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4. D ESCRIPTION DES ESPECES

4.2. Mammifères

4.2.5. Mustélidés

Martre (Martes martes Linné, 1758) ou fouine (Martes foina Erxleben, 1777)

Le genre Martes sp. est représenté en Europe par deux espèces, la martre et la fouine. A Concise, il a été reconnu à 259 reprises10. S'il existe plusieurs caractères externes permettant la distinction entre la martre et la fouine, à savoir la couleur du plastron, de la truffe, la pilosité des pattes, la couleur et la longueur de la queue, etc. (Hainard 1997, Maunoir 1986, Marchesi 1995), les caractères ostéologiques spécifiques sont rares et concernent principalement la tête de l'animal. Heureusement, en ce qui nous regarde, la découverte de nombreux ossements peu fragmentés a permis la diagnose.

Celle-ci a été réalisée sur la base des travaux de Rode et Didier (1944), Stubbe (1973, 1993), Stampfli (1976), Maunoir (1986), Grundbacher (1992) et Dutheil (1994) entre autres. Pour le crâne, les critères retenus sont les suivants (fig. 94 gauche):

- la longueur de la région post-orbitaire (fig. 94a), soit la distance allant du processus frontal jusqu'en avant de la constriction post-orbitaire, est plus longue chez la martre (Rode et Didier 1944);

- la suture des os palatins forme chez la martre une pointe à l'extrémité caudale du palais, dessinant ainsi un "M" (fig. 94b) ; chez la fouine, la pointe n'est pas ou peu présente (Dutheil 1994);

- le bord externe de la première molaire (M1) supérieure présente une échancrure chez la fouine (fig. 94c), alors qu'il est légèrement convexe chez la martre (Stubbe 1973 et 1993) ;

Les critères établis sur la mandibule portent sur :

- la morphologie de la branche montante (Maunoir 1986, p.14) ;

- la distance entre les foramens mentonniers (Stampfli 1976, Maunoir 1986, p.40). Celle-ci est plus importante chez la martre.

Le calcul de l’indice foramen, soit la corrélation entre la distance séparant les trous mentonniers et la longueur de la mandibule (Stampfli 1976, Maunoir 1986, p.40, Grundbacher 1992) rend également bien compte de cette différence entre les deux mustélidés.

Philippe Maunoir (1986) relève des différences au niveau de la scapula. Il note en effet : - une forme générale plutôt pentagonale chez la martre, plutôt trapézoïdale chez la fouine.

- chez cette dernière, le processus suprahamatus de l'épine scapulaire est semble-t-il dirigé vers le haut, contrairement à la martre, chez qui il est orienté vers le bas.

En réexaminant ces critères sur des squelettes de fouines et de martres actuelles, nous avons en outre constaté que le processus suprahamatus de l'épine de la scapula est bien plus développé longitudinalement chez la martre, alors qu'il est court mais par contre beaucoup mieux marqué chez la fouine (fig. 94d). Ce critère (développement du processus suprahamatus) semble détenir un pouvoir discriminant déterminant qui peut être mis en évidence métriquement (fig. 94 droite).

Stubbe (1993 p. 372) note également des différences morphologiques au niveau de l’atlas et de l’os coxal.

A Concise, les observations effectuées sur les crânes, les mandibules, les scapulas et les atlas convergent toutes vers une espèce : la martre. La présence exclusive de ce taxon au détriment de la fouine a déjà été constatée sur d’autres gisements néolithiques suisses comme Twann (Grundbacher 1992), Burgäschisee-Süd (Boessneck et al. 1963), Auvernier La Saunerie (Stampfli 1976) ou encore Arbon Bleiche 3 (Deschler-Erb et Marti-Grädel 2004).

Ce phénomène relève-t-il de causes biologiques, environnementales ou plutôt des choix d'ordre anthropique ? Il est difficile de le dire. La fouine est une espèce saxicole, plutôt inféodée à des zones d'éboulis et de rochers. Bien plus anthropophile, elle affectionne tout particulièrement les habitations humaines. Son apparition en Europe semble être un phénomène récent, remontant tout au plus au Néolithique (Mermod 1995) et successif au réchauffement post-glaciaire. La martre est pour sa part un animal franchement forestier, aux mœurs nocturnes et surtout crépusculaires, qui évite la proximité de l'homme. Compte tenu du paysage néolithique présumé, le développement de la martre a dû être largement favorisé par le couvert végétal. Dans le cas d'une coexistence réelle de ces deux espèces sur le Plateau suisse durant le Néolithique, une alternative nous vient à l'esprit pour expliquer l'absence totale de fouine dans les spectres de faune : soit les fouines, si elles parcourent déjà le Plateau suisse, se cantonnent dans des lieux isolés, peut-être excentrés par rapport au domaine essentiellement forestier exploité par les Néolithiques et dans ce cas, elles ont peu de chance (ou au contraire beaucoup!) d'être capturées ; soit une sélection de nature anthropique peut être invoquée, motivée par exemple par la qualité des peaux. La martre fournit effectivement une fourrure très

