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Interprétation de la composition isotopique des eaux du Rinjani :

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2 Géochimie :

2.6 Les isotopes de l’hydrogène et de l’oxygène :

2.6.5 Interprétation de la composition isotopique des eaux du Rinjani :

Les compositions isotopiques des sources thermales du Rinjani et du lac de cratère sont toutes identiques, avec des compositions isotopiques autour de -3%o±0.3 pour le et de -33%o±l pour le ôD. Il y a cependant une exception avec la source SA04-SP02, située à l’extrémité nord-est du fer à cheval que forme le lac de cratère.

La composition de cette source peut s’expliquer facilement par un mélange entre de l’eau présentant une composition isotopique identique à toutes les autres sources et de l’eau de pluie. En effet, sa composition isotopique est située juste sur la droite de mélange de ces deux eaux (figure 2.16). De plus, cette zone correspond à une zone d’écoulement des eaux de pluie vers le lac, cette partie du cratère est donc probablement imprégnée d’eau de pluie qui peut se mélanger aux fluides hydrothermaux pour former le fluide émis par cette source chaude.

Figure 2.16 : composition isotopique des sources thermales du Rinjani (rouge), de l’eau de pluie du Rinjani (vert) et du lac (bleu) comparée à la droite des eaux météoriques de cette région (MWL), à la droite d’évaporation calculée pour le lac du cratère du Rinjani, à la droite d’interaction eau roche (1ER) et à la composition des gaz volcaniques émis par les magmas andésitiques (AG).

La composition isotopique des sources thermales ne peut pas être expliquée par un seul phénomène. En effet, elle ne peut résulter uniquement de l’interaction entre le fluide hydrothermal et la roche encaissante. La composition isotopique de l’eau de pluie obtenue est beaucoup trop appauvrie en deutérium et en oxygène 18 sur la droite des eaux météoriques pour que ce soit possible.

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L’évaporation de l’eau de pluie ne peut pas non plus expliquer la composition isotopique de ces fluides, car la droite d’évaporation se trouve trop à gauche par rapport à la composition isotopique des sources thermales. Il ne reste donc que la possibilité d’une combinaison de ces deux phénomènes pour expliquer la composition isotopique de ces fluides.

Les compositions isotopiques identiques de toutes les sources thermales, ainsi que du lac volcanique, indiquent que la composition des sources thermales est principalement le résultat du recyclage des eaux du lac dans le système hydrothermal.

Cette interprétation se trouve renforcée par le fait que presque toutes les sources thermales situées autour du Gunung Baru ont une composition chimique en éléments majeurs proche de la composition du lac. De plus, la partie évaporation de la composition isotopique des sources thermales s’explique alors facilement, puisque le lac de cratère peut s’évaporer par ses 11 km^ de surface.

2.7

Les isotopes du soufre :

Les Isotopes utilisés pour tracer les processus volcaniques sont les isotopes 34 et 32 du soufre. La composition isotopique de l’échantillon est comparée avec la composition de la troïlite de Cayon Diabolo (Cayon Diabolo Troilite, CTD) pour obtenir une variation des rapports en soufre 34 par rapport à ce standard, tel que :

Les isotopes du soufre sont utilisés pour tracer l’origine du soufre dans les fluides émis à la surface des volcans. Les sulfates présents dans les sources thermales peuvent avoir deux origines. Premièrement, il peut être dérivé de la composante soufrée des gaz magmatiques (SOj et H2S). Deuxièmement, il peut avoir pour origine la dissolution de

sulfates présents dans l’édifice volcanique.

Lors de l’interaction entre le gaz magmatique et le fluide hydrothermal, le SO^ réagit avec le fluide suivant la réaction de disproportionation. Cette réaction peut prendre deux formes différentes en fonction de la température du fluide et du potentiel d’oxydoréduction :

4SO2 + 4H2O => 3H2SO4 + H2S Équation 2-28

3SO2 + 3H2O => 2H2SO4 -I- H2O -I- S° Équation 2-29

La première se produit à haute température et bas potentiel redox, la seconde lorsque la température est basse et le potentiel redox élevé (Kusakabe, 2000).

Lors de ces réactions, les espèces oxydées s’enrichissent en soufre 34 et les espèces réduites s’appauvrissent. L’enrichissement en soufre 34 se passe en deux étapes. La première consiste en un fractionnement cinétique initial (IKF), au moment où la réaction de disproportionation a lieu, cet enrichissement est d’autant plus important que la température est élevée (figure 2.17). Ensuite, le fractionnement entre les espèces oxydées et réduites va se poursuivre jusqu’à obtenir l’équilibre thermodynamique (figure 2.17). Le fractionnement à l’équilibre est, lui aussi, d’autant plus important que la température est élevée (Kusakabe et al., 2000).

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Lors de la dissolution de sulfates, la composition isotopique du soufre ne change pas entre la phase solide et la phase aqueuse.

