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I. SYNTHÈSE BIBLIOGRAPHIQUE

3. L’encapsulation cellulaire

3.2 Production et propriétés des bioréacteurs

Le principe de l’encapsulation consiste à isoler une suspension de cellules recombinantes dans une cage de polymères de façon à former des bioréacteurs (appelés aussi capsules ou billes). Le maillage de la matrice de la capsule se comporte comme une membrane semi-perméable : elle permet le passage des nutriments et des métabolites mais empêche celui de grosses molécules comme les immunoglobulines ainsi que les contacts cellule-cellule entre le greffon et l’hôte (pour revues, Zimmermann et al., 2005 ; Emerich & Thanos, 2006). L’implantation des capsules dans le parenchyme cérébral ou le ventricule se fait par chirurgie stéréotaxique (pour revues Kordower et

al., 1999a; Shoichet & Winn, 2000 ; Aebisher & Ridet, 2001 ; Visted et al., 2001 ; Read et al., 2002).

3.2.2 Les différents matériaux d’encapsulation

Le choix du matériau pour réaliser l’encapsulation des cellules est primordial. En effet, le composé choisi doit se conformer à certains critères tels que la neutralité immunologique, la stabilité chimique, la résistance mécanique et la facilité d’utilisation. De nombreux polymères, d’origine artificielle ou naturelle, permettent l’encapsulation. Quelques-uns des composés utilisés à cette fin sont listés dans le Tableau 7.

58 Tableau 7 : Exemples de polymères artificiels ou naturels qui ont été utilisés pour l’encapsulation

cellulaire (d’après Read et al., 2002).

Parmi ces composés, l’alginate est fréquemment utilisé pour l’encapsulation cellulaire (Aebischer et al., 1996a; Bloch et al., 2004). La neutralité immunologique de l’alginate en fait un candidat de choix dans le domaine des xénogreffes (Zimmermann et al., 2005). L’absence de toxicité de l’alginate est reconnue et fait qu’il est depuis longtemps utilisé dans les secteurs de l’alimentaire (comme gélifiant sous le nom d’E401) et pharmaceutique (comme pansement gastrique). Son utilisation est donc déjà validée chez l’Homme.

3.2.3 Propriétés immunologiques et mécaniques des polymères d’alginate

L’implantation de capsules d’alginate durant 9 semaines dans le parenchyme cérébral chez le rat ne provoque pas l’activation des cellules immunitaires (lymphocytes B et T), mais principalement de la microglie (Read et al., 1999). Toutefois cette réaction est minime lorsque les capsules implantées sont vides (Kuijlen et al., 2006). Une étude clinique rapporte que la greffe de cellules BHK encapsulées dans de l’alginate s’est avérée immunogène chez ¼ de patients SAL implantés. La présence d’anticorps anti-SVF, utilisé pour la culture de ces cellules, a été détectée dans le LCR de ces patients (Zurn et al., 2000). Ces données montrent la neutralité des implants d’alginate et suggèrent que la diffusion du sérum emprisonné lors de l’encapsulation pourrait significativement être à l’origine des réactions locales vis-à-vis de l’implant. Utilisés dans un contexte hors de l’encapsulation, les hydrogels à base d’alginate sont aussi utilisés comme des composants neutres occupant l’espace créé par des traumatismes spinaux. Ceci favorise la réinnervation du tronçon médullaire lésé en

59 prévenant la formation de la cicatrice gliale en l’absence de réaction immunitaire (pour revue Novikova et al., 2003).

