• Aucun résultat trouvé

Implication de l’Etat et des autres acteurs dans le domaine sanitaire : des évolutions

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 58-61)

2. Surveillance épidémiologique de trois maladies infectieuses équines en France

2.2 Particularités et hétérogénéité de la filière équine

2.2.3 Implication de l’Etat et des autres acteurs dans le domaine sanitaire : des évolutions

Au cours des dix dernières années, l’implication de l’Etat a évolué et globalement diminué concernant la gestion et le financement de la filière équine, en particulier d’un point de vue sanitaire.

Cette évolution s’est notamment manifestée par la fusion des Haras nationaux et de l’Ecole nationale d’équitation qui a donné naissance à l’IFCE. Les missions du nouvel Institut ont été recentrées sur les activités de service public, en abandonnant progressivement celles relevant du secteur marchand (centres techniques de reproduction équine en particulier). Par ailleurs, l’Etat s’est partiellement désengagé des courses en libéralisant les jeux et paris en ligne en 2010, mettant fin au monopole du PMU (Jez et al., 2012).

Dans le domaine sanitaire, l’Etat s’implique activement depuis plusieurs décennies dans la surveillance, la prévention et la lutte contre les maladies animales les plus importantes. Répondent à ce critère les affections susceptibles de porter gravement atteinte à la santé animale, de nuire à la santé publique et/ou de provoquer de lourdes pertes économiques directes ou indirectes, par exemple à travers les restrictions imposées au commerce national et international. Pour ces maladies, l’Etat impose ou définit des mesures de contrôle, qui s’accompagnent pour certaines d’une prise en charge financière. Les maladies ainsi règlementées ont longtemps été réparties en deux catégories : maladies animales réputées contagieuses (MRC ou MARC) pour celles jugées les plus importantes, et maladies animales à déclaration obligatoires (MDO ou MADO) pour celles ayant des conséquences modérées. Une nouvelle catégorisation des maladies a vu le jour en 2012. Les plus préoccupantes sont désormais appelées dangers sanitaires de première catégorie. Pour celles-ci, dont l’AIE fait partie, l’Etat prend et finance les mesures de surveillance, de prévention et de lutte jugées nécessaires à la défense de l’intérêt général. Pour les dangers sanitaires de deuxième catégorie, incluant l’AVE et la MCE, l’Etat peut prendre des mesures similaires (mais de manière non systématique) dans un but d’intérêt collectif. Les autres dangers sont dits de troisième catégorie et l’application de mesures sanitaires relève uniquement de l’initiative privée (Anonyme, 2011, 2012a, 2013). En 2006, la MCE est passée du statut de MRC à celui de MDO ; elle est aujourd’hui danger sanitaire de deuxième catégorie. La déclaration des cas, toujours réglementée, ne s’accompagne plus de mesures de police sanitaire obligatoires. Plus généralement, à la suite des Etats généraux du sanitaire qui se sont tenus en 2010 (DGAL, 2010) puis de la loi dite d’avenir agricole de 2014 (Anonyme, 2014b), l’Etat a décidé de réduire son implication en termes de lutte et de surveillance épidémiologique, en particulier pour les dangers sanitaires de deuxième catégorie. Certaines de ses missions sont progressivement transférées aux organismes à vocation sanitaire, aux organismes vétérinaires à vocation technique, aux associations sanitaires régionales et aux réseaux sanitaires de

détenteurs qui seront prochainement mis en place, suite à la parution de l’ordonnance n° 2015-1242 du 7 octobre 2015 relative à l’organisation de la surveillance en matière de santé animale, de santé végétale et d’alimentation (Anonyme, 2011, 2012b, 2015b).

Des réseaux sanitaires, prévus par l’ordonnance n° 2015-1242, seront en effet créés à l’initiative des professionnels pour être représentatifs de l’ensemble d’une filière animale ou végétale et ils pourront être reconnus par l’autorité administrative. Leur objectif sera de « coordonner, en liaison avec les organismes à vocation sanitaire, la mise en œuvre des mesures de surveillance et de prévention contre les dangers sanitaires » et de favoriser « la mutualisation des coûts correspondants ». Les réseaux devront « représenter au moins 60 % soit des détenteurs (…) [professionnels], soit des surfaces, des volumes ou du chiffre d’affaires de la production considérée ».

Leurs programmes d’action seront financés par des cotisations obligatoires des adhérents. Pour assurer leurs missions, les réseaux sanitaires pourront édicter des clauses types figurant dans des contrats conclus avec les différents partenaires participant à la mise en œuvre des dispositifs de surveillance et de prévention. L’ordonnance aborde également le rôle des plateformes d’épidémiosurveillance dans les domaines animal, végétal et alimentaire, chargées d’apporter à l’État et aux autres gestionnaires de dispositifs de surveillance « un appui méthodologique et opérationnel pour la conception, le déploiement, l’animation, la valorisation et l’évaluation des dispositifs de surveillance sanitaire et biologique du territoire ». Les réseaux sanitaires reconnus adhèreront ou participeront à ces plateformes. Enfin, l’ordonnance précise que les laboratoires nationaux de références apportent à l’Etat, aux laboratoires agréés, aux plateformes, ainsi qu’aux autres gestionnaires de dispositifs de surveillance le cas échéant, « l’appui scientifique et technique nécessaire à la collecte, au traitement, à l’accessibilité, à la transmission et à la diffusion des données d’épidémiosurveillance ».

