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Monétisation des externalités environnementales (hors effet de serre)

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 80-83)

2.4 Monétisation des externalités liées au confort d’été

2.4.2 Monétisation des externalités environnementales (hors effet de serre)

Les impacts environnementaux signifient ici les impacts causés par la libération de substances (particules fines…) ou d’énergie (bruit, rayonnement, chaleur) dans l’environnent (air, terre, eau).

Celles-ci sont transportées (quelques fois transformées) avant d’atteindre finalement des récepteurs (humains, faune, matériaux…) où elles peuvent présenter un danger et causer des dégâts.

Les causes d’externalités environnementales sont donc nombreuses et disparates (pollutions : sonores, atmosphériques, chimiques, thermiques…). Dans cette thèse, l’étude des externalités environnementales repose sur les résultats du projet ExternE (CE, 2005a) qui se focalise sur les pollutions atmosphériques (pouvant ensuite impacter l’eau ou les sols) et les pollutions sonores.

2.4.2.1. Présentation de la méthodologie d’Analyse des Voies d’Impact Méthodologie : comment quantifier les impacts environnementaux ?

L’évaluation des externalités environnementales repose généralement sur une méthode de monétisation des dommages physiques, dite d’analyse des voies d'impact (AVI), qui retrace le passage du polluant depuis son émission jusqu'aux récepteurs affectés (population, cultures, forêts, bâtiments…). Les étapes principales de cette analyse sont les suivantes :

Evaluation des émissions : spécification des technologies et polluants concernés (par exemple le nombre de kilogrammes de NOx émis par GWh produit par une centrale électrique).

Etude de la dispersion : calcul de l'augmentation de la concentration en polluants dans l’environnement (air, eau et sols) de toutes les régions affectées (par exemple la concentration

accrue d'ozone, en utilisant des modèles de dispersion atmosphérique et de la chimie de formation d’ozone due aux NOx).

Les auteurs d’ExternE utilisent une combinaison de modèles de dispersion locale (distance par rapport à la source inférieure à 50 km) et de dispersion régionale pour tenir compte de tous les dommages significatifs. Ils tiennent compte des réactions chimiques de transformation de polluants primaires en polluants secondaires (par exemple la formation de sulfates à partir de SO2). Il est à noter que lorsque les polluants sont émis dans l’air, la dose ingérée peut être de deux ordres de grandeur plus importante que la dose par inhalation.

Evaluation des impacts : calcul de la concentration ou de la dose absorbée par les récepteurs et calcul des impacts (en unités physiques) de cette dose, en utilisant une fonction dose-réponse.

Ce type de fonction rapporte la quantité de polluant (ozone par exemple) qui affecte un récepteur (la population par exemple) à l’impact physique sur ce récepteur (nombre de cas d'asthme provoqués par l’augmentation de la concentration d'ozone). De telles fonctions sont disponibles pour les impacts sur la santé humaine, les matériaux, les cultures…

Monétisation des impacts : évaluation monétaire des impacts, par exemple en multipliant le nombre de cas d'asthme par son coût sociétal. Les coûts comprennent des valeurs marchandes (dépenses de santé) et non marchandes (perte d’aménités liées au bruit).

Les impacts (sur tous les récepteurs potentiellement affectés par un polluant) sont ensuite agrégés. Le calcul des externalités selon la méthode AVI s’effectue à partir d’un site géographique et de technologies données. Les résultats obtenus dépendent des caractéristiques du site (densité de population, vents dominants, hauteur de la cheminée…) et peuvent varier significativement pour un même polluant. La méthode AVI est une analyse pluridisciplinaire nécessitant des connaissances en ingénierie, en modèles de dispersion, en épidémiologie, en écologie et en économie.

Catégories d’impacts prises en compte

Les catégories d’impacts environnementaux prises en compte dans le projet ExternE sont présentées dans le Tableau 2.10 ainsi qu’un aperçu des principaux effets monétisés.

Tableau 2.10. Catégories d’impact considérées dans ExternE (CE, 2005) et principaux effets monétisés

Catégories d’impact Principaux polluants Principaux effets PM10, SO2, NOx, O3 Réduction de la durée de vie Santé - Mortalité Benzène, particules diesel Cancers

PM10, SO2, O3 Hospitalisations pour problèmes respiratoires PM10, O3 Réduction du nombre de jours travaillés PM10, CO Insuffisance cardiaque

Benzène, particules diesel Risque de cancer (non fatal) Hospitalisations pour problèmes

Bruit Angine de poitrine

SO2, dépôts acides Vieillissement de l’acier, du calcaire, peintures…

Matériaux de

construction Particules (combustion) Salissure des bâtiments

SO2, NOx, O3 Modification des rendements (blé, pommes de terre, orge…)

Cultures

Dépôts acides Augmentation du besoin de chaulage des sols Perte d’aménité Bruit Perte d’aménité due à des nuisances sonores

Ecosystèmes Dépôts acides, dépôts

d’azote Acidification et eutrophisation

2.4.2.2. Monétisation des externalités environnementales liées aux émissions de polluants

Utilisation des résultats issus de l’AVI

Les émissions de polluants peuvent être d’origines très différentes : chauffage individuel, centrale électrique… Théoriquement, il faudrait effectuer, pour chaque cas, une AVI spécifique au site et à l’équipement concerné. En pratique, les émissions sont généralement sommées puis multipliées par des indices d'impact (€ par quantité de polluant) ne prenant pas en compte les conditions locales (ce qui n’est théoriquement justifié que pour les polluants à longue durée de vie). Ce travail de thèse ne portant sur aucun cas particulier, l’utilisation d’indices d’impact représentatifs est inévitable.

