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Le service est cohérent dans toute l’organisation

Passez à l’action et homogénéisez les services entre départements et types d’interfaces

5.7 Le service est cohérent dans toute l’organisation

Difficulté ***

Après ce dernier diagnostic, vous pourriez penser que tout a été dit sur la cohérence, mais ce n’est pas encore le cas. Certes, s’assurer de l’homogénéité entre départements et modes d’accès est crucial. Mais un autre type de cohérence est tout aussi impor- tant pour assurer une expérience de haute qualité aux membres de votre communauté.

Pourquoi c’est important

Une histoire de la vie courante pour expliciter le propos :

Vous faites vos courses dans votre supérette de quartier et vous avez vraiment besoin de mettre la main sur du combava, car votre émission de cuisine préférée a vanté les vertus de cet agrume pour faire un bon rougail. Vous avez fait trois visites au magasin, et demandé à trois personnes différentes s’ils avaient du combava. Les trois employés se sont excusés et vous ont dit que non, ils n’avaient plus de combava depuis un moment et ne savaient pas quand le magasin serait livré. Et de vous laisser sur ces belles paroles. Comment vous sentiriez-vous ? Désappointé sans doute. Probablement un peu embêté, car vous allez devoir

chercher votre combava dans une autre boutique et que vous n’avez aucune garantie d’en trouver.

Si vous aviez à noter le service reçu dans votre supérette à ces trois occasions, vous pourriez dire qu’il a été correct. Cohérent, même, puisque vous avez reçu la même réponse des trois per- sonnes de l’équipe.

Reprenons maintenant ce scénario au moment où le premier employé vous dit que : « Non, nous n’avons pas de combava » ; mais cette fois-ci vous demande : « Quelle recette essayez-vous de réaliser ? Avez-vous envisagé de remplacer le combava par du citron vert, qui est parfois utilisé comme substitut du com- bava dans le rougail ? » Et si le deuxième employé vous avait dit que : « non, nous n’avons pas de combava, mais je vais aller voir le responsable de rayon pour savoir où en est la livraison de com- bava » ? Et si la troisième employée vous avait dit que : « Non, nous n’avons pas de combava, mais êtes-vous allé voir dans la boutique exotique trois rues plus loin, parce que j’en ai vu là-bas dans la vitrine en passant devant à vélo » ?

Maintenant, si vous aviez à noter le service que vous avez reçu de votre supérette à ces trois occasions, que diriez-vous ? Vous répondriez sans doute qu’il était vraiment excellent.

Était-il cohérent ? Eh bien, non, si être cohérent signifie recevoir la même réponse à chaque fois, de la part de tous les employés. Mais si on vous demandait si le service était constamment au-dessus de la moyenne, vous répondriez probablement par l’affirmative. Trop souvent, organisations et procédures sont structurées de manière à mettre en œuvre le premier type de cohérence, celui qui s’assure que tous les règlements et procédures sont clairs, que tous les membres du personnel les connaissent, et qu’ils répondent de la même façon lorsqu’un même cas de figure se présente. Une telle cohérence formelle est sécurisante en termes de management, et confortable pour les employés. En réalité,

c’est vers l’autre type de cohérence, celui qui permet d’offrir un service toujours remarquable, qu’il faut tendre. C’est beaucoup plus difficile à réussir, bien sûr, et il est fort délicat de former des gens pour le faire : mais cela en vaut la peine et permet d’amé- liorer de manière significative la qualité de l’expérience de vos usagers.

À vous de jouer

Pour évaluer la cohérence du service dans une organisation, vous ne pouvez pas faire un sondage minute. La cohérence ne peut se mesurer que dans la durée. Voici deux propositions pour évaluer ce point précis dans votre bibliothèque. La première demande un certain investissement et nécessite d’être planifiée ; la seconde est un peu plus facile à mettre en œuvre. Choisissez la méthode qui convient le mieux à votre organisation.

