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Le parcours historique et méthodologique du Français sur Objectifs Spécifiques

5- Le Français Fonctionnel (FF)

Le français fonctionnel a vu le jour au cours de l’année 1974, riche en évolutions politiques et économiques. Sur le plan économique, le monde est obligé alors de gérer la crise économique due au choc pétrolier, situation qui a eu des répercussions négatives sur la diffusion du français à l’étranger. La langue de Molière est victime d’un recul remarquable au niveau mondial qui se manifeste à travers plusieurs changements (Lehmann, 1993) à savoir :

- Plusieurs pays décident de diminuer les heures consacrées à l’enseignement des langues étrangères, y compris le français,

- Le recul du français gagne aussi les anciennes colonies en Afrique noire qui était considérée comme un espace francophone traditionnel,

- Le gouvernement français mène des restrictions budgétaires vis-à-vis de la diffusion du français à l’étranger :

* Disparition des « commissions audiovisuelles », * Diminution du nombre des coopérants culturels, * Création des « bureaux pédagogiques ».

Face à cette dégradation de la diffusion du français à l’étranger, les responsables du Ministère des Affaires Étrangères notamment ceux de la Direction Générale des Relations

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culturelles, Scientifiques et Techniques (DGRCST) ont pris l’initiative de chercher de nouveaux publics qui pourraient rendre au français sa position privilégiée à l’étranger. Les publics visés sont à la fois des scientifiques, des techniciens et des professionnels. Cette volonté de récupérer la position privilégiée du français sur la scène internationale est exprimée dans certains documents internes du Ministère des Affaires Étrangères (MAE) : -« La culture n’est pas seulement littéraire mais scientifique »,

-« Une attention particulière devra être portée à la catégorie des adultes motivés », -« Il importe d’étendre l’usage du français comme langue de spécialité »,

-« L’activité de nos missions à l’étranger doit être orientée vers les sciences humaines » (MAE : documents internes repris par Lehmann, 1993 : 70)

Ces citations expriment clairement la forte volonté des décideurs de la diffusion du français à l’étranger de développer cette langue en régression. Cette volonté est marquée par deux aspects essentiels. D’une part, l’enseignement du français ne se limite pas à un public littéraire (les étudiants des facultés des Lettres ou de Pédagogie) mais il s’adresse aussi à un public plus diversifié qui touche tous les domaines professionnels. Alors, le champ du français s’élargit pour atteindre de nouveaux publics, donc une demande croissante. D’autre part, on parle d’un français fonctionnel plutôt que du français secondaire enseigné dans les écoles comme première ou deuxième langue étrangère. Dans ce contexte, notons que le terme du « français fonctionnel » fait son apparition notamment dans les textes officiels et les milieux didactiques :

- En 1975, le CREDIF organise un séminaire intitulé : « Session de formation sur le français fonctionnel »,

- « Approches d’un français fonctionnel », Études de linguistique appliquée N° 23, 1976, - Aupècle, M. & Alvarez, G. Français instrumental et fonctionnel, AUPELF, 1977,

- Rencontres didactiques à Mexico « L’enseignement fonctionnel du français en Amérique latine en 1977 »

Cette volonté politique favorisant le français fonctionnel aboutit à une évolution considérable de ce dernier. Cette évolution se concrétise par plusieurs mesures ayant pour objectif de maintenir le français à l’étranger, mentionnons les plus importantes :

- Lancement par le Ministère des Affaires Étrangères de 14 films (1975-1978) intitulés «Témoignages pédagogiques» dont dix sont consacrés à l’enseignement du français fonctionnel ;

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- Création en 1976 des centres d’études et de documentation scientifique et technique (CEDST Mexico et à Lima par exemple) et des formations linguistiques à l’appui comme celles menée à la faculté des sciences de Khartoum au Soudan ;

- Tentatives d’implanter des enseignements techniques et scientifiques aux universités à l’étranger : Université de Hamadan en Iran et Collègue Technologique Swon en Corée ; - Multiplication des missions portant sur le français fonctionnel à l étranger apportant elles

formation, expertise et aussi assistance pédagogique en français fonctionnel ;

- Le programme intitulé «Formation des boursiers prioritaires» lancé en 1976 par le gouvernement Chirac (1974-1976) dans le cadre du septième plan, concerne neuf pays non-francophones avec lesquels la France veut développer ses relations. Les pays concernés sont riches en matières dites stratégiques comme le pétrole et l’uranium. Ceci montre les imbrications qui se sont établies entre la politique et le français fonctionnel. Ce dernier semble alors être au service d’une politique adaptée par le gouvernement Chirac. En 1977, on assiste à la publication du rapport François qui trace les grandes lignes de cette politique : « Les actions de coopération devraient être redéployées de manière à développer les actions de coopération des futurs élites des pays qui sont, ou qui ont vocation de devenir des partenaires économiques privilégiés de notre pays » (repris par Lehmann, 1993 : 71).

