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Modèles de souris génétiquement modifiées

III. Les médulloblastomes

III.2. Les modèles murins pour comprendre les MB

III.2.2. Modèles de souris génétiquement modifiées

Le seul modèle permettant de suivre et d’observer la formation de tumeurs à partir de sa cellule d’origine est le modèle murin génétiquement modifié. Le premier de ces modèles, utilisé pour l’étude des MB, fut le modèle Ptch1+/-, créé en remplaçant sur l’un des allèles Ptch1 une partie de l’exon 1 et la totalité de l’exon 2 du gène Ptch1 par une séquence codant la ß- galactosidase (gène lacZ) (Goodrich et al., 1997). Ce modèle mime le syndrome de Gorlin- Goltz (Hahn et al., 1996). Les patients atteints de ce syndrome développement très souvent des tumeurs, y compris des MB. Depuis, ce type de modèle a été largement développé. Toujours pour le groupe Shh, l’utilisation du système Cre-lox a permis de générer des souris exprimant de manière conditionnelle une forme dominante active de Smoothened, SmoA2 ou SmoM2. Ce système a également permis de générer un modèle murin pour les MB du groupe Wnt avec l’expression d’une forme dominante active de la ß-caténine. Un grand nombre d’autres modèles de souris a été généré grâce à l’utilisation d’autres systèmes d’induction conditionnelle tels que

le système Tet (Tet-On et Tet-Off) qui permet soit d’induire, soit de stopper l’expression d’un gène d’intérêt de manière réversible. Ce système a d’ailleurs été utilisé pour montrer que la surexpression de N-Myc, dans les cellules Glt1 (Glutamate transporter 1) positives, induit la formation de tumeurs et que, de manière plus intéressante, l’arrêt de la surexpression de N- Myc, par injection de tétracycline, guérit totalement les souris, suggérant que ces tumeurs dépendent totalement de N-Myc pour leur prolifération (Swartling et al., 2010). Malheureusement, les tumeurs développées dans ce modèle ne miment pas un groupe de MB en particulier, puisque même si elles ressemblent fortement au MB du groupe 3, elles partagent également des caractéristiques avec les MB Shh, Wnt et du groupe 4.

Récemment, un autre système, le système RCAS/tv-a a permis de générer un modèle de souris génétiquement modifiées mimant la formation de MB du groupe 3 à grandes cellules dans le rhombencéphale. Dans ces souris, le récepteur tv-a, normalement absent chez les mammifères, est exprimé sous le contrôle du promoteur Nestine. L’expression de ce récepteur permet aux cellules Nestine positives d’être reconnues par le rétrovirus RCAS injecté dans le cerveau. Quand RCAS infecte ces cellules, la réplication du virus n’a pas lieu mais les ARN rétroviraux, codant pour la protéine c-Myc et pour la protéine anti-apoptotique Bcl-2, sont rétro- transcrits pour générer des séquences ADN qui seront intégrées dans le génome des cellules et exprimées de manière constitutive, conduisant à la formation de tumeurs. Les auteurs obtiennent le même résultat lorsqu’ils surexpriment c-Myc seul, mais dans des souris mutantes pour Tp53, confirmant la nécessité de bloquer l’apoptose simultanément à l’induction de c-Myc pour former des tumeurs (Fults, 2005; Jenkins et al., 2016). Ce modèle est le premier modèle murin génétiquement modifié qui mime la formation de MB du groupe 3.

Figure 16: Les techniques permettant d'obtenir des modèles murins de médulloblastomes

Il existe deux types de modèles murins : les modèles de transplantation et les modèles de souris génétiquement modifiées. Adapté de Neumann et al. (2017).

La génération de modèles génétiquement modifiés constitue un progrès majeur pour la compréhension des mécanismes impliqués dans la tumorigenèse et la production de nouveaux traitements. Par le passé, l’analyse de ces modèles a apporté des réponses précieuses sur le

fonctionnement de certains groupes de MB. En effet, jusqu'à très récemment, seuls les groupes WNT et SHH possédaient des modèles murins génétiquement modifiés mimant la formation de ces MB. Le groupe WNT, contrairement au groupe SHH, ne possède qu’un modèle généré par Gibson en al. en 2010 (Gibson et al., 2010). Cependant ce modèle a révolutionné notre compréhension des MB WNT. D’abord, il a permis de définir les cellules d’origines de ce groupe (les précurseurs de la lèvre rhombique inférieure) puis, plus tard ce même modèle a révélé que les vaisseaux sanguins des MB WNT présentaient une perméabilité anormale induisant l’accumulation des drogues thérapeutiques à l’intérieur des tumeurs. C’est sans doute pour cela que les patients atteints de ces tumeurs répondent le mieux aux thérapies et présentent le meilleur pronostic (Gibson et al., 2010; Phoenix et al., 2016).

Dans le cas des MB SHH, il existe plusieurs modèles de souris génétiquement modifiées mais la plupart consistent soit en la mutation du récepteur Ptch1, soit en l’expression d’une forme dominante active de Smo, qui conduisent à l’activation constitutive de la voie Shh dans les cellules où la modification est présente. Ce dernier modèle a permis de définir les cellules d’origine des MB SHH comme étant les précurseurs des cellules granulaires du cervelet et du noyau cochléaire (Grammel et al., 2012). De plus, les modèles Shh ont également permis le développement d’essais de drogues thérapeutiques visant à inhiber la voie de signalisation Shh. Pour certains patients atteints de MB SHH, ces drogues ont déjà donné des résultats extrêmement favorables (Rudin et al., 2009; Robinson et al., 2015).

Pour les MB des groupes 3 et 4, les connaissances sont beaucoup plus restreintes. Pour le groupe 4, notre connaissance rudimentaire limite fortement la génération d’un modèle spécifique, pourtant indispensable pour mieux comprendre ces MB. Dans le cas du groupe 3, il existe, en plus des modèles de transplantation, depuis 2016, le modèle de souris génétiquement modifiée publié par Jenkins et al., faisant intervenir le système RCAS/tv-a (Jenkins et al., 2016). Même si ce modèle a apporté de nombreuses réponses sur le fonctionnement des MB du groupe, l’utilisation du promoteur de la Nestine pour diriger la surexpression de l’oncogène c-Myc ne permet pas de conclure quant à la cellule d’origine des MB du groupe 3.

Les médulloblastomes sont les tumeurs cérébrales les plus fréquentes chez l’enfant. Elles se développent à partir du cervelet ou des structures adjacentes. Les avancées récentes dans la compréhension de ces tumeurs ont permis de les stratifier en 4 groupes distincts qui possèdent des caractéristiques épidémiologiques et moléculaires différents. Pour la majorité de ces

la maladie ainsi que pour une identification des événements qui transforment les cellules d’origine, ces modèles doivent être multipliés et améliorés en particulier pour les groupes 3 et 4 qui sont les MB les plus fréquents, les plus agressifs et pour lesquels on manque cruellement d’informations. Ces deux groupes partagent l’amplification génomique du facteur de transcription Otx2. Ce dernier est par ailleurs anormalement surexprimé dans 75% des MB. L’étude du rôle d’Otx2 dans les MB et son utilisation dans la génération de nouveaux modèles semble donc indispensable.