• Aucun résultat trouvé

Pied diabétique : 1 Définition :

Dans le document Les infections du pied diabétique (Page 41-59)

LISTE DES TABLEAUX :

VII- Conseils et rôle du pharmacien d’officine dans la prévention des infections du pied

2. Pied diabétique : 1 Définition :

Le pied diabétique a été défini par la conférence de consensus internationale de 2007 comme une « ulcération, infection ou destruction des tissus profonds du pied associées à une neuropathie périphérique ou à une artériopathie chronique des membres inférieurs chez le diabétique » [36].

2. 2 Physiopathologie :

Le développement des troubles trophiques du pied est la conséquence d'altérations artérielles, neurologiques et de processus infectieux.

Ces altérations sont le plus souvent associées mais il est classique de faire la distinction entre pied artériel, pied neuropathique et pied infectieux.

6

2.2 .1 Pied artériel :

L’artérite ou l’artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI) relève, comme chez le non diabétique, de la combinaison de lésions athéro- et artérioscléreuses. Elle est favorisée surtout par le tabagisme, mais également par l’hypertension artérielle et l’hypercholestérolémie.

L’AOMI peut entrainer des douleurs des jambes par manque d’oxygénation des muscles à la marche : c’est la claudication intermittente. Elle peut créer des plaies que l’on dit ischémiques. Ce sont des ulcères artériels, très douloureux (à l’inverse des lésions neuropathiques qui sont indolores) alors que l’ulcère veineux est généralement superficiel et étendu, l’ulcère artériel est creusant avec des bords nets. Sa localisation sera plutôt le bord du pied, ou alors au niveau de la jambe. Il peut aussi toucher les extrémités des orteils, ou se présenter sous forme de nécrose (peau noircie et cartonnée) [10].

2.2 .2 Pied neuropathique :

La neuropathie sensitivo-motrice, par diminution de la proprioception et faiblesse de la musculature intrinsèque du pied, favorise l'apparition de déformations de la structure du pied. Elle engendre une modification des points de pression avec report électif du poids sur la tête des métatarsiens. Ceci est à l'origine d'une hyperkératose, puis d'une ulcération jusqu'à la constitution d'un mal perforant plantaire.

La diminution de la sensibilité douloureuse rend compte, en l'absence d'une surveillance attentive, d'un retard fréquent de consultation. La neuropathie autonome, par ouverture des shunts arterio- veineux, entraîne une augmentation de la température locale et une ischémie

distale relative. En outre une hyposudation peut favoriser l'apparition de fissures et de

7

Figure 1 : Plaie ischémique sur artériopathie oblitérante des membres

inférieurs (AOMI) [10].

Figure 2 : Aspect d’un mal perforant plantaire (plaie neuropathique) après mise à plat

8

2.2 .3 Pied diabétique infectieux :

L'infection est une menace permanente pour le pied du diabétique. Le pied diabétique

peut être septique pur [11]. Mais la plupart du temps, l'infection trouve un terrain favorable:

9

II. Epidémiologie du pied diabétique infectieux :

1. Agents pathogènes :

1.1 Mycoses :

Les dermatophytes sont des champignons filamenteux microscopiques absents de la flore commensale de la peau, caractérisés par leur kératinophilie et leur kératinolyse ce qui explique l’atteinte préférentielle de la couche cornée de l’épiderme ou la kératine des phanères [14 - 16].

La répartition des champignons diffère selon la localisation des atteintes. Au niveau des lésions plantaires ou interdigitales, Trichophyton rubrum représente 75 à 90 % contre 8 à 12 % pour Trichophyton interdigitale et 1 à 2 % pour Epidermophyton floccosum. Alors qu’au niveau des ongles, on trouve Trichophyton interdigitale dans 20 % des cas et Trichophyton rubrum dans 80 % des cas [17, 18].

Une étude tunisienne sur la prévalence des mycoses superficielles chez le diabétique en

milieu hospitalier a montré que les principaux agents mycosiques au niveau du pied étaient les dermatophytes (94 %) dominés par Trichophyton rubrum (95 %). Les résultats de cette étude sont similaires à ceux de l’étude réalisée par Yomtov et al. [19].

Dans une autre étude sur les mycoses du pied chez le diabétique, un seul champignon identifié dans toutes les localisations (unguéal, plantaire et au niveau des espaces interorteils) : Trichophyton rubrum. [20].

Trichophyton rubrum est un champignon filamenteux microscopique qui a une affinité particulière pour la kératine (protéine de l’épiderme, des ongles, poils, et cheveux). Ce dermatophyte anthropophile est le responsable principale des dermatophytoses des pieds et des ongles. Il ne connait pas de forme sexuée (téléomorphe).

