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QUATRE DIALOGUES A MADRAS

Dans le document L'ÉVEIL DE L'INTELLIGENCE (Page 141-189)

1. Le conflit

Images: avons-nous conscience de ne voir qu'à travers des images? Concepts; l'in-tervalle entre les concepts et la vie quotidienne; le conflit qui en résulte. « Pour connaître l'illumination, il faut savoir regarder » « Vivre sans conflit sans pour cela s'assoupir. »

KRISHNAMURTI : Il me semble que ces réunions ne devraient pas véritablement s'appeler des « Discussions », mais plutôt des conversations entre deux personnes ou entre de nombreux interlocuteurs. Des conversations portant sur des sujets sérieux que la plupart d'entre nous considérons avec un intérêt plus que passager et envisa-geons avec l'intention profonde de comprendre les problèmes qu'ils impliquent. Ainsi ces conversations deviendront non seulement objectives, mais très intimes. Comme deux personnes qui parlent de sujets d'une façon amicale, facile - s'exposant récipro-quement l'un à l'autre. Autrement, je ne vois pas l'utilité de ce genre de conversations.

Ce que nous nous efforçons de faire, n'est-ce pas, c'est de comprendre (non pas intel-lectuellement, ni verbalement, ni théoriquement, mais réellement) quelles sont les nécessités les plus impératives de la vie et de quelle façon peuvent être résolus les problèmes profonds et fondamentaux que chaque être humain trouve devant lui. Ceci étant clair - que nous parlions ensemble comme deux amis qui font connaissance et non pas qui expriment leurs opinions d'une façon dialectique, mais qui véritablement examinent et réfléchissent ensemble à leurs problèmes ; maintenant, si ceci est bien établi, de quoi pouvons-nous parler ensemble?

AUDITEUR : L'autre jour, vous parliez de l'observateur et de la chose observée, la résolution des problèmes...

KRISHNAMURTI : Est-ce cela dont vous voulez parler? S'il vous plaît, monsieur, tâchons de découvrir d'abord ce que chacun de nous désire discuter, et ainsi nous pourrons tout considérer ensemble et voir ce qui se passera.

AUDITEUR : Pourquoi prétendez-vous que d'étudier la culture hindoue, son art et ses philosophes, c'est la violence?

AUDITEUR : Quelle est la voie à parcourir pour nous déconditionner?

AUDITEUR : L'esprit produit des images, mais ce que l'esprit aperçoit n'est pas vrai.

KRISHNAMURTI : Est-ce là véritablement ce qui nous intéresse dans notre vie quotidienne? Messieurs, ne sommes-nous pas en train de réduire cette réunion à un échange d'idées purement verbal et intellectuel?

AUDITEUR : Qu'est-ce que penser clairement?...

AUDITEUR : Qu'est-ce que le réel?...

AUDITEUR : Voulez-vous nous suggérer que la violence et la non-violence sont deux extrêmes?

AUDITEUR : Ne pouvons-nous pas diriger notre vie selon certains principes?

KRISHNAMURTI : N'y a-t-il pas eu suffisamment de questions? Qu'en pensez-vous, messieurs? Et laquelle est la question la plus importante entre toutes celles-ci?

AUDITEUR : Qu'est-ce que faire attention?

KRISHNAMURTI : Monsieur, quelle est, selon vous, la chose la plus importante à discuter? Ne pourrions-nous pas prendre cette question de l'observation et de la pen-sée? Le voulez-vous? C'est-à-dire ce que c'est que d'observer, d'écouter, qui écoute, qui pense? Nous allons relier notre discussion à notre vie quotidienne, et ne pas nous amuser avec ces concepts abstraits, parce que ce pays, comme tous les pays du monde, fonctionne au niveau des concepts, sauf quand il s'agit de technique. Qu'en-tendons-nous par voir. Vous, qu'en pensez-vous?

AUDITEUR : Observer avec un peu plus d'attention que d'habitude.

KRISHNAMURTI : Pourquoi dites-vous « un peu plus »? Monsieur, quand je me sers des mots: « Je vois un arbre », ou: « Je vous vois », ou: « Je vois ou je com -prends ce que vous dites », qu'entendons-nous par le mot « voir »? Avançons très lentement si vous le voulez bien - pas à pas. Quand vous voyez un arbre, qu'entendez-vous par là?

AUDITEUR : Nous ne regardons que superficiellement.

