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L’éducation routière pour les jeunes

CHAPITRE II - LES RAISONS D’UNE ACTION EFFICACE : UNE

1. L’éducation routière pour les jeunes

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des usagers. Ceux-ci sont traditionnellement classés en grandes catégories (jeunes ou enfants, jeunes en apprentissage de la conduite, conducteurs en entreprise, conducteurs sanctionnés...) qui bénéficient d’approches ciblées spécifiques.

- l’éducation à la conduite et à la sécurité routière s’inscrit dans un processus progressif et continu, en famille, à l’école, au moment du passage de l’examen du permis de conduire et après son obtention, pendant la vie active et au-delà ;

- la plupart des accidents ayant à leur source un comportement inadapté de l’usager, l’éducation à la route et à la sécurité routière doit, à tous les niveaux de la formation, prendre en compte les aspects comportementaux de l’individu.

Dans ce contexte, la chaîne du continuum éducatif se met progressivement en place en trois grandes étapes.

À l’école et au collège

Au sein du système scolaire est mise en place une action éducative débouchant sur :

- à la fin de l’école primaire, l’attestation de première éducation à la route qui valide les premières acquisitions depuis l’école maternelle et tout au long de l’enseignement primaire ;

- au collège, dans les classes de cinquième, l’attestation scolaire de sécurité routière de premier niveau (ASSR1) qui donne accès au brevet de sécurité routière nécessaire pour conduire un cyclomoteur ; - dans les classes de troisième, l’attestation scolaire de sécurité

routière de second niveau (ASSR2) qui donne accès à l’épreuve théorique du permis de conduire.

Ces éléments, appréciés par les élèves, leur donnent les repères nécessaires à une première compréhension des contraintes de la route et de son code pour tous les usagers (piétons et cyclistes inclus) mais pourraient être complétés par une démarche plus large et obligatoire.

¾ Un dispositif à perfectionner

On estime en effet que les jeunes français ne bénéficient en moyenne que de trois à quatre heures d’éducation routière pendant toute leur scolarité. Le continuum éducatif reste plaqué sur le dispositif scolaire. Il n’est pas intégré dans les programmes et ne dispose pas d’enseignants spécialisés. Il fonctionne bien là où les enseignants adhérent par conviction aux enjeux de la sécurité routière. Les enseignants n’ont pas pour rôle d’apprendre la conduite ou de préparer les élèves au permis mais plutôt de s’inscrire dans une démarche générale d’éducation à la citoyenneté afin de transmettre les bons comportements et le respect des autres sur la route.

Les actions de prévention menées dans le cadre scolaire sur ce thème sont fortement valorisées par les parents et les élèves et confirment la sous-évaluation du risque routier opérée par les jeunes eux-mêmes et les difficultés des enseignants à traiter le sujet.

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Il est d’autant plus important de commencer tôt le conditionnement qui permettra aux jeunes enfants d’intégrer le code de bonne conduite de la route car ils en sont les principales victimes et de l’inscrire dans le socle éducatif général.

L’éducation routière pour les jeunes élèves constitue encore un domaine à exploiter de façon systématique même s’il est déjà prometteur tant dans le nombre d’actions de sensibilisation effectuées par des associations spécialisées comme la Prévention Routière ou les collectivités locales par exemple dans le cadre des « journées de la citoyenneté » au cours desquelles le thème de la sécurité routière est toujours évoqué, que dans la qualité des partenariats engagés entre les établissements scolaires, les associations de parents, les collectivités territoriales ou locales et les partenaires associatifs.

Le permis de conduire

Il se transforme de deux façons, au niveau de l’examen et dans ses principes généraux :

¾ les principes généraux

Le permis probatoire, mis en place en 2004, vise à mieux encadrer les premières années de conduite et à responsabiliser les jeunes conducteurs et les conducteurs auteurs d’infractions. Partant avec un capital de six points, le nouveau conducteur dispose d’une période probatoire de trois ans (ou deux ans s’il a suivi la filière de la conduite accompagnée) pour acquérir son total de 12 points. S’il commet des infractions, à partir d’un retrait de 3 points, il doit suivre une formation obligatoire. S’il perd son capital de 6 points en une seule fois, son permis est annulé et il doit repasser l’ensemble des épreuves.

