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CHAPITRE II : MATERIAUX ETUDIES ET METHODES DE CALCUL

III.2. M ODELISATION DES MICROSTRUCTURES POLYCRISTALLINES

III.2.1. Modélisation 2D

III.2.1.2. Modèle 2D de la microstructure équiaxe

Comme nous avons mentionné dans la section III.2 plusieurs éléments sont nécessaires pour obtenir un modèle 2D de la microstructure isotrope avec des grains équiaxes. La procédure repose sur la représentation géométrique et morphologique des grains équiaxes par les cellules de Voronoï 2D ainsi que la définition de leurs propriétés cristallographiques et élastiques.

a) Description géométrique et morphologique

Les diagrammes de type «Poisson Voronoï» [80-87], adaptés à la création de structure morphologiquement isotrope, ont été utilisés dans le cadre de cette thèse. Une tessellation de Poisson-Voronoï 2D est fondée sur un tirage aléatoire de la position des germes dans l’espace 2D (tirage dit «de Poisson»). L'algorithme de Poisson décompose ensuite l'espace d'origine en un ensemble des cellules sous forme des polygones convexes. En pratique, l’algorithme permettant de créer les diagrammes de Poisson-Voronoï 2D [4, 44, 80-82] nécessite en paramètre d’entrée une grandeur 𝑑𝐺 homogène à une distance qui définit la densité effective de germes 𝜌𝐺 (en germes par unités de surface) utilisées pour construire le diagramme, avec :

𝜌𝑖𝐺 = 1

(𝑑𝑖𝐺)2 , 𝑖 ∈ [1 ; 𝑁] (III.20)

où 𝑖 est l’indice de différentes cellules de Voronoï générées dans la tessellation 2D.

La Figure III-5 présente un modèle 2D de microstructure équiaxe obtenu par un tirage de Poisson-Voronoï 2D avec une grandeur 𝑑𝐺 de 1000 μm.

Figure III-5 : Génération du modèle 2D de la microstructure isotrope avec des grains équiaxes basé sur le calcul des diagrammes de Poisson Voronoï 2D. Les dimensions de la microstructure créée sont 30 × 30 𝑚𝑚2 et la taille moyenne 𝑑𝐺 de 843 grains est de l’ordre de 1000 μm.

b) Taille moyenne de grains équiaxes

La grandeur 𝑑𝐺 définissant la densité de graines génératrices peut être considérée comme une équivalence de la taille moyenne ou du diamètre moyen de grains. Néanmoins, la relation entre ces deux paramètres n’est pas directe, il existe un écart entre la taille moyenne voulue de grains (souhaitée) 𝑑𝑉𝑜𝑢 et la taille moyenne obtenue de grains (réelle) 𝑑𝑂𝑏𝑡. Pour cette raison, une comparaison entre la taille moyenne de grains 𝑑𝑉𝑜𝑢 et celle-ci obtenue 𝑑𝑂𝑏𝑡 est présentée dans ce paragraphe. Nous notons que le diamètre moyen obtenu de grains peut être calculé approximativement en se basant sur les surfaces 𝐴𝑉𝑜𝑟𝑖 des cellules de Voronoï générées dans la tessellation 2D :

𝑑𝑂𝑏𝑡≈ 〈√𝐴𝑉𝑜𝑟𝑖 〉 (III.21)

où 𝑖 = [1: 𝑁] est l’indice de différentes des cellules de Voronoï générées dans la tessellation 2D. Pour évaluer le comportement de la distribution de grains obtenue, nous choisissons de standardiser les distributions étudiées, c’est-à-dire normaliser la variable aléatoire 𝑑𝑂𝑏𝑡. Le but de cette standardisation est de créer une nouvelle variable 𝑑𝑆𝑡𝑎𝑛𝑑 appelée «variable standard» ou encore «variable centrée réduite» dont nous connaissons mieux sa distribution. En statistique, cette transformation consiste à ramener la distribution ciblée à une distribution standardisée caractérisée par une moyenne nulle et un écart-type unitaire. Cela consiste simplement en un changement d’origine, qui place la moyenne de la distribution au point 0 de l’axe des abscisses.

𝑑𝑆𝑡𝑎𝑛𝑑 = 𝑑

𝑂𝑏𝑡− 𝑑𝑂𝑏𝑡

√𝑣𝑎𝑟(𝑑𝑂𝑏𝑡) (III.22)

où 𝑑𝑂𝑏𝑡 désigne les valeurs de diamètres réels de grains qui sont obtenues du tirage de Poisson-Voronoï, 𝑑𝑂𝑏𝑡 est la valeur moyenne de diamètres obtenus de grains et 𝑣𝑎𝑟(𝑑𝑂𝑏𝑡) désigne la variance des valeurs des diamètres réels.

