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des matériaux employés traditionnellement depuis les débuts de l’aéronautique, tels que l’acier ou les alliages d’aluminium. L’emploi des matériaux composites en quantité importante (supérieure à 20 %) pour un aéronef a été entreprise lors du développement de l’Airbus A380 qui a nécessité l’utilisation d’un composite, à base de fibre de verre et d’aluminium, couplé à une résine époxy : le Glare1 permettant un allégement des structures de 20 à 30 %. Ce matériau, mis au point par l’université de Delft, a ainsi permis de réduire grandement la masse du fuselage de l’Airbus A380, permettant à ce dernier d’entrer en service au début de l’année 2007. Pour les avions de dernière génération comme l’Airbus A350 ou le Boeing 787, l’intégration des matériaux composites représente désormais plus de 50 % (en masse) des matériaux utilisés dans leurs structures. Leur utilisation permet un gain significatif de la masse embarquée induisant notamment une diminution importante de la consommation de carburant (donc un impact économique et environnemental in fine). Les matériaux composites présentent également des performances supérieures sur le plan de la résistance (e.g. chocs, corrosion)

Ces avantages présentent en contrepartie un inconvénient majeur. Les matériaux composites à matrice organique sont particulièrement réactifs lorsqu’ils sont soumis à une agression thermique et se dégradent lorsqu’ils sont soumis à des forts flux de chaleurs, conduisant à la perte de leurs tenues mécaniques. Cette dégradation est la combinaison d’un nombre important de phénomènes à la fois thermiques (e.g. conduction, rayonnement), chimiques (modification de la structure, dégradation) ou encore mécaniques (e.g. délaminage, formation de pores). Ces phénomènes peuvent être dramatiques pour la sécurité des passagers en cas de combustion des structures composites d’un avion. Pour pallier à ces risques importants, des normes et standards de fabrication sont mis en place afin de certifier la sécurité des avions. D’autant que la problématique du feu dans l’aéronautique n’est pas récente. En effet, les incendies en vol, ou suite aux crashs, tels que celui du vol 111 de SwissAir en septembre 1998, sont une des principales causes fatales d’accidents. C’est pourquoi, afin de s’assurer de la bonne tenue au feu, les matériaux composites doivent répondre aux exigences croissantes de sureté des avions civils imposée par la FAA et l’EASA. La certification au feu, qui est l’une des plus sévère (en particulier pour les pièces localisées dans l’environnement moteur), exige que les pièces soient soumises à la flamme d’un brûleur certifié (normes ISO 2685 et FAA A20-135). Ces essais servant de d’étapes avant l’industrialisation, il est donc impératif, pour les acteurs industriels, d’être en capacité de franchir avec succès ce jalon. L’enjeu majeur pour les industriels est alors de développer des matériaux et structures composites capables de maintenir la sécurité des passagers malgré la présence d’un incendie, tout en respectant les besoins liés au gain de masse et de tenue structurelle permettant de limiter les coûts de fonctionnement des aéronefs.

Malgré tout, les essais permettant d’évaluer le niveau de tenue au feu des structures peuvent se révéler très incertains en fonction de la configuration, de l’environnement ou du type de matériaux testé du fait de la forte hétérogénéité entre les différentes familles de composites. Ainsi, il est important de développer à la fois des bases de données de

Ces modélisations peuvent être utiles afin de comparer des matériaux ou bien des conceptions et prévoir ainsi la tenue au feu de la pièce composite.

L’étude du comportement au feu des matériaux composites s’est intensifiée depuis une dizaine d’années pour répondre au défi de la tenue au feu. Pour cela, une large gamme de matériaux a été analysée afin d’évaluer leur inflammabilité, leur tenue mécanique ou encore leur toxicité. Cela a ainsi permis de réduire les risques lors des incendies. Cependant, malgré les connaissances acquises ces dernières années, d’importantes lacunes subsistent dans la compréhension du comportement au feu de ce type de matériaux. Les expérimentations à grande échelle nécessitent de progresser par essais-erreurs, rendant long et coûteux le processus de développement lorsque la question de la tenue au feu y est posée. L’utilisation des simulations numériques pour l’étude et la modélisation du comportement thermique des composites offre alors une alternative avantageuse face aux expériences à moyenne et à grande échelle. Néanmoins, ces simulations restent fortement dépendantes des paramètres d’entrée et des modèles choisis par l’utilisateur. Ce ne peut donc être qu’une étape dans le processus de développement permettant de cibler les configurations ou les zones critiques afin de préparer en conséquence les essais et les mesures expérimentales d’un part ainsi que les pièces et configurations d’autre part.

