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Quantification de la charge d’un ˆılot m´ etallique

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 20-24)

Ayant ´etudi´e la conductance d’un canal unique ins´er´e dans un circuit lin´eaire, nous franchissons maintenant une ´etape dans la complexit´e du circuit en consid´erant la pr´esence d’autres canaux. L’environnement de chaque canal est d´esormais non-lin´eaire et il doit se produire un ph´enom`ene de blocage r´eciproque car chaque canal fait partie de l’environnement des autres.

Nous avons ´etudi´e le circuit de la figure 1.6, o`u l’imp´edance de la section pr´ec´edente est remplac´ee par un autre conducteur coh´erent.

Vg Cg Coherent

conductor

metallic island

Coherent conductor

� 2 −� 2

Figure 1.6 – Repr´esentation sch´ematique du circuit ´etudi´e. Un ˆılot m´etallique est enclos entre deux conducteurs coh´erents et capacitivement coupl´e `a une source de tension Vg. Lorsque les deux conducteurs coh´erents sont des jonctions tunnels, la charge Q de l’ˆılot est discr´etis´ee en unit´e de e. En augmentant les probabilit´es de transmission des canaux de conduction, la quantification de la charge de l’ˆılot est progressivement d´etruite, jusqu’`a ce devenir une variable continue d`es lors qu’un canal est balistique.

Ce circuit est tr`es bien connu lorsque les deux conducteurs coh´erents sont des jonctions tunnels : il s’agit du transistor `a un ´electron (Set) [26, 52]. Apparaˆıt dans ce circuit un ph´enom`ene qui va dominer la physique4 : la charge Qde l’ˆılot m´etallique5 entre les deux jonctions tunnels est discr´etis´ee en unit´e du quantum de charge e.

Ce circuit et ses d´eriv´es font partie des rares syst`emes permettant de manipuler des

´

electrons un `a un et sont parmi les plus sensibles `a la charge ´electrique. Ils ont suscit´e d’intenses recherches et de nombreuses applications [8] allant de la d´etection de charges

4. `A la condition que l’´energie ´electrostatique associ´ee `a l’ajout d’un ´electron sur l’ˆılot, l’´energie de chargeEc=e2/2C, soit plus grande que l’´energie thermique.

5. M´etallique implique que l’´ecartδ entre les niveaux d’´energie de l’ˆılot est tr`es petit devant les autres ´echelles d’´energie (kBT,Ec, etc.). Les situations dans lesquellesδ n’est pas n´egligeable [53] ne seront pas abord´ees dans ce m´emoire de th`ese, bien qu’elles donnent naissance `a une physique riche et vari´ee (effet Kondo [54–57] ou oscillations de Coulomb m´esoscopiques [58–60] par exemple).

fractionnaires [4] `a la m´etrologie de l’amp`ere [61, 62] en passant par la r´ealisation de machines thermiques fondamentales [63] ont vu le jour.

Mais, `a nouveau, le comportement du circuit pour des probabilit´es de transmission au-del`a du r´egime tunnel est largement m´econnu [64–66]. Des travaux th´eoriques dans la limite quasi-balistique (τ → 1) pr´edisent [67–69] que la quantification de la charge de l’ˆılot – qui est la caract´eristique essentielle du Set – est progressivement d´etruite et que le circuit tend vers le blocage de Coulomb dynamique quand τ = 1.

La (non-)quantification de la charge se comprend bien en raisonnant sur les fonc-tions d’onde ´electronique. Quand tous les canaux connectant l’ˆılot au circuit sont en r´egime tunnel, la charge est discr´etis´ee car les fonctions d’onde, qui ne peuvent s’´etaler par dessus les jonctions tunnels, sont localis´ees dans l’ˆılot. Mais, `a l’oppos´e, si un canal est balistique, elles peuvent s’y d´elocaliser librement. La chargeQest alors une variable continue car seule une«partie de l’´electron»est localis´ee dans l’ˆılot – dit autrement, car la position de l’´electron fluctue (quantiquement) entre l’int´erieur et l’ext´erieur de l’ˆılot.

Cette transition de discret `a continu du spectre des valeurs propres de la charge de l’ˆılot peut aussi se comprendre `a la lumi`ere de la nature du transfert de charge dans le canal qui passe d’un transport granulaire `a un ´ecoulement continu. En effet, partant de la situation o`uQ= 0, si seuls des ´electrons«entiers»peuvent traverser le conducteur coh´erent, alors les valeurs de Q ne pourront ˆetre que des multiples entiers de e. `A l’oppos´e, si une quantit´e infinit´esimale de charge peut traverser le conducteur coh´erent, alorsQpourra prendre toute valeur r´eelle.

Des r´esultats exp´erimentaux contradictoires ont pourtant ´et´e obtenus ; certains observant la suppression de la quantification de la charge [70–72], d’autres non [73, 74]. De plus, il n’existe aucune v´erification quantitative des pr´edictions th´eoriques.

Les raisons `a tout cela se trouvent probablement dans certaines complications que pouvaient avoir les circuits ´etudi´es : coh´erence quantique dans l’ˆılot, ignorance des transmissions intrins`eques des canaux de conduction, m´elange de canaux balistiques et non-balistiques, d´eg´en´erescence de spin, etc.

