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I. Contexte

4. Possibles Traitements et immobilisation des résidus d’incinération des ordures

4.3. Méthodes thermiques

certaine quantité de métaux lourds et de substances toxiques augmentant la lixiviation lorsque le rapport des cendres volantes et de l’eau au ciment est augmenté.

Très peu d’études ont porté sur le mécanisme d’incorporation des métaux lourds dans la matrice. Il a été trouvé que dans le système de C-S-H, le calcium est remplacé par le cadmium dans le cas d’un dopage comparable à celui de matériaux à base de céramique (4.5.2).

Le problème environnemental du ciment pendant sa production est la grande consommation d’énergie nécessaire pour décomposer le carbonate de calcium (CaCO3) en chaux (CaO) et qu’une énorme quantité de dioxyde de carbone est émise lors de sa production (pour 1t du ciment, 700-900 kg de CO2 est émise ; ce qui représente environ 5 à 8% des émissions de CO2

causées par l’homme (National Ready Mixed Concrete Association, 2008)). Le ciment Portland représente près de 80% du total d’émission de CO2 des ciments en général (Pacheco-Torgal et al., 2013). Si 25% du ciment Portland est remplacé par des résidus fumés d’incinération, on pourrait réduire jusqu’à 15% les émissions du CO2 (Flower et al., 2007). Bien qu'il existe des inconvénients du ciment, il est aujourd’hui le matériau le plus approprié pour la construction. Une des solutions de réduction des effets négatifs pourrait être dans l’implication des résidus d’incinération dans la production du béton, ou le remplacement du béton par liants activés par réaction alcaline comme les géopolymères.

Dans la recherche bibliographique que nous avons effectuée, la majorité des travaux ont été faits avec des cendres volantes d’incinération riches en silicates (classe F), qui favorisent la durabilité, la résistance du béton et la création des liaisons silicates qui sont plus fortes. Au contraire les résidus de classe C, ne semblent pas être convenables pour la production de béton, car ils semblent dégrader les propriétés des bétons. Dans cette étude, nous utilisons deux cendres volatiles d’incinérateur d’ordures ménagères de Taiwan et de France toutes les deux sont riches en calcium (classe C), c’est pour cette raison que nous avons décidé de ne pas les immobiliser dans la matrice à base de ciment.

4.3. Méthodes thermiques

Le traitement thermique sur les résidus d'incinération est utilisé pour atteindre une densification qui pourrait améliorer une résistance à la lixiviation des résidus et une résistance mécanique pour que le matériau soit réutilisable. En plus, les températures élevées sont très efficaces pour détruire les dioxines, les furanes et autres composés organiques toxiques qui peuvent potentiellement rester imbrûlés.

Les traitements thermiques peuvent être divisés en deux catégories: la vitrification et le frittage.

La vitrification est un processus par lequel les résidus (REFIOM et/ou MIOM) sont chauffés à des températures d’environ 1200-1500°C en une seule fois. La matrice synthétisée a un caractère amorphe avec l'incorporation d'éléments toxiques dans la matrice de verre par des moyens chimiques et/ou de l'encapsulation.

Pendant le frittage, la température est augmentée jusqu'au point où les éléments chimiques d'intérêt atteignent une reconfiguration. Habituellement, les températures impliquées dans ce processus sont de l'ordre 1000°C. Pendant le frittage se produit une liaison de particules reconfigurées par rapport au départ.

Le cas spécial de traitement thermique est la dévitrification, pendant que nous transformons la phase amorphe (vitreuse) en phase semi-cristalline avec des températures élevées comme pendant le frittage. Ce processus permet aux atomes de se déplacer et de s’orienter pour obtenir des propriétés à la fois de phase cristalline et de phase amorphe en même temps. Ces matériaux sont appelés vitrocéramiques.