Option 1 : sondes culturelles (ou enquête ethnographique allégée) Les sondes culturelles ont été abordées dans la partie « Méthodes d’analyse des comportements » du chapitre 2. Pour cela, il vous faudra recruter au moins cinq utilisateurs réguliers de votre bibliothèque et leur donner à chacun un carnet de notes pour raconter leurs expériences après cinq visites à la bibliothèque. Demandez-leur de reporter des informations détaillées à propos de chacune de leurs visites : pourquoi ils sont venus, à qui ils ont parlé, quel service ils ont reçu et leur sentiment sur ce service. Certains usagers pourraient compléter ce travail en une semaine, d’autres prendre un peu plus de temps. Une fois que chacun d’eux vous aura remis son journal de bord, organisez un court entretien avec chacun pour jauger la cohérence du service qu’ils ont reçu. Donnez-vous 3 points pour chaque participant qui vous dit que le service était constamment remarquable (maximum 15 points).

Option 2 : interviews d’usagers

Si vous n’avez pas assez de temps à consacrer à une enquête ethnographique allégée, vous pouvez sans doute obtenir des résultats similaires, bien que moins riches, en vous contentant de faire les entretiens décrits à la fin du paragraphe précédent. Recrutez au moins cinq visiteurs réguliers et posez-leur des questions ouvertes sur leurs cinq dernières visites. Assurez-vous d’avoir avec vous quelqu’un pour prendre des notes ou, mieux encore, enregistrez les entretiens de manière à pouvoir réé- couter les enregistrements et réfléchir à chacune des réponses. Si vous enregistrez des interviews, pensez à demander systéma- tiquement la permission à tous les interviewés. Là encore, don- nez-vous 3 points pour chaque participant qui vous dit que le ser- vice était toujours remarquable (maximum 15 points).

Passez à l’action

Il y a peu de manières de faire monter votre cote d’utilisabilité. Si votre recherche sur les usages (enquête ethnographique ou entretiens individuels) vous a révélé que vous n’étiez cohérent ni dans la réponse (tout le personnel ne donne pas les mêmes réponses), ni en termes de niveau de service, et que vous ne retrouvez aucun signe indiquant que le service est apprécié pour sa grande qualité, reprenez ce chapitre au début et travaillez sur les exercices suggérés pour passer à l’action. Si vous réussissez bien en matière de cohérence de la réponse (tout le monde dit la même chose), mais que votre score sur le niveau de service est moins bon, c’est bien. Vous êtes à mi-parcours, ne vous arrêtez pas en si bon chemin ! Les idées suivantes vous permettront de surmonter les derniers obstacles.

Recommencez encore et encore ! Il s’agit du dernier point de ce chapitre, pour une bonne raison : il n’est pas possible que vous

puissiez rendre de manière constante un service exceptionnel à moins d’avoir travaillé tous les points qui précèdent.

Assurez-vous :

d’avoir élaboré une philosophie des services ;

que vos personnels la connaissent et la fassent vivre ;

d’avoir réduit le nombre de règlements et de procédures ;

de donner du pouvoir à vos agents et de renforcer leur

empathie envers les différents publics à desservir pour avoir l’équipe la plus accueillante et la plus prévenante possible.

Un engagement suivi dans la durée

Si vous avez introduit les changements dont nous avons parlé dans ce chapitre afin d’améliorer le service rendu dans votre bibliothèque, c’est bien !

Mais sachez que vous ne pouvez pas vous en féliciter et tourner les talons pour passer à autre chose. Ces choses-là exigent un entraînement suivi et des piqûres de rappel. Considérez qu’il faut répéter la plupart des exercices dont nous avons parlé dans ce chapitre (le client mystère, la liste des « Non », l’enquête contex- tuelle, les sondes culturelles) de manière suivie. Assurez-vous également que vous motivez vos agents de manière régulière, en les encourageant à s’investir dans les exercices de suivi autant que possible, et en communiquant les résultats de ces exercices de manière cohérente.

Envisagez une rotation des personnels

Il est assez facile de perdre son énergie et sa vigueur en service public lorsqu’on fait le même travail, au même bureau d’accueil, dans la même bibliothèque, tous les jours, depuis des années.

Si vous avez un peu de souplesse pour proposer plus de mobilité aux personnels d’accueil au sein de l’établissement, envisagez de le faire. Qu’il s’agisse de déplacer les gens entre « sections » ou juste de les faire bouger entre bureaux d’accueil dans un même département, changer les choses tous les 12 ou 24 mois environ peut faire des merveilles pour éviter aux agents de s’ennuyer et de perdre leur empathie. Le point positif pour la bibliothèque est d’avoir un personnel d’accueil parfaitement polyvalent entre départements, ce qui vous permet plus de souplesse et d’agilité pour des changements plus ambitieux.

Chapitre 6. Signalétique