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2-Les tétracyclines

Dans le document Antibiothérapie en parodontologie (Page 95-106)

2-1-Principaux composés

Les principales molécules encore disponibles sont [90] :

 La tétracycline et l’oxytétracycline surtout pour les cyclines de première génération.

 La doxycycline et la minocycline pour les cyclines de deuxième génération.

Toutes possèdent le noyau chimique tétracyclique nécessaire à l’activité antibactérienne, et qui a donné son nom à cette famille d’antibiotique (Fig. 15). L’adjonction d’un groupement tert-butyl-glycylamido en position 9 définit la structure des glycylcyclines. La posologie par voie orale est de 1 500 à 2 000 mg/j en trois à quatre prises pour les cyclines de première génération, alors qu’elle est de 200 mg/j et de 100 mg/j en une prise pour la doxycycline et la minocycline respectivement. Les formes injectables (doxycycline intraveineuse Vibraveineuse® et oxytétracycline intramusculaire Terramycine®) n’ont pas officiellement disparu, mais leur approvisionnement est très aléatoire. Il existe de nombreuses formulations topiques : cutanées et oculaires surtout et une pour les paradontopathies

Figure 15: Noyau commun à toutes les tétracyclines(en noir). Position du groupement R=tert-butyl-glycylamido, qui définit la classe des glycylcyclines(en rouge). [90]

2-2-Pharmacocinétique

Les principales caractéristiques pharmacocinétiques des tétracyclines sont les suivantes: 2-2-1- Absorption

L’absorption est :

 Satisfaisante pour les cyclines de première génération (60-80 %).  Meilleure pour les cyclines de deuxième génération (95 %).  Rapide C max: 3-4 heures pour l’ensemble des molécules.

 Altérée par les aliments pour la tétracycline et par les cations divalents (Ca2+

, Fe2+) présents dans les antiacides et la supplémentation martiale [91].

2-2-2- Diffusion

Le volume de diffusion est à 1 L/kg pour les cyclines de première génération et moindre (0,7L/kg) pour les cyclines de deuxième génération. À l’inverse, la liaison protéique est supérieure pour les cyclines de deuxième génération (plus de 80% contre 60% pour les premières générations). La diffusion est variable dans les tissus en fonction des molécules [91]. On peut retenir qu’il y a :

 Bonne diffusion intracellulaire et tissulaire (poumon, tube digestif, organes génitaux, tissu lymphatique et peau).

 Diffusion dans le parenchyme cérébral et les yeux pour les molécules de deuxième génération plus liposolubles [91].

 Mauvaise diffusion dans le liquide céphalorachidien par manque d’hydrosolubilité  Passage placentaire et dans le lait maternel.

2-2-3-Élimination L’élimination est :

 Rénale surtout pour les cyclines de première génération (T1/2 = 8-10 heures).  Biliaire surtout pour les cyclines de deuxième génération (T1/2 = 16-18 heures). La fraction excrétée de manière inchangée dans les urines est faible pour toutes les molécules. Il n’y a pas d’adaptation posologique pour la doxycycline en cas d’insuffisance hépatique ou rénale, alors qu’il faut être prudent, voire réduire les doses en cas d’insuffisance hépatique avec la minocycline et en cas d’insuffisance hépatique ou rénale avec les cyclines de première génération [91].

2-3-Mode d’action

Les tétracyclines de première et deuxième génération sont des antibiotiques bactériostatiques. Après avoir diffusé passivement ou activement à travers la paroi bactérienne, les cyclines se fixent principalement sur un site (site de haute affinité) de la sous-unité 30S du ribosome bactérien et de manière mineure sur des sites dits à faible affinité des sous-unités 30S et 50S du ribosome bactérien [92]. Les cyclines empêchent ainsi la fixation de l’acide ribonucléique (ARN) de transfert bactérien sur son site accepteur et entraînent un effet bactériostatique par cessation de la traduction bactérienne. Le spectre utile des tétracyclines de première et deuxième génération ne sera pas détaillé compte tenu des résistances acquises très fréquentes. La doxycycline a un effet antimalarique lent [92], mais conservé y compris chez les souches de Plasmodium falciparum hautement résistantes à la quinine, pour lesquelles la doxycycline est indiquée aux États-Unis [93]. Les autres propriétés non anti-infectieuses des tétracyclines [92] sont :

 Chélateur sur les cations divalents.

 Inhibiteur sur les métalloprotéases matricielles, utilisés in vivo dans les parodontopathies et in vitro dans de nombreux modèles (métastases en oncologie,

 Antioxydant in vitro : les cyclines peuvent chélater les radicaux libres oxygénés du fait de leur structure polyphénolique.