Le calcul du rapport de standardisation 𝑅𝑑𝑆𝑡𝑎𝑛𝑑= 𝑑𝑂𝑏𝑡⁄√𝑣𝑎𝑟(𝑑𝑂𝑏𝑡) (sans dimension) pour différentes valeurs des tailles des grains nous permet d’examiner la sensibilité des distributions des grains obtenues par les tirages de Poisson-Voronoï 2D à ces tailles des grains ciblées. Les propriétés de la distribution aléatoire de grains obtenues des tirages de Poisson-Voronoï 2D [80-87] calculés pour différentes valeurs des tailles moyennes 𝑑𝑉𝑜𝑢 : 300 μm, 500 μm, 800 μm et 1000 μm sont comparées sur la Figure III-6. Ces tirages sont effectués pour un domaine 2D de surface 20 × 20 𝑚𝑚2, ce qui permet d’obtenir des données statistiquement représentatives. La comparaison des tailles souhaitées et obtenues est détaillée dans le Tableau III-1. Sur la Figure III-7.a, nous traçons les distributions réelles ajustées par estimation par noyau(1) [106]. Les distributions standardisées de diamètres réels sont aussi exposées sur la Figure III-7.b.

𝑎) 𝑑 = 300 𝜇𝑚 b) 𝑑 = 500 𝜇𝑚

𝑐) 𝑑 = 800 𝜇m 𝑑) 𝑑 = 1000 𝜇𝑚

Figure III-6 : Modèles 2D des microstructures équiaxes de dimensions 20 × 20 𝑚𝑚2 pour différentes tailles moyennes de grains : 𝑎) 𝑑 = 300 𝜇𝑚, 𝑏) 𝑑 = 500 𝜇𝑚, 𝑐) 𝑑 = 800 𝜇𝑚 et 𝑑) 𝑑 = 1000 𝜇𝑚.

(1) En statistique, l’estimation par noyau ou méthode de Parzen-Rosenblatt [106] fournit une représentation non paramétrique de la fonction de densité de probabilité d'une variable aléatoire.

a) b)

Figure III-7 : Distributions de diamètres de grains obtenues des microstructures équiaxes générées par les diagrammes de Poisson-Voronoï 2D. a) Distributions de diamètres de grains obtenues par l’estimation à noyau (𝑑𝑂𝑏𝑡) et b) Distributions de diamètres standards de grains (𝑑𝑆𝑡𝑎𝑛𝑑).

Tableau III-1 : Données statistiques des modèles 2D des microstructures équiaxes obtenus par les calculs des diagrammes de Poisson-Voronoï 2D. Taille moyenne voulue 𝑑𝑉𝑜𝑢 (μm) Nombre de grains 𝑁𝐺 Taille moyenne obtenue 𝑑𝑂𝑏𝑡 (μm) Taille minimale obtenue 𝑑𝑚𝑖𝑛𝑂𝑏𝑡 (μm) Taille maximale obtenue 𝑑𝑚𝑎𝑥𝑂𝑏𝑡 (μm) Écart-type obtenu 𝛴𝑑𝑂𝑏𝑡 (μm) Rapport de standardisation 𝑅𝑑𝑆𝑡𝑎𝑛𝑑 = 𝑑 𝑂𝑏𝑡 √𝑣𝑎𝑟(𝑑𝑂𝑏𝑡)) Écart relatif entre les tailles voulues et obtenues (%) 300 10037 289 54 620 80 3,63 3,7 500 3603 482 93 1025 134 3,60 3,6 800 1448 760 234 1800 210 3,61 5 1000 899 965 242 1955 268 3,59 3,5

En observant la Figure III-7.a, nous constatons que les distributions des tailles de grains obtenues sont réparties autour des valeurs des tailles moyennes de grains souhaitées : 300 μm, 500 μm, 800 μm et 1000 μm. Ces observations sont confirmées par le Tableau III-1. Ce dernier montre que les valeurs de diamètres moyens réels 𝑑𝑂𝑏𝑡 sont proches des valeurs avec des écarts respectivement de l’ordre de 3,7%, 3,6%, 5% et 3,5%. Par ailleurs, dans les différents cas, le plus gros grain est caractérisé par une taille maximale d’environ deux fois plus grande que la taille moyenne. Nous remarquons aussi que la largeur de la distribution des tailles générée (écart-type) est proportionnelle à la taille de grains voulue. En effet, la plus large distribution des tailles de grains correspond à la plus grande taille 1000 μm et la plus étroite distribution correspond à la plus petite taille 300 μm. Il aussi important de noter que les différentes distributions de Poisson-Voronoï 2D [4, 44, 80-82] ne sont pas parfaitement symétriques. Nous constatons donc une légère asymétrie de différentes distributions avec une pente plus raide vers la droite.

Ces observations sont très cohérentes avec les résultats de Marthinsen [82]. En effet, l’auteur a montré que la distribution de Poisson-Voronoï 2D dispose d’un certain degré d’asymétrie. Marthinsen [82] a montré aussi que la distribution de Poisson-Voronoï ne peut pas être approximé ou ajustée par des autres distributions de type log-normale ou gamma, ect…. L’asymétrie de la distribution de Poisson-Voronoï 2D est confirmée par la Figure III-7.b. Sur cette figure, il apparaît que les différentes

distributions standardisées sont très similaires quelle que soit la taille moyenne voulue de grains. Ces résultats sont justifiés par les valeurs du rapport de standardisation du diamètre de grains 𝑅𝑑𝑆𝑡𝑎𝑛𝑑 pour les différentes cas. Le Tableau III-1 montre que ce rapport reste stable avec une valeur de l’ordre de 3,6. Ce qui montre que la distribution de Poisson-Voronoï 2D n’est pas sensible au nombre de grains et à la taille de grains.

