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CHAPITRE 2 – Les ressources de l’Amazonie : l’économie du bois

2.5 La protection des nations indigènes

Plusieurs soutiennent que la protection de la forêt amazonienne ne sera possible qu’à la condition où la situation des populations locales et peuples autochtones sera prise en considération et introduite dans les stratégies gouvernementales (Hall 2000, Ramos 2011, Viana 2011, Inoue 2011, Lourenço 2011). Dans l’état du Pará, 41% des crimes environnementaux ont lieu sur les terres indigènes et sont principalement reliés à l’exploitation forestière et minière illégale (Barreto et al. 2009). Il est donc suggéré qu’une des conditions nécessaires à une exploitation du bois durable en Amazonie est une forme d’assistance et protection socio-économique mieux adaptée aux différentes réalités indigènes de la région.

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Les cinq étapes qui permettent l’émission de titres de propriété à travers le Programme Terra Legal sont : l’enregistrement des biens, la référence géographique, l’inspection, le titrage et la surveillance post-titrage.

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La majorité des 817 000 personnes se déclarant « indigènes » du Brésil se retrouve en Amazonie légale, où les terres indigènes représentent près de 20% du territoire (IBGE 2010). Selon la Constitution Fédérale, toute terre indigène est « celles qui sont habitées par eux [les indiens] sur une base permanente, utilisées pour leurs activités productives, indispensables à la préservation des ressources environnementales nécessaires à leur bien-être et leur reproduction physique et culturelle, selon leurs usage, coutumes et traditions »7. Il est spécifié que même si la Constitution reconnaît que les indigènes ont les titres de possession permanente, ces terres restent des « biens de l’Union [État Fédéral Brésilien] », tout comme le territoire entier de l’Amazonie (SFB 2010). La Fondation Nationale des Indiens (FUNAI) est l’entité subordonnée au Ministère de la Justice qui est responsable de l’établissement et l’exécution de la politique indigène du Brésil, telle que présentée dans la Constitution de 1988 et le Statut de l’Indien. Cela concerne tous « les mécanismes de contrôle social, de gestion participative, de protection et de promotion des droits des peuples indigènes »8.

La forêt amazonienne, tout comme n’importe quel autre écosystème, n’est pas constituée de zones étanches et les activités qui se déroulent sur une aire auront nécessairement des impacts sur les aires dites protégées. La question qui se pose est la suivante : comment s’assurer du respect des droits des peuples indigènes au sein des législations visant le développement d’une économie du bois durable en Amazonie? En effet, même si la création du cadastre national des forêts publiques a permis de leur garantir de vastes territoires, aucune étude n’a réussi à démontrer que les conditions de vie des tribus se sont améliorées par la suite.

Tous s’entendent sur un point : la situation des peuples indigènes au Brésil est d’une grande complexité. À un extrême, il y a des tribus qui n’ont jamais même eu de contacts avec des hommes

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(Traduction personnelle) Constitution brésilienne, chapitre 8, article 231, 1988. 8

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blancs. D’autres tribus sont victimes de l’avancée, parfois mortelle, de bûcherons dans les terres reculées de l’Amazonie. À l’autre extrême, plusieurs tribus sont aujourd’hui complètement acculturées à la civilisation occidentale, ont perdu leur langue, ont adopté des outils pour mécaniser leurs activités et mènent un rythme de vie similaire à celle de la classe moyenne brésilienne (Lourenço 2011, Ramos 2011, Inoue 2011). Toutefois, la législation ne fait pas de distinction entre ces différentes réalités indigènes et les intérêts distincts. La Constitution donne le droit aux indigènes d’exploiter les ressources sur leurs territoires dans la mesure où cela est considéré comme une activité traditionnelle. Ainsi, l’exploitation du bois dans le but d’en faire le commerce n’est pas permise. Or, de nombreuses communautés indigènes demandent à la FUNAI le droit d’utiliser les ressources sur leurs terres comme source de revenus et non pas seulement comme un usage traditionnel (Cruz 2011, Lourenço 2011). Devant le peu de réponses à leurs demandes, plusieurs communautés « permettent » l’invasion de leur territoire par des groupes de bûcherons lesquels, en échange d’un certain volume de bois, viennent construire des routes, écoles et autres infrastructures qui relèvent normalement des services publics (Alflen 2011, Fanzeres 2011). Bien que d’une manière générale l’accès aux services de l’État dans certains secteurs de santé, d’éducation et d’assistance sociale se soit diversifié avec les années, on constate qu’il y a eu peu de contribution pour surmonter « la matrice coloniale caractérisant la relation entre le gouvernement et les peuples indigènes au Brésil »(Verdum 2011). Il persiste une forme de dépendance économique entre les peuples indigènes et le gouvernement qui limiterait le développement économique au sein de communautés indigènes et en contrôlerait les activités.

La protection des nations indigènes est loin d’avoir seulement un caractère anthropologique. Tandis qu’il se produit une exploitation des ressources presque impossible à empêcher sur les terres indigènes, ce ne sont pas toujours ces peuples qui en retirent les bénéfices directs. De plus, lorsque ce

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sont des indigènes qui en retirent des bénéfices, ceux-ci sont rarement distribués équitablement dans la communauté (Lourenço 2011, Viana 2011). Puisque l’exploitation sur ces terres est considérée comme inévitable, plusieurs analystes suggèrent une ouverture permettant aux communautés indigènes de pratiquer légalement une exploitation des ressources forestières selon les critères d’IBAMA et ainsi participer plus étroitement au développement d’une « conservation productive »9, tandis qu’on parle aussi d’une opportunité de développement dans le marché des services environnementaux (Verdum 2011).

Tandis que les discussions continuent, sur les possibilités de laisser les peuples indigènes jouer un rôle plus actif au niveau du développement économique forestier, le gouvernement brésilien a mis sur pied un nouveau cadre légal afin de reprendre le contrôle sur les activités sur les terres publiques.

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