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Les impacts des grandes sécheresses du 20ème siècle

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 46-50)

S ENSIBILITE D ’ UN TERRITOIRE ET VULNERABILITE D ’ UNE ACTIVITE ECONOMIQUE

2.2 Les impacts des grandes sécheresses du 20ème siècle

En 1921 un évènement sec de grande ampleur a touché principalement la France de l'Est. On parle ici de sécheresse hydrologique puisque l'agriculture a été peu impactée du fait d'une bonne répartition des pluies, contrairement aux sources qui ont été très diminuées (Blanchard, 1922).

Cet épisode sec a également été ressenti sur une partie du territoire breton. La sécheresse de 1949 (Fouchardière, 1949 ; Sanson, 1950), tout comme celle de 1989 (Blanchet, 1992 ; Dorize, 1990) a également été étudiée pour ses conséquences nationales et régionales. Parmi elles on compte notamment les effets sur le régime hydraulique des cours d'eau ainsi que sur l'agriculture. Pour autant dans certaines régions l'agriculture a peu souffert du fait d'importants apports en eau d'irrigation. Les impacts de la sécheresse de 1959 sur le nord de la France sont visibles à travers les questions concernant l'agriculture lors des débats parlementaires (Assemblée Nationale, 1959) où il est question de classer le département de la Manche et quelques cantons d'Ile-de-France en zone sinistrée.

La sécheresse historique de 1976 a été très médiatisée du fait de ses conséquences importantes sur l'agriculture et sur le débit des rivières (figure 2.2). Dès qu'une sécheresse de printemps a lieu en France, les médias rappellent les dégâts connus en 1976 en termes de comparaison d'intensité de l'épisode sec. Ce fut notamment le cas en 2011, où la sécheresse de printemps a fait craindre le pire : « La FNSEA, premier syndicat agricole, estime que la sécheresse qui sévit actuellement menace d'être plus grave qu'au printemps 1976, printemps alors le plus sec depuis 1959 » (Le Monde, 30 mai 2011).

Figure 2.2 Médiatisation de la sécheresse de 1976 et de ses conséquences : photo de la Loire à sec à Tours (La Nouvelle République, 28 juin 1976) et couverture du journal l'Express du 28/06/1976 (n°1303)

Les impacts de certaines de ces sécheresses récentes sont visibles dans les coupures de presses (figure 2.3) recueillies par Reynald Artaud pour le site internet Météo Passion.

Figure 2.3 Coupures de presse sur les impacts de diverses sécheresses en France (source : Reynald Artaud, www.meteopassion.fr)

Parmi ces coupures on remarque une illustration opposant les « gagnants » de la sécheresse de 1976 tels que les vendeurs de glaces et boissons froides, aux « perdants » que sont les agriculteurs qui ont vu leurs cheptels et récoltes diminués. L'impact de la sécheresse de 1976 sur l'agriculture est rappelé dans de nombreux articles, notamment à travers une caricature de Piem montrant les conséquences de la sécheresse sur l'économie agricole. Une photo de 1961 rappelle que les sécheresses ne touchent pas que les pays du tiers-monde et que le manque d'eau peut affecter des villes françaises. Plus récemment, la canicule de 2003 a engendré des besoins très importants en irrigation pour l'agriculture. En plus des conséquences sur la végétation, les sécheresses ont également des effets sur les animaux pour plusieurs raisons : alimentation réduite du fait de faibles stocks de fourrages, la qualité et quantité de l'eau s'appauvrit au fur et à mesure que l'épisode sec se prolonge. Les vagues de chaleur qui peuvent accompagner une sécheresse ont également des effets dévastateurs sur les animaux, qui voient leur condition de vie dégradée, ce qui peut avoir des conséquences négatives allant parfois jusqu'à la mort d'une partie d'entre eux.

Ces grandes sécheresses qui ont touché la France mais aussi, dans certains cas, des pays voisins, ont alerté la population face au risque de pénurie d'eau. C'est toute une communauté scientifique qui s'est intéressée à ces sécheresses, leurs particularités, leurs fréquences d'apparition, etc. La sécheresse de 1976, qui fit couler beaucoup d'encre, marqua les mentalités par l'impact que peut avoir le climat sur l'économie, chose qui n'était pas imaginée jusqu'alors (Marchand et al., 1986).

