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L’importance des langues chez les autres ordres mis- mis-sionnairesmis-sionnaires

La composante religieuse

I.4 Les Jésuites

I.4.2 L’importance des langues chez les autres ordres mis- mis-sionnairesmis-sionnaires

Bien que l’usage des langues autochtones soit une caractéristique essentielle de la politique des Jésuites, il est également appliqué par d’autres ordres mis-sionnaires et peut être considéré comme un attribut de l’Empire français263. Nous l’avons vu, les premiers missionnaires à se rendre dans le Nouveau Monde sont les Récollets. Confrontés à la barrière de la langue en matière d’évangélisation, leur solution se révèle très proche de celle des Jésuites.

Gabriel Sagard, membre de l’ordre des Récollets, est le premier à s’intéresser véritablement aux langues amérindiennes. Missionnaire auprès des Hurons, il s’efforce de comprendre leur langue et de la traduire en français. Il est no-tamment l’auteur d’unDictionnaire de la langue huronne, ouvrage auquel ont

262 Poisson,Lettres édifiantes et curieuses, écrites des missions étrangères, [missionnaire aux Akenas], [non datée, après 1731], vol. 6, p. 414.

263 Un récent article présente d’ailleurs la France de cette époque comme une société po-lyglotte dans laquelle les langues des différentes communautés, qu’il s’agisse du parler autochtone ou de patois locaux, ont leur place et sont respectées par les autorités gouver-nementales. Cohen, Paul, « Penser un empire de Babel, Langues et célébrations du pouvoir royal dans le monde atlantique français XVIe-XVIIesiècles », pp. 35-54.

recours les Jésuites qui se rendent au Canada après lui. Dans leGrand voyage au Pays des Hurons, Gabriel Sagard expose sa théorie concernant la langue des Hurons. Elle s’avère similaire à celle des Jésuites dans leursRelations.

Les Jésuites ne sont donc pas le seul ordre à avoir recours à l’apprentissage des langues des peuples à convertir. Avant eux, les Récollets ont posé les pré-mices du mode d’agissement français au regard des langues en Amérique du Nord. Les difficultés rencontrées par Paul Le Jeune avec la langue des Montagnais sont les mêmes pour Sagard quelques années plus tôt chez les Hurons. Lui non plus ne trouve pas de traduction des mots nécessaires à la compréhension de la religion catholique ce qui rend le travail d’évangélisation difficile :

«[…] pour estre leur langue assez pauvre & disetteuze de mots en plu-sieurs choses, & particulierement en ce qui est des mysteres de nostre saincte Religion lesquels nous ne leur pouvions expliquer, ny mesme le Pater noster, sinon que par periphrase, c’est-à-dire, que pour un de nos mots, il en falloit user de plusieurs des leurs : car entr’eux ils ne sçavent que c’est de Sanctification, de Regne celeste, du tres-sainct Sacrement, ny d’induire en tentation. »264

Néanmoins, ces problèmes de traduction démontrent une réelle volonté de la part de Sagard d’aller vers l’autre, de faire un effort afin d’intégrer la langue des Hurons plutôt que de leur imposer la sienne. Du point de vue de la langue, l’attitude de Sagard est conforme à celle des Jésuites.

Cette difficulté de traduction des concepts chrétiens dans les langues au-tochtones est également mentionnée par Pierre Barrere dans sa relation de 1743 sur la Guyane265. Ce médecin français qui n’appartient à aucun ordre religieux reprend à son compte les arguments des Récollets et des Jésuites, illustrant une fois encore l’uniformité de la pensée française quant à l’attitude à avoir avec les peuples à convertir.

264 Sagard, Gabriel,Le grand voyage du pays des Hurons ; suivi du Dictionnaire de la langue huronne, pp. 164-165.

265 Barrere, Pierre,Nouvelle relation de la France Equinoxiale, contenant la Description des Côtes de la Guiane ; de l’Isle de Cayenne ; le Commerce de cette Colonie ; les divers chan-gemens arrivés dans ce Pays ; & les Mœurs & Coûtumes des différens Peuples Sauvages qui l’habitent, pp. 218-219.

