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MICROVASCULARISATION TUMORALE

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Angiogenèse tumorale

Bien qu'il n'entre pas dans le propos de ce travail d'étudier le déterminisme primaire de l'angiogenèse tumo­ rale, il convient de résumer brièvement les résultats obtenus par ailleurs dans ce domaine. Un article donne une idée synthétique de la question (122) .

Ide et coll. (65), en 1939 déjà,suggèrent l'existence d'une stimulation humorale de la prolifération vasculaire, sous la dépendance du tissu tumoral.

Algire et Chalkey (2) observent une prolifération de néo­ capillaires autour de tumeurs de la souris, développées en auto-greffes dans une chambre transparente placée sous la peau.

Greenblat et Shubik (58) observent le même phénomène autour d'un fragment de mélanome du hamster,séparé du tissu receveur muqueux de la face interne de la poche jugale du même animal, par une membrane millipore .

Ehrmann et Knoth (42) reprenant le même modèle expérimental (greffe isolée dans la poche jugale du hamster), mais utili­ sant des fragments de choriocarcinomes humains, étudient le phénomène au microscope électronique. Les cellules néoplasi­ ques envoient des prolongements cellulaires dans les pores de la membrane, mais on n'observe pas de contact entre ces prolongements et les cellules du tissu hôte.

L'équipe de Folkman (49), en 1971, étend l'expérience à d'autres tumeurs avec les mêmes résultats.

Les capillaires néoformés présentent les caractères d'un endothélium en régénération avec de nombreuses mitoses

(124, 127). Des fractions d'extraits tissulaires tumoraux, doués d'une activité angiogène, sont isolés par chromatographie.

Ces extraits sont dénommés T.A.F. (tumour angiogenesis factor). Ils sont composés d'acides ribonucléiques de protéines et d'hydrates de carbone.

D'autre part, ces auteurs concluent à une dépendance de la vitesse de croissance des cellules tumorales vis-à-vis de

la prolifération des cellules endothéliales. Jusqu'à un diamètre de 2 à 3 mm., la colonie tumorale croît lentement et les échanges se font par diffusion. La croissance ul­ térieure, plus rapide, se fait à la faveur de l'établisse­ ment du réseau capillaire tumoral,qui provient d'un

envahissement de la tumeur par ceux, adjacents, de l'hôte, en réponse à une stimulation par le T.A.F.

En 1972, la même équipe (50) apporte une démonstration supplémentaire (de la validité des thèses avancées) par la comparaison du développement d'implants tumoraux sur l'iris, richement vascularisé, et d'autres, placés dans la région centro-cornéenne. Les premiers se vascularisent de façon précoce et grandissent (volumétriquement) très rapidement, les seconds restent "dormants".

Des expériences de marquage à la thymidine (29, 30) montrent une captation par les cellules endothéliales, débutant

8 heures après l'implantation tumorale. La suppression du

T.A.F. entraîne la régression des capillaires néoformés.

Le rôle du T.A.F. dans l'angiogenèse tumorale est dès lors incontesté, mais certains auteurs suggèrent la nécessité

d'un contact direct entre les cellules tumorales et les cel­ lules endothéliales capillaires pour la stimulation de

l'angiogenèse (124).

Gimbrone (52, 53, 54), lors d'implants de tumeur homologue dans la chambre antérieure de l'oeil du lapin, observe une réponse vaso-proliférative à la surface de l'iris, à distance de l'implant tumoral.

98.

Toujours selon Folkman et coll., lorsqu'une tumeur vascula­ risée est greffée, on ne perçoit jamais de prolifération de ses vaisseaux vers l'extérieur, mais elle est colonisée par des vaisseaux venus des régions adjacentes (90). La péné­ tration de la tumeur par les vaisseaux est suivie d'une augmentation localisée et rapide du volume tumoral dans la région correspondante.

Rubin et Casarrett (86) comparent les données micro­ angiographiques à l'aspect histologique de deux types de tumeurs expérimentales transplantables chez le rat : le carcino-sarcome de Walker (tumeur mammaire) et le lympho­ sarcome de Murphy, induit chez le rat Wistar par l'injection de dibenzanthracène. Ils observent que le type de vascula­ risation est indépendant du caractère histologique de la tumeur. Trois types de vascularisation sont décrits :

- vascularisation périphérique sans pénétration de vaisseaux dans la tumeur. Les cellules tumorales sont alors nourries par diffusion. Selon Rubin, ce type de vascularisation se rencontrerait dans certaines tumeurs épithéliales disposées en cordons, dont l'épaisseur ne pourrait alors dépasser

200 pm sous peine d'entraîner une nécrose.

- vascularisation périphérique avec pénétration de vaisseaux, où un véritable anneau macrovasculaire se forme autour de la tumeur avec pénétration centripète de fines artérioles qui sont incorporées au cours de la croissance tumorale et débouchent dans un réseau de néocapillaires.

