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INTRODUCTION

Dans le document Je ne suis pas féministe mais (Page 12-17)

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I - Contexte, enjeux et intérêt de l’étude

La troisième vague du féminisme, caractérisée notamment par le mouvement #Metoo, dont le hashtag a été utilisé quinze millions de fois sur les réseaux sociaux, a permis de libérer la parole sur des sujets tels que les agressions et violences sexuelles. Ce mouvement d’ampleur mondiale a ouvert le dialogue et démocratisé un combat mené par les féministes depuis des décennies. Plus qu’un mouvement accusateur, #Metoo a créé une véritable vague de solidarité entre les hommes et les femmes victimes d’expériences douloureuses.

Pour autant, les actions en faveur de l’égalité homme-femme ne semblent pas encore être une priorité dans les sphères politiques. Ce désintérêt pourrait même contribuer au développement d’idées ou de comportements antiféministes dans l’opinion publique. La victoire de Donald Trump en 2016 en est un exemple flagrant : son implication dans de nombreux scandales d’agressions sexuelles n’a pas entaché, sinon a encouragé sa popularité auprès de ses partisans.

Alors que certains pays font des progrès en matière d’égalité des genres, d’autres font machine arrière, notamment dans les pays développés. L’Argentine célébrait la fin de l’année 2020 avec une victoire féministe historique grâce à la légalisation de l’avortement, tandis qu’en Pologne, le gouvernement conservateur a confirmé le 27 janvier 2021 l'interdiction de l’IVG (interruption volontaire de grossesse), malgré des mois de manifestations massives.

En 2017, l’un des messages forts de la campagne d’Emmanuel Macron portait sur la lutte contre les inégalités entre les hommes et les femmes. Toutefois, près de deux-tiers des Français considèrent la situation encore insatisfaisante en termes d’égalité, un avis particulièrement soutenu par les femmes elles-mêmes1. Mais cette volonté d’obtenir l’égalité homme-femme

1 Étude Harris Interactive pour le Ministère de l’Économie et des Finances français, (2019). Les Français et l’égalité femmes-hommes [en ligne]. [Consulté le 7 janvier 2021]. Disponible à :

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n’implique pas nécessairement l’adhésion au féminisme, et l’identification au mouvement est loin d’être aussi affirmée. En 2019, seulement 55% des Français et Françaises de moins de 35 ans se considéraient comme féministes (voir annexe 1). Plus d’un tiers des Français2 souhaiteraient même utiliser un autre mot pour nommer la lutte pour l’égalité des genres, preuve que la dénomination est déjà synonyme de clivage.

Il semblerait donc que le féminisme, en tant que mot et mouvement, soit associé à de nombreux concepts et perceptions. Cet imaginaire collectif, nourri notamment par des clichés, empêcherait les Français de se reconnaître et de s’unir pour lutter contre l’essence du mouvement : les discriminations envers les femmes.

Nous souhaitions étudier ce sujet, car nous étions toutes les trois particulièrement interpellées par les femmes de notre entourage refusant de se dire féministes, critiquant les féministes et présentant des comportements antiféministes. Pendant nos années d’études à Grenoble École de Management, nous avons également constaté un sexisme et un antiféminisme ordinaires se manifestant au quotidien. Nous voulions ainsi comprendre les mécanismes en jeu dans l’identification au féminisme.

Nous étudierons dans ce mémoire l’impact des clichés sur le féminisme, en particulier sur les jeunes de quinze à vingt-quatre ans.

http://harris-interactive.fr/wp-content/uploads/sites/6/2019/12/Rapport-Harris-Les-Francais-egalite-femmes-hommes.pdf

2 Guionnet, C., (2017). Troubles dans le féminisme : Le web, support d’une zone grise entre féminisme et antiféminisme ordinaires. Réseaux [en ligne]. 201(1), p. 115. [Consulté le 28 janvier 2021]. Disponible à : https://doi.org/10.3917/res.201.0115

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II - Problématique de l’étude et questions de recherche

Nous avons choisi d’étudier, à travers ce mémoire, l’impact que les clichés sur les féministes peuvent avoir sur les jeunes de quinze à vingt-quatre ans. Nous souhaitons comprendre les mécanismes qui peuvent s’opérer auprès des jeunes et les pousser à refuser de s’identifier au féminisme, voire à développer des comportements antiféministes. Notre problématique d’étude est donc la suivante :

Comment les clichés sur les féministes participent-ils à développer une forme d’antiféminisme ordinaire ?

Cette question nous paraît particulièrement pertinente car nous avons vu dans la littérature que la notion de reconnaissance des droits des femmes a été relativement bien accueillie dans l’histoire. En effet, depuis 1946, le principe de l’égalité des sexes est une valeur constitutionnelle3. Cependant, nous avons aussi lu que les féministes ont une image très négative. Cette vision est en partie alimentée par les clichés sur les féministes. Nous avons toutes les trois déjà entendu la phrase “je ne suis pas féministe mais”. L’image dévalorisante du mouvement féministe bloque les femmes et les hommes d’aujourd’hui dans leur processus d’identification au mouvement et participe au développement d’une forme d’antiféminisme ordinaire. Nous souhaitons, avec cette problématique de recherche, analyser et comprendre les mécanismes qui opèrent entre les clichés sur les féministes et la progression de l’antiféminisme ordinaire. Nous concentrerons notre étude sur les individus de quinze à vingt-quatre ans, cible plus communément appelée “les jeunes”. Ce public nous semble particulièrement intéressant car il correspond à notre tranche d’âge et forme la génération de demain. De plus, les récents mouvements comme #Metoo ont été largement relayés grâce aux réseaux sociaux. Internet est alors devenu le terrain de jeu des féministes tout comme des antiféministes. La cible des quinze à vingt-quatre ans, ayant grandi avec Internet se retrouve alors au premier plan. Nous souhaitons donc analyser le rôle des réseaux sociaux dans la diffusion des clichés et le développement d’idées ou de comportements antiféministes chez ces individus.

3 Bard, C., 2012. Le féminisme au-delà des idées reçues. Paris : Éditions Le Cavalier Bleu.

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Afin de répondre au mieux à notre problématique, nous avons divisé notre sujet en trois questions de recherche :

Q1 : Quels sont les clichés sur les féministes répandus chez les 15-24 ans ?

Q2 : Quelles sont les différentes formes d'antiféminisme observées chez les 15-24 ans ? Q3 : Les clichés sont-ils un facteur de développement de l’antiféminisme chez les 15-24 ans ?

Nous commencerons par étudier la littérature qui traite de notre sujet. Afin de correctement comprendre notre sujet, nous parcourrons les origines du féminisme et de l’antiféminisme. Nous analyserons ensuite d’où viennent les clichés et comment ils ont été alimentés. Ensuite, nous verrons que le mouvement féministe a connu une modernisation et que les clichés antiféministes y ont trouvé de nouveaux canaux de diffusion. Enfin, nous terminerons la revue de littérature en nous concentrant sur l’identification des individus au mouvement féministe.

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