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REVUE DE LA LITTÉRATURE 1.1 Les enrobés bitumineux et ses constituants

1.2 Sollicitations externes et dégradations des enrobés bitumineux .1 Introduction .1 Introduction

1.2.4 Sollicitations hydriques .1 Introduction .1 Introduction

1.2.4.7 Perte d’adhésivité entre les constituants de l’enrobé

Avant tout, l’adhésivité constitue la capacité du bitume à coller aux granulats. Deux phases sont cruciales afin d’assurer la qualité et la pérennité de l’adhésivité. La première phase s’effectue lors du malaxage, le bitume ajouté aux granulats, mouille et recouvre leurs surfaces. Cette phase constitue "l’adhésivité globale", soit la capacité du liant à coller aux granulats secs ou "l’adhésivité active" dans le cas de granulats humides (Lesueur, 2005). Une forte liaison entre le bitume et le granulat est conditionnée par une bonne couverture (Castañeda Pinzon, 2007). Pour l’obtenir, le bitume doit être suffisamment liquide et le granulat doit avoir une température adéquate afin de maintenir la fluidité du bitume et assurer le mouillage de la surface et la pénétration partielle du bitume dans les pores ouverts du granulat. Par ailleurs, la qualité du mouillage est caractérisée par l’angle de contact liquide-solide. Le mouillage est : a) total lorsque le liquide s'étale totalement sur le solide (angle de 0°), b) partiel lorsque le liquide forme un monticule sur le solide (angle < 90°), c) considéré comme absent lorsque le liquide forme une goutte sur le solide (90 ≤ angle ≤ 180°) (Young et coll., 1998). Plus l’angle de contact est faible, plus l’énergie nécessaire pour séparer le bitume du granulat est grande. Notamment, l’ajout d’un composé tensioactif au bitume permet d’augmenter ces propriétés de mouillage.

La deuxième phase, appelée "adhésivité passive", est très importante au niveau de la durée de vie de l’enrobé bitumineux et correspond à la résistance au décollement du film (ou pellicule) de bitume de la surface du granulat en présence d’eau. Donc, l’adhésivité passive correspond à la capacité du bitume à résister au désenrobage par l’eau (Lesueur, 2005). Aussi, c’est la force de liaison à l’interface bitume-granulat en présence d’eau. Pour plus de détails sur l’adhésivité passive, il est possible de consulter l’ouvrage de Ramond (1977). Il existe plusieurs essais pour évaluer l’adhésivité passive, toutefois ils demeurent dans certains cas complexes à réaliser, à analyser ou sont totalement empiriques.

Une défaillance au niveau de l’adhésivité (interface bitume-granulat) en présence d’eau peut être expliquée par une faible adhésivité initiale ou par une perte progressive de cette

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adhésivité. La faible adhésivité initiale entre le bitume et le granulat peut être expliquée par les causes exposées au Tableau 1.13.

Tableau 1.13 Causes engendrant une faible adhésivité initiale du bitume au granulat

Composant ou étape

(cause)

Propriété d’ordre

physique chimique

Granulat

- Recouvert de particules fines en surface (recouvert de poussière et d’argile) ;

- Très angulaire : usure aux arrêtes (importance de la résistance à l’usure, à l’abrasion) ; - Faible résistance à la fragmentation (aux chocs) ;

X X X

Couple bitume-granulat

- Faible énergie de surface d’adhésivité ; - Incompatibilité chimique.

X X

Fabrication récente ou déficiente

- Certains granulats récemment concassés exhibent une mauvaise résist. au désenrobage ; - Séchage insuffisant du granulat avant enrobage ;

- Enrobage incomplet du granulat.

X X X

X X

Évidemment, les causes exposées au Tableau 1.13 peuvent également générées une perte d’adhésivité par la suite. La perte d’adhésivité est usuellement attribuée à l’infiltration de l’eau à l’interface bitume-granulat. Le désenrobage des granulats peut s’effectuer en trois étapes : 1) infiltration d’eau à l’interface bitume-granulat, 2) rupture de la liaison adhésive entre le bitume et le granulat, et 3) décollement du film de bitume. Il faut souligner que l’infiltration de l'eau à l’interface bitume-granulat est attribuable à l’affinité plus élevé du granulat avec l’eau qu’avec le bitume. De nouveau, plusieurs causes et mécanismes sont à l’origine de la perte d’adhésivité à l’interface bitume-granulat (Tableau 1.11 et Tableau 1.14). Alors, il devient difficile de déterminer quelles sont les propriétés des constituants qui influence le plus l’adhésivité (ou la perte d’adhésivité). Plus particulièrement, l’adhésivité entre le bitume et le granulat peut être expliquée par quatre théories qui précisent les forces d’interactions en jeu. Ces forces d’interactions sont dites (en ordre décroissant d’importance) : thermodynamique (énergie de surface), chimique (liaison ou réaction), électrostatique (orientation moléculaire) et mécanique (physique).

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Tableau 1.14 Mécanismes à l’origine de la perte d’adhésivité

Mécanisme Cause d’ordre *

Séparation, détachement ou décollement (Detachment) Chimique et thermodynamique

Décollement chimique (Chemical Disbonding) Chimique et électrostatique

Déplacement ou remplacement (Displacement) Chimique et thermodynamique ou mécanique

Osmose (Osmosis) Diffusion

Activité microbienne (Microbial Activity) Bactérienne

pH instabilité (pH Instability) Non spécifiée

Décapage hydraulique (Hydraulic Scouring) Non spécifiée

Désorption (Desorption) Mécanique après autres forces

Cloque, cloche et piqûre (Blistering and Pitting) Non spécifiée

Gel de l’eau (Freezing Water) Non spécifiée

Pression dans les pores (Pore pressure) Mécanique

Rupture film de bitume, microfissures (Film Rupture, Microcracks) Mécanique et thermodynamique Émulsion spontanée (Spontaneous Emulsification) Chimique ou électrostatique

* Bagampadde et coll. (2004) ; Caro et coll. (2008).