- vascularisation de type central, où des vaisseaux d'assez large calibre pénètrent dans la tumeur et s'y divisent, réalisant une sorte de hile vasculaire.

EXPERIENCES PERSONNELLES

Etude microangiographique des tumeurs expérimentales

L'étude microangiographique, selon les méthodes décrites au chapitre I, de 40 épithéliomas rénaux développés chez la souris et le rat, d'un diamètre variant entre 200 um et

1,2 cm., a permis les constatations suivantes.

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A l'extrême début de leur développement, les tumeurs ne sont pas vascularisées et refoulent par leur masse la microcirculation adjacente. Au départ, l'aspect vasculaire est donc comparable à celui observé dans les petites formations kystiques (fig. 44). L'histologie n'est pas indispensable

au diagnostic différentiel, car en microangiographie, les tumeurs apparaissent comme des plages avasculaires oblongues alors que les formations kystiques sont sphériques (fig. 45,46).

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Le stade suivant est représenté par une pénétration de capillaires à partir de la périphérie de la tumeur.

Chez la souris, lorsque les tumeurs se développent aux dépens de l'épithélium tubulaire, en cordons pleins, sans stade

kystique intermédiaire, les capillaires peuvent être détectés très précocément.

Lors de la prolifération tumorale papilliforme à l'intérieur d'un kyste, l'amas qui se forme aux dépens de l'épithélium

du kyste est d'abord avasculaire. On assiste ensuite à son invagination vers la lumière kystique, entraînant du con­ jonctif et, notamment, un capillaire axial (cf. fig. 30).

Ces "néocapillaires" sont constitués d'un endothélium soit directement adossé aux cellules tumorales, soit séparé de celles-ci par du tissu conjonctif (cf. fig. 30).

100.

Fig. 45. Souris même race que fig. 44, autre animal. Micro­ angiographie sur coupe à congélation de 200 ^um d'épaisseur. Agrandissement ; x 30. Plage avasculaire strictement arrondie, refoulant régulièrement les microvaisseaux adjacents :

formation kystique bénigne.

Fig. 46. Souris même race, autre animal. Mêmes conditions que fig. 45. Formation kystique de plus grande taille, avec

En microangiographie, on voit progresser vers le centre du kyste un puis plusieurs réseaux de forme allongée, formés de fins vaisseaux anastomotiques (fig. 47).

Les capillaires formés de novo dans la tumeur, à partir de la périphérie, représentent au sens strict du terme la

"néovascularisation". On voit que cette notion ne recouvre nullement le sens radiologique, angiographique du terme

(cf. chap. IV) qui désigne la totalité des macrovaisseaux refoulés ou remaniés par la tumeur, c'est-à-dire, en fait, préexistants à la néoplasie.

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Les capillaires provenant de façon concomitante de la périphérie s'anastomosent entre eux (fig. 48). Lorsque la totalité de la tumeur est colonisée, sa vascularisation se présente sous la forme d'un réseau à mailles irrégulières, constitué de capillaires d'un diamètre inégal et excédant nettement celui des capillaires du réseau normal adjacent

(fig. 49). Ce réseau des néocapillaires est d'abord connecté uniquement aux capillaires normaux voisins.

Au cours de la croissance tumorale, des artérioles et des veinules, puis des artères et des veines de calibre plus impor­ tant sont refoulées, puis captées par la tumeur (fig. 50).

Les connexions entre le réseau capillaire et les macro­ vaisseaux sont, pour les tumeurs de petite taille, toujours périphériques, et pour les tumeurs de grande taille, prépondé­ rantes à la périphérie. Ces connexions s'effectuent "au hasard", d'oü l'existence de court -circuits artério-veineux.

102.

Fig. 47. Souris même race. Mêmes conditions que fig. 46. Progression d'un réseau capillaire en forme de languette, de la périphérie vers le centre : colonisation cellulaire néoplasique du kyste, avec sa vascularisation.

Fig. 48. Anastomose des réseaux néocapillaires par jonction des travées cellulaires.

Fig. 49. Souris même race. Mêmes conditions que fig. 48. Réseau capillaire tumoral constitué ; mailles de disposition irrégulière, composées de capillaires d'un diamètre irrégulier mais excédant celui des capillaires normaux adjacents.

Fig. 50. Une tumeur solide de plus grand diamètre refoule les vaisseaux de moyen calibre rencontrés, et en capte certains qui débouchent directement dans le réseau capillaire (flèche).

Fig. 51. Mêmes conditions que fig. précédente, mais agrandissement x 20. La coupe qui intéresse la totalité de la surface rénale fait apparaître la coexistence de différents stades de développement des tumeurs : 3 formations tumorales pleines (T); 2 kystes bénins

(K); 1 kyste en voie d'invasion par les formations papillifères (P).

1

0

Chez la souris, les différents stades de développement peuvent coexister dans un même rein (fig. 51).