Le même rapport indique les caractéristiques des pays visés par ce programme de formation. Ils sont des pays : « proches du décollage économique », « stables politiquement », « aptes à jouer un rôle pilote dans une zone géographique donnée », « fortement solvables (exportateurs de pétrole), « vendeurs des matières premières ou acheteurs de produits finis » (Ibidem). Le « programme des boursiers prioritaires » assure à des étudiants d’élite une formation souvent du troisième cycle. Cette formation se fait dans des établissements de l’enseignement supérieur français. Le fait de centrer ce programme sur une catégorie particulière d’étudiants étrangers indique la nature institutionnelle et politique du français fonctionnel. Lors des rencontres interuniversitaires (1979, 1980, 1981), des formations linguistiques ont été prises en charge par l’AUPELF et par le CREDIF. Notons également que ce programme est au centre d’autres opérations du français fonctionnel comme :

- Cette vague du français fonctionnel a des effets éditoriaux. De 1970 à 1980, les matériels pédagogiques et les réflexions méthodologiques se sont multipliés,

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- Le Ministère des Affaires Étrangères a organisé, par le biais du CREDIF, le « Séminaire sur l’enseignement fonctionnel du français » (1975-1979) qui était considéré comme la formation des formateurs prioritaires.

Cette tendance soutenue par les responsables politiques continue à occuper le devant de la scène jusqu’à la fin des années soixante-dix. On souligne l’intervention du ministre François-Poncet à propos de la politique culturelle et extérieure de la France. Il affirme l’importance de : « s’adapter à la demande d’un public nouveau qui souhaite apprendre le français comme moyen d’accès à une spécialisation scientifique ou technique, donc comme langue véhiculaire». (Ibidem : 72).

5-1 L’approche méthodologique du français fonctionnel

La méthodologie du français fonctionnel tourne le dos aux approches méthodologiques précédentes. Elle essaye de se distancier vis-à-vis des langues de spécialité. Cette distanciation méthodologique se manifeste par certains rejets :

- Le premier rejet concerne les cursus longs composés de trois étapes traditionnelles (Niveau 1, Niveau 2, Perfectionnement). De tels cursus exigent beaucoup de temps dont le public visé ne dispose pas. En principe, celui-ci est un public professionnel qui ne consacre qu’une faible marge de son temps à l’apprentissage. C’est pourquoi, ces publics finissent, au bout d’un certain temps, par abandonner cet apprentissage. Ce dernier est fondé essentiellement sur la sélection du contenu plutôt que sur les besoins des apprenants et leurs situations professionnelles visées,

- Le deuxième rejet touche « les méthodes lourdes » définies comme « ensemble pédagogique généralement édité entièrement construit et couvrant plusieurs centaines d’heures d’enseignement » (Ibidem : 97) En effet, ces méthodes dites lourdes se caractérisent par :

- Une longue durée d’apprentissage ;

- Une élaboration qui exige beaucoup de temps en vue de réaliser les trois niveaux

mentionnés ;

- Les deux caractéristiques précédentes ont de mauvaises répercussions au niveau éditorial et pédagogique. D’une part, ces matériaux coûtent très cher pour le public visé qui a, alors, du mal à poursuivre son apprentissage. D’autre part, ces méthodes

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n’encouragent pas la multiplication pédagogique pour répondre aux besoins d’un public assez diversifié,

- Ces méthodes manquent de souplesse et d’adaptabilité, nécessaires pour la diversification des publics spécialisés,

- Le français fonctionnel rejette également les méthodes universalistes et maximalistes.