C'est ainsi qu'à partir de cette année les sécheresses devinrent un intérêt, voire une inquiétude, pour l'économie, ce qui explique l'essor des publications scientifiques à ce propos. Concernant la sécheresse de 1976, on s'intéressa autant à son aspect climatique (Brochet 1977 ; Namias, 1978) qu'hydrologique (Lecarpentier, 1977) ainsi qu'aux conséquences sur la forêt (Aussenac, 1978 ;

Harranger, 1978) et sur l'agriculture (Baculat et al., 1976 ; Hallaire, 1977 ; Henrion et Pecquet, 1977 ; INRA, 1977, Luquet et al., 1977). Byé et Pernet (1976) proposent une étude sur la place de l'agriculture dans l'économie française. Alors que Blanchet (1977) s'intéresse aux effets de la sécheresse 1976 sur la région Rhône-Alpes, Mounier (1977) fournit une étude plus générale sur les sécheresses, portée par les effets dévastateurs des évènements secs de 1976. Les conséquences de cette sécheresse sur de nombreux secteurs économiques sur une grande partie de l'Europe occidentale ont également été traitées par Comte (1987).

La sécheresse de 1976 est toujours étudiée, notamment en termes de comparaison avec des sécheresses plus récentes (Breda et al., 2004 ; Lefebvre, 2011). Debaeke et Bertrand (2008) ont suivi les effets des sécheresses de 1976, 2003, 2005 et 2006 sur l'agriculture française. La figure 2.4 illustre ainsi l'impact de ces sécheresses sur les rendements de quelques variétés culturales.

Figure 2.4 Graphiques de rendement de plusieurs cultures en France de 1969 à 2006 (en carré vides les grandes sécheresses de 1976, 2003, 2005 et 2006) (Debaeke et Bertrand, 2008)

Les sécheresses ayant eu les impacts économiques les plus forts ont conduit les élus à réfléchir à la mise en place d'assurances ou d'indemnités pour les victimes économiques telles que les agriculteurs par exemple. A la suite de la sécheresse de 1976, l'Etat a décidé de mettre en place un

impôt sécheresse de 2,2 milliards de francs (414 millions d'euros) pour soutenir les agriculteurs.

Depuis, dès qu'un épisode sec précoce se produit en France, la crainte d'avoir une sécheresse de la même ampleur que celle de 1976 amène la question d'un nouvel impôt exceptionnel de solidarité nationale. La sécheresse de 2011, similaire à celle de 1976 au printemps mais qui n'a pas été aussi longue, a conduit à ce type d'inquiétude dès le mois de mai.

D'après les informations recueillies à travers les analyses dendrochronologiques et les recueils historiques, on peut donc identifier les sécheresses majeures ayant impacté la France et la Bretagne. Le tableau 2.1 liste quelques unes de ces sécheresses pour lesquelles des conséquences majeures ont été ressenties en Bretagne. Ceci souligne la vulnérabilité de l'agriculture face aux épisodes secs intenses.

Tableau 2.1 Liste des sécheresses majeures observées par dendrochronologie ou recueillies dans des ouvrages historiques ayant eu des impacts en France et en Bretagne

Année Impacts observés

1540 Sécheresse hydrologique : les cours d'eau bretons sont asséchés, les fontaines taries. Les moissons furent précoces.

1762 Sécheresse néfaste pour l'agriculture bretonne. Le blé noir ne résistera pas à la saison sèche qui dura plusieurs mois.

1785 Sécheresse sévère en France et en Bretagne, impactant des régions réputées humides telles que le Trégor.

1921 Sécheresse sévère en France de l'est principalement. La répartition des pluies fait que l'agriculture souffre peu, contrairement à l'eau d'alimentation qui fut très affectée par le tarissement de nombreuses sources.

1949 Sécheresse hydrologique avec diminution du niveau des rivières en Ille-et-Vilaine. Des cultures ont été anéanties, certains arbres (jeunes ou vieux) sont sévèrement impactés.

1959 Sécheresse importante pour le nord de la France. Importants dégâts sur des parcelles agricoles d'Ile-de-France et sur une majeure partie du département de la Manche.

1976 Sécheresse extrême sur tout le territoire français ayant des impacts sur divers secteurs économiques.

1989

Impacts inégaux sur l'agriculture régionale, le maïs est la culture la plus touchée. En Bretagne, au Limousin et en Provence les réserves en eau sont sévèrement asséchées.

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 46-50)

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