La méthode structuro-globale audio-visuelle répond au besoin d’une méthode efficace pour l’enseignement du FLE. Elle est construite autour de l’utilisation conjointe de l’image et du son. Le support sonore est constitué par des enregistrements magnétiques, supports d’un enseignement de grammaire impliquant des exercices de réemploi des structures en situation, par transposition. La pratique de la langue est finalisée par la découverte de sa grammaire.
L’enregistrement sonore est conçu comme un modèle acoustique invariable et comme la présence d’une réalité linguistique étrangère qui n’est plus exclusivement apportée par le maître. Le support visuel par des vues fixes donne une idée du contexte social où l’on utilise la langue étrangère enseignée. L’objectif est d’enseigner aux apprenants à apprendre à parler et à communiquer dans des situations de la vie courante. Les méthodes audiovisuelles recourent à des séquences d’images de deux types: d’un côté, des images de transcodage qui traduisent l’énoncé en rendant visible le contenu sémantique des messages, de l’autre, des images situationnelles qui privilégient la situation d’énonciation et les composantes non linguistiques comme les gestes, les attitudes, les rapports affectifs, etc. L’image est conçue comme un point de départ possible de la compréhension, comme un simulacre d’une certaine réalité culturelle. L’utilisation combinée de l’image et du son comme instruments d’une représentation audio-visuelle simule un acte de communication et permet d’en provoquer de nouveaux.
Dans la méthode structuro-globale audio-visuelle (SGAV), la priorité est accordée à la langue parlée. La langue écrite n’intervient qu’une fois que l’apprenant a déjà une certaine maîtrise de la langue orale. On évite la traduction et la comparaison avec la langue première de l’apprenant. Le matériel didactique joue un rôle très important, mais l’enseignant doit également être technicien de manière à savoir faire fonctionner en synchronie le magnétophone et le projecteur à film fixe (les diapositives). Quant aux apprenants, ils ont également un rôle assez actif dans leurs interactions, tant avec l’enseignant qu’entre eux, car celles-ci sont considérées comme des lieux privilégiés pour apprendre rapidement à comprendre et à parler dans des situations très simples. La méthode structuro-globale audio-visuelle prend appui sur un document de base, un dialogue conçu pour présenter le vocabulaire et la structure à étudier. Elle est centrée sur l'apprentissage de la communication, essentiellement verbale. La langue est vue avant tout comme un moyen d'expression et de communication orale. L'écriture n'est considérée que comme un dérivé de l'oral; le non-verbal (gestes, mimiques, etc.) est très important dans cette méthode dans laquelle l'apprenant n'a
aucun contrôle sur le développement ou sur le contenu du cours, mais est actif puisqu'il doit continuellement écouter, répéter, comprendre, mémoriser et parler librement.
Selon Puren (1988), la méthode audio-visuelle française est une méthode originale, parce qu’elle constitue une synthèse inédite entre la méthodologie induite par les moyens audiovisuels et une psychologie de l’apprentissage spécifique, le structuro-globalisme. La méthode audio-visuelle se situe donc dans le prolongement de la méthode directe tout en essayant de proposer des solutions aux problèmes auxquels s’étaient heurtés les partisans de la méthode directe. Dans la méthode audiovisuelle, les quatre compétences (comprendre, parler, lire et écrire) sont visées, bien que l’on accorde la priorité à l’oral sur l’écrit. La méthode audio-visuelle prend aussi en compte l’expression des sentiments et des émotions, non considérés auparavant.
Dans la méthode structuro-globale audio-visuelle, la langue parlée, qui est donc prioritaire, est présentée au moyen de dialogues élaborés en fonction d’une progression décidée à l’avance et qui prescrit l’introduction du lexique et de la morphosyntaxe de la langue étrangère. Cette méthode présente la parole en situation (selon des conditions plausibles, d’où son appellation de « situationnelle »). Elle recourt aux images, essentiellement pour la restitution d’une partie des circonstances (spatio-temporelles, psychologiques, interactionnelles) dans lesquelles se présentent les répliques.
D’après Proscolli (1999), « l’enseignement grammatical est inductif, implicite : il s’agit de faire réemployer les éléments des dialogues de départ dans des situations différentes
susceptibles d’amener à mieux en percevoir les régularités (exercices de réemploi) » (p. 31).
La méthode structuro-globale audio-visuelle interdit toute explication grammaticale.
Les exercices structuraux fonctionnent comme une technique d’application de la méthode intuitive intégrale à l’enseignement grammatical. Au cours de ceux-ci, l’enseignant favorise l’analyse implicite des structures grammaticales par les apprenants. L’apprentissage passe par l’écoute et par la vue. La langue est considérée comme un ensemble audiovisuel : la grammaire, les clichés, la situation et le contexte linguistique ont pour but de faciliter l’intégration cérébrale des stimuli extérieurs. La méthode audio-visuelle se différencie donc
dela méthode directe par l’absence de réflexion grammaticale.
Rappelons les phases canoniques de la leçon structuro-globale audio-visuelle: la présentation/explication, la répétition/mémorisation, l’exploitation et la transposition, tout en
précisant que la terminologie peut être différente d’un auteur à l’autre.