Si l’ordonnance du 7 octobre 2015 fait référence à la constitution de trois plateformes d’épidémiosurveillance, la première d’entre elles a déjà vu le jour, à savoir la Plateforme d’épidémiosurveillance en santé animale (Plateforme ESA). Sa mise en place en 2011 correspondait à l’action n° 1 du Plan d'action en 40 points issus des Etats généraux du sanitaire (tenus en 2010), intitulé « Une politique de sécurité sanitaire rénovée pour l’agriculture française » (DGAL, 2010).

Il s’agissait de créer un outil de surveillance collaboratif totalement nouveau, dédié aux dangers sanitaires jugés prioritaires. Les grandes missions de la Plateforme ESA sont de contribuer à i) garantir l’adéquation entre les dispositifs de surveillance (en termes d’organisation, de méthodes et de fonctionnement) et les objectifs assignés par leurs gestionnaires, ii) s’assurer de leur qualité par l’évaluation, iii) coordonner les activités de surveillance et iv) faciliter le partage et l’analyse des données pour produire des informations pertinentes sur la situation épidémiologique des maladies

étudiées. La Plateforme ESA est un lieu de mutualisation des compétences et des outils pour renforcer la surveillance. Elle compte six membres titulaires, la DGAL, l’Anses, la Société nationale des groupements techniques vétérinaires (SNGTV), la Fédération nationale des groupements de défense sanitaire (GDS France), Coop de France et l’Association française des directeurs et cadres des laboratoires vétérinaires publics d’analyses (Adilva), auxquels se sont associés trois autres organismes à ce jour, le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad), la Fédération nationale des chasseurs et l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) (Calavas et al., 2012b; Plateforme ESA, 2014b, 2016b).

La finalité de ces évolutions sanitaires pour l’Etat est de renforcer l’efficacité de la surveillance, de la prévention et de la lutte, tant pour les actions obligatoires que pour les « programmes collectifs volontaires » (PCV) dans chaque filière. Elle traduit aussi une volonté des autorités publiques de ne plus être le principal maître d’œuvre, mais de confier ce rôle aux autres partenaires, qu’ils soient publics ou privés, en particulier aux organisations sanitaires et vétérinaires ainsi qu’aux représentants d’éleveurs et de détenteurs. Ainsi, l’implication de l’Etat se concentre progressivement sur un rôle de législateur, de délégant et de garant de l’action coordonnée des autres acteurs.

L’objectif est également de réduire son implication financière et d’encourager la mutualisation des coûts en associant plus fortement les professionnels des filières. Ces évolutions peuvent s’expliquer par le contexte de restrictions budgétaires mais aussi par la mobilisation croissante des partenaires privés sur les questions relatives à la gestion de la santé animale.

Ainsi, des collaborations se développent entre les acteurs sanitaires de la filière équine, notamment l’IFCE, le Respe, l’Anses et l’Avef. Ces organismes, avec une demi-douzaine d’autres partenaires publics et privés2, se sont associés en 2011 pour créer une fondation de coopération scientifique, la Fondation Hippolia. Son but est de promouvoir des programmes de recherche et de formation en santé, bien-être et performance des équidés. Les champs d’action de la fondation sont plus particulièrement le diagnostic, le traitement et la prévention des affections générées par l’exercice, les agents infectieux et l’environnement (Fondation Hippolia, 2016). Les collaborations se multiplient également pour la valorisation épidémiologique des données d’équarrissage et pour les activités de surveillance des maladies infectieuses équines, celles-ci étant présentées dans la section suivante.

De ce rapide tour d’horizon de la filière équine, il est possible de dégager deux constats ayant une forte influence i) sur l’organisation, le fonctionnement et les limites des systèmes et dispositifs de

2 Ecole nationale vétérinaire d’Alfort (ENVA), Inra, Pôle Hippolia, Université de Caen Basse-Normandie, Université de Liège, Syndicat de l’industrie du médicament vétérinaire et réactif (SIMV).

surveillance des maladies équines et ii) sur leurs évolutions possibles dans les années à venir :

- la filière équine française est complexe et très hétérogène, aussi bien en termes de structures, d’acteurs et d’activités, que de situations économiques et d’intérêts pour les questions sanitaires. Cette complexité se traduit dans le domaine de la surveillance épidémiologique par l’existence de plusieurs dispositifs de surveillance relativement indépendants, qui ont des objectifs et des modes de fonctionnement divers et partiellement complémentaires,

- les contextes économique et règlementaire actuels, de même que la prise de conscience croissante des enjeux sanitaires, conduisent au développement de collaborations entre les différents acteurs de la filière, en particulier dans les domaines de la recherche, de la performance et de la santé. Concernant la surveillance épidémiologique, une plus grande efficacité du suivi de la situation sanitaire et une mutualisation des efforts sont recherchées, afin de mieux évaluer et mieux gérer les risques liés aux principales maladies infectieuses équines.

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 58-61)

Documents relatifs