KRISHNAMURTI : Qu'entendez-vous par « superficiellement » - quand vous voyez un arbre, qu'entendez-vous par « voir »? Je vous en prie, restons-en à ce mot-là.

AUDITEUR : Nous le voyons en passant.

KRISHNAMURTI : Tout d'abord, monsieur, avez-vous regardé un arbre? Si vous avez regardé, que voyez-vous au moyen de votre « vision »? Voyez-vous l'image de l'arbre, ou l'arbre?

AUDITEUR : L'image de l'arbre.

KRISHNAMURTI : Faites attention, je vous en prie, monsieur. Voyez-vous l'image dans le sens d'une construction mentale, du concept d'un arbre, ou bien voyez-vous véritablement l'arbre?

AUDITEUR : L'existence physique de l'arbre.

KRISHNAMURTI : Mais voyez-vous véritablement cela? Monsieur, il y a un arbre... Vous devez voir un arbre ou une feuille en regardant par cette fenêtre, comme moi je les vois. Et quand vous les voyez, que voyez-vous réellement? Ne voyez-vous que l'image de cet arbre ou voyez-vous véritablement l'arbre lui-même sans son image?

AUDITEUR : Nous voyons l'arbre lui-même.

AUDITEUR : Nous arrivons à le comprendre.

KRISHNAMURTI : Avant d'en venir à comprendre, quand je vous dis: « Je vois un arbre », est-ce que je vois véritablement cet arbre ou l'image que j'en ai? Quand vous regardez votre femme ou votre mari, la voyez-vous elle et le voyez-vous lui, ou bien l'image que vous en avez? (Pause.) Quand vous regardez votre femme, vous la voyez à travers vos souvenirs, à travers l'expérience que vous avez eue d'elle, de ses manières d'être, de toutes ces images que vous avez d'elle. Et ne faisons-nous pas la même chose avec l'arbre?

AUDITEUR : Quand je regarde un arbre, je vois un arbre.

KRISHNAMURTI : Oui, vous n'êtes pas un botaniste, vous êtes un avocat et, par conséquent, vous regardez cet arbre simplement comme un arbre, mais si vous étiez un botaniste, si l'arbre vous intéressait véritablement, comment il grandit, à quoi il

ressemble, comment il vit, sa qualité, vous auriez alors des images, vous auriez comme des tableaux, et vous les compareriez à d'autres arbres, et ainsi de suite. Vous le regardez, n'est-il pas vrai, d'un regard qui compare, accompagné de connaissances botaniques, vous disant qu'il vous plaît ou non, qu'il donne de l'ombre ou non, qu'il est beau ou non, et ainsi de suite, et ainsi de suite. Quand vous avez toutes ces images, ces associations d'idées, ces souvenirs en ce qui concerne cet arbre, est-ce que vous regardez véritablement l'arbre, est-ce que vous le regardez directement, ou n'existe-t-il pas un écran entre cet arbre et la perception visuelle que vous en avez?

AUDITEUR : Je me dis quel genre d'arbre c'est.

KRISHNAMURTI : Comme un symbole. Donc, vous ne regardez pas vraiment cet arbre. Mais ceci est assez simple, n'est-ce pas?

AUDITEUR : Un arbre est un arbre.

KRISHNAMURTI : L' « arbre », messieurs, je sais que c'est assez difficile. Regar-dons la chose un peu différemment. Contemplez-vous votre femme ou votre mari à travers l'image que vous avez construite d'elle ou de lui, ou bien de votre ami? Vous avez créé une impression, et cette impression a laissé derrière elle une image, une idée, un souvenir, n'est-il pas vrai?

AUDITEUR : Les impressions que j'ai de ma femme se sont accumulées...

KRISHNAMURTI : Oui, elles se sont solidifiées, elles se sont épaissies, elles ont pris de la substance. Donc, quand vous regardez votre femme ou votre mari, vous la regardez, vous le regardez à travers l'image que vous en avez construite. D'accord?

Ceci est simple, n'ce pas? C'est ce que nous faisons tous. Eh bien, maintenant, est-ce que nous la regardons véritablement, ou bien ne regardons-nous pas le symbole, les souvenirs? Et tout ceci, c'est l'écran à travers lequel nous regardons.

AUDITEUR : Mais comment pouvons-nous nous en empêcher?

KRISHNAMURTI : Il n'est pas question d'empêcher. Voyons tout d'abord ce qui se passe réellement.