L’alginate le plus pur est un composé naturel extrait d’algues brunes dans lesquelles il est un composant majeur de la matrice extracellulaire. Les polymères d’alginate sont constitués d’acide guluronique (G) et mannuronique (M). Le mélange de l’alginate avec des cations divalents en solution induit la polymérisation des blocs G qui forment la trame du gel : plus l’affinité de l’alginate est importante pour le cation, plus le polymère formé est solide. Le baryum est le cation pour lequel l’alginate possède la plus grande affinité, mais sa toxicité limite son utilisation (pour revue, Zimmermann et al., 2005). Il est possible de substituer le baryum par le calcium pour éviter cette toxicité (pour revue Visted et al., 2001). Les blocs M ne participent pas à la gélification : il vient d’être montré qu’à 54% d’alginate M, les capsules produites ne résistent pas à un choc hypo-osmotique (Purcell et al., 2009). De plus, l’alginate M présente des propriétés immunogènes in vivo comme en témoigne la production d’anticorps anti-alginate M chez la souris (Kulseng et al., 1999). Aussi, des proportions plus importantes d’alginate G (>=60%) dans le mélange d’alginate diminuent l’immunogénicité des capsules et renforce leur stabilité. Une fois polymérisé, l’alginate-calcium présente des pores (de 5 à 200 nm) dont la taille dépend de la concentration en alginate : plus l’alginate est concentré, plus la diffusion hors de la capsules est lente suggérant un resserrement du maillage (Martinsen et al., 1992 ; Read et al., 1999). Le mélange d’alginate doit donc respecter certaines proportions en polymères G et M, et doit être utilisé à certaines concentrations (pour permettre la formation du maillage permettant la diffusion des produits sécrétés hors de l’implant).

Pour augmenter la résistance mécanique de la capsule, il est également possible de la recouvrir de poly-L-Lysine (PLL). Toutefois, l’ajout de PLL diminue le renouvellement des cellules dans la capsule et augmente la réaction de l’hôte vers la capsule (King et al., 2001). Il est possible de diminuer cette immunogénicité en réalisant une étape d’épimérisation de l’alginate (King et al., 2003) ou une étape d’encapsulation supplémentaire de la capsule-PLL, alourdissant le processus de production. Les travaux de Purcell et al. (2009) montrent également que la présence de PLL sur la capsule inhibe la sécrétion du NGF (mais pas du BDNF ou du GDNF) dans le milieu de cellules souches neurales encapsulées. Les PLL peuvent interférer avec la diffusion des produits sécrétés. Au final, l’encapsulation en « monocouche » d’alginate sans PLL est la procédure la plus simple, la moins immunogène et qui influe le moins sur la diffusion des composés sécrétés.

3.2.4 Les différents types d’encapsulation

Deux types d’encapsulation sont possibles : la microencapsulation et la macroencapsulation. Ces deux modes d’encapsulation diffèrent par la taille et la forme des bioréacteurs produits. La microencapsulation permet la fabrication de capsules sphériques de petite taille (de l’ordre de la centaine de µm), tandis que la macroencapsulation permet la formation d’implants cylindriques pouvant atteindre plusieurs cm de longueur (figure 12). L’ajustement de la taille des implants rend compatible la technologie d’encapsulation avec des applications chez l’animal (microsencapsulation) et chez l’Homme (macroencapsulation) et supporte la portabilité des approches entre différents

60 modèles d’étude et vers des stratégies thérapeutiques. La taille des implants dépend de la technique utilisée pour leur fabrication.

Figure 12: Les différents types de capsules. A) Macrocapsule de 6 mois explantée d’un patient. B) Coloration à l’hématoxyline et à l’éosine des cellules BHK viables (Aebisher et al., 1996). C) Une microcapsule de 4 mois explantée d’un cerveau de rat. Les cellules C2C12 en vie clivent la calcéine et produisent une fluorescence verte (Live/Dead Assay ; Visted et al., 2001).

L’utilisation d’un générateur électrostatique de billes est le dispositif de microencapsulation qui permet d’obtenir les plus petits implants (200 µM de diamètre) adaptés au petit animal, avec un fort rendement (plusieurs milliers d’implants par heure) et une bonne reproductibilité (Read et al., 2001). Suite au processus d’encapsulation, l’alginate permet la croissance des cellules encapsulées. Il a ainsi été observé trois phases de croissance cellulaire dans les capsules (Read et al., 1999; Visted et al., 2001). Après une première phase d’adaptation à leur microenvironnement au cours des premiers jours suivant leur encapsulation, les cellules entrent dans une phase de croissance durant laquelle elles envahissent la capsule (3 à 5 semaines). La dernière phase est un état d’équilibre entre la prolifération et la mort cellulaire dans l’implant (11 à 18 semaines). Il a été rapporté que la croissance de fibroblastes dans une capsule durant la première semaine pouvait altérer son intégrité et que l’alginate des implants persistants au-delà de cette période n’était pas altéré (Hunt et al., 2010). C’est pourquoi, dans nos approches expérimentales, les capsules sont produites plusieurs semaines avant leur implantation.