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assujettis 1. Électricité et gaz

5. Industrie pharmaceutique

5.1. Le secteur du médicament connaît une évolution profonde de son modèle économique et de ses perspectives de croissance

Le secteur pharmaceutique (qui, dans cette partie, est entendu au sens des laboratoires pharmaceutiques et des sous-traitants intervenant dans la chaîne de production des produits de santé, qui seront circonscrits pour les besoins de l’analyse au périmètre des médicaments à usage humain, abstraction faite des médicaments vétérinaires) se caractérise par l’importance de son poids économique dans l’économie française.

Ainsi, le marché français du médicament représente 27,5 Md€ (pour un chiffre d’affaires à l’exportation de 22 Md€) et les entreprises pharmaceutiques établies en France emploient directement 104 000 personnes en 2011, selon le bilan économique du LEEM (les entreprises du médicament, fédération professionnelle du secteur pharmaceutique). Le dynamisme du marché national s’illustre également par son rang dans le marché mondial : il représente ainsi 4,8 % du marché mondial en 2011, ce qui en fait le deuxième marché européen derrière l’Allemagne et le dote d’une taille comparable au marché chinois.

Toutefois, en dynamique, l’industrie pharmaceutique connaît des évolutions profondes qui altèrent sa structure de marché et obèrent ses perspectives de croissance à court terme.

En premier lieu, la venue à échéance de brevets qui protégeaient jusqu’alors des médicaments qualifiés de « blockbusters » (capables de générer un chiffre d’affaires d’au moins 1 Md€) contribuant très substantiellement à la croissance du chiffre d’affaires des laboratoires, constitue une évolution d’ampleur. En effet, une fois tombés dans le domaine public et exposés à la concurrence des génériques, les concepteurs historiques de ces

« produits de masse » perdent rapidement des parts de marché.

En deuxième lieu, et plus spécifiquement pour le marché français, l’action régulatrice des pouvoirs publics elle-même limite la croissance spontanée du marché31. Compte tenu du poids des médicaments dans les dépenses de santé remboursables, les pouvoirs publics ont en effet mis en place des politiques destinées à limiter la croissance de ces dépenses : ainsi, la politique de promotion des médicaments génériques exerce une pression à la baisse sur les prix de vente d’une partie croissante des spécialités admises au remboursement ; un ensemble d’actions de maîtrise des dépenses est également venu limiter la croissance spontanée du marché (sur le versant de la régulation de la prescription notamment, en y intégrant des données médicales) ; enfin, les ventes de médicaments elles-mêmes font l’objet d’une régulation par les prix au travers d’objectifs annuels d’économies fixés par convention après négociation entre chaque entreprise du secteur et le comité économique des produits de santé (CEPS).

En conséquence, le modèle économique du secteur connaît un changement fondamental qui se traduit par la déformation de la structure du marché au profit de produits de niche à prix élevés, mais surtout par la baisse tendancielle de la croissance du marché des médicaments (cf. graphique ci-dessous) et la contraction des effectifs du secteur.

Graphique 25 : Croissance annuelle du chiffre d’affaires du médicament remboursable (en %)

Source : Mission IGF-IGAS.

Le LEEM prévoit par ailleurs une croissance de - 1,8 % du marché national pour l’année 2013. La rentabilité commerciale (définie ici comme le ratio entre l’excédent brut d’exploitation -EBE- et le chiffre d’affaires hors taxes) suit également une tendance baissière depuis 2007 et a diminué de près de 2 points entre 1998 et 2010. Enfin, alors que l’emploi global dans l’industrie pharmaceutique avait cru sans interruption de 1998 à 2007, atteignant un maximum de 103 633 salariés pour l’ensemble du secteur, l’on ne comptait plus en 2010 que 97 967 salariés.

5.2. Le poids de la fiscalité spécifique connaît une dynamique haussière sur la même période pour le secteur pharmaceutique

Au sein de la fiscalité spécifiquement affectée au secteur pharmaceutique, qui représente dix-sept taxes pour un rendement de 4,4 Md€ en 2011, l’affectation de la TVA brute sur les produits pharmaceutiques représente 3,5 Md€. Les particularités de cette taxation, qui pèse sur la consommation et donc sur les ménages mais n’a pas d’incidence pour les entreprises du secteur, doivent conduire à concentrer l’analyse sur les 900 M€ de taxes affectées hors TVA, c’est-à-dire sur :

la taxe sur la promotion ;

la taxe sur les ventes directes ;

les taxes et redevances diverses affectées à la haute autorité de santé (HAS) et à l’agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), nouveau nom de l’AFSSAPS depuis 2012 ;

la taxe sur le chiffre d’affaires « pris en charge » (ville remboursable et hôpital, créée par la LFSS pour 2004) ;

les contributions qui constituent l’équivalent conventionnel de la clause de sauvegarde gérée par le CEPS (article L.138-10 du code de la sécurité sociale).

