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IV THEORIE DE L’ATTACHEMENT :

2. Les fondements de la théorie de l’attachement:

La théorie de l’attachement fut élaborée les années cinquante dans un contexte de l’après guerre par John Bowlby. Engagé au début de la guerre comme psychiatre militaire,il s’est particulièrement intéressé aux conséquences des séparations précoces mère/enfant suite à quoi, il fut désigné par l’OMS pour mener une enquête et prendre en charge les orphelins de guerre. En 1950, il devient consultant pour l’OMS concernant les questions de santé mentale des enfants sans foyers. Bowlby s’est d’abord intéressé aux effets de la carence de soins maternels sur le développement de la personnalité. Ses observations l’ont éloigneé des conceptions psychanalytiques pour proposer un nouveau cadre théorique qui privilégie la relation

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mère/enfant. Bowlby propose un modèle théorique du développement et du fonctionnement de la personnalité basé sur l’instinct qu’il distingue de celui de Freud basé sur la théorie des pulsions. Pour S. Freud, le premier besoin de l’enfant est la nourriture sur quoi s’étaye la relation objectale. La théorie Freudienne de l’étayage décrit l’existence d’une pulsion primaire basée sur la satisfaction des besoins oraux et physiques, qui secondairement donnent naissance à une pulsion dirigée vers la création d’un lien d’attachement.

Bowlby énonce que le premier besoin de l’enfant est le besoin de contact avec l’autre. La construction des premières relations répond à un besoin biologique fondamental qui ne dérive pas de la satisfaction des besoins alimentaires. Ainsi la théorie de l’attachement primaire va à l’opposé de la conception Freudienne de l’ « étayage », pour laquelle le lien affectif se construit secondairement, à partir de l’expérience de la satisfaction des besoins.

Il est défini par Bowlby en tant que fonction biologique qui vise la survie de l’espèce. C’est un lien affectif permanent, émotivement significatif, exclusif et provoquant la recherche de proximité.Le lien est réciproque entre mère/enfant et sera à l’origine de sécurité extérieure, mais d’abord intérieure. Les variables permettent de mesurer le type et le degré d’attachement chez l’enfant :

1/ Le besoin de proximité physique comme base de sécurité, 2/ La capacité d’exploration et d’autonomie,

3/ L’existence d’un rapport d’attachement en cas de stress 4/ La présence d’une réaction de protestation en cas de rupture.

2.1. Apport de l’éthologie :

Bowlby fut influencé d’autre part, par l’éthologie et sa méthode d’observation directe du comportement dans le milieu naturel; principalement par les travaux de l’autrichien Konrad Lorenz(1903-1989) sur l’empreinte chez les oies. Lorenz a pu montrer que les oies peuvent identifier leurs semblables, en particulier la mère, et la suivre (réaction de poursuite) après éclosion. Certains animaux comme l’oie, s’attachent de manière irréversible au premier objet en mouvement qu’ils voient ; expérience démontrée sur un leurre (canard en carton).Qu’elle soit biologique ou un objet de substitution, c’est au court de cette réaction de poursuite que le jeune canard apprend à identifier de façon sélective les caractéristiques de sa mère.

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L’animal présente même des réactions de détresse en l’absence d’objet lui offrant un contact.Bowlby fut influencé aussi par un autre éthologue américain Harry Harlow (1958) qui a étudié l’impact de la privation de la présence maternelle chez les singes. Son expérience consistait à exposer les bébés macaques rhésus àdifférentes situations de maternage. Il laissant dans la cage deux substituts maternels : en peluche, en acier. Privés de leur mère, les petits s’attachent à une mère substitut en peluche qui procure un contact agréable et chaud ; Ils s’attachent plus si elle est mobile qu’à une mère substitut allaitante faite en fil d’acier dont le contact est désagréable.II a souligné le rôle essentiel du contact tactile et conclu que la privation maternelle et l’isolement social ont une incidence négative sur les comportements individuels et sociaux à court et à long terme.