AUDITEUR : Quand pour la première fois vous regardez une femme ou un homme, vous n'avez pas d'impression préalable.

KRISHNAMURTI : Évidemment pas.

AUDITEUR : Mais alors, nous ne regardons pas la femme ou l'homme?

KRISHNAMURTI : Évidemment que oui, mais pourquoi en faites-vous une abs-traction? Qu'est-ce qui se passe véritablement dans votre vie quotidienne? Vous êtes marié ou bien vous vivez avec une personne, il y a entre vous des questions sexuelles, du plaisir, de la souffrance, des insultes, de l'ennui, de l'indifférence, de l'irritation, de l'agacement, de la brutalité, de la contrainte, de l'obéissance, et tout ce qui s'ensuit - tout cela a créé une image en vous au sujet de l'autre personne, et c'est à travers cette image que vous vous regardez l'un l'autre. D'accord? Donc, regardons-nous la femme ou l'homme, ou bien ne sont-ce pas plutôt des images qui se regardent?

AUDITEUR : Mais l'image, c'est la personne.

KRISHNAMURTI : Non, non. Il y a une énorme différence entre eux. N'y a-t-il pas une différence?

AUDITEUR : Nous ne connaissons aucune autre façon de nous y prendre.

KRISHNAMURTI : C'est la seule méthode de vision que vous connaissiez.

AUDITEUR : Mais nos impressions se modifient...

KRISHNAMURTI : Tout cela fait partie de l'image, monsieur - vous y ajoutez ou vous en soustrayez. Regardez, monsieur. Avez-vous une image de l'orateur? Vous avez une image de l'orateur, et cette image est fondée sur sa réputation, sur ce qu'il a pu dire auparavant, ce qu'il condamne ou ce qu'il approuve, et ainsi de suite. Vous avez construit une image, et c'est à travers cette image que vous écoutez ou que vous regardez. D'accord? Et cette image croît ou décroît selon votre plaisir ou selon votre souffrance. Et cette image, évidemment, interprète ce que dit l'orateur.

AUDITEUR : Mais il y a en nous un élan qui nous pousse à venir entendre vos causeries.

KRISHNAMURTI : Non, non, monsieur. Vous pouvez avoir une prédilection pour mes « yeux bleus » ou n'importe quoi! L'image comprend tout cela, monsieur. La sti-mulation, l'inspiration, l'élan - il y a beaucoup de choses que l'on peut ajouter à cette image.

AUDITEUR : Mais nous ne connaissons aucune autre façon de regarder.

KRISHNAMURTI : C'est ce que nous allons découvrir, monsieur. Nous regardons les gens non seulement de cette façon-là, mais nous contemplons aussi des concepts, n'est-ce pas? -- l'idéologie communiste, socialiste, et ainsi de suite. Nous regardons toute chose à travers des concepts, n'est-ce pas? Des concepts, des croyances, des idées, des connaissances, des expériences, de ce qui nous intéresse. Le communisme plaît à une personne et déplaît à une autre ; il y a celui qui croit en Dieu et l'autre qui n'y croit pas. Tout cela ce sont des concepts, des utopies, et c'est à ce niveau que nous vivons. Eh bien, ces concepts ont-ils aucune valeur? Existant à un niveau concret, conceptuel, ont-ils une valeur? Ont-ils un sens dans la vie quotidienne? La vie quoti-dienne, cela veut dire que l'on vit: vivre implique pratiquer des relations humaines ré-ciproques, qui à leur tour impliquent un contact réel, et le contact signifie coopéra-tion. Les concepts ont-ils aucune portée dans ce sens-là dans nos relations réci-proques? Mais les seuls rapports que nous ayons sont des rapports conceptuels. D'ac-cord?

AUDITEUR : Il nous faut alors trouver des rapports justes.

KRISHNAMURTI : Non, ce n'est pas une question de rapports justes, monsieur.

Nous nous contentons d'examiner. Je vous en prie, monsieur, comprenez ceci. Avan-cez lentement. N'acceptez pas d'emblée des conclusions préconçues. Nous vivons dans un univers de concepts, notre vie est conceptuelle, nous savons ce que cela veut dire, le mot « conceptuel » ; nous n'avons pas besoin de l'analyser. Ainsi, il y a une vie quotidienne réelle et une vie conceptuelle. Ou bien toute notre vie ne serait-elle pas conceptuelle? Est-ce que je vis selon mes concepts? Il y a une personne qui croit, par exemple, qu'il faut être non violent.

