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Carte 6. Aire du groupe kongo H10 en République du Congo Collectif (1987 : carte 5)

1. Les marqueurs du verbe conjugué Le verbe conjugué est constitué :

— du marqueurs du sujet ;

— du marqueur objet ; — du marqueur du relatif ;

— de la base verbale (radical verbal et extensions) ;

1 Nous y reviendrons.

(1) Baalá baá ba bábote bena.

ba-ála ba-á ba-a ba-bóte ba-en-a

CL2-enfant ACL2-PROX ACL2-REP.ANAPH ACL2-bon ACL2-être-MN

m. à m. « Les enfants les ci ils [les ci] ils [les ci] gentils ils [les enfants-ci] sont. »

« Ces enfants sont gentils. »

(2) Mití mií mya míbote myena.

mi-cí mi-í mi-a mi-bote mi-yen-a CL3-arbres ACL3-PROX ACL3-REP.ANAPH ACL3-bons ACL3-être-MN

m. à m. « Les arbres les arbres-ci ils [les arbres-ci] ils [les arbres-ci] bons ils [les arbres-ci] sont. » « Ces arbres sont bons »

52 — et du marqueur de la modalité.

a. Les marqueurs du sujet

Les marqueurs du sujet sont incorporés dans le verbe conjugué. Les pronoms singuliers font partie de la classe 1, ceux du pluriel, de la classe 2. Les deux classes renvoient aux humains. (3a) Diirí. Ø-Ø-di-il-i MS1-RSLT-manger-APPL-R m. à m. « Tu as mangé. » « Tu as mangé. »

En (3a), le sujet est repris par le marqueur Ø- qui indique la deuxième personne du singulier. Le ton différencie la deuxième personne du singulier, en (3a), de la troisième personne du singulier, en (3a). Ces deux marqueurs se ressemblent uniquement à certains tiroirs. Les autres marqueurs du sujet apparaissent sous la même forme dans tous les contextes. Les marqueurs de la deuxième et de la troisième personne du singulier varient suivant le tiroir de la conjugaison et suivant que le verbe, avec lequel ils sont employés, est focalisé ou non.

Tableau 6. Les marqueurs du sujet

Le tableau 7 présente la distribution des marqueurs de la troisième personne dont nous avons parlé.

Tableau 7. Distribution des marqueurs de la 2ème et 3ème personne du singulier

(3b) Díiri. Ø-Ø-di-il-i

MS1-RSLT-manger-APPL-R m. à m. « Il a mangé. » « Il a mangé. »

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Dans les énoncés non focalisés, le morphe Ø est utilisé comme marqueur de la deuxième et de la troisième personne du singulier, à la forme progressive et au résultatif. Dans les énoncés focalisés, celui de la deuxième personne reste le morphe Ø tandis que celui de la troisième personne est ka-. Le marqueur de la deuxième personne des énoncés non focalisés, au passé lointain et récent ainsi qu’au subjonctif est wu-, celui de la troisième personne est ka-. Il en de même dans les énoncés focalisés. Le morphe Ø est utilisé au « futur », dans les énoncés non focalisés, comme marqueur de la deuxième personne. Celui de la troisième personne est ka- ; il en est de même dans les énoncés focalisés.

Les marqueurs du sujet, de la deuxième et de la troisième personne du singulier, des verbes à la forme progressive et au résultatif changent de la même manière. Ceux des verbes au passé lointain, et récent, et au subjonctif varient aussi de manière identique. Les marqueurs des verbes conjugué au « futur » affichent une variation qui leur est particulière dans les énoncés focalisés et non focalisés.

54 b. Les marqueurs objet

Les marqueurs objet1 sont incorporés dans le verbe conjugué ou préfixé au verbe à l’infinitif. Ils sont au singulier et au pluriel, à la première, deuxième et troisième personne. Ils sont considérés comme faisant partie des classes 1, pour les pronoms au singulier, et 2 pour les pronoms au pluriel, puisqu’ils déterminent des humains.

(4a) Musamú waá kamuteélelé.

mu-sámu wu-a ka-Ø-mu-ta-il-il-i

CL3-problème ACL3-REP.ANAPH MS1-RSLT-MO1-dire-APPL-APPL-R m. à m. « Le problème il [le problème] il lui a dit. »

« Il lui a [fait part] du problème. »

Le terme « complément d’objet indirect » ne se prête pas aux réalités du kikongo (lari) puisque la base verbale -ta- « dire » (cl 15) ne se traduit pas par « dire à » (cl 15).