Quel que soit le procédé thermique, les résidus de l'incinération dans la plupart des cas conduisent à un produit plus dense, plus homogène avec des propriétés de lixiviation améliorées. Un inconvénient majeur de ces méthodes est qu'elles nécessitent des quantités d'énergie importantes et particulièrement pour la vitrification pendant l’immobilisation des éléments volatils tels que Hg, Pb et Zn (Sabbasa et al., 2003). Il est aussi important de noter qu'au cours de ces traitements thermiques, les nouvelles cendres volantes produites contiennent en grande quantité des espèces volatiles telles que Pb, Cd, Cl, S et Zn. La récupération de ces éléments est donc nécessaire.

4.3.1. Verre

Le verre est un des plus vieux matériaux fabriqués par l’homme. Pour obtenir une matrice vitreuse appelée « vitrifiant » (matrice solide avec une structure amorphe), il faut avoir une composition des oxydes convenables qui sont fondus et ensuite refroidis très rapidement. Pendant le refroidissement, la viscosité monte vite jusqu’au moment où le matériau est solide sans nucléation et sans que les atomes forment une structure ordonnée. De ce fait aucune discontinuité de l'enthalpie libre ne se produit et sa pente en fonction de la température reste identique. Ce matériau est métastable et sur une longue période de temps ou avec des températures élevées, peut devenir cristallisé par nucléation non contrôlée. Sur la Figure I-15 est illustré un diagramme de variations de l'enthalpie libre ou du volume d'un verre et d'un solide cristallisé en fonction de la température.

Figure I-15 : Diagramme de formation du verre (Tf= température de cristallisation ou fusion Tg= température de transition vitreuse)

L’incorporation des éléments dangereux par vitrification a été observée au début pour les déchets hautement radioactifs. Pour cet objectif, plusieurs types de verre ont été exploités comme les verres silicatés ou phosphatés. Les verres silicatés et plus particulièrement borosilicatés ont été considérés longtemps comme les plus adaptés pour les déchets de Haute Activité et à Vie Longue (HAVL) et pour certaines catégories de déchets de moyenne activité. C'est parce que ces verres se dissolvent facilement et qu’ils peuvent facilement être modifiés afin d'optimiser leurs propriétés. Ils ont été étudiés depuis de nombreuses années et aujourd’hui ils sont bien connus et compris. L’évaluation du verre silicaté pour déchets HAVL a été faite par plusieurs équipes (Lutze, 1988 ; Kibben et al., 1993 ; Pegg, 2001). Même si la majorité des études favorisent l’immobilisation des déchets HAVL dans les verres borosilicatés, certaines études se sont intéressées aux verres à base de phosphate (Stefanovsky et al., 1995 ; Sales et al., 1988). Les liaisons atomiques sont différentes de celles du verre borosilicaté, ce qui change leurs propriétés chimiques (Abe, 1989). Le verre phosphaté est moins thermiquement stable et aussi moins stable dans l'environnement aquatique, mais en ajoutant Fe2O3 ou Al2O3,il est possible d’améliorer la résistance et la durabilité du verre. Le plus durable des verres phosphatés est le verre alcalin aluminophospate (Sun et al., 2004). Les autres types de verre qui ont été étudiés sont les verres aluminosilicates (Vance et al., 1986 ; Brunnell et al., 1986) pour immobiliser UO2 et le verre à base d’oxydes de terres rares comme un hôte pour l’immobilisation de U, Pu et Am. Ce dernier montre une plus haute solubilité des éléments radioactifs dans sa structure que mentionnée avec du verre borosilicaté (Ramsey et al., 1994 ; Mertz et al., 1995).