Chrestien le Clercq, historien récollet, a lui aussi une vision très proche de celle des Jésuites. Pour lui, le pouvoir réside dans les langues et leur appren-tissage. Grâce à elles, les conversions se feront sans aucun problème :

« Si nous sçaviõs parfaitement bien la Langue, je ne sçais quel profit l’on ne feroit pas avec ces peuples. »266

Les idées des Récollets sur la langue sont tellement semblables chez la plu-part de leurs auteurs que certains n’hésitent pas à reprendre les écrits de leurs prédécesseurs à leur compte. Ainsi, Chrestien Le Clercq, dans son Etablisse-ment de la foy dans la Nouvelle France […], cite les paroles du missionnaire Jo-seph Le Caron, présent en Nouvelle-France en 1615, au sujet des problèmes liés à la traduction des concepts chrétiens dans les langues amérindiennes :

«[…] il est vray que leur Langue assez naturelle pour toute autre chose, est tellement sterile en ce point, qu’on n’y trouve point de termes pour exprimer la Divinité ni aucuns de nos Mysteres, non pas même les plus communs : c’est un de nos plus grands embaras. »267

En 1720, en Louisiane, Louis Hennepin reprend presque mot pour mot les paroles de Joseph Le Caron :

«[…] mais enfin leur langue, qui est fort naturelle & fort expressive en toute autre chose, est tellement sterile à cet égard, qu’on n’y trouve au-cun terme pour exprimer la Divinité, ou quelqu’un de nos mysteres par même les plus communs. C’est un des plus grands embarras que l’on trouve, quand on veut les convertir. »268

Le fait que l’on retrouve, pratiquement au mot près, à un siècle d’écart, la même analyse des langues des Amérindiens du Canada et de ceux de Loui-siane démontre la continuité de la pensée des Récollets à ce sujet.

Malgré les critiques qui leurs sont adressées par les Jésuites en Louisiane, les Capucins considèrent qu’il est nécessaire d’apprendre la langue des

266 Le Clercq, Chrestien,Etablissement de la foy dans la Nouvelle France[…], vol. 1, p. 134.

267 Ibid., p. 281.

268 Hennepin, « Voyage en un pays plus grand que l’Europe, Entre la Mer Glaciale & le Nouveau Mexique », in :Relations de la Louisiane et du Fleuve Mississipi, Oû l’on voit l’état de ce grand Pais & les avantages qu’il peut produire & c.,p. 285.

peuples à convertir. Pour le père du Tertre, missionnaire aux Antilles, il s’agit de la première étape à franchir pour la conversion des autochtones :

« Tout le temps que le R. p. Raymond demeura à la Dominique, il s’appli-qua à apprendre la langue des Sauvages ; il en assembloit tous les jours le plus grand nombre qu’il pouvoit leur enseignoit l’Oraison Dominicale […], se servant du jargon dont les Sauvages usent avec les François, pour s’en faire mieux entendre. »269

Il en va de même des Ursulines et Hospitalières, congrégations féminines envoyées dans les colonies dans le but de convertir les populations autoch-tones, mais agissant essentiellement auprès des femmes et des filles amé-rindiennes. Suivant l’exemple des Jésuites, les Ursulines et les Hospitalières s’efforcent d’apprendre les langues de celles qu’elles désirent convertir270. Lahontan insiste lui aussi particulièrement sur l’importance de l’apprentis-sage des langues. Connu pour ses écrits très engagés contre les Jésuites et la religion en général, il ne peut s’empêcher d’être d’accord sur ce point avec l’ordre qu’il abhorre. Pour lui aussi, l’apprentissage des langues est néces-saire. Il est même vu comme quelque chose de naturel, conditionné à la vie en Amérique du Nord :

« J’ai été cet hiver à la chasse avec trente ou quarante jeunes Algon-kins bienfaits & très-agiles, expressément pour apprendre leur langue.

On l’estime beaucoup en ce païs-ci, parce que toutes les Nations qui habitent à mille lieües à la ronde (à la reserve des Iroquois & des Hu-rons) l’entendent parfaitement, n’y ayant pas plus de difference de leur langage à celui-ci que du Portugais à l’Espagnol. »271

269 Du Tertre,Histoire Générale des Antilles habitées par les François, Contenant tout ce qui s’est passé dans l’establissement des Colonies Françoises, vol. 1, p. 203.

