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LE MOUVEMENT DESJARDINS FACE A LA REINGENIERIE

FONCTIONNEMENT DANS LE MOUVEMENT DESJARDINS

3.3 LE MOUVEMENT DESJARDINS FACE A LA REINGENIERIE

Nous avons donc présenté brièvement le Mouvement des caisses Desjardins où se déroule notre étude à travers sa structure, son processus de prise de décision, son fonctionnement et ses valeurs. Nous allons maintenant examiner les particularités de la réingénierie dans le Mouvement Desjardins.

3.3 LE MOUVEMENT DESJARDINS FACE A LA

Les membres n’ont pas toujours l’impression d’être écoutés et entendus. Or, une caisse se distingue des banques en ce que les membres ne sont pas seulement des clients. Ils sont aussi des propriétaires qui, en principe tout au moins, ont leur mot à dire sur la gestion et sur les services par divers mécanismes qui peuvent aller de la simple plainte à l’intervention à l’assemblée générale. Cette possibilité d’intervention distingue les caisses des banques.

De plus, les coûts d’opération sont trop élevés, ce qui affecte aussi la capacité concurrentielle, car les ressources humaines des caisses s’occupent essentiellement des opérations courantes et de l’administration de la caisse et ne consacrent que 5 % de leurs efforts à l’offre de produits et services.

Il y a donc un sentiment d’urgence qui se dégage de ce diagnostic. On en conclut qu’il faut changer, s’adapter, réagir sinon le Mouvement perdra son leadership. Pour les dirigeants du Mouvement, le changement, c’est la réingénierie. Elle apparaît alors comme une stratégie défensive : il faut s’adapter pour survivre. De plus, les banques sont «déjà entrées dans le processus de réingénierie. La pression du marché ne nous a pas laissé le choix ». Ce choix correspond aussi au type de changement adéquat à un secteur financier. Il faut ignorer les processus de travail actuels et réinventer les processus d’affaires. On a donc retenu la réingénierie parce qu’elle est une approche globale d’analyse qui s’attaque au fondement de chacun des processus et qui provoque un changement radical. En même temps, on présente la réingénierie comme une source de dynamisme nouveau, comme l’occasion d’une offensive, même comme une grande aventure, car on la décrit comme «un grand mouvement » qui va faire de Desjardins la meilleure et la plus dynamique des institutions financières au Québec. Les dirigeants du Mouvement souhaitent aussi atteindre des objectifs de qualité.

Selon Bélanger (1997), une autre raison semble justifier le choix de la réingénierie pour le Mouvement Desjardins. Peut-être a-t-on pensé que le Québec et Desjardins çà ne faisaient qu’un, c'est-à-dire que le nationalisme, l’appartenance à la communauté ou la proximité suffisaient pour susciter l’adhésion aux caisses Desjardins et pour «attacher » les membres à vie ! Alors, on croyait que sa clientèle était en quelque sorte captive, que ses 5,5 millions de membres lui seraient fidèles par tradition, et qu’il suffirait d’installer des représentants des filiales une ou deux journées par semaine dans les caisses pour

satisfaire les nouvelles demandes de produits. Puis on s’aperçoit que l’ancrage de Desjardins dans la société québécoise ne suffit pas. Le marché a changé, les membres ont de nouvelles attentes ; ils recherchent les meilleurs produits aux meilleurs prix.

C’est donc une stratégie de reconquête de son propre territoire en faisant appel à autre chose que les valeurs traditionnelles ou l’histoire d’Alphonse Desjardins.

Dans le discours des dirigeants du Mouvement, il y aurait selon Bélanger (1997), une vision particulière de la réingénierie. Les dirigeants du Mouvement insistent fortement sur l’idée que la technologie n’est qu’un levier qui permet la réorganisation, et que l’essentiel, le plus important, c’est le changement de mentalité, le changement de compétences des ressources humaines, le changement d’attitudes et de comportements.

De sorte que le virage qualité et client signifie donc un virage vers l’offre qui demande des nouvelles habiletés relationnelles :

• être à l’écoute des besoins et attentes des membres

• bien connaître la personne : avoir toutes les informations

• avoir les compétences pour leur offrir des conseils pour une solution financière globale, c'est-à-dire sur tous les produits

• sollicitation, proactivité, offre de services, saisir les occasions d’affaires au moment et où le membre le souhaite

• service personnifié à une clientèle dédiée

• objectif de fidélisation à la caisse pour tout le cycle de vie et la génération suivante.

Néanmoins, ce nouveau rôle est rendu possible par le redécoupage des activités en processus d’affaires soutenus par les nouvelles technologies de l’information. Cette orientation vers l’offre de services est soutenue par une grande flexibilité de l’organisation et un développement technologique important pour satisfaire le client. La réingénierie devrait avoir un impact important sur l’organisation du travail. Les processus d’affaires vont se diffuser à tous les niveaux. Dans le discours de Desjardins, les divers rôles et statuts des caissières et conseillers ne sont pas encore clairement définis. Les employés ne deviendront pas tous des conseillers, mais les dimensions «conseil » et

«offre » prendront une importance accrue pour l’ensemble du personnel.

Parmi les trouvailles qui découlent de la réingénierie, on note le fichier membre informatisé. Ainsi, les caisses dresseront sur ordinateur un portrait financier complet de chacun de leurs membres, pour leur offrir un service plus intégré. « C’est avec un service à la clientèle qu’on peut réussir à se démarquer. Parce que maintenant, les entreprises finissent toujours par se rejoindre au niveau des prix et de la variété des produits offerts ». Finalement, selon les dirigeants du Mouvement, c’est un service qu’on cherche à vendre et non un produit particulier. « La distinction coopérative c’est le service personnalisé », une relation personnalisée, compétente et durable où le membre est connu et reconnu ; une relation où le membre recevra une solution financière personnalisée...

avec des propositions adaptées à sa situation.

Donc, la réingénierie est définie d’abord comme une nouvelle stratégie vers l’offre et le client. L’insistance sur la satisfaction de la clientèle est tellement forte que le rendement financier est presque «secondarisé » dans le discours : « La réingénierie vise essentiellement la qualité des services aux membres, même si elle a des répercussions sur l’équilibre financier » (Béland, 1995).

On peut se demander si les dirigeants eux-mêmes ont peur de parler de profit et de vente.

Il est intéressant de remarquer que la décision d’implanter la réingénierie provient de la haute direction. Néanmoins, la réingénierie est présentée comme un changement radical dans une structure démocratique.

Il nous semble d’après le discours des dirigeants du Mouvement que Desjardins avec la réingénierie implante une approche relationnelle avec ses membres. Ainsi, de nombreuses composantes de l’approche relationnelle ont été mentionnées : écoute du membre, le lien de confiance, l’offre personnalisée, développement d’une relation de long terme avec les membres.

Le Mouvement des caisses Desjardins a donc décidé de réaliser une réingénierie de ces processus pour rattraper son retard par rapport aux banques, entre autres, sur le plan de la satisfaction et de la fidélisation des membres. Cette réingénierie devrait si on se réfère au discours des dirigeants favoriser l’implantation d’une approche relationnelle. Le défi pour Desjardins est d’intégrer ses valeurs, que nous avons présentées, à la réingénierie et à l’approche relationnelle. Maintenant, que le contexte de notre étude semble plus clair,

nous allons présenter notre cadre conceptuel et nos questions de recherche.

IV. CADRE CONCEPTUEL ET QUESTIONS