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Section IV Les idées et les contenus des études

Section 2 Le gouvernement français face à la Chine nouvelle

Au début de 1949, le gouvernement français commença à réfléchir sur la situation chinoise. Le problème essentiel établit de savoir si les troupes communistes, franchissant le Yang-Tsé arriveraient directement à la frontière sud de la Chine. La guerre d‟Indochine durait depuis plus de deux ans. Bien que le Vietminh se soit trouvé dans une situation défavorable en raison du manque d‟armes, de nourriture et de médicaments, il continuait à résister à l‟armée française. De plus, le gouvernement français affrontait des condamnations morales : outre le mouvement contre la guerre que conduisait le parti communiste français en métropole, bien des pays asiatiques, comme l‟Inde et la Birmanie, s‟opposaient à ce conflit. Même les Etats-Unis réprouvaient les politiques coloniales françaises et demandaient à son gouvernement d‟accorder l‟indépendance au Vietnam, au Laos et au Cambodge.

Dans ce contexte, l‟évolution de la Chine continentale, une région limitrophe de la péninsule indochinoise, représentait une sévère épreuve pour le gouvernement français. Si le parti communiste chinois gagnait la guerre civile, les communistes vietnamiens seraient stimulés par la révolution chinoise. Et il était probable que Pékin soutienne alors le Vietminh Ŕ une menace sérieuse pour le corps expéditionnaire français.

Dans une note du 11 janvier, la Direction d‟Asie-Océanie mentionna que « les provinces méridionales de la Chine, comme Kouang-Si, Kouang-Toung, Szetchouen et Yunnan, qui sont limitrophes de l‟Indochine, sont importantes pour la sécurité et l‟économie de l‟Indochine ». Si les quatres provinces étaient contrôlé par les

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Mao Zedong, Maozedong xuanji (Œuvres choisies de Mao Zedong), Tome 4, Pékin, Renmin chubanshe (Éditions du peuple), 1991, p.1374.

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communistes chinois, le danger serait grand pour l‟Indochine. Mais les diplomates français nourrissaient encore bien des illusions. Ils ne pensaient pas que le parti communiste chinois puisse facilement contrôler le Sud de la Chine : « du seul point de vue économique, le maintien, aux abords de l‟Indochine, d‟une sorte de glacis aussi peu perméable que possible aux influences communistes, il importe, semble-t-il, d‟examiner avec soin le parti que nous pourrions tirer du vieux séparatisme toujours vivace dans cette partie de la Chine. » De plus, les gouvernements étrangers pouvaient utiliser l‟arme économique pour faire pression sur les autorités communistes : « les nouvelles autorités communistes, pendant quelque temps au moins, ménageront les intérêts étrangers parce qu‟elles auront besoin, pour tenter de résoudre les immenses problèmes qui se posent en Chine, de l‟appui économique des grandes puissances, il n‟y a pas à craindre que les initiatives suggérées ci-dessus doivent, au moins dans un avenir proche, amener les communistes à prendre, à titre de représailles, des mesures funestes à nos intérêts. »1 Cette estimation était plus optimiste que les vues anglaises. Dans un mémorandum du gouvernement britannique au Quai d‟Orsay, les Anglais prévinrent que l‟extension du régime communiste à toute la Chine était inévitable. Mais les Français se demandèrent si « le pessimisme des Anglais à l‟égard de la situation chinoise est entièrement justifié. » Cependant, vu les intérêts et l‟influence de la Grande-Bretagne en Extrême-Orient, la France dut coopérer avec la Grande-Bretagne sur le problème chinois pour maintenir leurs intérêts communs en Chine : « s‟inspirant de la coopération européenne, [il faudrait] créer une sorte d‟organisme où seraient représentés divers pays européens et qui serait chargé, non seulement de développer le commerce entre la Chine et ces divers pays, mais aussi d‟intervenir auprès des autorités chinoises chaque fois que des intérêts communs se trouveraient en cause. »2

La Direction d‟Asie-Océanie résuma ses idées dans un aide-mémoire adressé à la Grande-Bretagne. Certes, le Quai d‟Orsay s‟inquiétait : Mao Zedong et ses collègues « ne doit nous laisser d‟illusion ni sur l‟intimité actuelle de leurs rapports avec Moscou ni sur leur volonté d‟établir un régime du type totalitaire qui élimine progressivement les conceptions occidentales de la propriété et de la libre entreprise. » Et d‟ajouter : « Les conséquences de l‟établissement en Chine d‟un gouvernement à direction communiste seront également extrêmement sérieuse dans

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AMAE, Asie-Océanie, Chine, 119QO/210, Note : Répercussions de la victoire des communistes chinois sur nos intérêts en Extrême-Orient, 11 janvier 1949, pp.1-3.