Figure 2.17 : la courbe IKF (fractionnement cinétique initial) représente la valeur de 1000lnaj^^._^

^“hso- s=(l + S34S“HSOL/t000)/(l + Ô34S-S/1000)) lors de la réaction de disproportionation. La courbe Equilibrium représente cette même valeur à l’équilibre thermodynamique (Kusakabe et al., 2000).

Le lac volcanique et les sources thermales du Rinjani présentent une importante concentration en sulfates (environ lOOOppm). La composition isotopique des sulfates du lac volcanique, avec un ô^‘*S de 12%o, est une composition isotopique moyennement enrichie en soufre 34 (tableau 2-2).

Date Numéro d34S

Lac 7/5/2005 SA05 lac 12.0

Sources 8/10/2004 SA04 SP02 10.0

thermales 7/6/2005 SA05 SP03 13.4 7/7/2005 SA05 SP05 12.3 8/11/2004 SA04 SP06 12.2

Tableau 2-2 : composition isotopique du soufre du lac volcanique et des sources thermales du Rinjani.

L’enrichissement en soufre 34 des gaz magmatiques est compris entre +5 et +7%o pour les zones de subduction (de Hoog et al., 2001). Pour le Rinjani, les valeurs mesurées sur des laves de l’éruption de 1943 sont de 3.2 et 3.3%o (de Hoog et al., 2001). Cependant, la concentration en soufre 34 des laves est moins élevée que la concentration initiale, car le dégazage enrichit la phase vapeur en soufre 34. De Hoog et al. (2001) ont estimé l’enrichissement en soufre 34 de l’ensemble de l’arc indonésien entre 5 et 7%o sur base d’un taux de dégazage de 90%, ce qui correspond à l’enrichissement moyen des zones de subduction.

Pour avoir un enrichissement du sulfate en soufre 34 à partir des gaz magmatiques de l’ordre de 12%o, il faut que le gaz se soit enrichi en soufre 34 lors de la réaction de disproportionation. De plus, le sulfate produit par la réaction de disproportionation a dû être séparé de 1’ H2S ou du soufre élémentaire produit par la réaction. En effet, comme le

lac est oxydant, si le soufre réduit se trouvait encore dans le fluide, il serait oxydé, ce qui appauvrirait le fluide en soufre 34.

La composition isotopique des sources thermales est identique à celle du lac, ce qui confirme l’hypothèse émise précédemment d’un recyclage des eaux du lac dans le système hydrothermal. Une source fait exception : la source la plus proche du cratère

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(SA05-SP03). Cette dernière est légèrement enrichie en soufre 34 avec une composition isotopique de 13.4%o au lieu de 12%o. Cet enrichissement peut s’expliquer par un apport de gaz magmatique en provenance de l’intrusion magmatique. Cette source présente aussi un rapport sulfate chlore plus élevé, confirmant un apport de gaz magmatique. De plus, elle n’est pas enrichie en calcium, ce qui indique que l’origine des sulfates pour cette source n’est pas la dissolution du gypse. Enfin, elle est légèrement plus acide que les autres, confirmant encore l’origine magmatique.

Le fait que toutes les sources thermales présentent le même pour leurs sulfates indique une origine commune pour les sulfates de tous ces fluides. Le recyclage de l’eau du lac par infiltration couplée à une dissolution du gypse ou de l’anhydrite pour produire le fluide se trouve ici confirmé.

Les compositions isotopiques en soufre 34 des minéralisations de gypse sur différents volcans ont été étudiées par Rye (2005) et Zimbelman et al. (2005). La composition isotopique de ces sulfates dans les systèmes hydrothermaux est très variable avec des compositions isotopiques en soufre 34 comprises entre 3 et 17%o. Cette large gamme de valeur provient d’une variation du mécanisme de formation de ces sulfates. Les fluides, dont la composition en soufre 34 est la plus enrichie, sont ceux dont les sulfates proviennent des réactions de disproportionation.

Le mécanisme de formation de ces sulfates est probablement le résultat d’un mélange d’un fluide hydrothermal riche en sulfates d’origine magmatique avec de l’eau météorique éventuellement enrichie en soufre réduit (HjS) d’origine hydrothermale et pauvre en soufre 34 (Zimbelman et al., 2005).

Les compositions isotopiques du Rinjani, situées au milieu de la gamme de valeurs, sont probablement principalement le résultat du lessivage d’un sulfate d’origine magmatique. La grande stabilité isotopique des sulfates dissous indique que ce gypse s’est déposé dans un milieu présentant une température stable. En effet, la composition isotopique d’équilibre des sulfates varie avec la température (Kusakabe et al ; 2000). Pour avoir une précipitation avec une composition isotopique stable dans le temps, le gypse qui a précipité a dû le faire dans un système hydrothermal avec une température stable.

L’homogénéisation de la composition isotopique des sulfates peut aussi être obtenue par plusieurs cycles de « dissolution précipitation » fréquente dans ce type de milieu (Zimbelman et al., 2005). Lors de la dissolution du gypse, la composition isotopique des sulfates n’est pas modifiée. C’est donc cette composition que va présenter le fluide hydrothermal émis au niveau des sources thermales, si ces dernières ne sont pas influencées par le gaz magmatique.

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