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Pour avoir une idée des représentations et des réactions des acteurs locaux face aux problèmes étudiés, nous nous appuyons sur deux types d’outils : l’interrogation directe des acteurs locaux et l’analyse de leurs documents.

 INTERROGER DIRECTEMENT LES ACTEURS

L’étude des acteurs donne une image à la fois de l’organisation territoriale et du système de représentation. D’une part, l’interrogation des acteurs locaux permet le recueil des données et offre la possibilité d’entretiens complémentaires au diagnostic territorial. Ils sont ainsi à la fois acteurs de la recherche et sujet d’analyse, en tant qu’élément du système local. La consultation en sus des universitaires et autres experts apporte une connaissance des études existantes et un partage d’expérience sur les terrains observés. D’autre part, l’identification du jeu des acteurs permet l’étude de l’organisation locale. Cette étude peut aller jusqu’à l’identification nominative de chaque personne (de Varine, 2006 p. 76), sa structure de rattachement, son rôle dans le développement local ainsi qu’une appréciation subjective de l’acteur par rapport à la constitution et à l’utilisation de la Ressource. L’analyse des acteurs locaux peut également inclure les « animateurs » du territoire, à tout point de vue : socio-économique, culturel, économique ou du développement local. Ainsi, nous devons à minima connaître les acteurs principaux du territoire et leurs relations, pour cibler au mieux les personnes à rencontrer pour la réalisation d’entretiens.

· L’enquête de territoire

Recueillir une image des acteurs locaux sur ces sujets, à un instant T, apporte un aspect qualitatif au diagnostic territorial. Le but est de faire parler les acteurs locaux, que ce soit par le biais d’entretiens dirigés, ou de manière indirecte par l’analyse de discours et d’entretiens déjà réalisés dans d’autres contextes. L’enquête de terrain permet de compléter l’analyse par diagnostic territorial, du point de vue des acteurs de terrain, afin d’identifier un système local de représentation. La réalisation d’une enquête auprès des acteurs locaux a pour but de connaître le niveau de conscience de la surexploitation des ressources ainsi que leur capacité à évoluer pour « faire autrement ». Cette enquête de terrain permet de compléter l’approche par « expertise » (le diagnostic territorial) par l’avis des acteurs du territoire. C’est l’intégration des représentations sociales locales dans l’analyse. L’enquête de terrain se décompose ici en deux outils d’observation et d’analyse que sont les entretiens et l’analyse de documents.

Les entretiens

Cette enquête est réalisée par entretiens semi-dirigés auprès des gestionnaires du territoire. Deux types d’entrevues nous intéressent ici : l’entrevue via un interlocuteur-clé et l’entrevue centrée (Gumuchian, et al., 2000). L’interlocuteur-clé est une « personne

ressource qui a des compétences spécifiques par rapport au sujet retenu ». Les acteurs interrogés dans ce travail sont choisis par rapport à leur rôle dans l’organisation sociale (maires, présidents d’intercommunalité) ou par leur renommée locale (« mémoire du village », personne cumulant les mandats locaux). Nous voulons aussi interroger ceux qui ont un rôle à jouer dans les politiques locales de changement climatique et de gestion des ressources. L’entrevue centrée « consiste à étudier en profondeur un sujet précis ». Nous avons établi une liste de thèmes puis de questions que nous voulons poser à tous les acteurs interrogés. Le but, par ces entretiens, est de constater ou non la conscience de la Ressource territoriale au sein des acteurs locaux. Nous nous interrogeons sur leur ressenti en termes de développement durable, de gestion des ressources et de changement climatique. Les questions guident l’entretien et ont pour objectif de faire parler l’interviewé sur les problèmes qui nous intéressent dans ce travail de recherche. Dans un premier temps, nous ne mentionnons pas les notions de ressource et de changement climatique pour voir si elles apparaissent spontanément dans le discours. Dans un second temps, nous nommons clairement ces notions et pouvons voir si nous parlons de la même chose et si les problèmes actuels d’épuisement et de pollution de l’air par exemple sont abordés. Enfin, nous souhaitons profiter de ces entretiens pour obtenir des éléments de connaissance sur les évènements passés, les processus d’action et les expériences. Avec cette méthode nous espérons pouvoir définir le niveau de conscience et/ou d’intérêt que porte l’acteur interrogé sur ces problèmes.

