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CONCLUSION CHAPITRE 1

Section 2 - La question des pièces d’identité

La Conférence intergouvernementale tenue à Genève le 22 août 1921, à laquelle prirent part dix pays489, se prononça en faveur de la création d’une pièce d’identité et de voyage qui suppléait à l’absence de passeport national. Ainsi, le Dr. Nansen, Haut-Commissaire de la Société des Nations, convoqua une nouvelle Conférence qui se réunit à Genève du 3 au 5 juillet 1922490. Cette Conférence, à laquelle prirent part seize Etats491, adopta l’Arrangement du 5 juillet 1922 portant création du certificat d’identité pour les réfugiés russes. Ce fut l’accomplissement du premier pas important dans la voie du rétablissement des réfugiés.

De même, une Conférence tenue à Genève le 31 mai 1924 étendit aux réfugiés arméniens le bénéfice du « Passeport Nansen ». Ainsi fut créée la pièce qui devait tenir lieu de passeport et rendre possible l’apposition de visas. Mais à la différence du passeport, cette pièce ne conférait pas au titulaire le droit de retourner dans le pays de délivrance, ce qui diminuait sa valeur pratique. Cependant, cette lacune fut comblée par l’Arrangement du 12 mai 1926 dont l’article 3 recommanda l’apposition sur les certificats d’un visa de retour. Par conséquent, l’article 2 de la Convention du 28 octobre 1933492 et l’article 15 de l’Accord de Londres du 15 octobre 1946 firent de la « clause de retour » une partie intégrante du titre de voyage.

Enfin, les bénéficiaires du « Passeport Nansen » furent étendus aux réfugiés turcs, assyriens, assyro-chaldéens et assimilés par l’Arrangement du 30 juin 1928, et en exécution de la résolution du Conseil de la Société des Nations à sa cinquième session, le 7 juin 1928493.

§1 Un passeport international pour les réfugiés

489 La Conférence d’étude, réunie à Genève le 22 août 1921, sur convocation du Conseil de la Société des Nations. Voir Résolution du 27 juin 1921 qui a consacré plusieurs séances à l’étude des problèmes résultant de la situation des réfugiés russes. Les pays suivants se sont faits représentés à la Conférence : Bulgarie, Chine, Finlande, France, Grèce, Pologne, Roumanie, Serbe-Croate-Slovène (Etat), Suisse, Tchécoslovaquie.

490 Société des Nations, Recueil des Traités, Genève, 1922, l’enregistrement de cet Arrangement, déposé au Secrétariat a eu lieu le 16 novembre 1922, vol. XIII, n° 355.

491 « Allemagne, Autriche, Bulgarie, Espagne, Finlande, France, Grande-Bretagne, Grèce, Hongrie, Japon, Pologne, Roumanie, Royaume des Serbes, Croates et Slovènes, Tchécoslovaquie, Suède, Suisse. (Council of 19th Session 1922, page 926).

492 Voir l’article 2 de la Convention du 28 octobre 1933 fut rédigé dans les termes suivants :

« Chacun des Parties contractantes s’engage à délivrer des certificats Nansen, valable pour un an au moins, aux réfugiés résident régulièrement sur son territoire. Le texte desdits certificats comprendra une formule autorisant la sortie et le retour. Les porteurs de certificats Nansen non périmés seront libres de sortir du pays qui leur a délivré ces titres et d’y revenir sans nécessiter d’autorisation à la sortie ou du visa des consuls de ce pays pour le retour. Les consuls respectifs des Parties contractantes seront habilités pour prolonger ces certificats, pour une durée de six mois au plus. Le coût des visas des certificats Nansen, qui sont gratuits pour les indigents, seront établis selon le tarif le plus bas appliqué aux visas des passeports étrangers ». Cf. Société des Nations, article 23 : Titres de voyage. E/1618/E/AC.32/5 français, p. 54

493 Société des Nations, Recueil des Traités, Genève, 1930, Annexe n° 1, E/ 1112/ French/ p. 91, vol. IXXXIX, N° 2006

DRAME KANDJI 163 Les certificats d’identité furent appelés communément « Passeport Nansen » car il était nécessaire qu’ils puissent être considérés comme des passeports. Donc, pouvait-on accepter de remplacer le mot « certificat d’identité » par le mot « passeport » ?

Pour éviter toute confusion, le mot « passeport » fut seul employé dans les questions énumérées par les Etats lors de la réunion intergouvernementale du 24 décembre 1925494. Mais il était entendu que l’emploi de cette terminologie ne préjugeait nullement sur la décision que la Conférence prenait sur la question posée ci-dessus.