¾ au niveau de l’examen

- l’épreuve théorique générale (le code) qui touche tous les apprentis conducteurs est rénovée. Les situations présentées aux candidats prennent plus en compte les aspects liés aux facteurs de risques et mettent davantage l’accent sur les attitudes positives à avoir vis-à-vis des autres usagers de la route (faisant appel aux acquis comportementaux) ;

- l’épreuve de conduite pour les véhicules légers (catégorie B, la plus fréquente) passe de 22 à 35 minutes et est placée dans un contexte de sécurité routière.

Les nombreuses évolutions du permis de conduire en quelques années, apprentissage anticipé de la conduite généralisé à tous les départements après une expérimentation de cinq ans sur deux départements, permis probatoire, permis à un euro par jour lancé le 3 octobre 2005, les aménagements qui vont intervenir sur l’épreuve théorique générale à la demande du ministre des transports afin d’intégrer de nouvelles thématiques dans l’épreuve du code, ont tous pour but d’améliorer les conditions d’accès ou de retour au permis de conduire.

Malgré ces améliorations progressives, la formation initiale des conducteurs doit être encore aménagée. Le financement du permis reste encore difficile pour de nombreuses familles, et la formation aux différentes épreuves ne permet pas toujours d’appréhender des situations de conduite variées.

¾ Les difficultés du financement

Avec la disparition du service national obligatoire qui permettait à toute une génération d’accéder gratuitement au permis de conduire, de nombreux jeunes connaissent des difficultés pour accéder à une formation de qualité à un prix modéré. Il est nécessaire d’imaginer des solutions de substitution pour les aider à accéder à une préparation efficace à moindre coût.

Même si dans le cadre du dispositif du permis à un euro par jour, plus de la moitié des auto-écoles a signé une charte avec l’État pour s’engager sur ce permis destiné à aider les jeunes ayant un souci de financement, même si les établissements de crédit ont accordé plus de 40 000 prêts, on est encore loin des 700 000 permis délivrés par an en France.

Les jeunes déscolarisés et défavorisés ont à la fois une difficulté de financement du permis et des difficultés d’apprentissage. L’action de structures éducatives spécialisées (auto-écoles du réseau FARE par exemple) permet à certains de faire face à ces difficultés.

Actuellement, un partenariat avec les lycées professionnels est à l’étude pour trouver une autre façon de donner accès à une formation de qualité.

L’Assemblée permanente des chambres de métiers (APCM) a défini avec la Direction des entreprises commerciales, artisanales et de services (DECAS) trois priorités pour améliorer les conditions de vie des jeunes apprentis : le logement, la santé et la sécurité routière. À la suite de cela, les centres de formation des apprentis (CFA) se sont organisés pour aider les jeunes apprentis à passer l’ASSR2 et le brevet de sécurité routière (BSR). Souvent issus de milieux défavorisés, ayant connu l’échec scolaire, la réussite de cet examen les valorise et leur redonne confiance en eux.

Par ailleurs, certains organismes gestionnaires ont mis à la disposition des apprentis des transports gratuits pour effectuer les trajets domicile-CFA afin d’éviter les accidents pendant les trajets et ont inscrit une sensibilisation à la thématique de la sécurité routière et de la conduite dans leurs actions quotidiennes.

Malgré ces actions pédagogiques innovantes, le fait est que le permis de conduire est encore difficile à financer pour nombre de jeunes.

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Encadré 2 : Le dispositif du permis à un euro par jour

Il a pour but de faciliter l’accès des jeunes au permis en permettant l’étalement du coût du permis sur plusieurs mois grâce à un prêt à taux zéro dont l’État prend en charge les intérêts par le biais d’une convention passée avec les organismes financiers. Les auto-écoles s’engagent à respecter une charte de qualité et souscrivent une garantie financière protégeant les élèves en cas de faillite.

Comme le soulignait Jean-Michel Bertrand, avant de faire un certain nombre de propositions de financement pour aider les jeunes : « beaucoup estiment que l’État a le devoir de s’impliquer dans la mesure où l’insertion des jeunes, leur mobilité et leur entrée dans le monde du travail sont autant d’enjeux nationaux très forts pour les pouvoirs publics...

L’apprentissage de la conduite et la réussite au permis de conduire demeurent un rendez-vous entre le jeune citoyen et ses responsabilités vis-à-vis de la société : ce moment correspond... à l’un des derniers rites institutionnalisés du passage dans le monde des adultes... Cette dimension nous conforte dans l’idée qu’une implication plus précise de l’État dans l’apprentissage de la conduite revêt une pleine légitimité »23.

¾ Un apprentissage à adapter à chaque situation

Par ailleurs, le contexte routier, même si les véhicules et les infrastructures sont plus sûrs, est plus complexe : plus de trafic, plus de catégories d’usagers, moins d’espace pour chacun, une cohabitation rendue plus problématique.

