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CHAPITRE 2 – Les ressources de l’Amazonie : l’économie du bois

2.11 Limiter les dégâts additionnels

L’exposé des différents aspects de la situation actuelle de l’activité économique du bois en Amazonie, il permet de poser un diagnostic. La recherche d’un équilibre entre la préservation environnementale et le développement économique basé sur le bois était un objectif des changements législatifs introduits au cours des dernières années. C’est aussi un amalgame de conditions qui ont permis à l’industrie forestière en Amazonie de parcourir ce chemin.

D’abord, bien que non négligeable même dans le passé, l’industrie du bois en Amazonie est devenue avec les années un aspect de plus en plus important tant au niveau économique que politique et social. Alors que les activités étaient légèrement réglementées pendant les premières grandes vagues d’occupation du territoire amazonien, les actions gouvernementales étaient nettement plus orientées vers la satisfaction d’intérêts privés. C’est à partir du moment où le gouvernement brésilien a assumé son rôle d’administrateur du territoire amazonien en reconnaissant celui-ci comme un bien collectif et un intérêt public que l’exploitation des ressources de la forêt est devenue indissociable de la protection environnementale (Mathis 2011). Pour arriver à concilier ces deux processus, l’État brésilien devait d’abord intervenir au niveau de la propriété des terres et entamer un processus de distribution. En effet, la première étape essentielle pour assurer la

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protection de la forêt est la régulation foncière et c’est aussi un des aspects les plus importants pour déterminer la légalité ou non d’une production de bois. En minimisant la confusion entourant la propriété de la terre en Amazonie, le gouvernement se responsabilise lui-même ainsi que les propriétaires particuliers vis-à-vis les activités d’exploitation de bois ayant lieu sur le territoire. Selon cette logique, une fois cette conscience de la responsabilité de la terre acquise, la protection contre les coupes illégales et la préservation environnementale seraient vus comme servant les intérêts collectifs tout autant que les intérêts privés.

Toutefois, cette responsabilisation n’a pas la même valeur pour tous les acteurs impliqués et la distribution des coûts et des bénéfices dans la réalité n’est pas toujours en cohérence avec les droits de propriété. Dans le cas des terres indigènes par exemple, les droits de propriété de permettent toujours pas aux populations locales de pouvoir profiter des bénéfices d’une conservation productive autant que dans le cas d’autres terres publiques ou privées.

Les développements législatifs qui visent à mettre en place un « mode d’emploi » pour l’exploitation durable du bois vont dans le sens d’une plus grande préoccupation et d’un désir de protéger cet espace énorme. L’adoption de ces lois a contribué à établir un cadre légal et donc ces conditions favorables pour une économie de cueillette du bois durable. Toutefois, en s’attardant plus en détails sur les premiers effets de tels changements, il est possible de remarquer que l’accessibilité concessions et aux plans de gestion forestière reste difficile pour ceux qui ne prévoient pas un grand volume de production ou qui ont des moyens financiers limités. Dans le futur, il serait important que le gouvernement facilite cet accès aux ressources professionnelles ainsi que technologiques en simplifiant les systèmes de valorisation des ressources déjà mis en place.

Un objectif de limiter les dégâts additionnels doit également faire partie des mécanismes permettant une meilleure application de la loi, tant au niveau de l’émission de récompenses pour les

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bons comportements qu’en ce qui a trait à l’application de pénalités dans le cas contraire. Une évaluation des méthodes utilisées par IBAMA dévoile non seulement un manque de ressources pour que l’agence fonctionne mieux au niveau régional mais également le besoin d’une meilleure efficacité judiciaire. Par ailleurs, un important débat s’est joué récemment sur la réforme du Code Forestier, dont un des points sensibles portait sur la diminution du taux de protection du couvert forestier obligatoire de 80 % à 50 % sur toute propriété rurale. Dans ce contexte de changement, il importe de se pencher sur les possibles conséquences et les intérêts en jeu. Plusieurs experts forestiers soutiennent que les modifications du Code Forestier de 1996 (augmentation du taux de protection de 50 % à 80 %) ont contribué à une baisse du taux de déforestation et donné un plus grand pouvoir de gestion des ressources forestières aux propriétaires en les obligeant à exercer un contrôle plus serré sur les activités ayant lieu sur leurs terres (Alflen 2011, Cruz 2011). Toutefois, il est aussi argumenté que le Code Forestier, dès ses débuts, n’a pas réussi à contrôler la déforestation, tout comme il n’a pas rempli le mandat de protection environnementale donné. La croyance erronée est que, sans la présence du Code Forestier, il se produira une « orgie de déforestation sans limite » (Lourenço 2011). Si la protection environnementale était son objectif initial, servant ainsi les intérêts du bien commun, les changements proposés actuellement révèlent plutôt une préoccupation à résoudre l’illégalité de l’exploitation de la forêt dans le passé, mettent en lumière l’ingérence d’intérêts plus restreints (Lourenço 2011).

Un autre débat qui a présentement lieu porte sur la décentralisation des pouvoirs d’application de la loi au niveau des états et même des municipalités. Les supporters soutiennent que le contrôle sur les activités sera beaucoup plus adéquat s’il est pris en charge par les autorités locales qui auraient une meilleure compréhension des enjeux régionaux. Les opposants craignent plutôt que la fragmentation des pouvoirs d’administration et d’application de la loi constitue plutôt un terrain

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fertile pour la corruption et la satisfaction d’intérêts privés. Les conditions facilitant une économie forestière de cueillette durable sont somme toute nombreuses mais l’expérience de l’industrie forestière de la forêt amazonienne montre que certains changements législatifs peuvent aussi porter fruits.

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