AUDITEUR : Je n'ai pas encore rencontré quelqu'un qui croie réellement à la vio-lence.

KRISHNAMURTI : Bien, monsieur. Ma question est celle-ci: toute notre vie est-elle conceptuest-elle?

AUDITEUR : La construction d'un concept vient d'une habitude et devient une ha-bitude.

KRISHNAMURTI : Nous pourrions peut-être arriver à cette question-là, plus tard, si nous pouvons nous attaquer à notre problème d'abord. Notre question est celle-ci:

toute ma vie est-elle conceptuelle?

AUDITEUR : N'existe-t-il pas une vie spontanée?

KRISHNAMURTI : Il existe une vie conceptuelle et une vie spontanée, mais puis-je savoir ce que c'est que de vivre d'une façon spontanée, alors que puis-je suis totalement conditionné, que j'ai hérité de tant de traditions? Reste-t-il aucune spontanéité? Que vous ayez un seul concept ou une douzaine, c'est encore une question de concepts. Je vous en prie, messieurs, tenons-nous à ce sujet pendant une minute. Est-ce que toute la vie, toute notre existence toutes nos relations ne sont que conceptuelles?

AUDITEUR : Mais comment peut-il en être ainsi?

KRISHNAMURTI : N'avez-vous pas une idée, monsieur, que vous devriez vivre de cette façon-ci et non pas de cette façon-là? Par conséquent, quand vous dites: « Il faut que je fasse ceci, il ne faut pas que je fasse cela », c'est une question conceptuelle.

Donc, toute notre vie est-elle conceptuelle, ou bien existe-t-il une différence entre vivre d'une façon non conceptuelle et vivre d'une façon conceptuelle? - dans ce cas, n'en résulte-t-il pas un conflit entre les deux?

AUDITEUR : Moi, je dirais que nous avons un concept, mais qu'après chaque ex-périence le concept est modifié.

KRISHNAMURTI : Oui, monsieur, les concepts sont modifiés, très évidemment.

Ils sont modifiés, on les change quelque peu, mais la vie conceptuelle est-elle diffé-rente de la vie quotidienne ou bien...

AUDITEUR : Elle est différente.

KRISHNAMURTI : Attendez, monsieur, attendez! Je voudrais analyser ceci un peu plus... Est-ce que la vie conceptuelle est différente de la vie quotidienne, ou y a-t-il un intervalle entre les deux? Je dis qu'a-t-il y a un intervalle. Quel est cet intervalle, et pourquoi y en a-t-il un?

AUDITEUR : (Inaudible.)

KRISHNAMURTI : C'est exactement cela. Mon concept est différent de l'actuel qui se passe en ce moment. D'accord? Il y a donc un intervalle, un clivage entre ce qui est et ce qui devrait être, autrement dit, le concept. Je m'en tiens à ce mot « concept ».

AUDITEUR : Mais quand vous parlez de l' « actuel », pour moi c'est le concept.

KRISHNAMURTI : Non, monsieur. Quand vous avez mal aux dents, ce n'est pas un concept. Quand moi j'ai mal aux dents, ce n'est pas un concept. C'est une actualité.

Quand j'ai faim, ce n'est pas un concept. Quand j'éprouve un désir sexuel, ce n'est pas un concept. Mais l'instant d'après, je dis: « Non, je ne dois pas » ou « Je dois », « C'est mal » ou « C'est bien ». Et alors il y a une division entre le réel, ce qui est et le conceptuel. Il y a une dualité. D'accord?

AUDITEUR : Quand j'ai faim, ce n'est pas un concept.

KRISHNAMURTI : C'est ce que nous disons, monsieur. Les élans primordiaux, la faim, la vie sexuelle, etc., sont des choses réelles, mais nous avons d'eux un concept.

Les concepts de division de classes, et ainsi de suite. Ce que nous cherchons à décou-vrir, c'est pourquoi il existe cet intervalle et s'il est possible de vivre sans cet inter-valle, de vivre uniquement avec ce qui est. D'accord? C'est cela ce que nous cherchons à découvrir.

AUDITEUR : Les animaux ne mangent que quand ils ont faim.