Par exemple, les certificats d’identité furent considérés par le droit allemand comme équivalents aux passeports. Le résultat désiré par le remplacement du terme « certificat » par le terme « passeport » sembla atteint495.

En Suisse, le gouvernement accorda le certificat d’identité aux réfugiés sous condition d’un séjour régulier dans le pays. La proposition de rendre les certificats d’identité obligatoires sembla inutile, car les réfugiés n’utilisaient ce document que pour le voyage.

Quant à la France, le certificat d’identité fut délivré par une autorité française, par exemple un agent consulaire français.

Si on analyse du point vue juridique la question des certificats d’identité, on soulève deux problèmes, qui tous méritent une étude et un intérêt scientifiques :

1- Dans un premier temps, quelle fut la législation des Etats Membres à l’égard du

« Passeport Nansen » ? Et quelles furent les solutions internationales adoptées par la Société des Nations ?

2- Dans un second temps, comment garantir la liberté de circulation internationale des victimes de persécutions à travers l’Europe ? Comment protéger le réfugié ou l’apatride contre les mesures d’expulsion ou de refoulement ? Ainsi se posait non seulement le problème général de la protection de la personnalité humaine, mais aussi la base théorique des droits de l’étranger en tant qu’individu.

A ) Le « Passeport Nansen » face à la législation des Etats d’Europe membres de la SDN

La question des réfugiés pendant la première guerre mondiale permit la création d’un système de passeports et de visas obligatoires jamais connu dans le passé, pour mieux contrôler non seulement ses propres ressortissants, mais aussi les étrangers. Le passeport imposé à ces derniers devint un document indispensable pour entrer dans un pays étranger ou en sortir ainsi que pour circuler dans son propre pays. Par conséquent, chaque Etat se

494 Société des Nations, Résumé des réponses des gouvernements au questionnaire du 24 décembre 1925, N°

RR 401/001/I, du Dr. Fridtjof Nansen, Haut-Commissaire pour les réfugiés, Appendice 2, p.11.

495 Société des Nations, Réfugiés arméniens et russes, note du Secrétaire général, Rapport du Haut-Commissaire pour les réfugiés sur des questions concernant les réfugiés arméniens et russes, transmis par le Directeur du Bureau international du Travail, Genève, le 3 septembre 1926, A.44. 1926, Publications de la Société des Nations, XIII. Aide aux réfugiés, 1926. XIII. 2.

DRAME KANDJI 164 réserva le droit d’admettre ou non des étrangers sur son territoire et de ne délivrer de passeports à ses ressortissants que dans certaines conditions. En effet, dans cette situation, la liberté de circulation pouvait être comparée à celle de l’article 2 de la Convention du 10 février 1938, ainsi conçue :

« Sans préjudice de la faculté des Hautes Parties contractantes de réglementer le droit de séjour et de résidence, le réfugié aura le droit, sur le territoire auquel la présente Convention s’applique, de circuler, de séjourner, ou éventuellement de résider, conformément à la législation et à la réglementation interne de ce territoire. »496

En revanche, un certain nombre d’Etats accordèrent aux étrangers le même traitement qu’à leurs ressortissants. Les Etats qui normalement ne pouvaient, du fait de l’application de leur législation nationale, faire bénéficier les étrangers de leur système de sécurité sociale, furent en mesure d’assumer les obligations prévues par leur législation interne, en instituant pour les réfugiés des systèmes spéciaux. En effet, ces réfugiés ne jouirent ni de la protection ni de l’assistance des autorités de leur pays d’origine497.

1 - La législation française et le « Passeport Nansen »

La France instaura le passeport pour entrer sur son territoire bien avant la création du passeport Nansen. En effet, en vertu du décret du 3 août 1914498 et les instructions ministérielles du 3 mars et du 24 mai 1915499, « toute personne qui voulait entrer sur le territoire de la République ou en sortir était obligée de se munir d’un passeport que délivraient à l’étranger les agents diplomatiques, consuls généraux et vice-consuls de France, et à l’intérieur le préfet du département de résidence ».

Il convient à cet égard de préciser que ce décret du 3 août 1914 rendant obligatoire le passeport portant mention des preuves de leur identité fut promulgué pour tous les étrangers.

Par le décret du 21 avril 1917, vint s’y ajouter la création de la carte d’identité des étrangers délivrée par la police sur présentation du passeport et qui valait autorisation de séjour.

