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Le phénomène du « viscosity wedge »

IV. Etude des contacts TEHD linéiques à fort

IV.3 Application aux cas de très fort glissement (SRR > 2)

IV.3.2 Le phénomène du « viscosity wedge »

Dans son livre sur les principes de la lubrification, CAMERON [Cam66] décrit comment l’action d’un gradient de température à travers l’épaisseur de film (ici selon y) engendre un gradient de pression dans le sens de l’écoulement (selon x). L’exemple d’un patin est décrit Figure IV-7. La surface mobile inférieure est considérée comme « froide » en amont et « chaude » en aval ; la surface supérieure est fixe et considérée comme uniformément chaude (a) à gauche, Figure IV-7, puis uniformément froide (b) à droite, Figure IV-7.

Figure IV-7 - Phénomène du « viscosity wedge » pour un patin et champs de vitesse (sans gradient de pression)

En l’absence de tout gradient de pression, les champs de vitesse sont tracés dans les deux situations. Dans le cas (a), en entrée, le lubrifiant sera plus aisément entraîné par la surface froide (viscosité plus importante), le cisaillement sera plus important proche de la surface chaude et le profil de vitesse résultant sera donc convexe. En sortie, les températures en haut et en bas étant équivalentes, le profil des vitesses sera linéaire. Un excès de débit entre l’entrée et la sortie serait donc engendré, nécessitant incontestablement la génération d’un gradient de pression selon x pour conserver la quantité de matière (de la même manière que pour une variation d’épaisseur, effet de base de la théorie de la lubrification). Pour le cas (b), le même phénomène est engendré : en sortie, le cisaillement étant plus important proche de la paroi inférieure, un profil concave serait engendré, menant également à un différentiel de débit entre l’entrée et la sortie, contrebalancé par l’action de la pression.

On montre donc ici physiquement comment l’action d’un gradient de température vertical, menant à un gradient de viscosité vertical, génère un gradient de pression horizontal. Mathématiquement, l’expression développée du gradient de pression résolu dans l’approche NAVIER-STOKES mise en œuvre dans ce travail est rappelée :

Froid Chaud Chaud Froid Chaud Froid u1 x y u1

(a) (b)

ρ η η η η = −+ ∂ ∂ ++ ∂ ∂ + ∂ ∂ + ∂ ∂             ∂ ∂ ∂ ∂ ∂ 2 2 3 p u u v u u v u u v x x y x x y x x y y y x (4.2)

En effectuant une analyse d’ordre de grandeur dans la zone de contact d’un cas EHD, l’influence de chaque terme sur le gradient de pression est comparée. Le terme le plus significatif est, comme prévu par les hypothèses des films minces, le terme E. Les termes D et F sont au moins un ordre de grandeur inférieurs, mais deviennent significatifs proche de la zone de sortie. Les autres termes demeurent très faibles devant E.

Le terme prédominant, source du gradient de pression horizontal est donc principalement issu du terme E, soit en première approximation :

η   ∂ ∂ ∂ ≈ ∂ ∂ p u x y y (4.3) avec η + ∂ ∂η ∂ ∂ ∂ 2 2 u u u y y y y y .

C’est ce dernier terme, ∂ ∂η ∂ ∂ u

y y , qui exprime la contribution du « viscosity wedge » et qu’il sera indispensable de considérer pour les cas de fort glissement. Or, ce même terme n’est classiquement pas pris en compte dans les modèles REYNOLDS, basés sur les hypothèses d’une viscosité constante dans l’épaisseur (η =

∂ 0

y ).

Afin d’illustrer précisément son effet dans un contact TEHD, l’évolution de la viscosité

η, du taux de cisaillement γ , et de la température T est reproduite Figure IV-8, pour le cas =4

SRR présenté précédemment, avec prise en compte ou non des effets thermiques.

En régime isotherme (à gauche, Figure IV-8), la viscosité (de 0.01 Pa.s à l’entrée du contact) ne varie que faiblement dans l’épaisseur et une valeur maximale de 0.63 Pa.s est relevée au centre. Le taux de cisaillement est quasiment uniforme dans la zone centrale et maximal en intensité proche de la zone de constriction.