10

T.rubum a une morphologie variable. La forme la plus fréquente donne des colonies blanches cotonneuses avec pigment rouge foncé à brun au revers de la colonie (Figure .3). Certains isolats produisent un pigment mélanoïde qui diffuse à travers le milieu et colore l’intégralité de la boite (Figure .4). Il se reproduit sur la gélose en formant des hyphes mycéliennes et des spores par voie asexuée, on parle de conidies. Ces spores se forment par condensation du cytoplasme à l’intérieur de l'hyphe préexistante puis par fragmentation.

Il existe deux types de spores, les macroconidies, qui sont pluricellulaires, et les microconidies, qui sont unicellulaires de forme ovale (Figure 5).

Les spores jouent un rôle important dans la propagation du champignon. Elles n'ont pas de besoins nutritionnels exogènes. Ce sont des formes capables de résister aux conditions environnementales adverses et donc de participer à la résistance au traitement antifongique. On considère que les conidies sont la cause des infections primaires de l'homme [77].

11

Figure 4 : Trichophyton rubrum, colonies mélanoïdes [77].

12

1.2 Bactéries :

L’examen bactériologique réalisé par différentes études relève le plus souvent un polymicrobisme.

Les bactéries aérobies à Gram positif sont les plus fréquentes ; dans ce groupe, Staphylococcus aureus est la bactérie la plus souvent mise en évidence, de façon isolée ou au sein d’une population polymicrobienne [21], lors d’infections qu’elles soient superficielles ou profondes. Les streptocoques β-hémolytiques sont également fréquents, le plus souvent dans le cadre d’infections polymicrobiennes et les infections qu’ils déterminent doivent être traitées. Cette prédominance des bactéries à Gram positif n’est cependant pas universelle [22]. Les bacilles aérobies à Gram négatif, essentiellement de la famille des entérobactéries (Proteus mirabilis, Escherichia coli, Klebsiella sp), se rencontrent généralement, en cas d’infections chroniques ou déjà traitées [23].

Les bactéries anaérobies strictes, le plus souvent cocci à Gram positif mais aussi bacilles à Gram négatif (Prevotella spp, Bacteroides spp) sont souvent associées à des germes aérobies.

Les bactéries à Gram positif anaérobies strictes sont en règle présentes dans des plaies peu profondes alors que celles à Gram négatif anaérobies sont associées à une nécrose ischémique ou à une atteinte profonde.

Une étude récente sur le pied diabétique infecté a indiqué que les principaux bactéries isolées étaient souvent des cocci à Gram positif aérobies (76 %), notamment Staphylococcus aureus (32,4%), Streptococcus sp (18,3 %). Les staphylocoques à coagulase négative représentaient (23,9%) des bactéries [25].

Les tableaux I et II présentent les différentes bactéries isolées selon une étude effectuée en 2013 à l’Hôpital Militaire Mohammed V de Rabat [26]:

13

Tableau I: Répartition des bactéries (cocci) isolées [26].

Cocci à Gram positif  Staphylocoques (34%) Staphylococcus aureus Staphylocoque coagulase Staphylococcus haemolyticus Staphylococcus saprophyticus  Streptocoques (11%) S. α hemolytique du groupe A S. β hemolytique du groupe B Streptococcus agalactiae S. du groupe viridans Streptococcus acidominimus Streptocoque du groupe F Streptococcus constellatus Streptocoque du groupe C  Entérocoques (11%) Enterococcus faecalis Enterococcus sakazakii Enterococcus faecium

14

Tableau II : Répartition des bactéries (bacilles) isolées [26].

Bacilles  Bacilles à Gram négatif  Entérobactéries E. coli (20%) Enterobacter (4%) E. cloacae E. aerogenes Proteus vulgaris (1%) Klebsiella (10%) k.oxytaca k.pneumoniae Morganella morganii (7%) Serratia marcereus (2%) Citrobacter freudii (2%) Autres BGN Acitnetobacter baumani (3%) Pseudomonas aeruginosa (12%) Ralstonia picketti (1%)

 Bacilles à Gram positif

Corynebacteriums (9%) : Corynebacterium species Corynebacterium striatum Bacillus (2%)

15

1.2 .1 Staphylocoques :

 Les staphylocoques sont une composante essentielle de la flore humaine normale, mais comprennent aussi des espèces qui sont d'importance pathogènes. Après coloration, ils apparaissent sous la forme de cocci à Gram positif en amas (fig.6, 7). Les figures 8 et 9 montrent l'aspect de cultures de S. epidermidis et S. aureus sur gélose au sang.

La présence d'une coagulase est utilisée pour distinguer S. aureus (coagulase positive) des autres staphylocoques. On peut aussi rechercher la présence d'une ADNase, produite par S. aureus (fig.10).