Les conditions de l’apprentissage sont elles aussi devenues plus difficiles et demanderaient un forfait d’heures d’apprentissage capable de donner aux futurs conducteurs l’habitude de conduire dans des circonstances météo ou de trafic plus compliquées : brouillard, neige, accès gratuit aux autoroutes permettant d’apprendre à rouler à 130 km/h.

Le forfait de vingt heures de conduite, qui est la norme proposée par les auto-écoles, ne permet pas de couvrir l’ensemble des exigences de l’apprentissage de la conduite par tous les temps et dans toutes les situations.

Certains apprentis conducteurs auraient besoin de davantage d’heures et d’une formation plus longue.

La conduite accompagnée permet cela quand les familles ne sont pas trop déstructurées et ont les capacités financières à la choisir, car elle est parfois à court terme un peu plus chère que les autres modes d’apprentissage. Les conditions de la conduite accompagnée : un adulte référent, un véhicule personnel, une assurance spécifique, ne sont pas adaptées à tous les publics.

23 Faciliter l’accès des jeunes au permis de conduire, rapport au Premier ministre de M. Jean-Michel Bertrand, 2005.

¾ Le permis de conduire comme rite de passage

Dans une société en manque de repères, le permis de conduire est devenu, en particulier pour les garçons, l’équivalent d’un rite de passage. Les trois quarts des jeunes passent leur permis avant l’âge de vingt ans, les hommes en moyenne quatre mois avant les femmes et la fonction d’insertion de ce passage est plus marquée pour eux. L’apprentissage de la conduite est ainsi plus souvent perçu comme l’achat d’un droit à conduire que comme l’apprentissage d’un savoir-faire dans toutes ses dimensions.

« L’exposition particulièrement élevée aux accidents des jeunes hommes s’explique par une combinaison de facteurs. D’une part, l’inexpérience de la conduite ne leur permet pas de résoudre certaines situations complexes, certains réflexes n’étant pas encore acquis. De l’autre, ils sous-estiment les risques ou même les recherchent. Des biais de perception des risques interviennent : les jeunes conducteurs surestiment leurs capacités de contrôle des situations, surtout après avoir bu. De plus, ils envisagent les situations avec un optimisme exagéré. Enfin, le besoin d’autonomie des adolescents et post-adolescents s’exprime dans des prises de risques. Ils sont à la recherche de sensations, tel le danger. Ils veulent donner et avoir une ˝ bonne image ˝ d’eux-mêmes, être populaires, susciter l’admiration de leurs amis. Ils s’imaginent acquérir cela en prenant des risques ».24

Il devient particulièrement important dans ces conditions d’accorder à la formation à la conduite le temps nécessaire pour que chaque jeune conducteur apprenne à maîtriser le risque, pour lui et pour les autres.

Après le permis de conduire

Des stages de formation et de sensibilisation post-permis se sont multipliés depuis quelques années. Ils se divisent schématiquement en deux groupes :

- d’une part, des stages obligatoires sont organisés, pour les conducteurs novices qui ont commis une infraction grave (soit dans le cadre du permis probatoire, un retrait de 3 points), et à l’appréciation de la justice dans le cadre des mesures alternatives de peines et des travaux d’intérêt général ;

- d’autre part, sur la base du volontariat, outre les stages de reconstitution partielle de points concernant les auteurs d’infractions, et souvent dans le cadre de l’entreprise, des formations complémentaires se développent sous des formes variées : rendez-vous d’évaluation pour les jeunes conducteurs, rendez-vous de perfectionnement pour les conducteurs expérimentés, recyclage et remise à niveau notamment pour les seniors.

24 Claudine Perez-Diaz, sociologue, chercheur CNRS au Centre de recherche Psychotropes, Santé mentale, Société (CESAMES).

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En 2005, environ cent mille conducteurs ont bénéficié de ces stages, la part des conducteurs en permis probatoire étant pour l’instant minime bien qu’en progression constante. Les évaluations font ressortir que les conducteurs qui les suivent prennent mieux conscience des risques, modèrent leur vitesse, portent systématiquement leur ceinture et de façon générale comprennent mieux les règles.

Le constat est fait également que les infractions et les accidents qui en résultent ne se produisent pas par ignorance de la réglementation ou par incapacité des conducteurs à diriger un véhicule. Il faut donc les amener à réfléchir autrement aux attitudes par rapport à la conduite qui sont à l’origine de leurs comportements.