La phase de présentation est globale, sans intervention de l’enseignant. Elle est fréquemment distinguée de la phase d’explication au cours de laquelle l’apprenant est amené à apprendre le dialogue réplique par réplique, sous la direction de l’enseignant, souvent avec un début d’exploitation permettant à l’apprenant de découper le segment sonore en unités de sens. Les phases d’exploitation et de transposition ont parfois été regroupées sous le terme d’« exploitation ».
Cette méthode a dominé en France de 1960 à 1970 et nous nous rappelons le manuel De Vive Voix (DVV) dont la première édition date de 1964/1965. Le matériel de ces manuels
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comprend un livre d’élève illustré de nombreuses images, un livre du maître, un cahier d’exercices et un cahier d’exercices de laboratoire, des dessins fixes (diapos) et des cassettes audio. Les dialogues empruntent à la langue courante de la vie quotidienne convoquée à partir de la présentation d’images à commenter, les personnages sont vivants et les situations assez authentiques. Les images servent de point de départ pour une compréhension directe
qui ne passe pas par la langue première des apprenants.
Selon Rivenc, toutes les méthodes audiovisuelles ont en commun d’accorder la priorité à la communication parlée qui est constituée dans un cadre de situations en simulation (Rivenc, cité par Chalaron, 1994).
Il est évident que les méthodes audiovisuelles donnent la priorité à l’oral. Plus précisément, elles accordent une priorité à la langue orale usuelle considérée comme l’outil de communication principal, l’écrit n’étant qu’un reflet, une transcription de l’oral. Elles abordent l’apprentissage par une focalisation sur l’oral et utilisent comme supports des documents de base dialogués, conçus pour présenter le vocabulaire et les structures à étudier, accompagnés d’images et présentant la parole en situation. La compréhension orale des dialogues est ainsi rendue plus aisée grâce à l’image qui permet la compréhension globale du dialogue. Le lexique est limité aux mots les plus courants. Moirand (cité par Boyer, 1990) note que les thèmes des dialogues relèvent de centres d’intérêt qui ne présentent pas de véritables situations de communication. Le contenu linguistique est présenté selon une certaine progression.
Les méthodes audiovisuelles visent avant tout des objectifs linguistiques en vue d’une pratique communicative de la langue. La civilisation et la culture françaises n’y sont pas des objets d’étude. D’ailleurs, les auteurs des méthodes ne formulent pas d’objectifs culturels. La thématique culturelle ne se manifeste que rarement et essentiellement sous la forme de l’histoire de l’époque et des transformations sociales. Bien que la culture française n’occupe pas de place importante dans les méthodes audio-visuelles, l’utilisation systématique de l’image intervient, de fait, comme un élément culturel de l’époque. Les dimensions para-linguistiques, le code gestuel et les situations spécifiques relèvent de facteurs socioculturels, c’est-à-dire qu’ils sont spécifiques à chaque communauté et donnent des informations culturelles.
La méthode audiovisuelle s’appuie sur un document de base dialogué conçu pour présenter le vocabulaire et les structures à étudier. D’après ce que nous avons étudié, écouté et observé, nous pensons qu’elle ne motive pas l’intérêt des apprenants, car les activités et exercices sont répétitifs et les caractères des personnages demeurent stéréotypés, tout comme le sont les thèmes culturels. Mais il faut admettre la remarque de Galisson (1980) « chaque
méthodologie est un produit ˝non biodégradable˝ qui laisse toujours des traces » (p. 134).
Mais de quelle autre méthode la méthode structuro-globale-audiovisuelle est-elle proche ? D’après Besse (1980), la méthode structuro-globale-audiovisuelle serait plus proche de la méthode directe européenne qu’elle ne l’est de l’audio-orale américaine et présenterait également des affinités avec la méthode situationnelle anglaise. En ce sens, la structuro-globale-audiovisuelle aurait le mérite de tenir compte du contexte social d’utilisation d’une langue et permettrait d’apprendre assez vite à communiquer oralement avec des natifs de
langues étrangères, mais n’offrirait pas la possibilité de comprendre des natifs parlant entre eux, ni les médias.
Calliabetsou parle de Méthodes Directes Première Génération (MDPG) et Deuxième Génération (MAO, MSGAV). Voici comment elle décrit les similitudes et les différences entre elles, les trois méthodes présentant des similitudes évidentes et, plus précisément :
- priorité à la langue orale ; - objectifs linguistiques et culturels pratiques ;
- centration sur la grammaire linguistique ; - processus d’apprentissage mécanique ; - approche directe/inductive/implicite ; - dramatisation de l’erreur ;
- recours à des dialogues ou des centres d’intérêt qui sont souvent trop conventionnels pour susciter des besoins d’échanges ;
- problème de transfert des comportements verbaux dans un contexte authentique ; - utilisation des moyens audiovisuels comme de simples stimuli.
Pourtant ces similitudes ne devraient pas masquer les différences. (Calliabetsou, 1995, pp. 163-164).
Selon Besse et Galisson, (1980 à l’environnement), la méthode structuro-globale-audiovisuelle « a toujours donné au paralinguistique et situationnel l’attention accordée aux problèmes de signification discursive et, plus généralement, aux valeurs d’emploi des énoncés dans leur contexte linguistique et non linguistique » (p. 49).