Une fois les effets thermiques implémentés, l’évolution de la température est représentée (à droite, Figure IV-8) dans le fluide et les solides. Compte tenu du fort cisaillement généré dans le contact, une augmentation de température de 32 K est relevée au milieu de l’épaisseur de film entre 0< <x 0.7 10⋅ −4 m. La chaleur générée est principalement évacuée vers la droite par

la surface inférieure (plus rapide) et vers la gauche par la surface supérieure. La situation décrite précédemment sur un modèle simplifié Figure IV-7 est donc retrouvée dans ce cas plus complexe. En effet, le lubrifiant froid (flèches bleues) est entraîné de la gauche vers la droite par la surface inférieure et à l’opposé, la surface supérieure entraîne le lubrifiant de la droite

B : Terme d’inertie C : Terme élongationnel D : Terme visqueux normal E : Terme visqueux de cisaillement F : Terme visqueux secondaire de cisaillement A : Terme de pression

vers la gauche, menant à des gradients de température importants dans l’épaisseur. L’évolution de la viscosité est donc fortement affectée.

Figure IV-8 - Résultats isothermes à gauche et avec effets thermiques à droite pour un cas EHD à SRR =4. De bas en haut : champs de température, viscosité et lignes de courant,

puis taux de cisaillement dans le fluide

Pour plus de précision, les profils de viscosité sont tracés à gauche Figure IV-9, adimensionnés par la valeur initiale

η

0, en fonction de l’épaisseur de film h (représentative de *

l’épaisseur locale variant de 0 à 1) et pour différentes abscisses /x b (où b =1.08 10⋅ −4m est la demi-longeur de contact).

Contrairement aux résultats obtenus en régime isotherme, la viscosité varie fortement dans l’épaisseur. Elle est très élevée proche des surfaces et faible au milieu du film fluide. Par l’action du gradient de température vertical et pour une même abscisse (x b/ =0.5 par exemple), la viscosité peut varier d’une valeur de 1.9 Pa.s, proche de la surface supérieure, à 0.06 Pa.s au milieu du film (à gauche, Figure IV-9), soit une diminution de 97%. En effet,

u2=-2.5 [m.s-1]

compte tenu des conditions cinématiques, le cisaillement est maximal au centre du film, menant à une forte augmentation de température et une diminution importante de la viscosité.

Figure IV-9 - Profils de viscosité adimensionnée

η η

/ 0 (en échelle logarithmique, à gauche) et de vitesse horizontale adimensionnée u u/ 1 (à droite) dans l’épaisseur locale h* et pour

différentes abscisses x b/ = − −[ 1, 0.5,0,0.5,1], avec prise en compte des effets thermiques

La composante horizontale adimensionnée du champ de vitesse, u u/ 1, est étudiée localement à droite, Figure IV-9. Elle est également « fortement » affectée par ces variations de viscosité, conduisant par le phénomène du « viscosity wedge » à un gradient de pression horizontal et une élévation locale de l’épaisseur (« dimple ») en amont de la sortie principale du contact. L’utilisation de la CFD pour la résolution du problème permet également de s’intéresser précisément à l’écoulement du lubrifiant dans la zone du contact. Par le tracé des lignes de courant (en blanc Figure IV-8), la présence d’une zone de recirculation dans laquelle le lubrifiant est piégé et où la température est maximale, est remarquée. Les échelles de représentation étant très déformées, cette zone est cependant plus étendue qu’il n’y parait. Le terme de vorticité représentant la quantité de rotation subie localement par le fluide et défini selon z par

∂ ∂

v u

x y [Gen07], est en effet totalement dominé par le terme de cisaillement « classique »,

u

y , engendrant une zone stagnante, à très faible vitesse.

L’étude de ces cas de fort glissement a permis de montrer le rôle prépondérant des effets thermiques sur le coefficient de frottement, mais aussi sur l’épaisseur de film. Les principaux mécanismes responsables des modifications locales d’épaisseur de film ont alors été identifiés. Afin de finaliser cette étude sur les effets de fort glissement dans les contacts lubrifiés, un cas de glissement extrême est traité.

10-1 100 101 102 103 0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 η/η0 h * x/b=-1 x/b=-0.5 x/b=0 x/b=0.5 x/b=1 -0.50 0 0.5 1 0.2 0.4 0.6 0.8 1 u/u1 h * x/b=-1 x/b=-0.5 x/b=0 x/b=0.5 x/b=1 data6

IV.4 Cas à vitesse d’entraînement nulle