Des milieux sélectifs, comme la gélose hypersalée au mannitol, sont utilisés pour la culture de S. aureus, lors d'études épidémiologiques visant à détecter des sujets porteurs [78].

 Facteurs de virulence :

Tableau III : Facteurs de virulence chez les staphylocoques [79].

1-protéines de surface (adhésines) : permettent la colonisation Protéine A

protéine de liaison au collagène de type I, II et IV protéine de liaison à la fibronectine

protéines de liaison au fibrinogène (clumping factor)

2-Facteurs protégeant la bactérie de la phagocytose :

capsule : composée d’exopolysaccharides

la coagulase : se lie à la prothrombine est forme un complexe : staphylothrombine qui entraine la polymérisation du fibrinogéne en fibrine et la formation d’un caillot protégeant ainsi la bactérie de la phagocytose.

3-Facteurs conduisant à l’extension de l’infection.

 Extension locale : la bactérie produit plusieurs toxines ayant pour cible les membranes cellulaires. Ces toxines se fixent à des cellules cibles et provoquent la formation de canaux membranaires laissant passer les ions (pore-forming toxins). On peut citer les hémolysines a, b, D et les toxines synergohmynenotropes.

 Enzymes dégradent le tissu conjonctif et favorisent l’extension du foyer infecté : protéases, élastase, hyaluronidase.

4-Toxines

responsables de syndromes

spécifiques

 La bactérie sécrète de nombreuses toxines, cependant très peu sont responsables de pathologies spécifiques. Il s’agit des entérotoxines, des exfoliatines A et B, et de la TSST-1.

16

1.2 .2 Streptocoques :

 Les streptocoques sont des cocci à Gram positif différenciables des staphylocoques par l'absence de catalase.

S. pyogenes est un pathogène responsable d'infections superficielles et profondes. Il forme des chaînettes de cocci dans les préparations colorées au Gram. La figure 11 montre une coloration de Gram de S. agalactiae (streptocoque du groupe B) dans l'hémoculture d'un nouveau-né septicémique.

Les streptocoques peuvent être classés selon l'hémolyse qu'ils produisent sur gélose au sang.

Les streptocoques bêta-hémolytiques sont divisés selon la classification de Lancefield, qui repose sur le typage d'un antigène polysaccharidique de paroi. S. pyogenes appartient au groupe A et S. agalactiae au groupe B de Lancefield (fig.12) [78].

 Facteurs de virulence :

Tableau IV: Facteurs de virulence chez les streptocoques [79].

1- Capsule Empêche la phagocytose (la colonie prend un aspect muqueux et lisse)

2- La protéine M Permet l'adhérence des streptocoques et joue aussi un rôle majeur dans l'inhibition de la phagocytose

3- Les toxines

érythrogènes A, B et C Elles sont responsables de l'éruption de la scarlatine.

4- Les streptolysines O et S

Elles sont des hémolysines.

In vivo, la streptolysine O suscite la formation d'anticorps antistreptolysine O (ASLO).

5- Les

anti-streptodornases B Elles sont augmentées dans les infections pharyngées et cutanées. 6- Streptokinase,

streptodornases, hyaluronidase

Elles interviennent dans la pathogénicité.

17

1.2 .3 Corynébactéries :

 Ce genre bactérien se caractérise sur le plan morphologique comme étant des bacilles à Gram positif, immobiles, droits ou incurvés avec des renflements (poire ou massue) et quelquefois, des formes ramifiées. Outre ces caractéristiques, leur disposition particulière en caractères chinois ou encore en palissade permet de les évoquer dans certains prélèvements [78].

1.2 .4 Entérobactéries :

 Tous ces germes ont une morphologie identique : bâtonnets à Gram négatif, de taille et de forme variable. Certains possèdent une capsule. La définition des entérobactéries repose sur les critères suivants : bacilles à Gram négatif, immobiles ou mobiles par cils péritriches, aérob-anaérobies facultatifs, attaquant le glucose par voie fermentaire, dépourvus d'oxydase et réduisant les nitrates en nitrites.

Ils comprennent une grande variété d'espèces y compris des bactéries commensales de l’intestin. La coloration de Gram ne permet pas de distinguer les différentes espèces. La figure 13 montre leur aspect typique, ici E.coli. Les entérobactéries (conformes) poussent toutes sur milieu de MacConkey qui différencie les espèces qui fermentent le lactose (colonies rosés) de celles qui n'en sont pas capables (colonies jaune pâle) comme le cas de Proteus mirabilis figure 14. La figure 15 montre des colonies muqueuses de Klebsiella pneumoniae, fermentant le lactose [78].

 Facteurs de virulence :

Tableau V : Facteurs de virulence des entérobactéries [79].