Devenue, comme l’écrit Gérard Noiriel, un acte éminent de la souveraineté nationale, la délivrance du passeport créa une nette ligne de démarcation entre nationaux et étrangers, assimila les réfugiés aux autres immigrés et posa la question du droit d’asile sous une forme totalement nouvelle500.

496 Société des Nations, voir article 2 de la Convention du 10 février 1938, Liberté de circulation, E/ 1618/

E/AC.32/5 Français, p. 53.

497 Société des Nations, article 20 de la Convention du 10 février 1938 contenait des mesures administratives, Concours administratifs, E/ 1618/ E/ AC.32/ 5 français, p. 51

498 Journal Officiel de la République Française, 4 août 1914, p. 701.

499 Journal de droit international privé, 1916, pp. 719 et 722. Voir aussi quant à la sortie du territoire français, les prescriptions édictées par l’instruction sur l’état de siège d’octobre 1913.

500 NOIRIEL, Gérard, La tyrannie du national, le droit d’asile en Europe (1793-1993), Op.cit., pp. 177-179.

DRAME KANDJI 165 Cependant, ce document seul ne suffisait pas. Il devait être accompagné d’une pièce annexe indiquant les pièces d’identité produites pour l’obtenir et les motifs, ainsi que le but du voyage. Seuls les ressortissants des nations alliées étaient autorisés à entrer en France avec leur passeport national, à condition que celui-ci fût visé par l’agent diplomatique ou le consul de la circonscription dans laquelle il avait été délivré et fût accompagné de la pièce d’identité501. Par exemple en France, le passeport était remplacé pour les ressortissants de la Belgique et du Luxembourg, et sous réserve de réciprocité, par une pièce d’identité munie d’une photographie et timbrée par les autorités du lieu de résidence de l’intéressé.

Plus tard, ce régime fut légèrement modifié par l’instruction du 31 janvier 1917502 permettant l’entrée et la sortie des étrangers porteurs des passeports nationaux, à la condition que ceux-ci fussent visés à chaque voyage par une autorité française.

De même, une autre nouveauté : un décret d’avril 1917 transforma le certificat d’immatriculation en carte d’identité étranger, dont la validité fut limitée à trois ans. Par exemple, les hôteliers et logeurs devaient signaler à la police la présence d’étrangers chez eux503. En revanche, la mise en place du passeport Nansen fut une avancée juridique majeure.

En outre, vers la fin de 1921, la plupart des réfugiés ne possédaient aucun passeport, sinon des passeports reconnus par un très petit nombre de gouvernements504. La tentative de réglementer sur le plan international le statut des étrangers, conformément au principe affirmé dans l’article 23 du Pacte de la SDN505, n’avait pas abouti. C’est pourquoi la France décida de rester maîtresse de sa législation et de sa réglementation. Pour tenir compte des mouvements d’opinion et pour ne pas aller à l’encontre de l’esprit général de la SDN, toute une série de mesures furent prises, les unes concernant l’ensemble des étrangers, les autres spécialement les réfugiés de la Grande guerre.

En ce sens, au printemps 1919, le gouvernement français déposa un projet de loi assouplissant le contrôle sur l’entrée et le séjour des étrangers. Mais il ne fut finalement pas discuté à la Chambre. Ce fut un échec entrainant un contrôle sévère aux frontières, des refus de visa de passeport, refus de naturalisation, arrêtés d’expulsion. Les modalités d’octroi de

501 REALE, Egidio, Le Régime des passeports et la Société des Nations, 2ème Edition, Paris (Ve), Librairie Arthur Rousseau, 1931, pp. 40-41. Op.cit.

502Journal de droit international privé, 1918, pp. 404 et suivants.

503 Jean-Charles BONNET, Les pouvoirs publics français et l’immigration dans l’entre-deux-guerres, Lyon, 1976, pp. 119-120.

504 Société des Nations, Rapport sur les travaux du Haut-Commissariat pour les Réfugiés présenté par le Docteur Fridtjof Nansen à la quatrième Assemblée, Genève, le 4 septembre 1923, Communiqué au Conseil, aux Membres de la Société et aux délégués à l’Assemblée, A.30.1923.XII.

505 L’article 23 du Pacte de la SDN « engage les Etats à assurer aux étrangers un traitement équitable ». Voir Pierre GUILLEN, L’évolution du statut des migrants en France aux XIXe-XXe siècle, Acte du Colloque de Rome (3-5 mars 1988), Publications de l’école française de Rome / Année 1991/ Volume 146/ Numéro 1 / pp.