Thermodynamique – L’énergie de surface constitue le facteur prédominant au niveau de

l’adhésivité. L’adhésivité résulte des forces intermoléculaires qui sont reliées à l’énergie libre de surface en présence des matériaux suivants : bitume, granulat, eau et air. À ce niveau, l’adhésivité peut être caractérisée par la notion de mouillage (étalement, épandage ou angle de contact). Le bitume mouille le granulat si l’énergie d’adhésion est supérieure à celle de sa cohésion (viscosité) (Corté et coll., 2004). Notamment, le chauffage du bitume permet d’abaisser sa viscosité (ou cohésion) et alors, d’augmenter sa capacité de mouillage. Généralement, la tension d'adhésion eau-granulat est supérieure (ou angle de contact inférieur) à celle du bitume-granulat expliquant que l'eau a tendance à déplacer le film de bitume du granulat (Ishai et coll., 1977 ; Kanitpong et coll., 2003). La vitesse de désenrobage est proportionnelle à la différentielle entre la tension d’adhésion du liant au granulat et celle de l’eau au granulat (Ramond, 1977).

Chimique – Une réaction chimique se produit entre les fractions du bitume adsorbé par le

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caractère acide (par ex., présence d’acides naphténiques), il se lie chimiquement plus facilement avec des granulats de nature basique, donc à haute teneur en carbonate de calcium, tels que marbre et le calcaire, plutôt qu’avec des granulats à caractère acide comme le quartz, le granite, les grès et les porphyres qui sont composés de silicates (Castañeda Pinzon, 2007).

Orientation moléculaire – Les molécules du bitume, notamment les groupes polaires,

s'orientent de manière à satisfaire les besoins énergétiques de la surface du granulat. L’orientation des molécules est possible lorsque le bitume est chaud. Alors, l’interaction électrostatique entre les deux surfaces est générée par l’attraction des charges électriques opposées : forces de type polaires, liaisons d’hydrogène ou interactions de Van der Waals (Castañeda Pinzon, 2007). Cette interaction est nettement inférieure à celle créée par une réaction chimique. La majorité des groupes fonctionnels du bitume sont composés de charges négatives. En conséquent, l’orientation des molécules entre les composants est favorisée lorsque des granulats chargés positivement sont utilisés (par exemple, le marbre, le calcaire et le basalte). L’ajout de chaux au granulat, qui constitue un composant basique, permet d’améliorer l’orientation des molécules du bitume améliorant ainsi l’adhésivité.

Mécanique – L’adhésion d’un bitume à un granulat est également liée à une interaction de

nature mécanique : prise mécanique du bitume au granulat. La prise mécanique est fonction de la porosité (pores ouverts) et à la texture (micro-texture) du granulat. Les caractéristiques de surface du granulat qui vont influencer l’adhésivité sont :

• propreté : le recouvrement du granulat par des particules fines réduit considérablement l’adhésivité entre le granulat et le bitume.

• texture : il est plus facile de recouvrir un granulat avec une texture de surface lisse qu’une rugueuse assurant ainsi un enrobage complet. Toutefois, le granulat possédant une texture de surface légèrement rugueuse favorise un meilleur ancrage mécanique, adhésivité, du bitume au granulat (Taylor et coll., 1983). La surface lisse et vitreuse, tel que celle du quartz, génère un ancrage moins important et donc plus favorable au désenrobage que la surface micro-rugueuse du basalte (Maupin, 2009).

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• angularité : Les essais de laboratoire indiquent bien que le désenrobage est plus sévère pour les granulats avec des particules angulaires que celles arrondies en raison du film mince de bitume aux arrêtes (Taylor et coll., 1983).

• Surface spécifique : La superficie d’une particule minérale est accrue avec la hausse de son angularité et de sa microrugosité, ce qui permet d’augmenter l’ancrage entre le bitume et le granulat. D’ailleurs, la hausse de la surface spécifique d’une particule nécessite une plus grande quantité de bitume, qui s’avère bénéfique au niveau de la résistance au désenrobage (Stuart, 1990).

• porosité et absorption du granulat : L’absorption du granulat peut être reliée à sa porosité ouverte. Les granulats possédant des gros pores perméables, tel que le calcaire, semble montrer une meilleure adhésivité comparativement aux granulats ayant une multitude de pores perméables de faible dimension, tel que le quartz (Taylor et coll., 1983). Toutefois, plus le granulat est poreux, plus il absorbe d’eau et il est alors plus difficile d’y faire évaporer toute l’eau lors du chauffage du granulat (Stuart, 1990). L’eau résiduelle nuit à l’adhésivité.

• minéralogie : La grosseur des grains du minéral affecte précisément la texture de surface et la porosité du granulat.

Évidemment, le mouillage du granulat et l’absorption du bitume par le granulat, qui affecte la qualité de la prise mécanique, dépend de la viscosité du bitume lors du malaxage et de la vitesse de refroidissement par la suite.

Au niveau de l’adhésivité, ce sont les caractéristiques physiques et chimiques du granulat, comparativement à celles du bitume, qui affecte le plus celle-ci et donc, la résistance au désenrobage (Ramond, 1977 ; Kiggundu et coll., 1988 ; Hicks, 1991 ; Curtis, 1993). Par ailleurs, les bitumes à viscosité élevée sont plus difficilement déplacés par l'eau, comparativement à ceux à faible viscosité, augmentant ainsi la résistance au désenrobage des enrobés bitumineux (Fromm, 1974 ; Ramond, 1977 ; USIRF, 2001).

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