La vitrification est aussi utilisée pour stabiliser les résidus d’incinération des ordures ménagères grâce aux hautes températures. Le produit final sous forme de verre est moins nocif pour l’environnement et peut être stocké dans un centre d’enfouissement standard ou être réutilisé. Plusieurs études avec différentes conditions de vitrification des résidus d’incinération ont été effectuées. Pour améliorer les propriétés et diminuer la température de fusion, il est

possible d’ajouter certains additifs. Par exemple les MIOM et REFIOM sont mélangés avec du calcin ou un sous-produit d’argile comme le feldspath qui enrichit le mélange en silicate et sodium, puis chauffés à 1450°C (Barbieri et al., 2000; Andreola et al., 2008). Le Feldspath est riche en alumine et renforce la résistance du produit final. Park et al (2002) utilisent le REFIOM en provenance de Corée avec l’addition de >5 wt.% SiO2 et MgO pour produire un verre. Le mélange est chauffé à 1500°C pendant 30 min pour volatiliser les chlorides présents. Le verre a montré une excellente résistance à la lixiviation des ions de métaux lourds (Cd2+<0.04 ppm, Pb2+<0.2 ppm). Il ont aussi conclu que le REFIOM ne peut pas être vitrifié sans aucune addition ce qui a été démontré quelques années plus tard par Arvelakis et al. (2008). Il a fait un verre à partir de REFIOM qui était nettoyé et délivré des chlorides et sels de sulfate qui peuvent être limitants pour les futures applications. Il a obtenu des résultats satisfaisants en montrant notamment que le REFIOM peut être fondu à des températures en dessous de 1300°C sans additifs.

Peu de recherches ont été effectuées sur la vitrification uniquement de MIOM, car il est considéré comme un déchet non dangereux et il peut être directement utilisé dans le secteur routier. On peut cependant citer celles de Lapa et al. (2006) et Monteiro et al. (2006) faites au Portugal ou aussi celle de Xiao et al. (2008) faite aux Pays-Bas, qui ont démontré une bonne durabilité du MIOM vitrifié sans additifs ajoutés.

La vitrification de REFIOM est actuellement appliquée par l’industrie sous processus appelé VitroArc® développé par la compagnie suédo-norvégienne (Enviroarc). Les résultats de lixiviation montrent une bonne résistance chimique sauf pour l’antimoine qui est un élément limitant une possible application dans le secteur du bâtiment. (Haugsten et al., 2000). En France, le projet VIVALDI a été initié par la société EUROPLASMA qui a construit une installation pilote de la vitrification d’UIOM près de Bordeaux. Les résidus sont chauffés par plasma avec des températures d'environ 1400°C. L'installation à Bordeaux est capable de vitrifier jusqu'à 7 tonnes de cendres volantes par jour. Les substances métalliques se séparent pendant la fusion du fait de leur différence de densité. Les études ont montré que le vitrifiat a un statut de déchet non dangereux et également une bonne faisabilité de technique de l’application. Le produit final peut être utilisé comme une substitution à des granulats pour la fabrication de pavés et dalles en béton pour voiries. Des améliorations du procédé sont envisagées, essentiellement au niveau du traitement des gaz et aussi pour respecter des nouvelles réglementations. La vitrification de REFIOM peut se faire aussi par arc électrique qui apparaît entre deux électrodes de graphite. Ce procédé est utilisé par exemple par le groupe Stein Heurtey à Evry.

Pour conclure, le matériau vitreux est un candidat pour l’immobilisation des résidus des déchets, nous pouvons constater que les résultats obtenus par les études précédentes ont été

plutôt satisfaisants. Le processus de synthèse est en principe simple, mais même si en France il est techniquement possible, le surcoût face à la filière actuelle peut apparaître élevé et il faut le mettre en balance avec le bilan environnemental qui reste à évaluer précisément. L’évaluation du comportement des vitrifiats dopés aux résidus d’incinération à long terme est compliquée à étudier et comme les verres sont des matériaux thermodynamiquement métastables, il peut arriver un changement structurel ou une dégradation du matériau qui ne pourrait pas résister aux attaques chimiques ou mécaniques. La contamination des sols, de l’eau ou de l’air serait un risque. Néanmoins, la vitrification pourrait être prochainement une alternative pour le traitement des déchets.