35-55.

DRAME KANDJI 166 la carte d’identité des étrangers furent par ailleurs durcies506. Cependant, la France, contrainte de respecter le système de la Société des Nations adopté définitivement en juin 1928, décida de se conformer à la réglementation de celle-ci concernant la protection des réfugiés et apatrides. Ce système s’appliqua aux Russes, Arméniens, Georgiens, Syriens, Assyro-Chaldéens, Kurdes et Turcs.

Ainsi, le régime des certificats d’identité pour les réfugiés arméniens fut appliqué en France et dans les postes diplomatiques et consulaires établis dans les pays qui adhérèrent à l’Arrangement de Genève à partir du 31 août 1924507. De même, le nombre de réfugiés russes en France munis du « Passeport Nansen » fut estimé par Pierre Kovallevski à 71 928 en 1931 et à 82 908 en 1933508. Cela montre l’importance de la présence de réfugiés russes en France, ce qui lui conféra une place à part au sein de la Société des Nations où elle obtint un délégué permanent au sein de l’Office des réfugiés.

506 Décret de 1929 ; Cf. Jean-Charles BONNET, op. cit. p. 174.

507 Voir la réponse du gouvernement français à la Société des Nations, Service français de la Société des Nations, Ministère des Affaires Etrangères, Direction des Affaires Politiques et Commerciales, Paris, le 28, août 1924. Voir aussi le Rapport du Haut-Commissaire de la Société des Nations au sujet des Certificats d’identité pour les réfugiés arméniens, Genève, le 12 août 1924, 48/ 38023/ 33218 ; C. 386. M. 141. 1924.

Archives de la Société des Nations.

508 GOUDRY, Georges, Note sur le « Passeport Nansen », Matériaux pour l’histoire de notre temps/ 1996/

Volume 44 / Numéro 1/ pp. 19-21. Op.cit.

DRAME KANDJI 167 2 - Le « Passeport Nansen » face aux principes juridiques pour l’asile durable en

Suisse

En Suisse, les frontières restèrent longtemps ouvertes aux étrangers, qui n’étaient pas obligés de présenter à leur arrivée un passeport préalable visé par les autorités diplomatiques ou consulaires suisses509.

Cependant, une première circulaire du Conseil fédéral du 25 septembre 1915510 changea cette politique d’accueil et invita les autorités suisses à prendre des mesures plus restrictives.

En effet, depuis la circulaire du Conseil fédéral, les cantons de frontière décidèrent d’interdire l’entrée sur le territoire suisse aux étrangers qui ne possédaient pas de papiers de légitimation. Sur ce, une ordonnance fédérale du 27 novembre 1915511 établit un modèle uniforme de passeport à délivrer par les autorités cantonales aux Suisses qui se rendaient à l’étranger. De plus, l’ordonnance fédérale du 21 novembre 1917512, entrée en vigueur le 20 décembre 1917, qui institua une police fédérale des étrangers, imposa les conditions requises pour entrer sur le territoire suisse comme la possession d’un passeport ou d’un autre papier de légitimation équivalent. Par exemple, les documents établissant la nationalité de l’arrivant et la possibilité de son entrée dans l’Etat d’origine ou dans celui de son dernier séjour devaient être visés par le ministre ou le consul suisse de la dernière résidence de l’arrivant.

Cependant, les réfugiés russes dits Nansen faisaient partie des réfugiés établis en Suisse depuis fort longtemps, parfois depuis leur naissance. C’est pourquoi ils bénéficiaient de l’ « asile durable ». Un arrêté intervenu après la seconde guerre mondiale abonda dans le même sens. L’arrêté du Conseil fédéral du 7 mars 1947513, autorisa les intéressés étaient autorisés à rester définitivement dans ce pays514. Par exemple l’article 6 de l’arrêté précité prévoyait que les « émigrants et les réfugiés doivent être autorisés à exercer une activité lucrative si rien d’important ne s’y oppose du point de vue économique et que les autorités cantonales y consentent. La pratique des autorités à cet égard ne donne pas lieu actuellement à des remarques spéciales ». Relevons ici qu’une autorisation de travail n’était

509 REALE, Edigio, Le Régime des passeports et la Société des Nations, 2e Edition, Paris (Ve) Librairie Arthur ROUSSEAU, 1931 ; op. cit. p. 45.

