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6.2 Résultats complémentaires à l’article

6.2.1 Leviers d’action à déployer

Plusieurs leviers d’action ont été identifiés, certains ayant été mis en action lors de la recherche. Ces leviers sont présentés selon les niveaux de Chaudoir et collaborateurs (2013) en distinguant ceux qui ont été déployés durant la recherche (éléments en gras dans le tableau 6) de ceux qui doivent encore l’être. Les leviers d’action identifiés touchent tous les niveaux d’influence, en particulier ceux de l’organisation et du système, et dans une moindre mesure, les usagers, les ergothérapeutes et les pratiques émergentes.

En lien avec les pratiques émergentes, les informateurs ont rapporté la nécessité de mieux évaluer les besoins de participation sociale, d’inclure ces besoins dans les plans d’intervention puis de faire des expériences et des essais (Tableau 6). Comme mentionné par une coordonnatrice clinique, un des leviers serait de bonifier les outils utilisés pour mieux comprendre les besoins de participation sociale : « [Il faut] développer davantage l'évaluation des activités sociales et évaluer les capacités et limites de l’usager afin de permettre un jumelage avec l’activité envisagée. » (S5). Comme les ergothérapeutes rapportent avoir tendance, dans le contexte actuel, à mettre de côté la participation sociale, les participants ont suggéré d’inclure des objectifs d’intervention en lien avec la réalisation d’activités sociales et de loisirs dans les plans utilisés par l’ensemble de l’équipe du SAD. Ces plans pourraient inclure des rappels pour les intervenants pivots. Enfin, la possibilité de faire des essais pour intégrer des interventions visant à favoriser la participation sociale des aînés a été reconnue comme un levier pour les ergothérapeutes : « Ça peut être expérimental […] justement pour essayer d’implanter [des interventions de participation sociale] et assurer la pérennité de ce qu’on veut faire. » (S1).

Tableau 6

Leviers d’actions à déployer pour intégrer des pratiques de participation sociale Niveau d’influence§ Levier d’action

Pratiques émergentes • Mieux évaluer les besoins de participation sociale • Inclure la participation sociale dans les plans

d’intervention

• Faire des expériences et des essais Ergothérapeutes • Faire connaître leur rôle

• Créer des liens avec la communauté • Participer à la recherche

Usagers Aînés

• Exprimer ses besoins de services • Participer à l’organisation des pratiques Proches aidants

• Accompagner l’aîné

• Encourager l’aîné à participer Organisation Milieu du soutien à domicile

• Étendre son mandat à la participation sociale • Favoriser les partenariats

• Sensibiliser la direction et les collègues Milieu communautaire

• Rejoindre les aînés dans la communauté

• Fournir des services de proximité pour favoriser la participation sociale

Système Réseau de la santé et des services sociaux • Modifier les indicateurs de performance • Prioriser la participation sociale

• Impliquer les citoyens Milieu académique

• Sensibiliser les décideurs

• Évaluer l’effet de la participation sociale • Offrir des formations

Légende : Gras : levier ayant été déployé ; (non-gras) : levier devant être déployé ; §Les leviers d’actions sont

organisés selon les niveaux d’influence du modèle de Chaudoir et collaborateurs (2013).

Les leviers d’action qui concernent les ergothérapeutes incluent la possibilité de faire connaître leur rôle en lien avec la participation sociale, de créer des liens avec la communauté et de participer à la recherche en lien avec leur pratique (Tableau 6). Les participants ont d’abord mentionné la nécessité pour les ergothérapeutes de faire connaître leur rôle : « On a une responsabilité de ne pas lâcher un mouvement où on se fait reconnaître et où on fait reconnaître l’importance de ce qu’on recommande. » (E). De plus, ce levier soutient

l’importance de créer des liens avec la communauté pour soutenir l’ergothérapeute qui veut favoriser la participation sociale, tel que rapporté par une intervenante communautaire en lien avec les préjugés envers les aînés ayant des incapacités : « Avoir la chance de travailler en équipe [avec l’ergothérapeute]. […] Si elle me l’explique, je peux comprendre et le vulgariser aux autres pour qu’ils soient plus tolérants envers la personne. » (C). La présente recherche aurait contribué à amorcer le déploiement d’un troisième levier d’action, soit de participer à la recherche en lien avec leur pratique, ce qui aurait permis aux ergothérapeutes de faire connaître leur rôle.