Une comparaison détaillée de distributions obtenues avec les diagrammes de Poisson-Voronoï 2D et les distributions observées expérimentalement est proposée dans la section III.4.1.

c) Propriétés cristallographiques et élastiques

Les observations expérimentales du paragraphe II.1.5.2 ont montré que l’alliage à base Ni étudié peut être considéré comme macroscopiquement isotrope, du point de vue morphologique et cristallographique. C’est pourquoi, une fois que l'espace 2D est partitionné en un ensemble des cellules Voronoï représentant les grains équiaxes, une orientation cristallographique aléatoire doit être attribuée à chaque grain dans le but de reproduire le comportement macroscopiquement isotrope du matériau. Les orientations de grains peuvent être déterminées grâce aux angles d’Euler. La représentation de ces angles est définie par deux repères : un repère fixe appelé «repère d’échantillon» (𝑥𝑠, 𝑦𝑠, 𝑧𝑠) et un repère tournant appelé «repère du cristal» (𝑥𝑐, 𝑦𝑐, 𝑧𝑐). Dans notre étude, les orientations cristallographiques sont déterminées par les trois angles d’Euler (𝜑, 𝜃, 𝜓) dans la formulation de Roe [107, 108]. Selon cette convention, les trois angles d’Euler définissent trois rotations successives respectivement autour les axes 𝑧𝑐, 𝑦𝑐 et 𝑧𝑐′′ (voir Annexe H).

Les propriétés élastiques de chaque monocristal sont dérivées du tenseur d’élasticité du monocristal 𝐶𝑖𝑗𝑀𝑜𝑛𝑜𝑐𝑟𝑖𝑠𝑡𝑎𝑙 aligné dans le repère d’échantillon. Les constantes du tenseur d’élasticité du monocristal de l’Inconel600 sont décrites dans le Tableau I-2. Les rotations aléatoires des constantes du tenseur 𝐶𝑖𝑗𝑀𝑜𝑛𝑜𝑐𝑟𝑖𝑠𝑡𝑎𝑙 selon les angles 𝜑, 𝜃 et 𝜓 donnent lieu à un nouveau tenseur 𝐶𝑖𝑗𝑀𝑜𝑛𝑜𝑐𝑟𝑖𝑠𝑡𝑎𝑙′

contenant 21 constantes d’élasticité.

Pour reproduire pratiquement à l’échelle macroscopique le comportement isotrope du matériau polycristallin à symétrie cubique, le même tenseur élastique caractérisant les propriétés élastiques du monocristal 𝐶𝑖𝑗𝑀𝑜𝑛𝑜𝑐𝑟𝑖𝑠𝑡𝑎𝑙 est affectée à tous les grains. Ensuite, des orientations aléatoires de grains équiaxes sont attribués à chaque grain. Pour cela, les angles d’Euler 𝜑 et 𝜓 sont définis par une distribution uniforme entre –π et π alors que pour l’angle θ, c’est son cosinus qui doit suivre une distribution uniforme [4] entre -1 et 1. La loi de tirage si dessous assure de générer une distribution spatialement isotrope des orientations cristallographiques :

𝜑 = 𝑟𝑎𝑛𝑑𝑜𝑚[−𝜋, 𝜋] 𝜃 = 𝑎𝑟𝑐𝑜𝑠(𝑟𝑎𝑛𝑑𝑜𝑚[−1, 1])

𝜓 = 𝑟𝑎𝑛𝑑𝑜𝑚[−𝜋, 𝜋]

(III.23)

Figure III-8 : Figures de pôles {001}, {011} et {111} (dans la convention de Roe [107, 108]) suite à 1623 tirages d’angles d’Euler selon la relation (III.23).

La représentation de la fonction de distribution des orientations (ODF) permet de caractériser les propriétés cristallographiques de la microstructure générée à partir d’un tirage de Voronoï 2D. Dans cette optique, nous représentons alors les figures de pôles dans les plans {001}, {011} et {111} pour 1623 grains de taille moyenne de 775 μm. La Figure III-8 présente les figures de pôles obtenues avec un tirage uniforme d’orientations spatiales respectant la loi (III.23).

La précaution sur le tirage de l’angle θ permet bien d’obtenir une distribution isotrope des orientations cristallographique conformément aux observations expérimentales présentées dans la section II.1.5.2. Ces résultats montrent que la procédure de la modélisation 2D basée sur le calcul de diagrammes de Poisson-Voronoï [80-87] est capable de créer une microstructure artificielle du matériau macroscopiquement isotrope et homogène qui est similaire à la microstructure réelle caractérisée par les analyses EBSD présentées dans le paragraphe II.1.5.1.