On voit ici comment le fait de se contenter de la traduction peut être un leurre ; d’où l’importance de la démarche que nous adoptons Or si l’on part de la valeur notionnelle véhiculée par -ta-« dire » (cl 15), on se rend très vite compte qu’il détermine une relation prédicative dite « centrifuge »2 a r b où le terme a, représenté par le marqueur ka- du sujet, est la source du procès, le terme b représenté par le marqueur objet mu-, le but du procès. L’applicatif -il relie cette relation prédicative avec le terme b’, exprimé par l’objet musamú « le problème » (cl. 3), repris le pronom wu (cl. 3) dans l’anaphorique waá.

Tableau 8. Les marqueurs objet intra-verbaux

1 Nous reviendrons sur leur position dans le schéma qui résume les positions des marqueurs dans le module verba.

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D’autres marqueurs personnels objets sont également suffixés ; ils sont moins utilisés que les précédents.

Tableau 9. Les marqueurs objet finaux

c. Le marqueur du relatif

Le marqueur du relatif a la même forme que le classificateur nominal du sujet ou de l’objet de l’énoncé.

Le classificateur 7 dans cikáyenda « qu’il était parti » reprend la valeur déterminée par le classificateur nominal ci (cl. 7) dans lúmbu (cl. 7).

1 Extrait de Samba (Nom Propre), auteur : Jacques Loubelo ; vidéo déposée le 21 novembre 2012;https://www.youtube.com/results?search_query=jacques+loubelo+ya+samba.

(5) Lumbú cikáyenda bakeetó bádila.1

Ø-lúmbu ci-ka-á-yend-a ba-kéentó ba-á-dil-a

CL7-jour REL7-MS1-PASS-aller-MN CL2-femme ACL2-PASS-pleurer-MN m. à m. « Le jour [le jour] il partit les femmes elles [les femmes] pleurèrent. » « Le jour où [il mourût], les femmes pleurèrent. »

(6) Malaalá makadíiri ma mábote.

ma-láala ma-ka-Ø-di-il-i ma-a ma-bote CL6-orange REL6-MS1-RSLT-manger-APPL-R ACL6-REP.ANAPH ACL6-bon

m. à m. « Les oranges [les oranges] il a mangées elles [les oranges] elles [les oranges] bonnes. » « Les oranges qu’il a mangées sont bonnes. »

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Le terme « relatif » que nous utilisons, ne rend pas totalement compte de la reprise qui se manifeste clairement dans l’énoncé. En effet, on aurait pu tout aussi bien représenter l’abréviation REL par ACL comme c’est le cas avec l’anaphorique de reprise et l’adjectif. L’abréviation REL que nous retenons, souligne le rôle joué par ce marqueur dans la construction.

d. La base verbale (radical et extensions)

La base verbale est constituée du radical verbal et des extensions. Les extensions sont des occurrences de notions sémantiques et grammaticales qui concourent au formatage de la base verbale1. Elles marquent des qualités ou des états et entretiennent avec la base une affinité au niveau des propriétés qui implique aussi les arguments. Le kikongo (lari) compte neuf extensions verbales :

le statif --ik- ; le passif -u ; le duratif -am- ; le compressif -at- ; l’agrégatif -am- ; l’associatif -an- ; l’applicatif -il ; et le dissociatif -ul-. • Le statif -ik-

Le statif -ik- exprime l’altération d’une propriété en dehors de toute autre considération ; l’allusion à un fait est exclue. Seule la qualité acquise, le résultat qu’il exprime, est pris en compte. Le statif -ik- traduit le résultat d’un procès centrifuge, d’un état acquis ou d’une valeur inachevée. On le trouve dans les verbes tels que zibiká « fermer » (cl. 15), bamiká « induire » (cl. 15), yaniká « sécher » (cl. 15), etc.