270 Jaenen, Cornelius, J.,Friend and Foe: Aspects of French-Amerindian Cultural Contact in the Sixteenth and Seventeenth Centuries, p. 54. Voir également les lettres de Marie de l’Incar-nation, sœur ursuline qui précise les qualités que doivent avoir les religieuses envoyées au Canada, qualités au nombre desquelles figure l’importance de l’apprentissage des langues :

« Pour le corps, il est necessaire qu’elle soit jeune, pour pouvoir facilement apprendre les Langues ; qu’elle soit forte, pour supporter les fatigues de la Mission […] ». L’incarnation, Marie de,Lettres de la vénérable mère Marie de l’Incarnation première supérieure des Ursu-lines de la Nouvelle France, p. 63.

271 Lahontan, Louis Armand de Lom d’Arce,Nouveaux voyages de Mr. le Baron de Lahontan dans l’Amérique Septentrionale […], p. 19.

Le baron de Lahontan est conscient de la nécessité de pouvoir communiquer avec les peuples qui vivent sur le même territoire que les Français. Il est à la recherche d’une forme de langage diplomatique, qui peut être utilisé par plu-sieurs nations à la fois et qui permet de se faire comprendre de nombreuses tribus. La compréhension de l’autre est donc, pour Lahontan comme pour les Jésuites, une étape essentielle à l’établissement des Français dans le Nou-veau Monde.

I.4.3 Coutumes

Autre composante de la politique des Jésuites, l’adaptation du catholicisme aux coutumes des peuples à convertir est, comme pour l’apprentissage des langues, un trait marquant de l’Empire français. De par leur importance, les Jésuites parviennent à influencer le gouvernement français et lui imposent leur marque dans la façon d’agir avec les peuples à convertir.

Comme pour la langue, les Jésuites estiment qu’il ne faut pas exiger des po-pulations autochtones qu’elles adoptent les mœurs et coutumes des Fran-çais. Non seulement ces religieux estiment qu’ils doivent agir par la persua-sion, mais ils pensent également qu’il ne faut pas changer le mode de fonc-tionnement de la société dans laquelle ils tentent d’implanter le catholicisme.

Pour ce faire, ils essayent d’adapter les rites catholiques aux coutumes amé-rindiennes272. Tout ce qui possède une ressemblance, grande ou petite, avec un élément du catholicisme, est mis à contribution. L’optique de cette po-litique n’est pas de pousser les Amérindiens à renier totalement leur mode de vie, mais à l’adapter à la nouvelle religion que leur apportent les

mission-272 Cette politique est déjà esquissée par Ignace de Loyola, fondateur de l’ordre des Jésuites.

Dans la 18eAnnotationde sesExercices spirituels, il affirme que c’est à celui qui enseigne de s’adapter au mode de vie de l’apprenant : « C’est en fonction de l’état de celui qui s’exerce, par exemple selon son âge, sa culture ou ses dons, que les exercices doivent être adaptés, pour ne pas imposer à celui qui est frustre ou faible ou sans forces ce qu’il ne pourrait porter sans inconvénient et encore moins assumer pour son profit. » Ces propos annoncent la politique des Jésuites tant au regard de la langue que de l’adaptation aux coutumes de l’autre. Loyola, Ignace de,Écrits, traduits et présentés sous la direction de Maurice Giuliani, sj [et al.], p. 59.

naires. Pour les Jésuites, il est plus aisé de convertir les Amérindiens en leur laissant la possibilité de continuer à vivre selon leurs habitudes, pour autant que celles-ci ne soient pas en contradiction totale avec les dogmes du chris-tianisme. Pour l’historien Denis Delâge, cette adaptation aux coutumes au-tochtones est si prononcée, en Amérique du Nord, que ce sont les Jésuites qui se convertissent à l’univers religieux des Amérindiens plutôt que les Amérin-diens au catholicisme273. Sans aller aussi loin que cet auteur, nous estimons que les écrits des Jésuites montrent une réelle volonté d’adaptation aux rites religieux préexistant leur arrivée.