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AMAE, Asie-Océanie, Chine, 119QO/210, Note : Répercussions de la victoire des communistes chinois sur nos intérêts en Extrême-Orient, 11 janvier 1949, pp.4-6.

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les pays voisine. Le triomphe du communisme Ŕ même sous une forme édulcorée Ŕ dans un pays de première importance et bénéficient en Asie du prestige traditionnel de la Chine aura une immense résonance du Japon aux Indes. » Ainsi, la victoire du parti communiste chinois exercerait une influence sur l‟Indochine, qui « a une frontière commune de 1800 kilomètres avec la Chine, frontière aisément perméable en raison de sa longueur même et du relief du terrain. »1

Le Quai d‟Orsay proposa deux options optimistes. D‟une part, il devait utiliser les moyens économiques pour séduire le régime communiste. « Ce pays qui sera relativement pacifié et offrira des conditions favorables à une reprise de la vie économique, le gouvernement communiste sera confronté aux mêmes problèmes de ravitaillement général et d‟équipement industriel que le gouvernement Kuomintang n‟a su résoudre. Pour y faire face et justifier son programme de relèvement de la Chine, le gouvernement communiste sera amené à faire appel à des concours extérieurs, tout d‟abord sous forme d‟importation de produits alimentaires et de matières premières de base, puis sous forme d‟aide technique et sans doute aussi financière. Il ne semble pas que, dans les circonstances actuelles, l‟U.R.S.S. puisse lui être d‟un grand secours. Seule l‟Asie du Sud-Est peut fournir le riz nécessaire et les puissances occidentales les produits d‟équipement et les capitaux. » Et il tenta de poursuivre : le gouvernement communiste « sera assez réaliste pour admettre et même rechercher les arrangements nécessaires à la reconstruction du pays et au ravitaillement alimentaire de la population. Il y a là des possibilités de compromis et de transaction. Pour en tirer tout le parti possible, le Ministère des Affaires Etrangères serait favorable à toute initiative d‟échanges de renseignements et de collaboration entre entreprises privées sur le plan local. De même il serait d‟accord sur l‟opportunité de prendre en commun, si le besoin s‟en faisait sentir, certaines mesures de rétorsion économique. »

Le Quai d‟Orsay pensait d‟autre part que les provinces méridionales chinoises constituaient une vaste zone neutre. Si une résistance militaire organisée ne pouvait pas durer contre la poussée communiste en provenance du Nord, le contrôle direct des autorités communistes sur les provinces du sud serait difficile en raison du particularisme des populations locales que n‟avaient jamais complètement fait disparaître les régimes antérieurs.2

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AMAE, Asie-Océanie, Chine, 119QO/210, Aide-Mémoire du ministère des Affaires étrangères à l’ambassade de la Grande-Bretagne à Paris, 2 février 1949, p.7.

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AMAE, Asie-Océanie, Chine, 119QO/210, Aide-Mémoire du ministère des Affaires étrangères à l’ambassade de la Grande-Bretagne à Paris, 2 février 1949, pp.10-11.

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Pour défendre les intérêts des puissances occidentales, le Quai d‟Orsay accepta l‟idée britannique de coopérer avec les pays du Commonwealth, les Pays-Bas, la Birmanie et le Siam afin de définir une attitude commune des Etats intéressés sur les problèmes du Sud-Est asiatique. Il estima aussi que « la protection de l‟ordre dans l‟Asie méridionale contre les menées subversives externes ou internes serait puissamment renforcée si des contacts étaient établis à ce sujet par les puissances intéressées avec les Etats-Unis d‟Amérique. » Il croyait que les Etats-Unis avaient de multiples raisons pour éviter de voir passer ces territoires sous l‟allégeance idéologique, sinon politique, d‟une Chine communiste. Si les Etats-Unis participaient « à la coopération franco-britannique dans l‟Asie du Sud-Est, [cela] constituerait certainement un élément psychologique de première importance. »1

Cet aide-mémoire dévoile les trois éléments que le Quai d‟Orsay prenait en compte à l‟égard du triomphe communiste chinois : la protection des intérêts français en Chine grâce aux contacts avec le nouveau régime et l‟arme économique ; la défense de l‟Indochine pour éviter l‟infiltration des forces communistes chinoises; la coopération avec la Grande-Bretagne et l‟obtention du soutien des Etats-Unis en Extrême-Orient.