10 La description qui va suivre a déjà fait l’objet d’une publication partielle en 2004 dans le cadre des XXIVe rencontres internationales d’archéologie et d’histoire d’Antibes.

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appréciée, dont la qualité est semble-t-il largement supérieure à celle de la fouine (Stubbe 1973, p.252). Cette seconde hypothèse pose cependant problème. En effet, compte tenu des mœurs de l'espèce, le système d'acquisition qui paraît le plus adapté est le piégeage. Or, comme le souligne B.

Grundbacher (1992), il paraît difficile de concilier une sélection spécifique et un système de prédation aléatoire adapté aux caractéristiques éthologiques de l'animal, à moins que les niches écologiques des deux espèces aient été suffisamment distinctes pour permettre d'orienter la prédation. La question reste en suspens.

Revenons à Concise. Les restes de ce mustélidé sont distribués très inégalement entre les ensembles E2B, E3B et E4A, puisque le premier (E2B) réunit à lui seul 238 restes, soit 92% des vestiges. Au sein même de cet ensemble, la martre représente numériquement plus de 21% des restes de mammifères sauvages alors qu’elle participe de façon tout à fait accessoire au poids des restes et par conséquent aux ressources carnées.

Les vestiges de l’ensemble E2B

L’intérêt dont la martre semble faire l’objet dans l’ensemble E2B est sans doute accentué par le fait que les ossements, dont les 2/3 sont issus de trois mètres contigus, forment une accumulation bien circonscrite d’une vingtaine de m2, qui reflète un phénomène localisé. Ces restes représentent au minimum 12 individus.

Age et sexe des individus

Si une sélection s'est peut-être opérée quant à l'espèce, elle n'a semble-t-il pas eu lieu en fonction de l'âge des animaux. Nous sommes en présence d'individus de plus de 4 mois, attendu que l’ensemble des crânes présente une dentition définitive. Il s'agit de bêtes relativement jeunes, âgées pour la plupart de moins de deux ans, voire de moins d'un an pour trois d'entre elles, d'après l'usure dentaire et la conformation de la crête sagittale (Stubbe 1973, Habermehl et Röttcher 1967). Elles ont toutefois atteint la taille adulte puisque tous les éléments du squelette postcrânien sont ossifiés, à l’exception d’une vertèbre thoracique et de l’extrémité distale d’un fémur. Cette prédominance de jeunes adultes n'a rien d'étonnant en regard d'une population naturelle, où la part des individus de moins de 2 ans s'élève à plus de 70 % (Stubbe 1973, p. 266).

En ce qui concerne le sexe des individus, la distinction mâle/femelle s'appuie principalement sur le crâne et la mandibule. Les mandibules sont les vestiges qui se prêtent le mieux à la distinction, celles appartenant aux femelles étant nettement plus petites. Si toutes les mesures semblent discriminantes, la longueur de la rangée dentaire est une des plus parlantes selon Ph. Maunoir (1986, p. 82-92). La présence d’une seule mandibule à l’état fragmentaire dans l’ensemble E2 limite l’analyse. D’après la mesure de la longueur de la rangée dentaire, cette pièce peut être attribuée sans hésitation à un mâle. La mandibule est par contre trop incomplète pour qu’il soit possible d’étudier la corrélation entre l’indice foramen et la longueur de la mandibule (Stampli 1976).