De plus, les nombreux phénomènes (e.g. dégradation de la résine, oxydation des fibres de carbone, délaminage, formation de pores) engendrés par la dégradation des matériaux composites rendent difficiles de telles modélisations multi-physiques. La modélisation de ce type de configuration requiert de prendre en compte à la fois l’évolution de la source thermique (la flamme) mais également la réponse thermique et chimique du composite et tous les phénomènes associés. La compréhension des phénomènes multi-physiques couplés et transitoires est alors un préalable nécessaire à la mise en place de moyens numériques validés.

C’est dans ce contexte que se positionnent les travaux présentés dans ce manuscrit. L’objectif consiste donc à évaluer et modéliser le comportement au feu de matériaux composites destinés aux applications aéronautiques. Pour cela, deux matériaux composites à base de fibres de carbone sont comparés. Le premier est un phénolique thermodurcissable, issu de la réaction de polymérisation entre le phénol (acide carbolique) et un formaldéhyde. Cette résine trouve de multiples applications dans l’industrie, notamment pour la protection thermique dans l’aérospatial. Il est également utilisé pour des composants automobiles ou des pares-feux sur plateforme pétrolière offshore. Sous l’action du feu, les composites carbone-phénoliques se caractérisent par une production importante de char (jusqu’à 50% de la masse initiale) ainsi qu’une faible conductivité thermique impliquant un temps de dégradation lent et une facilité d’extinction. Le second matériau est un composite thermoplastique, le polyéther-cétone-cétone (PEKK) qui appartient à la famille des PolyArylEtherKetone (PAEK), connus pour leur haute performance mécanique et leur stabilité à haute température. En raison de sa faible inflammabilité et émission de volatils lorsqu'il est soumis au feu, ce polymère a été

À partir d’une analyse du comportement au feu disponible dans la littérature, les différents points nécessaires à l’étude, la compréhension et la modélisation des phénomènes de dégradation thermique sont définis. Ainsi, expérimentalement, le comportement thermique des deux matériaux est étudié de la petite à la grande échelle. La prise en compte de ces différentes échelles est nécessaire afin d’assurer l’analyse en vue de la modélisation. En effet, plus la taille des échantillons augmente, moins il est possible, d’un point de vue numérique, de détailler les interactions physiques entre les phénomènes rencontrés. A contrario, les essais à petite échelle, sur des microstructures dans des conditions maîtrisées et répétables, permettent de dissocier les phénomènes et de donner une analyse détaillée de la dégradation du matériau.

Tout d’abord, des caractérisations à petite échelle (à l’échelle de la microstructure, inférieure au millimètre) permettent de fournir les premières informations concernant les processus de dégradation mais également les paramètres thermophysiques des différents composés du matériau (e.g. résine, char et fibre). Ces paramètres peuvent être utilisés comme données d’entrée dans les simulations numériques. Ensuite, à moyenne échelle (environ 10 cm), les échantillons sont soumis à un flux thermique radiatif représentatif des conditions d’essais de certification à l’aide d’un cône calorimètre. Les résultats obtenus permettent ainsi de valider, pour les deux composites étudiés, les simulations numériques réalisées à l’aide d’un modèle de pyrolyse monodimensionnel. Enfin, des essais à grande échelle dite « industrielle » (échantillons représentatifs de la taille réelle) sont réalisés à l’aide du brûleur NexGen disponible sur la plateforme expérimentale Feux VESTA de l’INSA Centre val de Loire et du laboratoire PRISME (Bourges, France). Ces essais permettent, d’une part, d’évaluer l’effet d’échelle en comparant les résultats à ceux obtenus à moyenne échelle et, d’autre part, à valider les simulations numériques conduites sur une configuration représentative de ces essais. Ce manuscrit présente donc, au travers de cinq chapitres, l’intégralité du travail conduit au cours de cette thèse.