 L’ANALYSE DE DOCUMENTS

L’analyse des documents vient compléter l’enquête par entretien. Ces documents se retrouvent sous la forme de littérature grise (rapports d’expert, de consultant, ou études commandités par les élus et techniciens) et de documents politiques et internes aux collectivités (discours, comptes-rendus de réunions). L’analyse de terrain peut aussi se réaliser à travers l’étude de documents stratégiques territoriaux de moyen et long termes tels que des documents de planification du territoire (PLU, SCOT). Dans différents domaines scientifiques, cette utilisation des matériaux écrits est dite « Analyse de contenu » (ADC). Elle est aussi utilisée en géographie, permettant une approche qualitative de la recherche sur l’espace (Gumuchian, et al., 2000 p. 334).

L’analyse thématique des entretiens et documents fournit des éléments de compréhension du contexte de gestion des ressources et du niveau des enjeux. Elle peut consister en l’analyse de comptes-rendus ou de discours en repérant combien de fois le mot de la thématique est cité ou suggéré. Nous pouvons ainsi étudier la notion de ressource et le thème du changement climatique et s’ils sont conscients dans le discours de son auteur. Dans le cadre de ce travail, il nous semble judicieux d’analyser également la notion de développement durable qui sous-tend l’ensemble de ce travail. Les thèmes d’étude sont donc choisis au départ et disposés dans une grille d’analyse qui sert de support au relevé des notions présentes dans le document (figure 5). Une fois remplie,

l’approche quantitative donne déjà des informations sur les notions abordées ou non, et les thèmes plus présents que d’autres.

Figure 5 - Thèmes étudiés dans l'Analyse De Contenu

Thèmes Corpus Indicateurs

Ressource ressource ressource, sol, eau, air, sous-sol, patrimoine, richesse, paysage, estive, herbe, montagne, plaine

pollution pollution, pollué, dégradation, dégradé, abîmé, écologie, souillé, contaminé, nitrate, phytosanitaire, engrais, pesticide, insecticide, déchet, produit chimique, hydrocarbure, eaux usées, épuration, gaz toxique

Ressource territoriale patrimoine, richesse, savoir-faire, encrage

Changement climatique

catastrophe catastrophe naturelle, inondation, tempête, éboulement, froid, neige, sécheresse

climat climat, climatique, réchauffement, changement, température, météo, atmosphère,

pollution de l’air émissions, gaz à effet de serre, couche d’ozone, carbone

Développement durable

développement développement, évolution, croissance, expansion, essor

temporalité durable, durabilité, court-moyen-long termes, génération, devenir

développement durable environnement, devenir du territoire

Source : auteur

Cette première approche est complétée par un point de vue qualitatif qui permet de regarder également l’importance des notions recherchées par rapport aux autres dans le texte, vis à vis aussi de la taille et de l’objectif du texte et enfin avec quoi elles sont mises en relation. Les corpus de mots proposés pour cela correspondent plus à une logique de langage courant qu’à la définition d’un thème regroupant le vocabulaire grammaticalement et étymologiquement correct. L’utilisation d’un logiciel libre (type Tropes ou Iramuteq) permet de renforcer l’analyse de document en permettant des croisements plus complexes entre les différents thèmes analysés et avec les autres. Nous espérons ainsi obtenir une idée des représentations locales, à travers les discours, connaître le niveau de conscience des problématiques étudiées (changement climatique, épuisement des ressources, développement durable et Ressource territoriale).

Avec les entretiens nous regardons les discours, avec l’observation nous regardons les faits et avec l’analyse de documents, nous regardons les traces. En d’autres termes, l’analyse des documents écrits permet d’étudier une situation « prescrite », le recueil de discours permet d’étudier des situations « dites » et l’observation permet l’étude d’une situation « réelle » (IFSI, 2000). Nous utilisons également l’observation pour comprendre l’organisation locale des acteurs, notamment à travers l’étude de leurs relations. En ces termes, nous pouvons mentionner une pratique d’observation participante qui est utilisée pour décrire et comprendre un environnement et les évènements qui s’y déroulent. Nous avons en effet travaillé tout d’abord comme consultant auprès de collectivités et d’établissements publics afin d’appréhender le contexte territorial,

inconnu au démarrage de la recherche. Une fois le contexte local mieux ciblé, nous avons travaillé directement au sein de collectivités, dans un des territoires d’étude. Nous avons installés notre lieu de vie au sein d’un autre territoire d’étude. Nous essayons de tirer quelques conclusions de cette observation participante qui se veut « flottante » (large), contrairement à une observation centrée qui nécessite une grille d’observation précise (IFSI, 2000). Cet outil n’est pas évident à mobiliser car il est difficile de garder un regard neutre en étant soi-même intégré au système que l’on étudie. De plus, nous pouvons nous même avoir une influence sur le système.