Sur le crâne, le développement de la crête sagittale, plus important chez le mâle, est un critère morphologique souvent utilisé. Dans notre cas, son emploi est cependant difficile pour deux raisons : d'une part, l'observation de la crête sur toute sa longueur est bien souvent délicate, du fait de la fracturation de la boîte crânienne dont témoignent la plupart des crânes de notre corpus ; d'autre part, la morphologie de la crête varie non seulement en fonction du sexe mais également de l'âge de l'animal, les différences étant bien plus marquées chez les adultes (Habermehl et Röttcher 1967, Stubbe 1973). Le recours à la métrique s’avère plus aisé et plus heureux. La longueur de la rangée dentaire supérieure est une valeur à fort pouvoir discrimant (Maunoir 1986, p. 82 et suivantes). Elle offre l’avantage de ne mobiliser que la partie antérieure du crâne, généralement complète sur les pièces de notre corpus, contrairement à la mesure de la longueur du crâne proposée par Stampfli (1976, p. 48, 177, 179). Elle permet de distinguer 6 mâles et 5 femelles (fig. 95 gauche). Dans un cas l’analyse métrique n’a pas pu être employée, puisque seul un fragment de la boîte crânienne nous est parvenu. D’après la morphologie de la crête sagittale, cet os s’apparente plutôt à celui d’une femelle, sans qu’il soit possible de l’assurer.

Données ostéométriques

Les données ostéométriques obtenues pour notre corpus (annexe 1) semblent assez comparables à celles récoltées sur d'autres gisements contemporains (fig. 95 droite et 96). Les deux humérus de l’ensemble E2B Concise présentent toutefois à DTD égal une longueur relativement plus grande que celle qui a été enregistrée sur les pièces des autres gisements (fig. 96 droite). On remarquera que les scapulas mesurées à la Saunerie montrent quant à elles un important décalage du point de vue de la hauteur selon l’épine, par rapport aux vestiges des autres gisements (fig. 96 gauche), alors qu’une

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telle différence n’est pas vraiment perceptible sur l’humérus (fig. 96 droite). Nous n’avons pas d’explication pour expliquer un tel écart.

Une grande variabilité de taille est nettement perceptible sur les divers gisements et pourrait refléter elle aussi un dimorphisme sexuel bien marqué, ce que n’avait pas manqué de souligner H. R. Stampfli (1976). Notons toutefois que J. Boessneck et al. mentionnent également une grande variabilité de taille à Burgäschisee-Süd qu’ils refusent de corréler au sexe, étant donné qu’ils observent des valeurs proches des valeurs extrêmes chez deux sujets mâles actuels (Boessneck et al. 1963, p.50). La question mériterait une analyse plus approfondie basée sur davantage de données.

L’absence d’os pénien au sein de l’accumulation se doit d’être relevée.

Traces anthropiques

De nombreuses traces laissées par un tranchant effilé ont été observées sur divers éléments anatomiques et témoignent d’un prélèvement de la peau (pl. 12).

Les crânes plus ou moins complets, onze au total, portent tous des stries localisées sur leur tiers antérieur, au niveau des nasaux, des frontaux et des arcades zygomatiques (pl. 12b, c et d). Ces zones correspondent grossièrement au museau et aux orbites de l'animal. Lors d’une expérimentation d’écorchage réalisée sur une fouine au moyen d’un couteau en silex11, il est apparu que ces stries étaient typiquement laissées lorsque l'on tentait de retirer la peau, liée très étroitement à l'os en cet endroit du crâne.

Les fines incisions observées sur la face externe de l’unique mandibule de l’ensemble E2B, au-dessous de la canine et des deux premières prémolaires correspondent au prolongement du même geste. Des témoignages identiques sont par ailleurs répertoriés sur trois autres pièces de l’ensemble E3B.

La fracturation des boîtes crâniennes peut quant à elle être mise au compte d'un prélèvement de la cervelle, de la technique de mise à mort ou encore de la séparation du corps d'avec la tête (pl. 12a).

Sur le squelette postcrânien, diverses traces peuvent également être interprétées comme consécutives à l’écorchage. De fines stries ont été observées sur plusieurs métacarpiens et phalanges, soit 16 pièces au total, principalement des métacarpiens III et V et des phalanges proximales (pl. 12g et h). Les incisions, fines, courtes et répétées sont effectuées perpendiculairement à l'axe des os. Elles sont localisées sur la face dorsale du corps des métacarpiens, mais également sur les faces dorsale, plantaire et latérale de plusieurs phalanges proximales. Une seule phalange médiale laisse apparaître une strie longitudinale sur sa face plantaire. Les métatarsiens, deux fois moins nombreux que les métacarpiens, ne présentent aucune incision. Le membre postérieur semble avoir fait l'objet d'un traitement plutôt au niveau du talon, puisque l'ensemble des calcanei, soit quatre pièces portent des stries sur la face plantaire (pl. 12f), en relation probable avec le dépouillement ou la désarticulation de l'extrémité de la patte. Des traces analogues sont absentes de notre expérimentation, attendu que le prélèvement de la peau ne s'est effectué que jusqu'à l'extrémité distale des os longs. Malgré le déficit en bas de pattes et surtout en métatarsiens, phalanges médiales et distales, la présence d'un certain nombre d'entre eux au sein de l’accumulation indique que dans certains cas au moins ces os ne restent pas solidaires de la fourrure. Ceci peut par exemple être le cas si l’écorchage est réalisé jusqu’aux phalanges distales ou si la dépouille est sectionnée au-dessus des extrémités.