Le chapitre 1 est consacré à l’environnement et au contexte qui ont conduit à la mise en place de cette étude. Dans un premier temps, une revue du contexte aéronautique est réalisée. Le processus de certification aéronautique, et plus particulièrement la certification des pièces et ensembles au feu, est présenté. L’utilisation des matériaux composites pour des applications aéronautiques est introduite, avant de présenter en détail les deux matériaux étudiés dans le cadre de ce travail de thèse. Ensuite, le comportement au feu des matériaux composites et les phénomènes de dégradation thermiques sont exposés. Ce chapitre permet ainsi de mettre en avant et de comprendre les phénomènes et conséquences de la dégradation thermique de matériaux composites ainsi que les méthodes de modélisation associées. Ce chapitre permet également de situer ce travail dans le contexte industriel et de justifier les différents axes du travail réalisé afin de répondre à la problématique soulevée.

Le chapitre 2 présente les caractérisations, réalisées à petite échelle, de la cinétique de dégradation et des propriétés thermophysiques des deux matériaux étudiés. Ces données sont nécessaires aux calculs numériques et utilisées en tant que paramètres d’entrée. La

de dégradation de la résine, et d’oxydation de la fibre et de la résine. Les propriétés thermophysiques telles que la masse volumique, la conductivité thermique ainsi que la chaleur spécifique sont ensuite mesurées jusqu’à 1000°C et à pression ambiante. À partir de lois de mélange spécifiques, les propriétés thermophysiques de la résine et du char (résidus de dégradation de la résine) sont ensuite déterminées en fonction de la température.

Le chapitre 3 est dédié à l’étude expérimentale et numérique du comportement au feu à moyenne échelle des deux matériaux étudiés. Dans un premier temps, il présente les essais réalisés au cône calorimètre et dans un second temps les résultats expérimentaux sont confrontés à ceux obtenus numériquement. Les résultats de l’étude numérique de la pyrolyse conduite avec l’outil fireFOAM sont ensuite complétés avec une étude de sensibilité locale du modèle de pyrolyse aux paramètres cinétiques et thermophysiques. Cette étude de sensibilité locale permet de mettre en avant les différences dans le processus de dégradation des deux matériaux ainsi que les paramètres d’entrée ayant un impact sur le modèle de pyrolyse.

Le chapitre 4 est dévolu à l’étude expérimentale et numérique du comportement au feu des deux matériaux composites étudiés à grande échelle. L’étude expérimentale du comportement au feu est réalisée à l’aide du brûleur NexGen de la plateforme expérimentale Feux VESTA de l’INSA Centre Val de Loire (laboratoire PRISME). Les différents éléments constitutifs du banc d’essai ainsi que son principe de fonctionnement sont détaillés. Ensuite, des simulations numériques sont introduites. Les modèles utilisés dans les calculs réalisés à l’aide de fireFOAM, les conditions limites et le domaine de calcul sont décrits. Deux cas tests sont ensuite étudiés. Ces simulations visent à assurer la modélisation de deux configurations de référence : une flamme de panache, ainsi que l’agression thermique d’une plaque d’aluminium par une flamme de kérosène en vue de la modélisation des essais feu à grande échelle. Enfin le comportement au feu à grande échelle des deux matériaux est présenté et analysé à partir des mesures de perte de masse et de températures réalisées au cours d’un essai de 15 minutes dans les conditions requises par les normes aéronautiques. Des conclusions sont également apportées en tenant compte des observations faites lors des mesures réalisées à petite et moyenne échelle.

Le chapitre 5 présente l’évaluation des émissions de volatils des deux matériaux composites au cours de leurs dégradations thermiques. Ces émissions de volatils sont mesurées à l’aide d’un appareil de pyrolyse flash couplé à un analyseur GC-MS pour trois températures différentes sélectionnées au cours de la décomposition des matériaux à partir des mesures thermogravimétriques. Les limites inférieures d’inflammabilité ont été calculées en utilisant une méthode empirique basée sur des propriétés intrinsèques des matériaux pour les différentes espèces identifiées à chaque température. Ces données permettant alors d’établir une classification de la tenue au feu de ces derniers en fonction des différents paramètres clés.

La tenue au feu des matériaux composites : un