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L’exercice crue centennale en Île-de-France : Sequana 2016

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 31-35)

La crue centennale de la Seine est considérée comme le risque majeur en Île-de-France. Elle s’est déjà produite en 1910, et à d’autres reprises avec des phénomènes de moindre ampleur : 1924 (crue triennale), 1982 et 2001. Les enjeux humains, économiques et sociétaux se sont entre temps énormément densifiés dans ces zones inondables. L’OCDE (Organisation de

Coopération et de Développement Economiques) a publié en 2014 une étude sur la gestion des risques d’inondation de la Seine (Figure 6) qui a permis d’évaluer les impacts potentiels d’un tel évènement. Elle estime qu’il toucherait 5 millions de franciliens en tenant compte des défaillances des réseaux techniques, pour un coût allant de 3 à 30 milliards d’euros en dommages directs [OCDE, 2014]. Celle-ci souligne également les progrès accomplis pour améliorer la résilience de cette région, notamment via le dispositif ORSEC. Le secrétariat général de la zone de défense de Paris a mis en place des groupes de travail thématiques sur la gestion d’une telle inondation (secteurs du transport, de l’énergie, de la banque, des télécommunications, de la distribution, etc.) et a réalisé un exercice de simulation en 2010 puis un autre en 2016 : Sequana. Ces travaux ont ainsi créé une dynamique autour des questions de prévention entre les acteurs de la gestion de crise. La directive européenne relative à l’évaluation et à la gestion des risques d’inondation [EU inondation, 2007] a été déclinée sur ce Territoire à Risque Important (TRI) en stratégie de gestion des risques d’inondation, assortie à une gouvernance co-pilotée par le préfet de région et le préfet de police. Celle-ci a donné lieu à la signature en avril 2016 par les grands opérateurs de réseaux d’une déclaration d’intention de partage de données et de travail sur les vulnérabilités et dépendances des réseaux franciliens (action co-pilotée par la Direction Régionale et Interdépartementale de l’Environnement et de l’Energie, et le SGZDS-Préfecture de Police).

[DECLARATION D’INTENTION, 2016]

Figure 6 : Carte de la zone inondable en cas de crue centennale [OCDE, 2014]

L’exercice Sequana avait quatre objectifs [Plaquette de présentation Sequana, 2016] :

· éprouver la capacité de tous les acteurs des différents secteurs d’activité à gérer une crue centennale, à coordonner les actions de tous au plan zonal, à évaluer leur

pertinence et la cohérence de ces dispositifs entre secteurs d’activité, et à améliorer les plans existants ;

· donner au SGZDS Paris une vue d’ensemble de la coordination globale de la planification ;

· améliorer la capacité de réponse de la sécurité civile et éprouver la coopération civilo-militaire avec l’utilisation de la force Neptune (mise en œuvre du Mécanisme Européen de Protection Civile MEPC) ;

· éprouver chez les partenaires de l’exercice les capacités de réaction du personnel chargé de la sécurité des biens, tester les procédures opérationnelles internes et la remontée d’information vers les autorités publiques, tester les plans de continuité d’activité.

Pour répondre à ces objectifs, l’exercice s’est déroulé en trois phases, du 7 au 18 mars 2016.

La première semaine a été consacrée à un exercice simulant la montée de la crue centennale.

Matin et soir, des cartes, des bulletins météorologiques et des points de situation permettaient de simuler cette évolution. Le niveau fictif centennal a été atteint le vendredi 11 mars. Le week-end du 12 et du 13 mars a accueilli des manœuvres terrain de démonstration. La Belgique, l’Espagne, l’Italie et la République tchèque ont participé à cet exercice. La deuxième semaine s’intéressait à la décrue de la Seine dans un format différent de la première semaine. Il s’agissait de réfléchir aux actions de retour à la normale, en les hiérarchisant vis-à-vis des enjeux prioritaires secteur par secteur, et en testant la « résilience des réseaux aux conséquences matérielles, fonctionnelles et structurelles » [Plaquette de présentation Sequana, 2016]. En effet, la décrue jouée n’interviendrait qu’après une période d’étiage de plusieurs jours, ce qui pose les questions de la résistance des infrastructures et de la voirie face à une inondation longue. Ce délai pendant lequel les équipes ne pourront pas directement intervenir permettra néanmoins d’acheminer les matériels et les équipes nécessaires aux opérations spécifiques (pompage, dépollution, évacuation des déchets, vérification des installations techniques, etc…). Cet exercice a été financé en partie par la Commission Européenne avec une subvention de 739 000 euros via le programme ECHO (service d’aide humanitaire et de protection civile de la commission européenne). L’exercice européen Sequana a rassemblé 87 partenaires, répartis dans les secteurs médicaux, bancaires, assurantiels, académiques, miniers, acteurs de sécurité civile, institutions publiques, centre de rétention, médias, et opérateurs de réseaux techniques.