Cette utilisation des coutumes amérindiennes peut être illustrée par l’exemple d’un enterrement décrit par Paul Le Jeune. Le Jésuite accepte que les Amérindiens enterrent leurs morts avec des objets auxquels ils attachent la croyance qu’ils leur seront utiles dans l’au-delà. Bien évidemment, le re-cours à ces objets lors d’enterrements n’est pas prévu par le catholicisme. Ce-pendant, le missionnaire s’en accommode, pour autant qu’il puisse intégrer à la cérémonie certains rites chrétiens. Il choisit de fermer les yeux sur ce mode de fonctionnement en espérant que cela permette de nouvelles conversions au catholicisme. S’y opposer ne servirait, selon Paul Le Jeune, qu’à freiner l’avancée des conversions :

« Je leur dis bien que cette ame estoit maintenant dedans le Ciel, et qu’elle n’avoit que faire de toutes ces pauvretez ; neantmoins nous les laissasmes faire, de peur que si nous les eussions voulu empescher (ce que j’aurois peu faire, car le Père chanceloit desja) les autres ne nous permissent pas de baptizer leurs enfans quand ils seroient malades, ou du moins ne les apportassent point apres leur mort. »274

La suite de la cérémonie atteste également l’entière participation du Jésuite aux coutumes amérindiennes : il a recours à des traditions amérindiennes (le festin des morts) qu’il organise lui-même dans le but d’intéresser de nouvelles personnes au catholicisme :

273 Delâge, Denys, « La religion dans l’alliance franco-amérindienne », p. 63.

274 Le Jeune, Paul,Relations des Jésuites contenant ce qui s’est passé de plus remarquable dans les missions des pères de la Compagnie de Jésus dans la Nouvelle-France, année 1634, p. 7.

« Apres l’enterrement nous fismes le festin des morts, donnans à man-ger de la farine de bled d’Inde meslée de quelques pruneaux à ces bonnes gens, pour les induire à nous appeler quand eux ou leurs enfans seront malades. Bref ils s’en retournerent avec fort grande satisfaction […] »275.

Les Jésuites s’efforcent ainsi de connaître au mieux les coutumes amérin-diennes afin de pratiquer celles qui plaisent le plus à la tribu. Le fait d’offrir un festin ou de recourir à l’échange de présents est un trait marquant de nom-breuses sociétés amérindiennes que les Jésuites comprennent rapidement et s’empressent de mettre en œuvre afin de s’attirer la sympathie et l’approba-tion des autochtones.

Un autre aspect de l’utilisation des coutumes amérindiennes par les Jésuites est l’idée, avancée par Paul Le Jeune, d’agir auprès des enfants de la tribu afin d’influencer leurs parents. Le Jeune avance cette théorie en fonction de la connaissance qu’il a des sociétés amérindiennes dans lesquelles les en-fants sont plus libres qu’en France. D’après lui, leurs parents n’oseront pas les contredire s’ils professent le christianisme ce qui, à long terme, peut s’avérer un moyen intéressant de conversion :

« Nous avions tousjours pensé que l’amour excessif que les Sauvages portent à leurs enfans nous empescheroit de les avoir ; c’est par ce moyen là mesme qu’ils seront nos pensionnaires : car en ayant quelques-uns assidez, qui appellent et retiennent les autres, les peres et les meres qui ne sçavent ce que c’est de contrarier leurs enfans, les laisseront sans contredit […] »276.

Or, lorsqu’ils acquièrent une plus grande connaissance des coutumes des so-ciétés qu’ils tentent de convertir, les Jésuites s’aperçoivent que le recours aux enfants ne peut fonctionner car ils n’ont pas d’influence sur la tribu. L’idée des séminaires, dans lesquels envoyer les enfants d’Amérindiens, est donc aban-donnée dès les années 1640277.

275 Ibid., p. 8.

276 Ibid., année 1636, p. 35.

277 Beaulieu, Alain,Convertir les fils de Caïn : Jésuites et Amérindiens nomades en Nouvelle-France, 1632-1642, p. 149.

C’est pour cette raison que les Jésuites, à travers les travaux de leurs Re-lations, s’efforcent d’intégrer les coutumes amérindiennes. Leur objectif est d’apprendre à connaître l’autre, ses mœurs, ses habitudes, avant de lui impo-ser un mode de fonctionnement différent. Les Jésuites attachent ainsi une importance particulière à la compréhension des croyances amérindiennes qu’ils essayent d’analyser au regard des coutumes européennes278.