Il ressort de cette analyse que l’industrie pharmaceutique connaît un effet « de ciseau » entre, d’une part, la stagnation de son chiffre d’affaires et de sa rentabilité économique et, d’autre part, la croissance du poids de la fiscalité affectée qui lui est spécifique : or le secteur est déjà très fiscalisé (le ratio de fiscalisation rapportant la somme des prélèvements obligatoires génériques et de la fiscalité affectée sectorielle rapportée à la valeur ajoutée est de 92 % en 2011, ce qui est très élevé ; le poids de la fiscalité affectée sectorielle dans cette somme est de 66 %, ce qui constitue également un taux très substantiel). Cet effet « de ciseau » devrait, selon les estimations du LEEM, s’amplifier dans les années à venir, notamment du fait de l’extension de l’assiette de la taxe sur les dépenses de promotion des médicaments (constituée à ce stade des rémunérations de toutes natures, des remboursements de frais de transport et des frais de publication et des achats d’espaces publicitaires) aux dépenses engagées pour l’organisation et la participation aux congrès pharmaceutiques32.

Tableau 13 : Évolution des principales taxes affectées spécifiques au secteur pharmaceutique sur la période 2011-2013 (M€)

Années

Taxe sur promotiola

n

Taxe sur les ventes directe

s

Taxes et redevanc es HAS et ANSM

Taxe sur le chiffre d'affair es pris

en charge

Contributio ns sur convention

CEPS

Total des prélèvemen

ts spécifiques

Croissance du montant prélèvemendes

ts spécifiques

2011 158 50 75 255 333 871 -

2012 156 50 138 402 250 996 + 14 %

2013

(estimation) 230 60 148 396 250 1084 + 9 %

Source : LEEM.

Graphique 26 : Évolution du poids des principaux prélèvements spécifiques à l’industrie pharmaceutique au regard du chiffre d’affaires

-3,0%

-2,0%

-1,0%

0,0%

1,0%

2,0%

3,0%

4,0%

5,0%

2011 2012 2013 (estimation)

Taux de croissance du CA

% des prélèvements spécifiques dans le CA Source : LEEM.

5.3. Un tel effet de ciseau pourrait être de nature à peser sur les choix d’investissement des entreprises mondiales en France s’il continue à s’accentuer

Le rapport IGF-IGAS précité s’avère nuancé dans l’ensemble quant au caractère désincitatif de la fiscalité affectée reposant sur l’industrie pharmaceutique. L’impact favorable du système fiscal, en particulier du crédit d’impôt recherche (CIR) qui bénéficie substantiellement à un secteur pour lequel 11 % du chiffre d’affaires des entreprises était consacré à des dépenses de recherche et développement en 2009, a permis jusqu’à présent de compenser les hauts niveaux enregistrés par la fiscalité spécifique. Ainsi, la position de la France est actuellement comparable à celle de l’Allemagne, de l’Espagne et de l’Italie en termes de pression fiscale sur

Toutefois, dans le cadre d’un marché mondialisé et concurrentiel, l’effet « de ciseau » précédemment mis en exergue emporte une double conséquence à court terme : d’une part, la poursuite de la stagnation, voire de la baisse de la rentabilité des entreprises exerçant leurs activités sur le territoire national puisqu’elles ne peuvent répercuter la hausse de la fiscalité spécifique sur les coûts dans un marché national conventionné ; d’autre part, la diminution de l’attractivité du territoire pour les entreprises pharmaceutiques étrangères désireuses d’investir en France. En effet, si le rapport IGF-IGAS rappelle à raison que la place accordée à la fiscalité spécifique dans les décisions d’investissement doit être relativisée car ces dernières tiennent d’abord à des considérations économiques (taille du marché, forte solvabilisation de la demande, qualité de la main d’œuvre, effet de signal et effet de référencement, autant de facteurs pour lesquels le marché français demeure structurellement porteur), il n’en demeure pas moins qu’« en leur état actuel, les taxes spécifiques jouent au détriment de l’attractivité du territoire français » du fait du manque de lisibilité et de l’instabilité de la fiscalité spécifique française.

La fiscalité affectée paraît ainsi de nature à influer directement à la baisse sur l’attractivité du marché national : dans un marché où l’industrie est d’autant plus délocalisable que la chaîne de valeur s’avère complexe et surtout fragmentée à l’extrême, le coût marginal d’une augmentation de la fiscalité affectée est susceptible de se répercuter sur les investissements étrangers effectués en France, avec des effets induits sur l’emploi et la croissance de court et moyen terme.

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