La consommation de ces animaux n'est pas assurée. Si aucune strie de décarnisation n’a été constatée, la fragmentation du corps de certaines vertèbres thoraciques dans le sens de leur longueur ainsi que le bris fréquent des os longs ont néanmoins été enregistrés. La fracturation presque systématique des boîtes crâniennes a pu survenir à différents moments, lors de la mise à mort ou au cours de l’exploitation de la carcasse.

Distribution anatomique des restes

D’après la distribution anatomique des restes, l’ensemble du squelette est présent, à l’exception des carpiens, des sésamoïdes, des patellas et de certains petits os du tarse, dont l’absence quasi-totale est à mettre en relation avec la maille du tamisage (annexe 5). Notons par contre la bonne représentation des os longs et en particulier celle des métacarpiens ainsi que celles des vertèbres et des scapulas (fig. 98 gauche).

Quoique notre distribution reste proche du profil de distribution théorique, le fort déséquilibre entre les éléments crâniens, y compris les dents supérieures isolées, et les éléments de la mâchoire inférieure

11 L’expérience a été menée au Muséum d'histoire naturelle de Genève avec l'aide de Jean-Marie Zumstein, collaborateur technique au département d'archéozoologie du Museum d'histoire naturelle de Genève.

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est frappant (fig. 98 gauche). Ce d’autant que les restes crâniens, constitués pour moitié de crânes plus ou moins complets fournissent le nombre minimum d’éléments squelettiques (NME) le plus élevé.

Afin d’évaluer si un tel cas de figure connaît des parallèles en Suisse durant le Néolithique, les données obtenues à Concise ont été confrontées à celles d’autres gisements plus ou moins contemporains où l’exploitation de la martre a été mise en évidence (fig. 97). Malheureusement, seuls les sites de Twann (Becker et Johansson 1981; Grundbacher 1992), de Seeberg Burgäschisee-süd (Boessneck et al. 193) et d’Arbon Bleiche 3 (Deschler-Erb et Marti-Grädel 2004, p. 209-211, CD88) fournissent des données détaillées quant au nombre de restes par partie anatomique. Les sites d’Auvernier Brise-Lames et la Saunerie (Desse 1975; Stampfli 1976) livrent pour leur part des observations générales, souvent non chiffrées, qui viennent néanmoins étayer et compléter les observations faites sur les trois autres gisements.

Les comparaisons entre les distributions squelettiques obtenues à Concise et sur les autres sites soulignent leur forte dissemblance (fig. 98 droite). En effet, alors que les extrémités sont bien représentées à Concise quoique déficitaires, elles font totalement défaut ou presque à Twann12, à Burgäschisee-süd, à Arbon Bleiche 3 ou sur les sites d’Auvernier. L’absence quasi totale de mandibule à Concise contraste par contre avec l’abondance de cet élément dans les autres stations.

Si le déficit en bas de pattes peut aisément trouver une explication dans la manière de prélever les peaux ou même dans les procédures de tamisage, le manque presque total de mandibules à Concise est plus singulier. Et ce, d’autant plus que sur les autres sites, il s’agit de l’élément le plus courant, auquel il est d’ailleurs fait appel pour établir le nombre minimum d’individus (NMI). Attendu que l’unique mandibule de martre découverte à Concise est totalement excentrée par rapport à l’accumulation principale et qu’au sein de cette dernière, les crânes fracturés présentent une répartition différentielle - ils se trouvent à l’écart du squelette postcrânien -, nous sommes en droit de nous demander si les mandibules ont fait l’objet d’un prélèvement systématique sur ce site, et si oui dans quel but.

Quelques comparaisons…

Quelques éléments de réponse semblent pouvoir être apportés, au vu de certaines découvertes. Sur le site de Twann, plus ou moins contemporain de celui de Concise, C. Becker et F. Johansson signalent une mandibule de martre dont la branche montante est travaillée et les surfaces fortement lustrées (1981, p.70-71). Dix ans plus tard, B. Grundbacher, qui reprend de manière détaillée l’étude des carnivores de ce site, évoque en outre quatre paires de mandibules de martre perforées au niveau de leur branche montante (1992, p. 202-203-206). Elle mentionne également la présence d’une mandibule de martre percée et polie sur le site d’Eschner-Lutzengüetle (Liechtenstein), dans un horizon du Néolithique récent (cité d’après Hartmann-Frick, 1960). J. Schibler relève quant à lui l’existence de deux pièces similaires dans un niveau néolithique final d’un site littoral zürichois (Schibler et al., 1997, p. 175).