(7) Firimika ndoongá yoó.2

Ø-filim-ik-á N-loongá yi-ó

IMP-retourner-STAT-NR CL9-assiette ACL9-DIST m. à m. « Retourne l’assiette l’assiette-là. »

« Retourne cette assiette-là. »

1 Nous renvoyons, à ce propos, à l’ouvrage d’Odile Racine (2015) sur les extensions en swahili, pour plus de détails.

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Le radical traduit l’idée de retourner. L’extension -ik-, dans firimika « retourne », détermine l’état final de l’objet ndoongá « assiette » (cl. 9), à la fin de ce procès, sans la moindre intervention.

• Le passif -u

Le passif fait référence à un évènement. L’état qu’il détermine est issu d’un procès initié par une source non précisée qui transforme le référent d’un terme b représenté par le marqueur du sujet. Le passif ne se réduit pas à une question de diathèse comme c’est le cas en français. Il est également utilisé pour exprimer un état intense ou le fait d’être dépassé par des évènements.

Le passif -u-, dans wayuku « qui s’est habitué » ne donne aucune indication sur la source du procès qui transforme le sujet mwaaná woó « ce jeune homme » (cl. 1). Celui-ci n’a aucune prise sur maseembó « malchance » (cl. 6) qui s’abat sur lui.

• Le duratif -am-

La présence du duratif indique que le référent du sujet acquiert un état, il se met dans une situation ou dans une position.

(9) Fukamá.2 Ø-fuk-am-á IMP-s’agenouiller-DURT-NR m. à m. « Agenouille-toi.» « À genou. »

1 Extrait de Lere lere « A chacune son heure » ; auteur : Michel Rafa et le ballet théâtre Lemba, vidéo déposée le 11 août 2013 ;: http//www : https://www.youtube.com/results?search_query=lere+lere

2 Extrait de Mariage Congolais de M. et Mme Ntsatou Nadège, vidéo déposée le 29 novembre 2013; htpps:www.youtube.com/watch?v=lyO2N2E5Br8.

(8) Mwaaná woó wayuku maseembó bu kalándá nzíla, yisukídi.1

mu-ána wu-ó wu-á-wuk-u ma-sembó bu CL1-enfant ACL1-DIST REL1-PASS-s’habituer-PSF CL6-malédiction CL14 ka-Ø-land-á N-zíla yi-Ø-suk-íl-i

MS1-FUT-suivre-NR CL9-chemin MS9-RSLT-s’arrêter-APPL-R

m. à m. « L’enfant l’enfant-là est habitué les malédictions abstrait il suivra le chemin, il [le chemin] s’arrête. »

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Le radical -fuk- traduit la notion de s’agenouiller ; l’extension -am- indique que le sujet, c’est-à-dire la deuxième personne à qui est donné l’ordre, devra être1 dans un état, dans une position.

• L’agrégatif -am-

L’agrégatif -am- détermine un état non achevé, un mouvement ou une attitude. L’extension indique que, quelle que soit la direction du procès, on a affaire à des procès compact ou à des processus de densification. Il est toujours question de figement, de blocage ou de posture massive.

(10) Nzó yikangámané.

N-zó yi-Ø-kaang-am-il-i

CL9-maison ACL9-RSLT-fermer-AGRG-APPL-R m. à m. « La maison elle [la maison] est fermée. » « La maison est fermée. »

L’extension -am- a une valeur qui marque l’absence de mouvement du sujet nzó « maison » (cl. 9).

• L’associatif -an-

L’associatif2 indique que le procès du verbe est multiple. Il sous-entend que le geste est répété au moins deux fois. Il a parfois une valeur intensive qui vient du fait qu’il détermine la démultiplication. Il est connu sous le nom de « suffixe du réciproque » à cause de la réciprocité qu’il dégage.

Exemple :

bwaaná « trouver » => bwabaná « se rencontrer » (cl. 15) moná « voir » => monaná « se voir » (cl. 15)

tsotsá « provoquer » => tsotsasaná « se provoquer mutuellement » (cl. 15) tuká « injurier » => tukasaná « s’injurier » mutuellement » (cl. 15) wisá « faire comprendre » => wisaná « s’entendre » (cl. 15)

etc.

1 Le procès n’est pas encore réalisé.

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(11) Batomónó zolosonó.

ba-tom-il-i1 Ø-zol-is-an-á

CL2-s’embellir-APPL-R CL15-aimer-CAUS-ASSOC-NR m. à m. « Ils sont embellis s’aimer. »

« Ils s’aiment beacoup. »

La notion du verbe zoló « aimer » (cl. 15) détermine une relation centripète qui sous-entend l’existence d’une source et d’un but du procès. Odile Racine trouve judicieux de parler de multiplicité2, plutôt que de réciprocité3, qui est plus englobant, car on ne pourrait justifier la réciprocité en (12) même si cela est possible en (11).