KRISHNAMURTI : Mais vous et moi, nous ne sommes pas des animaux. Il y a des moments où nous le sommes peut-être, mais réellement, maintenant, nous ne sommes pas des animaux. Donc, ne retournons pas aux animaux, aux bébés, aux gé-nérations précédentes ; il faut nous en tenir à nous-mêmes. Donc, il y a le moment immédiat où l'on vit, et l'existence idéationnelle, conceptuelle, et qui est étrangère au fait. D'accord, messieurs? Je crois à quelque chose, mais cette croyance n'a

absolu-ment rien à voir avec le réel, bien que le réel ait pu produire la croyance ; mais le réel n'a aucun rapport avec cette croyance. « Je crois à la fraternité universelle. » Dieu sait qui peut y croire, mais je dis: « Je crois à la fraternité universelle » - mais dans le fait, je suis en concurrence avec vous. Donc, la concurrence qui est actuelle est entière-ment différente de ce qui est conceptuel.

AUDITEUR : (Inaudible.)

KRISHNAMURTI : Jusqu'à présent, nous avons quelque peu éclairci la question.

L'actuel c'est « ce qui est », ce sont les faits. Dans ce pays, il y a la faim, la misère, la surpopulation, la corruption, l'inefficacité, la brutalité, et tout ce qui s'ensuit. Voilà le fait, mais nous nous disons que nous ne devrions pas admettre tout cela. D'accord?

Dans notre vie quotidienne, l' « actuel », le « ce qui est », et les faits quotidiens sont quelque chose d'absolument différents du fait réel ; c'est le conceptuel. Vous êtes d'accord?

AUDITEUR : Mais ce que vous appelez l'actuel, c'est un autre concept, assuré-ment.

KRISHNAMURTI : Non. J'ai faim, ce n'est pas un concept, j'ai vraiment faim. Ceci n'est pas né d'un souvenir de la faim que j'ai éprouvée hier. Si c'est le résultat de la faim que j'ai éprouvée hier, ce n'est pas l'actuel. Prenons comme exemple la vie sexuelle - vous ne voyez pas d'objection à ce que je parle de la vie sexuelle? Vous tous... enfin, n'en parlons plus. (Rires.) L'élan sexuel peut exister ou non, mais il est stimulé par une image qui est fictive, qui n'est pas réelle. Et alors je me demande pourquoi le conceptuel existe.

AUDITEUR : Peut-être...

KRISHNAMURTI : Non, non, monsieur. Ne me répondez pas, mais découvrez si vous avez en vous un concept. Pourquoi ai-je un concept?

AUDITEUR : Mais il y a des choses comme la colère qui sont psychologiques...

KRISHNAMURTI : Toutes ces choses sont reliées les unes aux autres. Quand je suis en colère, irrité c'est un fait. Il est là. Mais dès l'instant où je me dis: « Il ne de -vrait pas en être ainsi », cela devient conceptuel. Si vous dites: « Eh bien, la famine en Inde ne peut être résolue que par tel ou tel parti politique », c'est purement concep-tuel - vous n'êtes pas en train d'agir sur le fait. Les communistes, les socialistes, les membres du Congrès - quels que soient les partis - ils se figurent tous que l'on pourra résoudre le problème de la famine en suivant leur méthode - ce qui est évidemment une pure sottise. La famine c'est le fait, le concept c'est l'idée, la méthode, le système.

Et je me pose la question, pourquoi ai-je des concepts? (Ne me répondez pas, mes-sieurs, posez-vous la question à vous-mêmes.) Pourquoi croyez-vous aux Maîtres, aux gourous, à Dieu, à un état parfait? Pourquoi?

AUDITEUR : Mais je me demande...

KRISHNAMURTI : Écoutez ce qu'a dit le premier à des auditeurs. Il a dit qu'en ayant un concept je peux me réformer. Tout le monde se figure cela, et pas vous seulement. Avoir un idéal, un but, un principe, un héros, vous vous figurez ainsi que vous pourrez vous améliorer vous-même. Mais, en fait, qu'est-ce qui arrive, est-ce que

KRISHNAMURTI : Écoutez ce qu'a dit le premier à des auditeurs. Il a dit qu'en ayant un concept je peux me réformer. Tout le monde se figure cela, et pas vous seulement. Avoir un idéal, un but, un principe, un héros, vous vous figurez ainsi que vous pourrez vous améliorer vous-même. Mais, en fait, qu'est-ce qui arrive, est-ce que

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