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Les autres cellules endocrines de l’îlot

5.1.1. La cellule α

Tout comme la cellule β, la cellule α pancréatique est un détecteur du glucose impli-qué dans le maintien de la glycémie, puisqu’elle produit et sécrète le glucagon, une hormone hypoglycémiante dont les effets sont opposés à ceux de l’insuline.

Le glucagon est, tout comme l’insuline, synthétisé sous une première forme immature nommée proglucagon, qui subit des modifications post-traductionnelles pour aboutir au glu-cagon mature. Le clivage du progluglu-cagon dans la cellule α est opéré par la prohormone-convertase 2 (Whalley et al. 2011). Le proglucagon est également synthétisé dans d’autres organes, principalement l’intestin (dont les cellules endocrines du pancréas sont issues du point de vue phylogénétique) et le cerveau. Dans ces organes, le proglucagon est clivé en d’autres peptides, les plus connus étant les incrétines GLP-1 et GLP-2 produites par les cel-lules L intestinales (Figure 21).

Figure 21 : Organisation structurelle du proglucagon et des peptides dérivés

Les peptides libérés spécifiquement dans le pancréas ou l’intestin sont indiqués sous la séquence com-plète du proglucagon. Les numéros au-dessus de la structure du proglucagon indiquent les positions rela-tives des acides-aminés des différents peptides qui en dérivent. GLP, glucagon-like peptide; GRPP, glicen-tin-related pancreatic peptide; MPGF, major proglucagon-derived fragment; IP, intervening peptide.

D’après Sinclair et Drucker (2005). Tout à droite est donnée la structure primaire du glucagon. D’après http://www.diapedia.org/metabolism/glucagon.

Glucagon

LES MÉCANISMES DE RÉGULATION AU SEIN DE LÎLOT

Bien que la déficience en insuline résultant d’un déficit fonctionnel des cellules β ait longtemps été considérée comme centrale dans la pathophysiologie du diabète, il est mainte-nant admis qu’un excès de glucagon, causé par l’absence de sécrétion d’insuline, caractérise également cette maladie et est responsable de multiples manifestations du diabète en contri-buant à aggraver l’hyperglycémie (Unger & Orci 1975, Quesada et al. 2008, Unger &

Cherrington 2012, Godoy-Matos 2014). En effet, comme nous le verrons par la suite, la cel-lule β exerce une inhibition sur l’activité de la celcel-lule α à haut glucose. La dysfonction voire la destruction des cellules β au cours du diabète lève ce contrôle négatif de l’activité des cel-lules α dont la sécrétion devient alors excessive. Cette importance de l’augmentation de la sécrétion du glucagon dans le diabète montre que la cellule α est également cruciale dans le maintien de l’homéostasie, et sa sécrétion doit être, tout comme celle de l’insuline, exacte-ment régulée.

Nous avons au cours du précédent chapitre vu que les mécanismes par lesquels une augmentation de la glycémie régule la sécrétion d’insuline par la cellule β sont bien connus.

En revanche il n’existe aucun consensus concernant les mécanismes de régulation de la sécré-tion de glucagon par le glucose. Les hypothèses actuelles se répartissent en trois catégories.

En premier lieu, il est possible que la concentration de glucose soit mesurée par des détecteurs de glucose extra-pancréatiques qui renvoient l’information aux cellules α par voie nerveuse (Miki et al. 2001, Thorens 2011). Cependant, la sécrétion de glucagon est aussi ré-gulée indépendamment du contrôle nerveux comme attesté par les études sur îlots isolés. La deuxième proposition est donc que la détection du glucose doit se faire à l’intérieur même de l’îlot par les cellules β et δ qui contrôlent les cellules α par la libération paracrine d’insuline inhibitrice (Ostenson 1979), de zinc (Ishihara et al. 2003), de GABA (Rorsman et al. 1989) ou de somatostatine (Starke et al. 1987). Enfin, des études supportent l’hypothèse de l’existence d’une détection de glucose par la cellule α elle-même. Dans cette dernière catégo-rie, plusieurs mécanismes ont été proposés. La diminution de glucose causerait une dépolari-sation induisant un influx calcique qui initie la sécrétion de glucagon. Cette dépolaridépolari-sation pourrait être causée soit par une diminution de l’activité de la pompe électrogène Na+/K+ (car moins d’ATP) (Bode et al. 1999), soit par l’activation d’un influx calcique dépolarisant de-puis les stocks intracellulaires contenus dans le réticulum endoplasmique par la SERCA (Liu et al. 2004, Vieira et al. 2007).

