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Principaux tissus cibles et lésions observées

2. Toxicité intrinsèque de la fumée de cigarette

2.2. Toxicité par inhalation de la fumée : études expérimentales

2.2.3. Bilan de ces études

2.2.3.3. Principaux tissus cibles et lésions observées

2.2.3.3.1. Atteinte respiratoire

Les lésions qui ont été observées suite à l’exposition à la fumée de tabac ambiante se situaient majoritairement au niveau du système respiratoire, profond le plus souvent.

Observations lésionnelles

Cendon et coll. ont ainsi observé diverses modifications de la structure pulmonaire chez le rat adulte exposé, avec notamment une inflammation des bronches axiales et périphériques associée à une hyperplasie du système sécrétoire et une hypertrophie des muscles lisses bronchiaux [20]. L’exposition pré-natale ou péri-natale au courant secondaire a également été responsable

d’altérations du développement pulmonaire (par inhibition du développement des cellules

épithéliales bronchiolaires et des cellules de Clara), notamment chez les fœtus de rats exposés in utero [69] [70]. Des expositions de singes en fin de gestation puis en tout début de période pré- natale ont permis de confirmer cette altération chez le singe (par exacerbation du phénomène d’apoptose et altération de la réponse immunitaire) [139] [151]. Une hyperréactivité des voies

pulmonaires (évaluée par la résistance pulmonaire à la métacholine) a été observée chez de jeunes

rats exposés in utero et en période post-natale [71] [72] [73].

Plusieurs études -constituées en majorité de travaux effectués par les équipes de H. Witschi et de D’Agostini- sur la souris adulte ont montré une augmentation significative à la fois de l’incidence et de la multiplication de tumeurs pulmonaires [10] [31] [142] [143] [144] [145] ; les proportions d’adénomes (80%) et d’adénocarcinomes (20%) étaient conservées quelles que soit l’exposition ; cette observation concernait des souris soumises à un mois de récupération à l’air libre après exposition au courant secondaire.

A l’occasion d’une étude récente de D’Agostini, de nombreuses lésions prénéoplasiques

pulmonaires ont été observées chez de jeunes souris exposées depuis leur naissance au courant

secondaire, en même temps qu’une dégénérescence du paremchyme hépatique [33].

Une hyperplasie modérée de l’épithélium des cornets nasaux de rats exposés par masque nasal a enfin été observée, cette lésion étant réversible à l’arrêt de l’exposition [83].

67 Modifications fonctionnelles

En plus de ces observations lésionnelles, plusieurs études ont montré des modifications de la fonction respiratoire associées à l’inhalation de fumée de tabac ambiante.

Cendon et coll ont observé chez le rat exposé une diminution de l’élasticité pulmonaire ainsi

qu’une augmentation de la capacité résiduelle fonctionnelle du poumon [20].

Une exacerbation de la réponse allergique par hyperréactivité des voies pulmonaires et éosinophilie chez des souris adultes préalablement sensibilisées a été observée [120], ainsi qu’une exacerbation des symptômes asthmatiques chez des souris adultes qui avaient été exposées in utero [103]. La mise en place d’asthme et de troubles respiratoires associés au tabac a été également étudiée chez le cochon d’inde [11] [12] [13] [71] [95] [96].

2.2.3.3.2. Autres observations

Ces observations relèvent tantôt d’études où elles étaient activement recherchées, tantôt de découvertes fortuites à l’occasion d’études dont les objectifs étaient différents.

L’exposition de femelles gestantes au courant secondaire a montré une réduction

significative du poids de naissance des petits, chez le rat [107] et la souris [47].

L’exposition par corps entier a montré chez la souris l’apparition de plages d’alopécies sur le dos, associée à un passage des poils en phase télogène [32].

Plusieurs études portant sur le lapin ont conclut à une altération de l’endothélium vasculaire consécutive à l’exposition au courant secondaire, se manifestant par l’apparition de multiples

plages d’athérosclérose [64] [153]. Une accélération du développement de ces plaques a été mise

en évidence par Penn et Snyder chez le jeune coq lorsque celui-ci était exposé [104].

Les dernières observations à noter relèvent de la biologie moléculaire. Certains auteurs ont remarqué la formation d’adduits sur l’ADN consécutifs à l’exposition chez le rat [68] [83], d’autres l’activation des cytochromes P450 pulmonaires chez le rat exposé [50].

Husgafvel-Pursiainen récapitule en 2004 les lésions du matériel génétique (effets génotoxiques de la fumée de tabac ambiante) engendrées par l’exposition in vivo expérimentale au courant secondaire : formation d’adduits de l’ADN, cassures de l’ADN, aberrations chromosomiques ou encore échanges de chromatides sœurs. Les auteurs qualifient ces lésions d’ « indéniables » et appuient sur le fait que cette génotoxicité a été obtenue dans des conditions expérimentales reproductibles [67] [63].

Le tableau suivant récapitule les seules données fournies aujourd’hui par la toxicologie par inhalation pour l’établissement d’une relation dose-effet entre le danger « fumée de tabac

68 Lésions pulmonaires Symptômes

asthmatiques

Autres signes

Rat Lésions pulmonaires

Cendon J45 et J90 Hyperréactivité voies Joad TSP=1, H6, J100 Altération développement Ji TSP=1, H6, J21 Réduction de poids de naissance Rajini TSP=1, H6, J11

Hyperplasie épith nasal et adduits d’ADN Lee TSP=10, H6, J14 et J90 Adduits d’ADN Izzoti TSP=80, H6, J28-35 Activation cytoP450 Gebremichael H6, J7 à J100 Souris Tumeurs pulmonaires Witschi, D’Agostini TSP=87-160, J150-180 puis 30j de récup Lésions prénéoplasiques D’Agostini H=6, J=120 Adultes Seymour H6, TSP=1, J42 In utero Penn TSP=10, J19 Plages d’alopécie D’Agostini TSP=83, H6, J180 Réduction du poids de naissance Esposito TSP=1, H6, J35

Cochon d’inde Jeunes

Joad,Mutoh,Bonham TSP=1, H6, J35

Lapin Plages d’athérosclérose

Zhu,Hutchinson TSP=4-33, H6, J70

Coq Plages d’athérosclérose

Penn TSP=8, H6, J112 Singe Altération du développement pulmonaire Zhong,Whang TSP=1, H6, J>180 avec TSP exprimées en mg/m3

Jx=exposition totale de x jours (weekend inclus) Hx=exposition de x heures par jour

Tab. 7 - Tableau récapitulatif sur les relations exposition à la fumée de tabac ambiante – effets sur la santé, établies par la toxicologie expérimentale

espèce

69 L’information principale à retenir est la suivante : il n’existe pas, actuellement, de niveau d’exposition à la fumée de tabac ambiante reconnu pour n’avoir aucun effet (ou NOAEL = « No- Observed Adverse Effect Level »), pour ce qui est de la cancérogénicité en tout cas.

Nous avons déjà évoqué les similitudes qui existent entre la biologie de l’Homme et celle de l’animal de compagnie, en particulier en ce qui concerne le développement de certains cancers. La constatation d’effets néfastes du tabagisme passif sur la santé de l’Homme représente donc un argument de plus pour la plausibilité biologique d’effets chez l’animal de compagnie. Nous allons donc dresser un bilan des effets de la fumée de tabac ambiante sur la santé humaine, à partir des données que l’épidémiologie humaine nous fournit.