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II.3. CHAPITRE 3 : Evolution de la neurogénèse

III.1.1. Une méthode originale pour reconstruire l’évolution des gènes Hox et ParaHox

La méthode que nous avons employée pour retracer l’histoire évolutive des gènes Hox et ParaHox diffère des précédentes de plusieurs points de vue. Tout d’abord, nous avons fait attention d’utiliser des séquences provenant d’une grande variété d’espèces, représentante de nombreux phyla, en sélectionnant dans la mesure du possible des espèces à évolution lente, ce qui n’est pas le cas dans les autres analyses. Le jeu de données utilisé dans notre analyse est le plus diversifié depuis le séquençage du génome de Nematostella. Par ailleurs, nous avons testé le soutien des nœuds de chaque famille combinant les résultats de deux méthodes d’analyse phylogénétique et ceci répété sur un grand nombre de jeu de données, différant dans leur composition en séquences hautement dérivées caractérisées comme perturbatrices. Enfin, les relations entre les familles, intitulées « metagrouping » ont été mises en évidence en s’attachant à la fréquence d’apparition des nœuds plus qu’à leur soutien. Cette méthode systématique paraît bien adaptée pour tirer de l’information des séquences courtes comme les homéodomaines. Quatre types de résultats nouveaux et originaux ont découlé de l’application de cette méthode (Quiquand et al., 2009) : 1) l’identification de véritables orthologues Xlox/Pdx chez les cnidaires, 2) la confirmation qu’un certain nombre de séquences de cnidaires que nous appelons « PG9-like », représentent effectivement les groupes

« postérieurs » des gènes Hox/ParaHox, 3) l’état orphelin du groupe paralogue PG1 due à l’absence de regroupement des séquences « antérieures » PG1, PG2 et PG3 dans nos analyses phylogénétiques alors que ce regroupement était admis « de fait » depuis la découverte des gènes Hox, et 4) enfin la meilleure conservation au sein des eumétazoaires des familles de gènes ParaHox par rapport aux gènes Hox.

Concernant la diversification des gènes Hox postérieurs chez les cnidaires, nos résultats sont en accord avec ceux présentés par Chiori et al., à l’exception du fait que nous les avons classifiés en quatre groupes (B-E) quand eux les classifiaient en trois groupes (A-C). En comparaison avec les autres séquences Hox et ParaHox de cnidaires, les séquences postérieures Hox sont en effet très diversifiées et forment différents groupes distincts. De plus, leur affiliation aux séquences Hox postérieures de bilatériens, qui forment un groupe unique, est peu soutenue, mais est évidente en appliquant notre méthode de fréquence d’apparition d’évènements. Ceci prouve que les gènes Hox postérieurs de cnidaires sont très divergents.

La méthode que nous avons mise au point pour pallier l’effet perturbant des séquences de cnidaires hautement dérivées en faisant varier systématiquement le jeu de données, nous a permis d’une part de mettre en évidence pour la première fois des homologues Xlox/Pdx chez les cnidaires et de suggérer que la séquence divergente de Nematostella Xlox/Cdx serait en fait plus proche de la famille Pdx.

Cette séquence était précédemment proposée comme affiliée à la fois aux deux familles Pdx et Cdx (Chourrout et al., 2006). Dans l’étude de Chiori et al., elle est proposée comme appartenant à la famille Cdx, mais sans aucun appui statistique.

Notre analyse inclut des séquences Pdx d’hydrozoaires qui ont probablement eu un effet attracteur sur la séquence Xlox/Cdx. Cette différence pourrait expliquer ces résultats divergents. Par ailleurs la famille Pdx fournit donc un exemple solide d’une famille de gènes clairement mieux conservée chez les médusozoaires, en l’occurrence chez les hydrozoaires, que chez les anthozoaires. Or depuis la publication des ESTs d’Acropora et du génome de Nematostella, les anthozoaires étaient le plus souvent présentés comme les meilleurs représentants de l’état ancestral (Collins et al., 2006).

Notre analyse corrobore celle de Chiori et al. par le fait que nous avons également noté que certaines familles de gènes Hox/ParaHox ne sont pas représentées dans toutes les classes de cnidaires. Alors que la famille Hox PG2 ne se retrouve que chez Nematostella, d’autres familles ont clairement divergées entre anthozoaires et medusozoaires comme la famille PG1, mais aussi les familles relatées au groupe PG9/Cdx.

Le gène Gsx/Cnox2/Anthox2 a été identifié chez 15 espèces de cnidaires différentes. En revanche, les familles Pdx et Cdx sont représentées par seulement deux séquences d’hydrozoaires chacunes (II.1-2. Chapitre 1-2) (Kamm et al., 2006;

Chiori et al., 2009; Quiquand et al., 2009). De plus, on peut constater que pour les

espèces de cnidaires chez qui le génome est disponible (Nematostella et Hydra magnipapillata) la totalité des gènes ParaHox n’a pas été retrouvée. Nematostella et l’hydre possèdent toutes deux le gène ParaHox Gsx et Nematostella présente un deuxième gène ParaHox (Xlox/Cdx) affilié selon les analyses à la famille Pdx (Quiquand et al., 2009), Cdx (Chiori et al., 2009) ou aux deux (Chourrout et al., 2006). Les gènes ParaHox étaient donc présents chez l’ancêtre commun des eumétazoaires, mais ceux-ci n’ont pas été systématiquement conservés chez les cnidaires à l’exception de Gsx. La conservation de ce gène chez de nombreux cnidaires dans trois classes différentes, suggère une fonction fondamentale et ancestrale qui, comme nous l’avons confirmée (II.2. Chapitre 2), est probablement liée à la détermination des précurseurs neuronaux et nécessaire à la mise en place correcte du système nerveux.

Ceci met en évidence l’importance fondamentale d’utiliser plusieurs modèles de cnidaires pour les études évolutives comparées. Bien que représentant un modèle très utile à l’approche expérimentale, Nematostella appartient à la classe des anthozoaires qui a divergé des hydrozoaires il y a environ 500 millions d’années (Peterson and Butterfield, 2005). Il s’avère donc très intéressant que des modèles de médusozoaires ayant un cycle de vie complet comme Clytia soit utilisé, d’autant plus que les études de perte de fonction sont maintenant bien maitrisées chez cette espèce (Momose and Houliston, 2007).

Enfin, nous défendons l’hypothèse que les familles ParaHox sont mieux soutenues que les familles Hox et nous obtenons ce résultat en incluant ou non la séquence Cdx d’hydrozoaire récemment identifiée (Chiori et al., 2009) (II.1-2.

Chapitre 1-2). Ce résultat contraste avec ceux de Chiori et al. qui proposent que les familles Hox et ParaHox antérieures sont plus soutenues que les familles Hox et ParaHox postérieures. Pour ce point en particulier, la raison pour laquelle nos conclusions diffèrent est principalement dû au fait que les séquences Pdx n’avaient pas été identifiées chez les cnidaires (en particulier chez Clytia) lors de leurs analyses. Enfin, d’une manière étonnante, le support qu’ils obtiennent pour la famille Cdx (en excluant les séquences hautement dérivées) est également bas alors que nous obtenons un très bon soutien dans notre deuxième analyse présentée au chapitre 2 (II.2.).

III.1.2. Duplication en tandem d’un complexe ProtoHOX versus