Il n’y a pas la moindre réciprocité dans wámwaangana « il se brisa ». Le sujet Moutampa se retrouve, lui-même, en plusieurs fragments au terme du procès.

• L’applicatif -il-

L’applicatif exprime plusieurs valeurs. On le trouve dans les verbes tels que :

taangá « lire » => taangilá « lire pour quelqu’un » (cl. 15)

« lire au moyen de quelque chose » (cl. 15)

boongá « prendre » => boongelá « prendre pour quelqu’un » (cl. 15)

« prendre au moyen de quelque chose » (cl. 15)

tsoneká « écrire » » => tsonekená « écrire pour quelqu’un » (cl. 15)

« écrire au moyen de quelque chose » (cl. 15)

Il est la trace d’un dédoublement du terme du procès.

1 La voyelle et la consonne de l’applicatif sont assimilées par la voyelle et la consonne du radical ; la voyelle finale l’est au contact de la voyelle assimilée de l’applicatif.

2 Cela est plus englobant ; c’est son invariant.

3 Il ne s’agit alors que d’une valeur contextuelle.

4 La première syllabe de Moutampa est assimilée à mu (cl. 3) ; d’où l’accord en cette classe.

(12) Moutampa wámwaangana.

Ø-Moutampa4 wu-á-mwaang-an-a

CL3-Moutampa ACL3-PASS-briser-ASSOC-MN m. à m. « Moutampa elle [Moutampa] se brisa. » « Moutampa se brisa. »

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Il peut avoir, selon les cas, une valeur contextuelle instrumentale ou locative. • Le compressif -at-

Le compressif détermine des relations centrifuges en véhiculant une notion de fermeté, de serrement, de compression ou d’absence de jeu.

(13) Kaá gaána bakúmataaká, kátáá zaabá ko.1

kaá ga-ána ba-kúm-at-aak-á ka-Ø-Ø-ta-á-a

mais CL16-ANAPH CL2-frapper-COMP-HBT-NR NEG-MS1-PROG-dire-CONN-MN Ø-zaab-á ko

CL15-savoir-NR NEG

m. à m. « Mais, l’endroit contact là-bas ils [les personnes] frappent souvent, il dit connaître pas. »

« Mais il ne sait pas là où les gens ont l’habitude de frapper. »

Le compressif donne des précisions sur la nature du procès. Il y a un contact ferme du point, une pression exercée, sur l’endroit gaána bakúmataaká « là où on frappe ».

• Le dissociatif ou réversif -ul-

Comme son nom l’indique, le dissociatif -ul- exprime une valeur notionnelle qui traduit la séparation. Il est présent dans les termes exprimant l’idée d’ouvrir, d’enlever, qui s’oppose à fermer ou mettre sur.

Exemple :

zibulá « ouvrir » (cl. 15) vutulá « rendre » (cl. 15) vuumbulá « réveiller » (cl. 15) baagulá « interpréter » (cl. 15)

1 Extrait de Mariage Congolais de M. et Mme Ntsatou Nadège, vidéo déposée le 29 novembre 2013, htpps:www.youtube.com/watch?v=lyO2N2E5Br8.

(4a) Musamú waá kamuteélelé.

mu-sámu wu-a ka-Ø-mu-ta-il-il-i

CL3-problème ACL3-REP.ANAPH MS1-RSLT-MO1-dire-APPL-APPL-R m. à m. « Le problème il [le problème] il lui a dit. »

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tiindulá « incliner » (cl. 15)

etc.

Le dissociatif -ul- dans naangunétyeenó « soulever un instant s’il vous plait » traduit l’idée que le portable est décollé, du bas en l’occurrence, pour être exhibé en haut.

• Le causatif -is-

Le causatif est la trace d’un dédoublement de la source du procès. Exemple :

siimbá « tenir » => siimbisá « faire tenir » (cl. 15) taangá « lire » => taangisá « faire lire » (cl. 15) butá « accoucher » => butisá « faire accoucher » (cl. 15) dyooká « fuir » => dyookesá « faire fuir » (cl. 15)

etc.