Le Quai d‟Orsay ordonna à Jacques Meyrier, l‟ambassadeur français en Chine, de « rester sur place » et de ne pas suivre le Kuomintang à Canton : « Quel que soit le régime qui s‟installe en Chine, notre évident intérêt nous demande de tenter à tout prix de rester sur place, de sauver les positions acquises, et de composer, dans toute la mesure de nos moyens, avec un gouvernement qui risque cependant de nous devenir rapidement hostile. »2 Le gouvernement français essayait ainsi de nouer contact avec les nouveaux dirigeants chinois pour maintenir les intérêts français et la position de ses représentants diplomatiques en Chine.

L‟espoir de voir maintenue une zone neutre au Sud de la Chine fut cependant déçu. En avril, les troupes communistes chinois traversèrent le Yangtze et prirent rapidement les villes de l‟Est de la Chine. Le 27 mai, Shanghai, le centre économique du pays, fut libéré par les forces communistes, les faibles troupes du Kuomintang n‟opposant qu‟une faible résistance. Face à l‟urgence de la situation, Jacques Meyrier s‟inquiéta : « Ce ne serait plus par mois mais par semaines qu‟il faudrait compter dans le temps qui nous sépare du moment où les troupes communistes arrivent aux confins

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AMAE, Asie-Océanie, Chine, 119QO/210, Aide-Mémoire du ministère des Affaires étrangères à l’ambassade de la Grande-Bretagne à Paris, 2 février 1949, p.9.

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de l‟Indochine. »1

Au moment où la domination du parti communiste chinois sur la Chine continentale semblait inévitable, le Quai d‟Orsay réfléchit au problème de la reconnaissance du nouveau régime. Les représentants diplomatiques français en Extrême-Orient se divisaient : d‟une part, J. Meyrier et ses collègues en poste en Chine soutenaient la reconnaissance immédiate du régime communiste ; d‟autre part, Paul Pignon, Haut-Commissaire en Indochine, estimait qu‟il ne fallait pas céder à la précipitation.

Dans une note du 21 mai, la Direction d‟Asie-Océanie compara ces deux attitudes : « J. Meyrier considère qu‟une reconnaissance rapide du futur gouvernement communiste offre le meilleur moyen de parer au danger que le déferlement de la vague communiste fait courir à l‟Indochine. Sur ce point, l‟opinion de M. Meyrier paraît bonne. La Chine communiste exigera une reconnaissance complète. Elle n‟acceptera pas un statut d‟infériorité même pour un temps. Elle pourra, en outre, imposer une rupture de toutes relations avec le gouvernement Kuomintang. » Mais le Haut-Commissaire en Indochine défendait une thèse différente : « Il considère qu‟une reconnaissance trop hâtive mettrait d‟une part à la disposition du gouvernement communiste chinois les moyens d‟action en Indochine qui ont été accordés à la Chine nationaliste par les traités de 1946, et d‟autre part, serait interprétée comme une preuve de faiblesse de notre part par l‟ensemble de l‟opinion vietnamienne. M. Pignon conseille donc “la plus grande circonspection dans les pourparlers qui pourraient être menés à ce sujet avec les gouvernements américain et britannique”. » 2

Le Directeur d‟Asie était enclin à partager les vues de M. Pignon. « Il semble donc que rien ne milite en faveur d‟une reconnaissance hâtive par la France du futur gouvernement chinois. Tout en admettant qu‟il n‟a jamais été politique de refuser de reconnaître ce qui est, nous n‟avons intérêt à essayer d‟aller vite dans cette affaire. Une politique commune des puissances occidentales, basée sur ces idées, doit être recherchée. Cette solidarité maintenue entre la reconnaissance française et celle des autres grandes puissances occidentales est en définitive la solution présentant pour nous le plus de garantie en face du danger qui menace l‟Indochine. »3

Le Ministre des Affaires Etrangères, Robert Schuman, pensa qu‟il devait cerner

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AMAE, Asie-Océanie, Chine, 119QO/210, Télégramme de l’ambassade de France en Chine à Paris, 9 mai 1949. 2

AMAE, Asie-Océanie, Chine, 119QO/212, Note de la direction d’Asie-Océanie : De la reconnaissance du futur gouvernement communiste chinois, 21 mai 1949, pp.6-7.