 Antiapoptotique in vitro, notamment au niveau cérébral, d’où l’essai des tétracyclines dans de nombreuses pathologies neurodégénératives.

 Anti-inflammatoire in vitro lié à l’effet antioxydant et inhibiteur sur les métalloprotéases.

 Une accumulation préférentielle dans les tissus lésés.

De nombreuses études sont en cours pour trouver de nouvelles applications pratiques aux tétracyclines. À l’heure actuelle, la seule indication non infectieuse des tétracyclines est la limitation de la perte de parodonte dans les parodontopathies chroniques pour la doxycycline (Periostat®).

2-4-Indications

Les tétracyclines obtiennent des concentrations élevées dans le sulcus gingival, surtout la minocycline [86]. Elles peuvent donc aider à éradiquer certaines bactéries pathogènes impliquées dans les maladies parodontales [94,95]. L'activité des collagénases est aussi inhibée en présence de tétracyclines, ce qui permet de limiter la destruction tissulaire par les micro-organismes en place [94,96]. Les tétracyclines, soit la tétracycline, la minocycline et la doxycycline, peuvent donc jouer un rôle favorable dans le traitement de certaines maladies parodontales [95].

2-5-Contre-indications

Les contre-indications sont :

 Prescription chez la femme enceinte ou allaitante et l’enfant de moins de 8 ans (risque de pigmentation des dents provisoires et définitives).

 Association aux rétinoïdes du fait du risque d’hypertension intracrânienne (HTIC).  Allergie documentée à la famille des tétracyclines de première et deuxième

génération.  Myasthénie.

2-6-Effets indésirables

Les principaux effets indésirables sont :

 Digestifs : nausées, vomissements douleurs abdominales, diarrhées, mais aussi ulcères oesophagiens.

 Cutanés : photosensibilité.

 Neurosensoriels : HTIC, vertiges, syndrome vestibulaire résolutif.

 Anaphylactiques : oedème de Quincke, bronchospasme, choc (habituellement croisé à l’ensemble de la classe thérapeutique).

 Biologiques : cytopénie, hépatite et élévation de l’urée chez l’insuffisant rénal.  Immunologiques et dentaires : lupus médicamenteux et pigmentations dentaires

chez l’adulte parfois induits par la minocycline [91].

2-7- Interactions médicamenteuses

Les principales interactions médicamenteuses sont :

 Réduction de l’absorption des tétracyclines en cas de prise concomitante d’un cation divalent (Ca2+, Fe2+) présent par exemple dans les antiacides et la supplémentation martiale.

 Réduction de l’absorption des tétracyclines en cas de prise concomitante de didanosine ou d’agents antidiarrhéiques.

 Réduction des concentrations sériques de la doxycycline [91] en cas d’association avec des anticonvulsivants.

 Néphrotoxicité potentielle en association aux diurétiques, ou au méthoxyflurane [91]

 Réduction des besoins en insuline sous tétracyclines [91].

 Elévation de l’international normalized ratio (INR) en cas d’association aux antivitamines K et élévation de la digoxinémie en cas d’association aux digitaliques [91].

3-Macrolides

La classe des macrolides regroupe les macrolides vrais, les lincosamides et les synergistines. Tous ces antibiotiques ont en commun leur spectre d’activité antibactérien étroit, leur mécanisme d’action, leur activité bactériostatique et une assez bonne tolérance.

 Macrolides vrais

L’érythromycine est considérée comme le chef de file des macrolides [84]. Ses dérivés ont permis d’obtenir une plus grande stabilité en milieu acide, des demi-vies plus longues et un élargissement du spectre antibactérien. Il s’agit de l’azithromycine, de la clarithromycine, de la josamycine, la midécamycine, de la roxithromycine, et de la spiramycine. Il existe, par ailleurs, un dérivé proche appelé kétolide : la télithromycine.

Les macrolides sont des antibiotiques bactériostatiques. Ce sont des inhibiteurs des synthèses protéiques ARN dépendantes. Ils se fixent au niveau de la sous-unité 50S des ribosomes, bloquant la synthèse protéique.

Du point de vue structural, ces antibiotiques se caractérisent par un anneau macrocyclique lactonique oxygéné, auquel sont liés deux sucres par des liaisons glycosidiques (au moins un ose est aminé).