Détermination des indices d’impacts

Le Tableau 2.11 (Rabl et Spadaro, 2005) regroupe les indices d’impact pour les principaux polluants émis par les systèmes énergétiques (centrales électriques, chaudières) en Europe. Ces valeurs seront utilisées par la suite.

Pour le cas particulier de la production d’électricité d’origine nucléaire, les coûts externes peuvent prêter à débat. Tout d’abord, il n’existe pas de consensus méthodologique sur la prise en compte du risque, même faible, d’accident nucléaire (voir partie 2.4.4.1). Ensuite, les coûts et les risques associés à la gestion et au stockage des déchets radioactifs à durée longue, quand ils sont pris en compte, sont écrasés par l’actualisation. Enfin, le risque de prolifération nucléaire est une externalité qui n’est pas monétisée.

Tableau 2.11. Indices d’impact pour différents polluants émis en Europe (Rabl et Spadaro, 2005)

Polluants Indices d’impact [€/tonne]

Aucun indice d’impact n’a été trouvé concernant ce type de pollution, les coûts externes sont directement donnés par kilowattheure électrique produit. Pour la suite, la valeur de 0,19 €cts/kWh produit est retenue (CE, 2005). Elle est basée sur la technologie actuelle de la France et est constituée pour une très grande part du risque de cancers pour les générations futures. Cette estimation du cycle nucléaire suppose un fonctionnement normal dans un système politique stable, avec un contrôle strict de la conformité à tous les règlements.

2.4.2.3. Monétisation des externalités environnementales liées à l’épuisement des ressources non renouvelables

L’épuisement important des ressources non renouvelables (pétrole, matières premières…) aura un impact significatif sur le niveau de vie des générations futures. Les systèmes économiques devront se reposer sur une consommation de plus en plus faible de ces ressources, ce qui nécessitera une transition avec le développement de nouvelles technologies, une utilisation à plus large échelle de ressources renouvelables, etc. Les coûts liés à la transformation du système économique devraient donc être considérés comme des externalités négatives pour les générations à venir.

Toutefois, selon certains économistes (Solow55 par exemple), le progrès donne souvent les moyens de dépasser le caractère limité des ressources non renouvelables (efficacité énergétique, amélioration du taux de récupération du pétrole…) et le marché permet une gestion optimale de ces ressources.

55 Selon Robert Solow (prix de la Banque de Suède en sciences économiques 1987), « le souci ancien au sujet de l’épuisement des ressources naturelles ne repose plus sur aucune base solide. Il est très facile de substituer d’autres facteurs aux ressources naturelles. Ainsi n’y a-t-il, en principe, aucun problème. Le monde peut, en effet, continuer sans ressources naturelles ; ainsi l’épuisement de celles-ci est tout juste une péripétie, non une catastrophe » (Sachs, 1991).

En effet, comme le rappelle Girmens (2006), le concept de rareté (le caractère limité des ressources à la disposition d’une société) est central en économie. Le paradigme néoclassique aboutit au résultat que le prix relatif (le rapport d’échange entre deux biens) est lié à la rareté des biens et que lorsqu’un bien devient rare, son prix augmente et la demande doit naturellement se déplacer vers d’autres biens (sous l’hypothèse, cruciale, qu’il existe des substituts au bien en question). Dans ce domaine, la contribution fondamentale est celle d’Hotelling (1931) qui a démontré que pour atteindre la condition d’équilibre56, le prix des ressources non renouvelables devait correspondre à la somme du coût de production et de la rente de rareté (ou rente d'Hoteling), cette dernière devant augmenter à un taux égal à celui du taux d’actualisation. Par conséquent, au fur et à mesure que la quantité de ressource diminue, son prix augmente, favorisant l'émergence de solutions de substitution. De plus, si l’on considère qu’il est important qu’il n’y ait pas de décroissance du capital global entre les générations mais que la forme du capital que l’on laisse aux générations futures n’a pas d’importance (ressources, technologies ou savoir), alors l'augmentation des connaissances compenserait la diminution de ressources naturelles.

La confiance dans l’efficacité des mécanismes de marché et dans la substituabilité (qui est liée à la question, plus générale, du progrès technique) garantirait que chaque génération puisse satisfaire ses besoins. L’épuisement des ressources non renouvelables ne serait alors plus à considérer comme une externalité.

Toutefois, force est de constater que l’optimisme technologique n’est pas universellement partagé57. De plus, en supposant que la rente de rareté est bel et bien prise en compte dans les prix des ressources, cette rente est touchée par les exploitants de ressource et non par les acteurs économiques lésés (les générations futures). Rien ne prouve que les rentes dégagées par l’épuisement des ressources soient réinvesties dans le capital technique, ou consacrées à la création d’externalités positives intergénérationnelles (subventions pour le recyclage…) et tout laisse à croire que l’épuisement des ressources non renouvelables reste une externalité intergénérationnelle.

Il n’existe pas, cependant, de travail de monétisation concernant l’épuisement des ressources fossiles et des matières premières. Comme le rappelle Girmens (2006), dans le cas qui nous intéresse (une externalité négative intergénérationnelle), le caractère non borné de l’horizon temporel de l’économie et l’infinité d’agents rendent le problème insoluble. Cette externalité ne sera donc pas prise en compte dans la suite de l’étude.

2.4.3 Monétisation des externalités liées au changement

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 80-83)

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