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AMAE, Asie-Océanie, Chine, 119QO/212, Note de la direction d’Asie-Océanie : De la reconnaissance du futur gouvernement communiste chinois, 21 mai 1949, pp.7-8.

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la position du parti communiste chinois sur ce problème. Lors du Conseil des Ministres du 10 juin, il suggéra de contacter le régime de Mao Zedong. Quoique les délégués du gouvernement du P.C.C. ait refusé d'entrer en rapport avec les agents diplomatiques français, Schuman chargea « certaines personnalités françaises d'essayer de prendre des contacts. » Il nota aussi que « les Américains semblent désemparés devant les succès communistes et les Anglais s'orientent vers une reconnaissance du nouveau gouvernement. »1

En conclusion, l‟opinion générale du Quai d‟Orsay fut à adopter une attitude d‟attente et de réserve sur la question. Il fallait attendre le développement de la conjoncture et connaître les intentions véritables de Mao Zedong. D‟ailleurs, il était nécessaire pour le gouvernement français de garder la même attitude avec ses alliés, surtout les Etats-Unis et la Grande-Bretagne. La Direction d‟Asie-Océanie envoya un télégramme à Meyrier le 7 juillet : une reconnaissance hâtive du régime communiste endommagerait les intérêts français en Indochine et le gouvernement de Bao Dai.2

A l‟époque, les autorités nouvelles renforcèrent la sécurité des villes libérées. Elles eurent peu de contact avec les consuls des pays occidentaux, et ne les mirent pas dans l‟embarras. A Shenyang, le consulat français pouvait continuer à envoyer les télégrammes et les courriers, sortir et entrer dans le centre de la ville.3 Bien que la sécurité et la liberté personnelle des diplomates aient été lésée, les autorités communistes refusèrent de reconnaître leurs statuts diplomatiques, les considérant seulement les comme résidents étrangers.4

Face à cette attitude, les diplomates français étaient plein d‟inquiétude. Ils espérèrent que le gouvernement français ferait les premiers pas pour reconnaître le nouveau régime afin de rétablir la relation sino-française et défendre les intérêts français en Chine. Deux mois après la libération de Shanghai, la situation se détériora. Les sociétés, écoles, institutions français à Shanghai firent faillite. Même les diplomates et les émigrants français étaient en danger. Au vu de cette situation, le Quai d‟Orsay demanda à Meyrier et au consul à Canton de quitter la Chine.5

, Meyrier était d‟accord mais il demanda encore une fois au gouvernement français de reconnaître le nouveau régime le plus vite possible. Dans son télégramme du 4 août, il

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AN, 4 AG 3-11, Procès-verbal de la séance du Conseil des Ministres tenu le 10 juin 1949, pp.5-6. 2

AMAE, Asie-Océanie, Chine, 119QO/212, Le Ministre des Affaires Etrangères à AmbaFrance Nankin, Reconnaissance du gouvernement chinois, 7 juillet 1949, p.14.

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AMAE, Asie-Océanie, Chine, 119QO/24, Télégramme de Paris à Londres et à Washington, 12 août 1949, p.24. 4

AMAE, Asie-Océanie, Chine, 119QO/24, Télégramme de Nankin à Paris, 28 août 1949, p.93. 5

AMAE, Asie-Océanie, Chine, 119QO/210, Le Ministre des Affaires Etrangères à AmbaFrance à Nankin : Départ éventuel de M. Meyrier, 6 août 1949, p.41.

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souligna son point de vue pour sauvegarder les intérêts français : « le seul moyen que nous puissions avoir de mettre un frein à l‟agressivité communiste est d‟accueillir au plus tôt les dirigeants de la Chine Ŕ en reconnaissant leur Gouvernement Ŕ dans la société internationale des nations civilisées. » Meyrier trouvait que « nos colonies, nos œuvres et nos entreprises en Chine seraient privées de la garantie de sécurité que représentent pour elles nos consulats et l‟Ambassade. » Si la reconnaissance n‟était pas réalisée, les consulats et l‟Ambassade seraient fermés. « Nos compatriotes perdent courage et s‟orientent vers l‟abandon », ces populations « ne seraient plus soutenues de l‟appui moral que nos représentants leur ont jusqu‟ici prodigué. »1