1-Facteurs d’adhésion bactériens aux épithéliums

Pilis Fimbriaes

2-Enzymes Invasion et destruction tissulaire

3-Exotoxines Toxines ayant un mode d’actions spécifique (entérotoxines)

4-Endotoxine Destruction et désorganisation du systéme immunitaire : choc endotoxique 5-Capsule Protection contre la phagocytose

18

1.2 . 5 Acinetobacter :

 Les acinetobacter sont des bactéries à Gram négatif, non fermentantes, coccoïdes, non sporulées, parfois capsulées, immobiles (mais pouvant présenter une mobilité par saccade résultant de la présence de fimbriae polaires), aérobies strictes, à métabolisme respiratoire strict, catalase positive et oxydase négative. Les bactéries du genre Acinetobacter sont connues comme étant capables de former des inclusions intracellulaires de polyhydroxyalcanoates sous des conditions de stress [78].

1.2 . 6 Pseudomonas :

 Les pseudomonas sont des bacilles à gram négatif, oxydase positif, aérobie stricts, asporulés, colonies souvent pigmentées. Pseudomonas et les espèces voisines comprennent des bactéries largement distribuées dans l'environnement, et dont certaines sont d'importants pathogènes pour l'homme. Ce sont des germes résistants à de nombreux antibiotiques. P. aeruginosa est responsable d'infections variées, ou septicémie. La figure 16 montre la coloration de Gram d'une expectoration, avec des cocci à Gram positif (S. aureus) et des bacilles à Gram négatif (P. aeruginosa) [78].

19 Figure 6 : Staphylococcus aureus. Coloration de Gram

d'hémoculture d'un patient septicémique. Une septicémie à S. oureus peut résulter de l'infection d'une blessure mineure. (Gram, x1000) [78].

Figure 7 : Staphylococcus aureus. Coloration de Gram

de pus de blessure infectée à S. aureus. Remarquer les cocci à Gram positif et les polynucléaires altérés colorés en rosé. (Gram, x1000) [78].

Figure 8 : Staphylococcus epidermidis. Culture sur

gélose au sang, montrant des colonies blanches. S.

epidermidis est l'un des staphylocoques à coagulase

négative. Ils font partie de la flore normale de la peau, mais peuvent être à l'origine d'infections chez le nouveau-né, l'immunodéprimé, et chez les patients porteurs de dispositif invasif. (Gélose au sang, 18 h à 37°c) [78].

20 Figure 9 : Staphylococcus aureus. Culture sur gélose au

sang. Les colonies de S. aureus sont jaunes ou dorées, contrastant avec les colonies blanches de S. epidermidis et des autres staphylocoques à coagulase négative.

(Gélose au sang, 18h à 37 °c) [78].

Figure 10 : Production d'ADNase. Les staphylocoques à

coagulase positive ou négative peuvent être différenciés en recherchant la production d'ADNase Après incubation d'une nuit sur un milieu contenant de l'ADN, on inonde la boîte avec de l'acide chlorhydrique dilué, qui précipite l'ADN non hydrolyse. Les colonies productrices d'ADNase sont entourées d'une zone transparente, là où l'ADN a été hydrolyse. 5. aureus est ADNase positive (Gélose à l'ADN, 18 h à 37°c) [78].

Figure 11 : Streptococcus agalactiae (groupe B de

Lancefield). Coloration de Gram montrant des cocci à Gram positif dans une hémoculture de nouveau-né. Les streptocoques du groupe B sont une cause importante de méningite et d'infection généralisée du nouveau-né. (Gram, x1000) [78].

21 Figure 12 : Culture de Streptococcus pyogenes sur gélose

au sang. Les colonies sont entourées d'une zone d'hémolyse claire de type β. La boîte contient un disque de bacitracine, à laquelle S. pyogenes est sensible (à la différence de la plupart des autres streptocoques β hémolytiques). (Gélose au sang, 18 h à 37 °c) [78].

Figure 13 : Escherichia coli, coloration de Gram. La

coloration montre les bacilles à Gram négatif typiques des Enterobaclenaceae La plupart ont une morphologie identique, et ne peuvent être différenciés par la coloration de Gram (Grain, x1000) [78].

Figure 14 : Proteus mirabilis sur milieu de MacConkey. P.mirabilis ne fermente pas le

lactose et forme des colonies claires (Gélose de MacConkey, 18 h à 37 °C) [78].

22 Figure 15 : Klebsiella pneumoniae sur milieu de

MacConkey. K.pneumomae fermente le lactose et forme des colonies muqueuses rosés (Gélose de MacConkey, 18hà37°C) [78].

Figure 16 : Coloration de Gram d'une expectoration

contenant Pseudomonas aeruginosa. Cette expectoration d'un patient atteint de mucoviscidose montre des staphylooques et les fins bacilles a Gram négatif de

Dans le document Les infections du pied diabétique (Page 41-59)

Documents relatifs