510 Feuille fédérale, 1915, V. III, p. 316.

511 Recueil Officiel, nouvelle série, XXXI, p. 395.

512 Recueil Officiel, nouvelle série, XXXIII, pp. 989 et suivants.

513 La question de l’octroi de l’asile durable fut traitée par les autorités fédérales. Ainsi, le Conseil fédéral prit le 7 mars 1947 un arrêté concernant les réfugiés. Il accorda l’asile durable aux personnes âgées de plus de cinquante-huit ans, aux malades, aux orphelins et à tous ceux qui n’avaient pas la possibilité, en raison de circonstances particulières, de quitter la Suisse. De plus, à ceux qui le pouvaient, on octroyait l’autorisation de travailler. Ceux qui avaient obtenu ce statut et qui se trouvaient dans l’incapacité de travailler furent soutenus financièrement, cette aide étant financée à un tiers par la Confédération, un tiers par les Cantons et le derniers tiers par les organisations caritatives. Voir Procès-verbal de la séance de la Commission synodale de l’Eglise nationale vaudoise du 6 décembre 1946, ACV K XIV 501/24. Voir Rapport de la Commission vaudoise de secours aux réfugiés évangéliques sur l’exercice 1947, rédigé par Thérèse Vallotton. ACV 513/3, 20 mai 1948.

Voir NARBEL, Nathalie, Un ouragan de prudence, Les Eglises protestantes vaudoises et les réfugiés victimes du nazisme (1933-1949), Labor et Fides, 2003, p. 166.

514 League of Nations, Extract from Report sent by PCIRO Switzerland dated 26.6.48. Original on 100/1.SWI.

« Protection- Switzerland ».

DRAME KANDJI 168 pas donnée si elle entraînait un séjour durable ou si elle risquait de priver l’intéressé d’une possibilité de départ.

Quant aux nouveaux cas de réfugiés, ils eurent généralement une autorisation de séjour ou de tolérance. La protection accordée à ces derniers par les autorités suisses fut la même que pour les réfugiés séjournant en Suisse depuis plusieurs années.

En revanche, les néo-réfugiés étaient dans une situation différente. Ils étaient venus en Suisse avec un visa consulaire pour un séjour de durée limitée et n’eurent généralement pas d’autorisation cantonale leur permettant de prolonger ce séjour. D’autres avaient franchi illégalement la frontière. En effet, un certain nombre de réfugiés vinrent clandestinement à Genève dans l’espoir de trouver une solution à leur situation en s’adressant aux institutions internationales ayant leur siège dans cette ville. Toutefois, la « Centrale suisse pour l’assistance aux réfugiés »515 formula son programme en vue d’un asile durable et le soumit aux autorités compétentes afin de trouver une solution durable au problème international des réfugiés. En effet, la Suisse devait accorder à un certain nombre de réfugiés et d’émigrants le droit à un asile durable même s’ils étaient démunis de certificats d’identité ou de papiers de légitimation. Elle devait octroyer le droit à un permis de séjour ou d’établissement normal.

Par le nouvel arrêté du 20 mars 1947, l’asile durable devint une réalité puisque les principes juridiques furent posés. Les bénéficiaires de cette disposition reçurent une « garantie de présence » légalement fondée. La crainte d’une nouvelle émigration fut donc supprimée. Les réfugiés trouvèrent en Suisse un foyer durable. Et cette garantie durait plus longtemps que l’arrêté. Dès qu’elle était donnée, elle était valable pour la vie, quelle que soit la réglementation légale qui remplaçait l’arrêté de pleins pouvoirs. De ce point de vue, on s’aperçoit que le réfugié auquel fut accordé l’asile durable était mieux placé que n’importe quel autre étranger en Suisse.

Ainsi, pour bien comprendre la question des pièces d’identité dans la législation suisse, ainsi que le nouveau statut des réfugiés créé par le nouvel arrêté fédéral, il faut partir de l’état juridique pendant cette époque. En effet, l’établissement en Suisse s’appuyait sur une disposition de la Constitution réglée par une loi fédérale du 26 mars 1931, qui fut suivie le 5 mai 1933 d’un règlement d’application516. Il ressort de ces dispositions l’état juridique suivant : un étranger reçoit

515 Le Conseil fédéral prit, le 20 mars 1947, par le moyen des pleins pouvoirs, un arrêté sur les modifications à

515 Le Conseil fédéral prit, le 20 mars 1947, par le moyen des pleins pouvoirs, un arrêté sur les modifications à