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Préparation per-opératoire :

Matériels et méthodes

III. Préparation per-opératoire :

La prise en charge per-opératoire d’une pneumonectomie est une étape importante de part sa difficulté et d'autre par la fréquence de ses complications.

1] la technique d’analgésie :

La chirurgie thoracique, étant l’une des plus intenses en douleurs post-chirurgicales, nécessite la mise en place d’un cathéter péridural thoracique ou para vertébral qui est préconisée par la majorité des auteurs en l’absence de toute contre-indication et avec l’accord du malade pour permettre une analgésie post opératoire plus encadrée et plus efficace. Des deux techniques d’analgésie (péridurale ou bloc para vertébral (APD)), la péridurale thoracique est considérée comme le gold standard. La combinaison d’anesthésie générale avec une analgésie péridurale limite l’utilisation peropératoire des opiacés intraveineux, accélérant ainsi la phase de réveil et permettant une extubation sur « table » d’un patient adéquatement analgésié et réactif. Plusieurs méta-analyses plaident en faveur de l’utilisation d’une APD au décours de la chirurgie thoracique.

La méta analyse de Ballantyne et al [86] montre que l’utilisation des morphiniques en péridurale diminue la fréquence des atélectasies, mais pas les autres complications pulmonaires. Une autre méta-analyse [87] conclut que l’APD a un bénéfice en termes de mortalité (réduction de 30 %). Par contre la péridurale expose à des épisodes d’hypotension artérielle expliquée par l’extension du bloc sympathique ce qui justifie la prescription des sympathomimétiques chez ces patients.

Rares sont les études qui n’ont montré aucun bénéfice de la péridurale en chirurgie thoracique, comme c’est le cas d’une étude portant sur 50 patients après thoracotomie qui ne retrouvait pas d’influence de l’APD thoracique ni sur la survenue des complications pulmonaires, ni sur la durée de séjour. Par contre, le contrôle de la douleur était de meilleure qualité [84].

Finalement, bien que l’intérêt d’une APD ne soit pas formellement démontré en chirurgie thoracique pour prévenir les complications postopératoires, la grande majorité des équipes ont incorporé cette technique dans leur prise en charge thérapeutique en raison de l’excellente analgésie obtenue.

Récemment, une autre technique d’analgésie locorégionale s’est imposée en chirurgie thoracique et elle considérée actuellement comme un véritable concurrent de la péridurale : il s’agit de l’analgésie par cathéter para vertébral dont les avantages sont les mêmes voir supérieurs à ceux de la péridurale:

-Analgésie limitée au coté opéré

-moins d’effets hémodynamiques avec un bloc sympathique atténué -moins de risque de lésion nerveuse et médullaire

Plusieurs études récentes, comparant les 2 techniques en chirurgie thoracique, confirment ces données positives de l’analgésie para vertébrale. Jose Manual Rabbanal [88] a conclu dans sa série de 136 patients que le bloc para-vertébral est plus efficace et est associé à moins d’effets secondaires.

Dans notre série, tous les patients ont pu bénéficier d’une technique d’analgésie péridurale.

La technique de péridurale thoracique reste la technique de référence en matière d’analgésie postopératoire.

2] la technique d’anesthésie :

L’anesthésie générale est la règle dans ce type de chirurgie lourde. Le choix de l’agent anesthésique ne semble pas primordial, puisqu’il n’influence pas le devenir postopératoire.

Les agents anesthésiques de courte durée d'action et les halogénés doivent être privilégiés permettant une extubation « sur table ». Le propofol a l'avantage de ne pas avoir d'effet sur la vasoconstriction pulmonaire hypoxique (VPH) et d'entraîner un shunt moins important en ventilation uni pulmonaire que les halogénés.

La curarisation est le plus souvent souhaitable, elle est initiée dès que le malade est reconnu ventilable, pour faciliter l’intubation, on choisira un curare d’action intermédiaire de type atracurium ou cis-atracurium.

Le service d’anesthésie réanimation dispose d’un protocole d’anesthésie adapté à ce genre de chirurgie et inclut tous les nouveaux produits et techniques anesthésiques recommandés.

3] l’intubation trachéale :

L’exclusion pulmonaire par une intubation sélective est actuellement recommandée dans les gestes de résection pulmonaire notamment dans la pneumonectomie. Elle permet de faciliter la chirurgie, de mieux exposer le poumon, éviter l’inondation du poumon controlatéral par les secrétions purulentes et de diminuer les forces de cisaillement au niveau du poumon opéré. Mais, elle pose la contrainte du bon positionnement du dispositif utilisé et la maîtrise des concepts physiopathologiques de la ventilation uni-pulmonaire qui vont conditionner la qualité d’oxygénation durant la période per opératoire [89].

3-1 Tube à double lumière :

Par rapport aux bloqueurs, les sondes à double lumière permettent une aspiration trachéale bilatérale, donnent la possibilité d'appliquer une CPAP au poumon non opéré, de passer rapidement d'une ventilation uni pulmonaire à une ventilation bi pulmonaire. Leur inconvénient est la nécessité de ré-intuber le patient avec une sonde simple en fin d'intervention. Le changement de la sonde peut être parfois difficile.