Chez le rat, les tumeurs d'aspect non épithélial se

présentent comme des plages de raréfaction de la circulation (fig. 52).

Les tumeurs à caractère épithélial présentent une vasculari­ sation comparable à celle précédemment décrite, mais il existe parfois des espaces amorphes dans lesquels le produit de

contraste vient s'accumuler (fig. 53).

Microcirculation de tumeurs de grande taille (microangiographie des tumeurs humaines)

Le matériel déjà décrit au chapitre IV, concerne des tumeurs rénales découvertes cliniquement et opérées, qui sont en

général de grande taille (plus de 5 cm. de diamètre en moyenne), si bien qu'on ne peut décrire qu'un stade d'état (cf. fig. 54).

Les caractères élémentaires de la microcirculation - c'est- à-dire, essentiellement des capillaires - sont identiques à ceux évoqués pour les tumeurs expérimentales.

Ces tumeurs prennent toutefois un aspect "nodulaire" où

chaque unité est nourrie par un vaisseau de calibre plus im.por-

tant, venu de la périphérie. Les régions inter­

nodulaires apparaissent délimitées "au hasard" par des zones de nécrose et de fibrose.

Il s'agit là en quelque sorte d'"unités vasculaires fonctionnel­ les" de la tumeur (fig. n° 55).

Les vaisseaux de calibre plus important sont peu nombreux à l'intérieur de la tumeur, ce qui contraste avec la richesse du réseau péritumoral(fig. 56).

Fig. 52. Rats Wistar traités au D.M.N. Microangiographie sur coupe de 300 um d'épaisseur. Agrandissement : x 18. La zone tumorale apparaît comme une région de raréfaction vasculaire avec quelques minimes irrégularités capillaires dans la région centrale.

Fig. 53. Mêmes conditions que fig. 52. La tumeur est ici vascularisée par un réseau irrégulier de néocapillaires. Existence d'un espace amorphe à contour irrégulier dans lequel le produit de contraste s'accumule.

slicer de 0,5 mm. d'épaisseur. Agrandissement : x 10. Du haut vers le bas, on distingue trois zone : le rein normal avec arrangement régulier des artères sub-arquées et des artérioles afférentes ; la zone péritumorale avec entassement de vaisseaux de calibre important ; la région intratumorale avec son riche réseau de néocapillaires.

Fig. 55. Idem que fig. précédente mais agrandissement x 20. Le réseau capillaire tumoral paraît formé d'unités sous la dépendance d'un vaisseau de calibre plus important,

présentant peu d'anastomoses avec les unités adjacentes.

Dig. 56. Mêmes spécimen et conditions que fig. 55. Détail de la région péritumorale : entassement anarchique de vaisseaux de calibre important.

Le réseau capillaire dense, formé de vaisseaux d'un diamètre supérieur à celui de leurs homologues du parenchyme rénal

adjacent, s'opacifie de façon intense en microangiographie. La radiographie de l'organe in toto ou en coupes épaisses ne révèle alors qu'une image opaque globale,et il faut des coupes minces pour individualiser les capillaires eux-mêmes.

La confrontation de ces observations à l'angiographie in vivo ayant présidé au diagnostic clinique de ces tumeurs, indique que la superposition du riche réseau de capillaires néoplasiques dilatés, est à l'origine des images d'opacité intense et

indistincte décrites par certains auteurs et attribuées à l'existence de soi-disant "lacs veineux".

C'est encore l'opacification de ces réseaux qui est responsable de l'apparition précoce d'images irrégulièrement contrastées

("tumour blush"), et d'une stagnation du produit de contraste angiographique dans la tumeur après la phase veineuse ("tumour stain").

Le caractère hétérogène de ces images d'angiographie in vivo est imputable à l'alternance en superpositions irrégulières de plages de capillaires et de régions de nécrose tum.orale.

110.

La microcirculation des txuneurs rénales est une néovascu­ larisation au sens strict du terme, c'est-à-dire, qu'elle représente une prolifération capillaire endotumorale de novo, et non simplement l'incorporation des capillaires du tissu hôte.

Ces capillaires sont dérivés du réseau vasculaire adjacent à la tumeur, la prolifération des vaisseaux se réalisant

de la périphérie vers le centre.

Ces "sinusoïdes" tumorales s'avèrent différentes dans leur structure des capillaires normaux dont eOdes proviennent : leur lumière est plus large, et présente des irrégularités de calibre.

La vascularisation capillaire tumorale présente un caractère d'arborisation et de disposition caractéristique de l'archi­ tecture cellulaire de la tumeur elle-même, c'est-à-dire de son type histologique.

Par contre, la vascularisation péritumorale et le mode de pénétration des macrovaisseaux dans la masse de la tumeur dépendent surtout de la région hôte, à savoir de l'ambiance vasculaire rencontrée au cours de la croissance.

CHAPITRE VI. : NECROSE SPONTANEE DES TUMEURS RENALES

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