Les leviers d’action relatifs aux usagers sont présentés en deux volets : d’abord ceux concernant les aînés puis ceux liés aux proches aidants. Pour les aînés, les informateurs ont suggéré que ceux-ci doivent exprimer leurs besoins en matière de services pour favoriser leur participation sociale et participer à l’organisation de ces pratiques, tandis que les proches devraient accompagner l’aîné et l’encourager à participer (Tableau 6). Tel qu’amorcé par la recherche, les participants ont reconnu que les aînés doivent en premier lieu exprimer leurs besoins par rapport aux pratiques qui peuvent favoriser leur participation sociale : « Il ne faut pas avoir peur. Quand tu es avec l’ergothérapeute, il faut lui en parler ; si tu ne lui parles pas, elle ne peut pas savoir ce dont tu as besoin. » (A). Quant aux proches aidants, ils peuvent à la fois encourager l’aîné à participer à ces pratiques, ce que les intervenants trouvent parfois difficulté à faire. Les proches aidants peuvent aussi accompagner l'aîné aux services offerts. Comme le mentionne un coordonnateur clinique : « [Les proches aidants] ont des bons liens, souvent, ils ont plus d’influence que nous autres. Donc c'est d’encourager à avoir une meilleure participation sociale, puis les accompagner aussi, sur place. » (S3).

En lien avec l’organisation, les leviers d’action se déclinent sous deux formes, soit le mandat du SAD et celui des organismes communautaires. D’abord, pour le SAD, son mandat pourrait s’étendre à la promotion de la participation sociale, à favoriser des partenariats entre les ergothérapeutes et le milieu communautaire et à sensibiliser les membres de la direction et les collègues (Tableau 6). En effet, certains participants ont reconnu la nécessité pour le SAD d’avoir un mandat élargi qui inclurait la participation sociale, au-delà de la compensation des incapacités : « La participation sociale doit d’abord être une position de l'organisation et que le département change ses pratiques, mais je ne pense pas qu’un ergothérapeute puisse faire ce boulot-là seul, ça prend un leadership affirmé. » (S6).

Ensuite, pour le mandat du milieu communautaire, les leviers concernent à la possibilité de rejoindre les aînés dans la communauté et de fournir des services de proximité (Tableau 6). Ainsi, étant mieux connectées aux besoins des aînés, les ressources à proximité du milieu communautaire (installations, bénévoles, intervenants) peuvent être un levier pour aider l’ergothérapeute à favoriser la participation sociale, tel que rapporté par une intervenante communautaire : « On essaye de se déplacer. Parce que ce n’est pas toujours évident de rejoindre les gens. On parle de gens qui ont une mobilité réduite. On est en train de faire un sondage pour savoir quels sont leurs besoins. » (C).

Par rapport au système, les leviers d’action rapportés incluent le rôle du réseau de la santé et des services sociaux et celui du milieu académique. En lien avec le réseau de la santé, les participants ont souligné la nécessité de modifier les indicateurs de performance, de prioriser la participation sociale dans le financement des ressources du milieu communautaire et d’impliquer les citoyens dans les décisions du système (Tableau 6). Reconnus comme étant un obstacle potentiel à l’intégration des pratiques de participation sociale, les indicateurs de performance devraient être modifiés pour reconnaître les bienfaits de ces pratiques, notamment les interventions de groupe, tel que suggéré par une décideuse organisationnelle : « Ça demanderait une révision en profondeur du système statistique pour que celui qui fait du groupe, qui rejoint plus de clients à la fois, soit une plus-value pour le système de santé et non une dévaluation. » (S2). En modifiant les indicateurs de performance pour tenir compte de la participation sociale, il serait également possible d’en faire une priorité d’intervention au SAD. Les participants ont aussi souligné l’importance d’impliquer les citoyens qui sont des parties prenantes essentielles du système, comme le rapporte un organisateur communautaire : « Le système de santé, ce n'est pas à part de toi, t'en est partie prenante. Oui, tu es un patient parce que tu as des problèmes de santé, mais tu es aussi un citoyen à part entière, tu peux t'impliquer. » (S6). Par rapport au milieu académique, les leviers d’action identifiés étaient de sensibiliser les décideurs et d’évaluer les effets préventifs de la participation sociale, en plus d’offrir des formations aux professionnels (Tableau 6). Tel que mentionné par un décideur organisationnel : « Ça serait intéressant que le ministère soit au courant [des avantages liés aux] interventions de groupe. S’il rencontre vingt personnes, ton intervenant n’a pas à aller cogner à vingt portes, y’en a vingt à portée de main en une seule intervention. » (S7). Finalement, en plus de contribuer par la recherche,

le milieu académique devrait offrir des formations aux professionnels en lien avec les moyens d’intégrer les interventions de participation sociale. En somme, les informateurs ont identifié différents leviers d’action, dont certains ont été déployés lors de la recherche (Tableau 6) et ont déjà permis d’observer certaines retombées inattendues.