INTRODUCTION

Contrairement aux cellules β, les cellules α sont électriquement actives en absence de glucose et génèrent de très grands potentiels d’action. Les cellules α sont équipées de canaux KATP composés des mêmes sous-unités que dans les cellules β. Le rôle de ces canaux dans la

Low glucose High glucose

β-cell

α-cell

Figure 22 : Comparaison du couplage entre glucose et sécrétion dans les cellules β et α

A: La sécrétion d’insuline par les cellules β est inhibée à bas glucose (gauche) et activée à haut glucose (droite) selon des mécanismes bien caractérisés. B: Aucun consensus n’a été établi concernant les méca-nismes grâce auxquels la cellule α détecte le glucose. Le modèle privilégié propose que l’activité élec-trique (faible dépolarisation de la membrane) de la cellule α est associée avec l’activation des canaux Nav

et Cav, l’influx calcique par les Cav déclenchant la sécrétion de glucagon à bas glucose (gauche).

L’augmentation des taux de glucose augmente à 6 mM (droite) ferme totalement les canaux KATP, dépola-risant encore plus la membrane. L’inactivation des Nav au potentiel atteint se traduit par une amplitude réduite des potentiels d’action (AP), ce qui entraine une moindre activation des Cav de type P/Q liés à l’exocytose et donc une réduction de la sécrétion de glucagon. D’après Ashcroft et Rorsman (2013).

LES MÉCANISMES DE RÉGULATION AU SEIN DE LÎLOT

cellule α est demeuré une énigme. Dans la plupart des modèles, il a été proposé que l’activité du canal KATP dans la cellule α est régulée de la même façon que dans la cellule β.

L’augmentation du ratio ATP/ADP à haut glucose fermerait le canal KATP, résultant en une dépolarisation de la membrane, qui inhiberait alors le déclenchement de potentiels d’action dans la cellule α. En revanche, à bas glucose, l’activation des KATP hyperpolariserait la cellule α, ce qui supprimerait l’inhibition induite par la dépolarisation (présente à haut glucose) des canaux ioniques impliqués dans le déclenchement du potentiel d’action, provoquant ainsi la sécrétion de glucagon (Rorsman et al. 2008). Ce dernier modèle est actuellement le plus ré-pandu (Rorsman et al. 2012, Gylfe 2013, Gylfe & Gilon 2014).

5.1.2. La cellule δ

La cellule δ sécrète la somatostatine en réponse au glucose. Sa physiologie demeure peu connue mais certains résultats ont apporté quelques indications sur les mécanismes impli-qués dans la sécrétion de la somatostatine.

Comme les cellules β et α, les cellules δ sont équipées de canaux KATP et leur mem-brane se dépolarise lors d’une augmentation des taux de glucose. Les cellules δ sont stimulées à des concentrations de glucose inférieures à celles nécessaires au déclenchement d’une ré-ponse dans la cellule β (~3 mM), probablement parce qu’elles expriment moins de canaux KATP. Les mécanismes du couplage stimulus-sécrétion observés dans la cellule β ne semblent pas être valables pour la sécrétion de somatostatine. En effet, il est plutôt suggéré que la fer-meture des canaux KATP dépolarise la cellule δ lors d’une augmentation de la concentration de glucose, et que la sécrétion de somatostatine dépendrait non pas des Cav de type L comme c’est le cas dans la cellule β, mais plutôt de la libération de Ca2+ depuis les stocks intracellu-laires (réticulum endoplasmique) induite par l’influx de Ca2+ au travers des Cav de type R.

Cependant, la nature exacte du couplage stimulus-sécrétion dans la cellule δ demeure hypo-thétique en raison du peu d’études électrophysiologiques conduites sur ce type cellulaire (Drews et al. 2010).

INTRODUCTION