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I. Le virus de l’Hépatite C

2. Diversité génétique du VHC

2.1 Épidémiologie

2.1.2. Prévalence de l’infection

Deux remarques doivent d’emblée accompagner les chiffres décrits dans ce paragraphe. D’une part, la majorité des données disponibles reposent sur la séroprévalence des anticorps anti-VHC et ne permet donc pas de distinguer les patients guéris et les patients avec une infection active, qu’elle soit en phase aiguë ou chronique. D’autre part, la plupart des études épidémiologiques sont menées sur des sous-groupes de populations tels que les donneurs de sang, les usagers de drogues, les personnes incarcérées, qui ne sont pas ou peu représentatifs de la population générale du pays où ils résident. Les études sur la population générale sont les plus utiles mais restent très rares car non réalisables pour beaucoup de pays [135, 136]. Plusieurs aires géographiques mondiales ont fait l’objet de revues récentes permettant une mise à jour des données épidémiologiques.

L’infection par le VHC est ubiquitaire mais deux aires géographiques peuvent être décrites : une aire de faible prévalence correspondant aux pays les plus industrialisés (Europe de l’Ouest, Amérique du Nord et Japon) ; subdivisée en une zone de très faible prévalence (≤1%) avec les pays scandinaves, le Royaume Unis, l’Allemagne, la France, l’Australie et le Canada ; et une zone de prévalence un peu plus élevée (aux alentours de 2%) comprenant par exemple les Etats-Unis, le Japon et l’Italie. L’Asie du Sud-est, l’Afrique et l’Europe de l’Est présentent des niveaux de prévalence élevés (supérieurs à 3.5%).

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Ainsi en Amérique Latine, la prévalence est comprise entre 1,4% et 2,5% soit 6,8 à 8,9 millions d’adultes infectés par le VHC [137]. Le génotype 1 est majoritaire. Dans ces pays, le nombre de patients traités est faible ce qui risque de conduire à une augmentation des nouveaux cas d’une part et à la survenue des complications de l’infection à VHC, en particulier le CHC. La transmission par transfusion y apparait comme la voie de transmission majeure, la transmission nosocomiale semble être le second mode de transmission via l’utilisation de matériel non stérilisé (aiguille, instruments pour soins dentaires, matériel pour tatouage), enfin la transmission par usage de drogue injectable semble minime.

Les données épidémiologiques en Europe, au Canada et en Israël sont issues de nombreuses données et registres, qui permettent de fournir une analyse solide [138]. Il apparait ainsi de grandes différences entre les pays avec des prévalences variant de moins de 0,5% en Europe du Nord jusqu’à plus de 3% en Roumanie ou dans les zones rurales grecque et italienne. Il est estimé qu’entre 11,3 et 14,7 millions d’adultes ont une sérologie VHC positive dans cette zone géographique. Le facteur de risque de transmission majoritaire est l’utilisation de drogues par voie injectable et concerne près de la moitié des patients quel que soit le pays. Le génotype est aussi lié à la voie de transmission, ainsi les génotypes 1a et 3 sont associés à la toxicomanie intraveineuse alors que le génotype 1b est clairement associé à un antécédent de transfusion sanguine. La prévalence de l’infection par le VHC a augmenté depuis quelques années dans les anciens pays du bloc communiste. La cause identifiée est une explosion de la toxicomanie, en particulier chez les hommes jeunes. A l’inverse, la prévalence semble diminuer en Europe de l’Ouest. Ce déclin serait expliqué par la mise en place de mesures préventives, en particulier, une politique de dépistage massif, la mise à disposition de traitement de substitution et de kit d’injection à usage unique pour les toxicomanes, et enfin le traitement à large échelle de l’infection à VHC. Concernant certaines zones rurales avec de fortes prévalences, le risque identifié correspond à des transmissions nosocomiales. Le dernier point concernant l’épidémiologie de ces pays est une modification de la distribution des génotypes liée aux flux migratoires, l’augmentation de certains génotypes est ainsi associé à l’arrivée de migrants en provenance de pays qui entretiennent une histoire particulière avec le pays occidental (immigration des pays de l’Est vers l’Allemagne, du Pakistan et d’Inde vers la Grande Bretagne ou d’Afrique vers la Grèce).

La zone géographique comprenant l’Asie, l’Australie et l’Egypte est celle qui présente le plus grand nombre d’individus infectés avec une estimation variant de 49,3 à 64 millions de

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patients anti-VHC positifs [139]. Cependant, les situations sont très variables selon les aires géographiques. Les niveaux de prévalence varient de 1 à 2 % mais montent jusqu’à 4 à 15% dans certains pays tels le Pakistan, Taiwan ou l’Egypte. Les voies de transmission sont très variables et surtout fortement liées à l’histoire des pays. En Egypte, la dissémination de l’infection a été clairement associée aux campagnes de lutte contre la schistosomiase, au Pakistan l’utilisation très important de la voie injectable pour l’administration d’un très grand nombre de traitements a conduit aussi à cette dissémination. De même au Pakistan, l’habitude de se faire raser chez le barbier a été identifiée comme une autre voie majeure de transmission. Le recours traditionnel au tatouage en Asie est aussi un autre facteur de risque de transmission. La transmission par transfusion est la cause majeure dans beaucoup de pays, en effet, le don de sang est un acte rémunéré pour encore de nombreux pays, la qualification des dons par tests sérologiques n’existe pas, la sélection des donneurs se fait parfois sur questionnaire. Cette grande hétérogénéité épidémiologique se retrouve aussi au niveau moléculaire, le génotype 1 est majoritaire en Australie, en Chine, à Taiwan et en Asie du Nord ; le génotype 6 au Vietnam et en Asie du Sud-est et le génotype 2 est très prévalent en Corée et au Japon, en Inde et au Pakistan est principalement identifié le génotype 3, au Moyen Orient prédomine le génotype 4 (Egypte, Arabie Saoudite, Syrie) suivi du génotype 3 (Iraq, Iran). Il est important de considérer que les données de ces zones restent partielles, liées à des systèmes d’enregistrement et de surveillance encore en développement et à une densité de population très élevée.

La France compterait 500 à 600 000 individus infectés par le VHC et se situe en zone de prévalence intermédiaire. L’étude menée en 2003-2004 auprès des assurés sociaux rapportait une prévalence estimée de 0,86% (0,66-1,10), plus de la moitié des patients (53%) présentaient une hépatite C active avec un ARN détectable (Figure 15). Les facteurs indépendants associés à l’infection par le VHC étaient l’usage de drogue par voie IV, la transfusion sanguine avant 1992, le tatouage, des conditions de vie socio-économiques faibles, la naissance dans un pays présentant une forte prévalence de l’hépatite C et un âge supérieur à 29 ans [140]. Ces travaux montraient une stabilité de la prévalence par rapport à la précédente étude menée en 1994, et une amélioration du dépistage, près de 57,4% des patients séropositifs pour l’hépatite C connaissaient leur statut [141].

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Figure 15. Estimations de la prévalence des anticorps anti-VHC par inter-région de résidence pour la population française en métropole âgée de 18 à 80 ans en 2003-2004, d’après Merre, 2005 [142].