3-2 Tubes avec bloqueur :

Le bloqueur du tube Univent™ coulisse dans une lumière accessoire du tube, bloqueur et tube sont munis de ballonnets basse pression. Le bloqueur est mis en place dans une bronche souche par un mouvement de rotation soit à l'aveugle, soit à l'aide d'un fibroscope (surtout pour la bronche gauche).

Les indications d'un bloqueur sont les impossibilités de mettre en place un tube à double lumière : estomac plein, risque d'inhalation, intubation difficile prévisible, malade très hypoxémique ; ce tube est par ailleurs bien adapté si le calibre trachéal et bronchique est réduit ou si les sécrétions sont particulièrement abondantes et épaisses comme c'est notamment le cas chez les patients atteints de mucoviscidose. Ce tube permet, par ailleurs d'éviter réintubation en fin d'intervention quand la poursuite d'une ventilation assistée est nécessaire [89].

Dans les situations où les patients étaient intubés avec une sonde à simple lumière pour une raison ou une autre et pour lesquels un élargissement de la résection à la carène était prévu, le chirurgien est obligé de tolérer l’absence d’exclusion pulmonaire et des périodes d’apnée seront préconisées pour faciliter l’accès à la carène .

Dans notre série, les données relatives à l’intubation ont montré la réalisation de 6 intubations sélectives doubles lumières, 7 intubations sélectives lumière unique et pour le reste, une intubation bi pulmonaire.

4] le côté le plus fréquemment atteint :

La plus part des auteurs ont trouvé que le côté de la pneumonectomie était le plus souvent gauche, toute indication confondue. Notre série a comporté un nombre plus important de pneumonectomies gauches (44 cas) que droites (22 cas) toute indication confondue.

Cette différence n’est pas retrouvée dans la littérature, notamment dans les séries portants sur de plus grands collectifs de patients opérés pour une résection pulmonaire pour cancer bronchique, parmi lesquels la proportion de malades programmés pour une pneumonectomie gauche et celle de malades prévus pour une pneumonectomie droite sont proches. Dans la série d’Ali Rifaat [92], une prédominance droite de la pneumonectomie a été rapportée. Similairement, dans notre série, le nombre de pneumonectomies gauches et droites en cas de néoplasie pulmonaire est le même alors que la prédominance gauche est plus importante pour l’indication du poumon détruit post tuberculeux.

Tableau 25: Côté opéré en cas de cancer broncho-pulmonaire

Les séries Pneumonectomies

gauches

Pneumonectomies droites

Notre série 9 9

S. K. Park [34] 9 3

Chun Sung Byun [46] 49 24

Ali Rifaat [92] 16 29

Gilbert MASSARD [93] 15 10

5] La ventilation mécanique per opératoire :

Plusieurs études récentes incluant un nombre important de patients de chirurgie thoracique indiquent que l’implémentation d’une stratégie de ventilation « protectrice » comportant de petits volumes courants (4-6ml/kg), une pression positive enfin d’expiration (PEP) ainsi que des manœuvres de recrutement alvéolaire, s’avère bénéfique en terme de l’incidence de l’ALI (acute lung injury) et des atélectasies [94].

Les auteurs sont arrivés à la conclusion qu’une baisse des volumes courants par rapport aux volumes standards améliore nettement les échanges gazeux et diminue le taux des espaces morts.

Notre étude a révélé que le suivi n’est pas basé sur des gazométries artérielles sanguines dans la période péri opératoire, mais plutôt juste sur une

Si l’analyse des données disponibles ne permet pas de tirer des conclusions quant à l’évolution de l’hématose des patients de la série, on peut toutefois remarquer qu’aucun accident hypoxique grave n’a été signalé pendant l’intervention. À la lumière de ces observations, afin d’objectiver la qualité de l’hématose à chaque étape de prise en charge peropératoire, un protocole est proposé pour suivre les gazométries artérielles sanguines des patients pneumonectomisés à des périodes prédéfinies.

6] Apport liquidien per opératoire :

Puisque les patients subissant une résection pulmonaire sont

particulièrement sensibles à toute élévation de la pression capillaire pulmonaire, des régimes liquidiens restrictifs ont été préconisés avec un seuil transfusionnel visant le maintien d’une hémoglobinémie supérieure à 80-90g/dl.

La littérature scientifique répercute l’impact favorable du remplissage liquidien peropératoire guidé par les données du monitorage et un algorithme qui intègre les paramètres hémodynamiques (fréquence cardiaque, pré charge et débit cardiaque), respiratoires (contenu sanguin en O2) et métaboliques (lactate, température, saturation veineuse en O2).

Chez nos patients, l’apport liquidien par les solutés de remplissage vasculaire variait entre 500ml et 2 litres avec une moyenne à 950 ml et aucun de nos malades n’a été transfusé en per opératoire.

Dans la littérature récente, plusieurs études confirment le rôle néfaste de la transfusion sanguine massive et l’évolution postopératoire des patients quelque soit le type de chirurgie [95].

Même si notre étude est rétrospective, ne permettant pas de dégager les principaux facteurs pronostiques des complications postopératoires chez les patients transfusés, on peut considérer ces données comme significatives au moins d’un point de vue analytique simple. Ce constat doit pousser l’équipe médico-chirurgicale à agir sur tous les facteurs qui peuvent réduire le saignement per-opératoire et par conséquent limiter au maximum le recours à une transfusion sanguine (technique chirurgicale minutieuse et apport liquidien raisonné guidé par le monitorage hémodynamique..).