Figure 17: Structure chimique du télithromycine [97]

3-1-Pharmacocinétique

Les macrolides sont habituellement administrés par voie orale, bien qu’une forme intraveineuse existe (Erythrocine®). Leur absorption est incomplète et entravée par les aliments. La prise prandiale améliore la tolérance digestive sans trop modifier les concentrations sériques. La caractéristique essentielle des macrolides est leur excellente diffusion tissulaire, en particulier au niveau des bronches. Les molécules les plus récentes ont une concentration cellulaire préférentielle permettant un meilleur traitement des germes intracellulaires (légionelles, chlamydies et mycobactéries). Les macrolides possèdent également une bonne pénétration osseuse, prostatique et séreuse (ascite, liquide pleural). Les concentrations dans le liquide céphalorachidien (LCR) restent toujours faibles, quel que soit la spécialité. Ces antibiotiques traversent par ailleurs le placenta et diffusent dans le lait maternel. Les macrolides subissent pour 30 à 50 % une métabolisation hépatique. Après un cycle entéro-hépatique, métabolites ou molécules inchangées s’éliminent par les fèces (80-95%). L’élimination urinaire est minoritaire.

En conséquence, l’utilisation des macrolides n’est pas recommandée en cas d’insuffisance hépatique.

3-2-Mode d’action

réversible à la sous-unité 50S des ribosomes, au niveau du site P. Ils empêchent ainsi le transfert du complexe peptidyl-ARNtr depuis le site P vers le site A, ce qui entraîne une inhibition de l’élongation de la chaîne peptidique.

3-3-Indications

Depuis leur arrivée sur le marché, la clarithromycine et l'azithromycine sont devenues les macrolides retenus pour les infections buccodentaires, délogeant l'érythromycine comme solution de rechange à la pénicilline. Elles restent des options alternatives à la pénicilline parce qu'une résistance peut être acquise par les bactéries visées, que leur activité est souvent bactériostatique plutôt que bactéricide et que leur capacité à éradiquer les infections buccodentaires est légèrement inférieure à celle de la pénicilline. Toutefois, elles sont reconnues comme étant des options acceptables lors d'allergie à la pénicilline [86,89]. La plupart des bactéries aérobies et anaérobies de la cavité buccale font partie du spectre de la clindamycine sauf Eikenella corrodens [95,89]. Elle est indiquée dans le traitement des infections impliquant les tissus osseux, telles les ostéomyélites et l'ostéite purulente, et de toute autre infection causée par des espèces du genre Bacteroides ou d'autres espèces ne pouvant être éradiquées par la pénicilline ni les macrolides [86]. Certains auteurs sont d'avis que la clindamycine induirait la colite pseudomembraneuse plus fréquemment que la pénicilline [88,95]. Selon eux, son utilisation devrait être réservée au traitement des infections buccodentaires chez les patients allergiques à la pénicilline, des infections causées par des bactéries anaérobies qui sont à un stade plus avancé dans le processus infectieux et des infections chroniques [86-88].

3-4-Contre-indications

Hypersensibilité aux macrolides, Insuffisance hépatique grave, Insuffisance rénale.

3-5-Effets indésirables

Les effets indésirables sont :

 Intolérance digestive (effet le plus fréquent) avec nausées, vomissements, diarrhée et inconfort abdominal. Ces manifestations sont surtout retrouvées chez l’enfant (7

l’érythromycine ne sont généralement pas la conséquence de son effet antibiotique mais de son pouvoir de libérer de la motiline ou d’activer les récepteurs à la motiline. Les effets gastro-intestinaux sont plus fréquents avec la télithromycine qu’avec les autres macrolides.

 Allongement de l’espace QT à l’électrocardiogramme (érythromycine, clarithromycine).

 Hépatotoxicité : il peut s’agir d’une simple élévation des transaminases, voire d’un ictère ou d’une hépatite cholestatique réversible survenant les dix premiers jours (1 %). Ces troubles imposent l’arrêt immédiat du traitement.

 Allergie (0,5 % avec l’érythromycine) : prurit, érythème et urticaire.

 Ototoxicité (exceptionnelle) : des troubles transitoires de l’audition peuvent survenir dès les 48 premières heures de traitement avec l’érythromycine. Ils régressent dès l’arrêt du traitement.

 La télithromycine est connue pour engendrer des étourdissements, mais aussi des céphalées, des troubles du goût, une élévation des transaminases hépatiques et des candidoses vaginales.

3-6-Interaction médicamenteuses

L’érythromycine diminue le catabolisme de nombreux médicaments en inhibant le cytochrome P450 CYP 3A4, ce qui peut entraîner des élévations importantes de la concentration plasmatique de ces médicaments administrés en même temps, et être à l’origine d’effets indésirables parfois graves.

Inducteur de torsades de pointe par allongement de l’espace QT [97]. Les associations suivantes sont contre-indiquées :

 Cisapride et érythromycine ou clarithromycine.  Pimozide et clarithromycine.

 Quinidine et érythromycine.