Enfin le SGZDS Paris participe en parallèle au projet de recherche Euridice, qui a pour but de modéliser entre autres les interactions entre les différentes cellules de crise [EURIDICE, 2016]. Ce projet a observé plusieurs gestions d’évènements majeurs (COP 21 par exemple), et a couvert l’observation de l’exercice Sequana. Cependant au vu du nombre très important de participants à cet évènement, l’équipe d’Euridice a fait appel à des chercheurs extérieurs pour couvrir l’ensemble des cellules de crise, et l’auteur a eu l’opportunité de pouvoir s’inscrire dans ce réseau d’observateurs. En plus des cellules de crise situées chez chaque partenaire, une cellule animation a permis de répondre aux questions des participants sur la situation potentielle du terrain. Cette cellule était composée entre autres de représentants des opérateurs de réseaux essentiels comme les réseaux électriques, les réseaux de télécommunication, les

réseaux de transports en commun, les réseaux d’eau, de gaz ou d’assainissement. Cette cellule animation a été maintenue en phase de décrue.

1.2.4.2 Le déroulé de l’exercice

En phase de crue, la journée de simulation commençait chaque matin par un point de situation avec un bulletin hydrologique, météorologique, ainsi qu’un état actualisé des victimes/déplacés et des clients touchés par des coupures de réseaux.

Les participants s’appuyaient sur le portail CRIS’ORSEC, web-plateforme sécurisée et ouverte uniquement aux acteurs concernés par cette gestion de crise, pour communiquer les faits marquants ou leurs demandes à la sécurité civile. Il pouvait s’agir par exemple de GRT qui déclare une fuite de gaz à telle adresse, d’ERDF qui annonce que tel poste client est coupé préventivement, ou bien d’un opérateur de réseau d’eau qui demande à la préfecture un laisser passer pour ses équipes d’intervention afin d’accéder à un équipement technique.

En plus du portail ORSEC, les participants avaient accès à une plateforme cartographique en ligne (Web ArcGIS Platform). Sur cette plateforme de visualisation, on pouvait voir deux fois par jour l’actualisation des zones inondées sur l’Île de France, mais également les routes coupées, les zones de fragilité électrique d’ERDF et les zones de fragilité des communications filaires d’Orange. Ces trois dernières informations ont été primordiales dans l’évaluation de la pertinence des réponses des acteurs. En effet, elles ont favorisé la prise de conscience des problèmes d’accessibilité pour les équipes d’intervention – notamment vis-à-vis du franchissement de la Marne et de la Seine en période de crue. La cartographie des zones de fragilité électrique a également fortement impacté les différents participants, qui n’avaient pas toujours conscience d’être potentiellement privés d’électricité alors même qu’ils n’étaient pas inondés, et donc de devoir adapter leur plan de réaction à cette situation. Idem pour les zones de fragilité des télécommunications : si Orange garantit une communication mobile à l’extérieur des bâtiments, la bande passante autorisée sera bien plus réduite, et nombre de techniciens utilisent aujourd’hui des outils embarqués nécessitant une connexion mobile avec des envois de données. De plus la communication vers les infrastructures dont la ligne fixe est indisponible nécessite de connaître les numéros de mobiles des personnes sur place… si celles-ci ont pu accéder au site (dépendance à la praticabilité des routes).

Deux points de situation étaient réalisés dans la journée : un à 14 h, et l’autre à 16 h.

Cependant, à chaque début de journée, il était impossible de reprendre le point de situation de la veille, car les zones de fragilité électrique et de télécommunications étaient pré-calculées, et les actions terrains pré-organisées. Il y a donc eu certaines fois un écart entre la situation de la veille, résultant des décisions prises par les joueurs, et la reprise du scénario initialement prévu le jour d’après.

Les impacts sur les réseaux électriques, les télécommunications et le réseau routier ont fait prendre conscience aux participants de leur vulnérabilité potentielle aux effets cascade. Par ailleurs, il est à noter que les zones de fragilité de télécommunications d’Orange était calculée

à la fois sur les zones inondées ET sur les zones privées d’électricité, donc en intégrant un premier effet cascade technique.

1.1.4. Conclusion sur la planification et la gestion de crise en France relatives aux

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