La compréhension des coutumes amérindiennes permet rapidement aux Jé-suites d’acquérir un statut important au sein des sociétés qu’ils désirent convertir. En utilisant les coutumes amérindiennes orales telles que les as-semblées, les Jésuites parviennent à atteindre les dirigeants de ces sociétés.

En effet, c’est au sein de ces conseils que la plupart des décisions de la tri-bu sont arrêtées. En y prenant part et en intégrant la gestuelle, le mode de parole et la langue, les Jésuites parviennent à se faire accepter des autoch-tones et acquièrent une certaine importance qui leur permet de véhiculer plus facilement leur propagande catholique :

« La premiere est la methode que nous tenons à l’instruction des Sau-vages. Nous assemblons les hommes le plus souvent que nous pou-vons, car leurs conseils, leurs festins, leurs jeux et leurs danses ne nous permettent pas de les avoir icy à toute heure, ny tous les jours. Nous avons égard particulierement aux Anciens, d’autant que ce sont eux qui determinent et decident des affaires, et tout se fait suivant leurs ad-vis. »279

Pour convaincre le public du bien-fondé de leur manière de procéder, les Jésuites vont s’intéresser de près aux croyances des Amérindiens afin de déterminer à quel type de religion ils adhèrent. Outre la question de l’exis-tence ou non d’une religion qui dépend de différents facteurs, les Jésuites tentent de trouver le plus de points communs possible entre le catholicisme et les croyances amérindiennes. Le sujet des âmes revient à de nombreuses reprises dans lesRelationsdes Jésuites qui, à l’instar de Jean de Brébeuf,

278 Breboeuf, Jean de,Relations des Jésuites contenant ce qui s’est passé de plus remarquable dans les missions des pères de la Compagnie de Jésus dans la Nouvelle-France, année 1636, p. 100.

279 Ibid., p. 78.

constatent avec enthousiasme que les Amérindiens, comme les catholiques, croient à l’immortalité de l’âme :

« C’est un plaisir de les entendre parler des âmes, ou pour mieux dire, c’est une chose tout à fait digne de compassion, de voir des hommes raisonnables avoir des sentimens si bas, d’une essence si noble, et qui porte des traicts si vifs de la Divinité. »280

Cette volonté de chercher des points communs entre la religion des Amérin-diens et le catholicisme trouve sa quintessence chez Lafitau, auteur jésuite desMœurs des sauvages ameriquains comparées aux mœurs des premiers temps. Dans son ouvrage, Lafitau tente de prouver que la religion pratiquée par les Amérindiens a de nombreux points communs avec celle des Anciens.

Selon lui, les Français et les Amérindiens ont connu une même religion, mais le temps et l’éloignement ont altéré celle des Amérindiens jusqu’à la rendre méconnaissable :

« Les Sauvages en general ont aussi tous quelque conoissance du Dé-luge, qui ayant été universel, ainsi que la raison même nous le fait conclure de ce que la foy nous en enseigne, a été un évenement trop singulier & trop remarquable pour qu’on en trouve pas des vestiges chez toutes les Nations ; mais la manière differente dont ils racontent qu’en ont été préservez les Réparateurs du Genre Humain, est aussi mêlée de fables […] »281.

Comme les autres Jésuites avant lui, il reprend le principe de l’immortalité de l’âme que l’on trouve à la fois chez les Français et les Amérindiens :

« Mais que ces idées ayent été justes, ou non, il est toûjours vrai qu’ils ont reconnu de tout temps dans l’homme une Ame réellement distin-guée de son corps […] »282.

L’objectif de Lafitau et des Jésuites est la mise en avant de nombreux points communs entre le catholicisme et les religions amérindiennes qui permettent

280 Ibid., p. 104.

281 Lafitau, Joseph-François,Mœurs des sauvages ameriquains comparées aux mœurs des

281 Lafitau, Joseph-François,Mœurs des sauvages ameriquains comparées aux mœurs des