Le 7 août, Meyrier envoya un autre télégramme au Ministère des Affaires Etrangères. Il souligna que les ambassadeurs des puissances du pacte de Bruxelles « sont d‟accord avec M. Meyrier pour estimer qu‟il conviendrait que les puissances contractantes occidentales se concertent dès maintenant pour déterminer leur attitude à cet égard, attitude qu‟ils souhaitent aussi réaliste que possible, c‟est-à-dire favorable à l‟établissement de jure ou de facto de relations diplomatiques avec le gouvernement de Mao Tsé Toung. »2 Le consul français à Shanghai, Jean Royère, montra que les sécurités des personnes et des biens étrangères étaient menacées par les sentiments anti-impérialistes du régime communiste. Il approuva l‟opinion de Meyrier : « Reconnaitre Mao Tsé Toung, c‟est avez l‟espoir de sauver ce qui peut être sauvé, se donner des chances de tempérer son régime. Lorsque l‟armée de la libération aura conquis tout le pays, ce sera une nécessité, mais alors tout aura été perdu. »3

Le directeur d‟Asie-Océanie défendait pourtant un point de vue différent. « On ne saurait mettre en balance les intérêts commerciaux et culturels qu‟elle possède en Chine, avec les intérêts qu‟elle possède en Indochine. Ces derniers peuvent encore être défendus, tandis que les premiers sont d‟ores et déjà condamnés et subiront, tôt ou tard, le sort des intérêts que nous possédions en Roumanie ou en Pologne. » Il trouva que la reconnaissance du gouvernement de Mao Zedong n‟influerait pas sur la défense des intérêts français en Chine. Il exprima son accord avec M. Pignon : « Dans ces conditions, c‟est à la thèse du Haut-Commissariat qu‟il convient de se relier : reconnaissance, certes, mais non précipitée. Cette solution a l‟avantage, par ailleurs, d‟aligner notre politique sur celle des Etats-Unis. »4

Il proposa donc au Ministre des

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AMAE, Asie-Océanie, Chine, 119QO/212, Télégramme de l’Ambassadeur à Changhai, 4 août 1949, pp.15-16. 2

AMAE, Asie-Océanie, Chine, 119QO/212, Télégramme de Nankin à Paris, 7 août 1949, p.18. 3

AMAE, Asie-Océanie, Chine, 119QO/212, Télégramme de Fransulat Shanghai à Paris, 12 août 1949, pp.24-26. 4

AMAE, Asie-Océanie, Chine, 119QO/212, Note pour le ministre : Position française à l’égard de la reconnaissance du futur gouvernement communiste chinois, 3 septembre 1949, p.31.

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Affaires Etrangères la solution suivante: « Etant admis que le Gouvernement français doit fixer sa politique chinoise en fonction de l‟Indochine, il n‟y a aucune raison d‟abandonner aujourd‟hui le principe de la politique d‟attente et de réserve précédemment préconisée de ce point de vue. Aucun élément nouveau n‟est en effet intervenu depuis l‟analyse de la situation faite en Mai dernier. »1

Le 1er octobre 1949, au moment de la fondation de la République Populaire de Chine, Mao Zedong, dans un discours, mentionna que « le gouvernement de la République Populaire de Chine est le seul gouvernement légitime qui représente le peuple entier de la République populaire de Chine. Le gouvernement de la Chine nouvelle est disposé à nouer des relations diplomatiques avec tous les pays étrangers qui respectent les principes de l‟égalité, de l‟avantage réciproque, et de respect mutuel du territoire et de la souveraineté. »2 Le texte de cette déclaration ainsi qu‟une lettre de Zhou Enlai furent envoyés à tous les représentants étranger à Pékin. « L‟établissement des relations diplomatiques normales de la République populaire de Chine avec tous les pays du monde est nécessaire. »3 affirmait-elle.

Les représentants français qui restaient en Chine tentèrent encore une fois de persuader le gouvernement de reconnaître la Chine nouvelle. Attaché militaire français à Nankin, Jacques Guillermaz, envoya un télégramme à Paris. L‟établissement de la Chine nouvelle amenerait les dangers à la frontière sino-indochinoise et de fortes chances pour que le Tonkin devienne vite une zone de friction internationale affirmait-il. « Dans cette hypothèse il semble que notre politique de base doive consister à gagner du temps pour présenter enfin et dès que possible aux intrigues chinoises le spectacle d‟une Indochine pacifiée et effectivement