Dans le même sens, le psychanalyste René Spitz (1945), met l’accent sur les séquelles graves, consécutives à la séparation, dont les carences affectives et l’hospitalisme. Il observa aux Etats-Unis une centaine de nourrissons abandonnés qu’il identifia chez les bébés qui étaient séparés de leurs mères.

Bowlby conclu que le besoin d’attachement est primaire et occupe une place aussi nécessaire à la survie que le besoin de s’alimenter.L’hypothèse proposée par Bowlby repose sur la théorie du comportement instinctif. Elle postule que le lien de l’enfant à sa mère est le produit de l’activité d’un certain nombre de systèmes comportementaux qui ont pour résultat prévisible la proximité de l’enfant à sa mère.

Le système d’attachement paraît comme un système motivationnel, comportemental. La relation privilégiée qui lie l’enfant avec sa mère résulte de l’activation d’un certain nombre de comportements génétiquement déterminés, acquis au cours de l’évolution, et qui contribuent à la survie de notre espèce. Ces comportements d’attachement sont organisés en système, une notion empruntée à la cybernétique. Bowlby a tiré de la cybernétique cette idée centrale d’homéostasie, c'est-à-dire que l’être humain maintien son équilibre par une autorégulation en fonction de son environnement.Un système est constitué de comportements coordonnés qui ont des traits spécifiques est une fonction adaptative. La principale fonction du système d’attachement est de protéger l’enfant en permettant d’établir la proximité physique avec la mère.Bowlby a donc adopté un mode d’approche définie par quatre caractéristiques :

 Sa méthode est prospective, à l’opposé de l’approche psychanalytique qui se base sur la reconstruction rétrospective.

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 Elle s’est focalisée sur un seul agent pathogène qui est la séparation avec la mère et les séquelles qu’elle peut engendrer.

 Elle s’est basée sur l’observation directe des enfants.

 Elle s’est inspirée et a utilisé des données de l’espèce animale.

2.2. Mary Ainsworthet la situation étrangère :

Mary Salter Ainsworth (1913-1999), élève de Bowlby, psychologue clinicienne canadienne, installe fermement la théorie de l’attachement à travers son étude empirique en Ouganda en 1954. Ses travaux ont éclairci le domaine des relations d’attachement et ont donné lieu aux types d’attachement que nous développerons plus loin. Ses expériences sur 28 bébés durant neuf mois, se sont basées sur l’observation directe appelée « situations étranges » .Son étude a porté sur les effets de séparation et de sevrage à partir de l’observation qui lui a permis de parvenir à catégoriser et à hiérarchiser divers schèmes de comportement.

En 1969, Ainsworth décrit pour la première fois la situation étrange dans une publication puis dans son ouvrage de 1978.Ce dispositif expérimental évalue de façon qualitative, le type d’attachement de l’enfant à l’âge de douze mois. Durant ce test de laboratoire, l’enfant est exposé à de très brèves séparations d’avec sa mère et mis en présence d’une personne non familière.Sept épisodes successifs, durant trois minutes chacun, s’enchaînent dans un ordre préétabli, censé activer le système d’attachement avec une intensité croissante :

1/ L’enfant est seul avec son parent dans la pièce d’expérimentation et d’enregistrement où se trouvent quelques jouets ;

2/ Ils sont rejoints par une personne inconnue de l’enfant comme du parent,

3/ La personne étrangère ayant capté l’attention de l’enfant, le parent quitte la pièce, laissant en présence l’enfant et l’inconnu(e),

4/ Le parent revient et l’inconnu s’en va,

5/ Le parent quitte lui-même la pièce 3 minutes plus tard, laissant l’enfant seul, 6/ L’inconnu revient,

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Cette suite d’épisodes devrait engendrer une tension graduelle permettant à l’observateur de se rendre compte de la manière dont l’enfant organise son comportement envers la figure d’attachement, lorsqu’il fait l’expérience d’une situation troublante.Les épisodes sont filmés puis les comportements de l’enfant sont analysés de façon globale (catégorisation d’attachement) tandis que chaque épisode est coté grâce à des échelles interactives (qui concernent à la fois l’attitude de l’enfant et le comportement de l’adulte).