 Statines : risque de rhabdomyolyse.

 Theophylline : risque de surdosage avec agitation, céphalées, tremblements, convulsions, tachycardie, douleurs précordiales, troubles du rythme avec l’érythromycine, la clarithromycine, la josamycine et la roxithromycine.

 Carbamazépine : risque de surdosage avec somnolence, ataxie, troubles de l’équilibre, nystagmus, confusion, nausées, vomissements avec l’érythromycine, la clarithromycine, la josamycine et la midécamycine.

 Dérivés de l’ergot de seigle : risque d’apparition d’ergotisme (absence de vascularisation des extrémités avec risque de nécroses) en cas d’association de l’ergotamine avec l’ensemble des macrolides, sauf la spiramycine.

 Ciclosporine : risque de surdosage avec insuffisance rénale, hypertension artérielle, convulsions avec l’érythromycine, la clarithromycine, la josamycine, la midécamycine et la roxithromycine.

 Digitaliques : risque de surdosage avec nausées, vomissements, troubles du rythme graves avec l’érythromycine, la clarithromycine, la roxithromycine et l’azithromycine.

 Antivitamine K : risque de surdosage, avec accidents hémorragiques, avec l’érythromycine, la josamycine, la clarithromycine, la roxithromycine et l’azithromycine.

 Benzodiazépines, en particulier le midazolam ou le triazolam: risque de surdosage avec troubles psychomoteurs, troubles du comportement avec amnésie antérograde, trouble de la conscience et psychomoteurs.

 Alfentanil surdosé avec l’érythromycine.

 Rifabutine surdosée avec risque d’uvéite et de leucopénie avec la clarithromycine.  Il convient également d’éviter d’associer l’érythromycine avec l’amiodarone, la

félodipine la colchicine. De même la clarithromycine ne doit pas être administrée avec l’indinavir, la zidovudine, le vérapamil et la phénytoïne.

 Les synergistines ne présentent aucune interaction médicamenteuse majeure.

4-Lincosamides

4-1-Structure

La lincomycine (Lincocine®) a été isolée en 1962 à partir de la fermentation de

Streptomyces lincolnensis var. lincolnensis. [98] Cet actinomycète provient d’un échantillon

de sol prélevé dans la région de Lincoln, dans le Nebraska, aux États-Unis. Elle est constituée d’un acide aminé (la proline) alkylé en position 4 rattaché via une liaison amide (pont peptidique) à un cycle galactose (groupement 6-amino-thio-octopyrannoside). À partir de la lincomycine, de nombreux dérivés ont été préparés par hémisynthèse afin d’accroître le spectre antibactérien et l’activité. Des substituants du groupement hydroxyle en position 7 ont donné naissance à de nombreux dérivés comme la clindamycine (groupement chlore) (Dalacine®). Ces molécules sont très stables lyophilisées ou en solution.

Figure 18: Structure chimique de la clindamycine [84]

4-2-Mode d’action

La structure chimique des lincosamides est très différente de celle des macrolides, mais leur mécanisme d’action est proche. La pénétration des lincosamides dans la bactérie s’effectue probablement par diffusion passive. La diffusion est limitée chez les bactéries à Gram négatif par la présence d’une membrane externe et surtout de pompes d’efflux physiologiques, expliquant la résistance naturelle de ce groupe bactérien.

Chez les bactéries à Gram positif sensibles, les lincosamides inhibent la synthèse protéique en se fixant sur la plus grosse des deux sous-unités du ribosome, la 50S, et en inhibant l’étape d’élongation. Les lincosamides inhibent directement la formation de pont peptidique entre les acides aminés au niveau de la sous-unité 50S du ribosome [99].

4-3-Effets indésirables

Des effets indésirables sont rapportés avec les lincosamides, dont des troubles digestifs (nausées, vomissements, diarrhée avec risque important de colite pseudo-membraneuse) des atteintes hépatiques (élévation des transaminases, hépatite), des troubles hématologiques (leucopénie, neutropénie, thrombopénie, agranulocytose) et, rarement, des réactions allergiques (prurit, urticaire, syndromes de Lyell et de Stevens-Johnson).

L’usage de la voie parentérale expose à des thrombophlébites pour des doses élevées et à des hypotensions en cas d’administration IV trop rapide (débit maximal : 30 mg/minute).

4-4-Interactions médicamenteuses

L’association des lincosamides avec les macrolides ou avec les synergistines est déconseillée. L’emploi simultané avec des curarisants requiert une grande prudence en raison du risque de potentialisation de leurs effets. Enfin, il convient de respecter un intervalle de deux heures entre les prises d’antiacides et les lincosamides.

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