Plus récemment, à Arbon Bleiche 3, 28 mandibules de martre ont été reconnues, parmi lesquelles 18 présentent des surfaces lustrées et une perforation (Erb et al. 2002a, p.313-314, Deschler-Erb et Marti-Grädel 2004, p. 210-211). Les dix autres n’ont pas été décomptées parmi les pièces façonnées, bien qu’elles présentent toutes un lustré plus ou moins marqué. Ce type de traces a également été observé sur 7 mandibules d’écureuil et 8 de hérisson.

De tels stigmates, mis régulièrement en relation avec une utilisation des mandibules comme pendeloque ou amulette, ont effectivement été observés sur d’autres espèces. Si le lièvre et le chat sauvage sont chacun mentionnés à une reprise (Schibler 1981, p. 69 ; Schibler et al. 1997, p. 175), l’écureuil est un peu plus mobilisé (Deschler-Erb et Marti-Grädel 2004, p. 208). Le hérisson fait pour sa part de multiples apparitions. Il est à n’en point douter l’espèce favorite, et ce même au détriment de la martre. Les mandibules de hérisson polies, voire perforées sont en effet attestées sur bon nombre de sites néolithiques suisses (entre autres Becker et Johansson, 1981, Boessneck et al. 1963, Stampfli 1976, Deschler-Erb et Marti-Grädel 2004). Ce genre de pratique, également reconnu au bord d’un lac jurassien (Chaix 1989, p. 383), dépasse en fait largement les frontières de la Suisse, comme l’a montré J.-D. Vigne (1988 p. 34-36). Il rappelle à ce propos une découverte intéressante faite dans le sud-ouest de la France. Il s’agit de la sépulture chasséenne de Saint-Michel-du-Touch (Haute-Garonne) contenant un vase dans lequel étaient déposés un poinçon, un gobelet et quatre hémi-mandibules de hérisson (Vigne 1988 p. 34-36, d’après Clottes 1982). Il n’est malheureusement pas précisé si ces dernières sont lustrées ou perforées.

12 L'absence du rachis à Twann résulte avant tout d'une détermination moins approfondie n'allant pas jusqu'à la reconnaissance spécifique (Grundbacher 1992, p.201).

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Outre l’identité de traitement, l’identité de taille entre ces différentes espèces se doit d’être soulignée.

Lors de la sélection de l’os, le critère de taille prévaut-il sur celui de l’espèce à proprement parler ? La question peut être posée.

Au vu de ces différents exemples, l’hypothèse d’un emploi des mandibules de martre de l’ensemble E2B comme pendeloques ou amulettes est tentante. On aurait alors le témoignage en négatif du traitement particulier réservé à cet os. L’absence quasi totale de mandibules sur le site pourrait dans ce cas s’expliquer par le fait que l’accumulation reflète les déchets d’une activité qui vise à prélever la peau mais également les mandibules de ces animaux. La distribution des crânes, à l’écart des restes post-crâniens, illustrerait pour sa part un prélèvement qui s’effectue en deux temps. Sur les sites de comparaison, la présence en grand nombre de mandibules de martre est néanmoins difficile à interpréter pour l’instant, en l’absence des données de l’analyse spatiale. Elle n’est peut-être pas sans relation avec la localisation des fouilles, qui ont généralement concerné le cœur des stations, et non leur périphérie comme c’est le cas à Concise. Il est certain qu’une reprise de l’étude des vestiges de martre sur les différents sites ainsi que la confrontation de leur distribution spatiale avec celles des dépotoirs et des habitats puissent fournir quelques éléments de réponse ou du moins de réflexion.

Les vestiges des ensembles E3B et E4A

En ce qui concerne la vingtaine de restes découverts dans les ensembles E3B et E4A, quelques précisions peuvent être apportées. Parmi les 19 ossements du genre Martes sp. mis au jour en E3B,

En ce qui concerne la vingtaine de restes découverts dans les ensembles E3B et E4A, quelques précisions peuvent être apportées. Parmi les 19 ossements du genre Martes sp. mis au jour en E3B,