Notre r´ealisation exp´erimentale du circuit de la figure 1.6 – un contact ohmique AuGeNi enclos par deux Qpc en r´egime d’effet Hall quantique entier pouvant ˆetre chacun court-circuit´e – accomplit la situation la plus canonique possible : absence de coh´erence et densit´e d’´etats continue dans l’ˆılot, d´eg´en´erescence de spin lev´ee, contrˆole des transmissions intrins`eques des Qpc. Cela nous a permis de d´emontrer sans ambi-gu¨ıt´e que la quantification de Qest d´etruite d`es qu’un canal balistique connecte l’ˆılot au circuit. Nous avons ´egalement effectu´e une caract´erisation fine de cette destruc-tion dans la limite quasi-balistique, et l’avons trouv´ee en accord quantitatif avec les pr´edictions des r´ef´erences [68, 69]. Ces r´esultats sont maintenant r´esum´es.

Chapitre 1. Introduction 21

R´esultats obtenus au cours de cette th`ese

La quantification de la charge de l’ˆılot est r´ev´el´ee par lesoscillations de Coulombde la conductance diff´erentielleG=∂I/∂V du circuit quand est balay´ee la tensionVg de la grille coupl´ee capacitivement `a l’ˆılot. L’´evolution de ces oscillations est montr´ee en haut de la figure 1.7 lorsque la conductance intrins`eque GL du QpcL est progressivement augment´ee, tandis que le QpcR est maintenu `a une faible probabilit´e de transmission : RKGR = 0.24, o`u RK = eh2. En r´egime tunnel (RKGL = 0.11, `a gauche), la conduc-tance pr´esente des pics ´etroits s´epar´es par des r´egions de conductance nulle, ce qui indique que la charge de l’ˆılot est discr´etis´ee. En augmentant GL (vers la droite), le minimum augmente, les pics s’´elargissent et les oscillations finissent par disparaˆıtre quand un canal est balistique (RKGL = 1.5, `a droite) : la charge de l’ˆılot est deve-nue une variable contideve-nue. Plus quantitativement, le panneau principal de la figure 1.7 montre le contraste des oscillations de Coulomb GGmax−Gmin

max+Gmin mesur´e en fonction de GL, pour diff´erentes r´ealisations deGR. Sur toutes les courbes, le contraste tend abrupte-ment vers z´ero lorsqueRKGL→1 et reste nul pourRKGL≥1. Une conductance telle que RKGL,R <1 correspond `a un unique canal partiellement transmis ; une conduc-tance telle que 1 < RKGL,R < 2 correspond `a deux canaux parall`eles, dont l’un est balistique et l’autre partiellement transmis.

Des pr´edictions th´eoriques quantitatives existent pour des temp´eratureskBT Ec

dans deux cas limites :

— les deux canaux sont quasi-balistiques 1−RKGL,R1 [68] ;

— un canal est quasi-balistique 1−RKGL1 et l’autre tunnel RKGR1 [69].

Il est pr´edit et nous avons observ´e exp´erimentalement que le contraste diminue dans ces deux cas comme√

1−RKGL; les donn´ees sont de plus en accord quantitatif raisonnable avec le pr´efacteur pr´edit. Nous avons aussi observ´e que ce comportement en √

1−RKGL est plus g´en´eralement valable quelle que soit la valeur de GR d`es lors que 1−RKGL 1 ; voir la courbe en haut de la figure 1.8 pour RKGR = 0.75 par exemple. Remarquablement, comme le montrent les donn´ees en bas de la figure 1.8, il s’av`ere que ce comportement, `a l’origine perturbatif en 1 −RKGL, devient, aux temp´eratures kBT ≈Ec, vrai quelle que soit la valeur de la conductance intrins`eque du canal, RKGL∈[0,1].

En conclusion, nous avons d´emontr´e que seuls des canaux non-balistiques per-mettent la quantification de la charge de l’ˆılot, nous avons pour la premi`ere fois test´e quantitativement des pr´edictions th´eoriques au-del`a du r´egime tunnel et nous avons ob-serv´e que certaines caract´eristiques de ces pr´edictions ont une port´ee plus g´en´erale que les conditions dans lesquelles elles ont ´et´e d´eriv´ees. En perspectives, il est pr´edit qu’`a tr`es basse temp´erature le circuit est gouvern´e au point de d´eg´en´erescence par un effet Kondo de charge. Nous verrons que nos donn´ees fournissent les premi`eres indications de l’existence de cet effet.

0 , 0 0 , 5 1 , 0 1 , 5 2 , 0 0 , 0

0 , 5 1 , 0

R K G R = 0 . 0 7 6 0 . 7 5 0 . 2 4 0 . 9 7 5 0 . 4 9 0 . 9 8 3

R

K

G

L

(G

max

-G

min

)/ (G

max

+ G

min

)

0 , 0 0 , 1

0 2

V

g

( m V )

R

K

G

0 2 0 2 0 2 0 2

Figure 1.7 – Destruction de la quantification de la charge de l’ˆılot en fonction des transmissions des canaux. Les cinq panneaux du haut montrent la mesure brute des oscillations de Coulomb en fonction de Vg avec RKGR = 0.24 et, de gauche `a droite, RKGL={0.11,0.62,0.88,0.989,1.5}. Le panneau principal montre le contraste des oscillations de Coulomb mesur´e `a temp´erature de base,T = 13 mK, en fonction deRKGL, avec de haut en basRKGR={0.076,0.24,0.49,0.75,0.975,0.983}.

0 , 0 1 0 , 1 1

1 E - 3 0 , 0 1 0 , 1

1

1 - R K G L

(G max-G min)/(G max+G min)

T

R K G R = 0 . 7 5

Figure 1.8 –Destruction de la quantification de la charge de l’ˆılot en fonction de la temp´erature.Le contraste des oscillations de Coulomb est mesur´e avecRKGR= 0.75 aux temp´eraturesT ={13,30,45,80,120,165}mK. Les lignes continues sont des fonctionsy

x.

Chapitre 1. Introduction 23

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