Celles-ci ne s’intéressent pas à la diversité des publics visés. Rappelons par exemple la méthode du Français scientifique et technique. Ces méthodes ne prennent pas en compte les besoins langagiers spécialisés des apprenants. De même, le facteur temps constitue un élément-clé dans l’enseignement du français fonctionnel. Vu le temps limité accordé par ce public à l’apprentissage, il est donc difficile d’envisager un apprentissage qui vise à la fois l’oral, l’écrit, la compréhension et l’expression,

- Le français fonctionnel s’érige aussi contre l’élaboration des méthodes fondées sur des comptages lexicaux. Une telle approche méthodologique était contestée à l’époque. Dans ce contexte, citons par exemple Le Vocabulaire Général d’Orientation Scientifique qui consiste à donner un inventaire lexical à l’instar du Français Fondamental. Cette approche lexicale semble être inadéquate surtout qu’elle est réalisée à partir de l’écrit. De même, ces méthodes sont connues par un « tronc commun scientifique » que Lehmann ne tarde pas à critiquer : « On ne voyait ni sur quelle théorie linguistique, ni sur quelle réalité de la pratique langagière ordinaire des scientifiques, ni non plus sur quel modèle épistémologique ou académique d’organisation des savoirs scientifiques pouvait reposer un tel découpage» (Lehmann, 1993 : 98)

- Reste à souligner également que le public spécialisé tient à avoir accès aux textes authentiques concernant leurs domaines professionnels. Ceci remet en cause l’élaboration même des méthodes destinées à ces publics intéressés à traiter des textes authentiques.

Les rejets du français de spécialité ne font que préparer le terrain à l’émergence, au sein des milieux didactiques, de la notion du français fonctionnel. Celle-ci a vu le jour pour la première fois dans un article intitulé Monsieur Thibaut et le bec Bunsen de Louis Porcher (1976). Cet article a fait couler, à l’époque, beaucoup d’encre d’autant plus qu’il constitue la charnière entre deux visions différentes de l’apprentissage du français destiné aux publics

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spécialisés. L’auteur de l’article se rappelle, lors d’une table ronde portant sur le FOS organisé en Mars 2002, de vives réactions suscitées à la suite de la publication de ce fameux article:

« J’ai écrit un petit texte (…), qui s’appelait « Monsieur Thibaut et le Bec Bunsen » qui a fait un barouf épouvantable malgré moi et qui disait: mais au fond (moi j’arrivais dans le FLE donc j’y connaissais rien), je ne vois pas ce que veut dire « français fonctionnel ». Moi, je crois qu’il y a un enseignement fonctionnel du français. C’est tout ce qu’il y avait dans l’article (…). A l’époque ça a secoué beaucoup les gens, au point qu’il y a eu plusieurs dizaines d’arrivées de courrier au ministère des Affaires étrangères demandant que je sois foutu à la porte. » (Porcher, 2002 : 85-86).

Il critique les tenants de la méthodologie structuro-global audiovisuelle dès le titre de son article puisqu’il fait référence à un des personnages de la méthode « Voix et Images de France ». Dans cet article, Porcher L. se charge de donner une définition du français fonctionnel où il met en évidence la fonctionnalité de l’apprentissage du français en le liant aux buts des apprenants:

« La meilleure définition du français fonctionnel nous paraît être celle d’un français qui sert à quelque chose par rapport à l’élève (et à l’avis) même de ses destinataires. Cette notion ne se confond évidemment pas avec celle de langue-outil, mais elle fait litière des croyances à l’apprentissage de la langue française pour elle-même (…). Le français fonctionnel est celui que l’on enseigne en fonction d’un but» (Porcher, 1976 : 16)

Dans ce contexte, l’auteur de cet article indique que le champ du français fonctionnel dépasse celui du français scientifique et technique ou même celui de langues de spécialité. Depuis sa publication en 1976, cet article a eu des échos auprès des didacticiens. Parmi eux, Denis Lehmann, une des figures de proue dans le domaine du français fonctionnel, lance pour la première fois en 1980 l’expression Enseignement fonctionnel du français, plus parlante que celle du français fonctionnel, qui n’est en réalité qu’une commodité de formulation. L’expression de Lehmann exige l’adéquation entre les pratiques pédagogiques et les objectifs visés quel que soit le domaine de l’apprentissage du français :

« Par-delà les différences de publics et de contenus, est fonctionnel tout enseignement mettant en œuvre des pratiques qui sont en adéquation avec les objectifs assignés ; à ce titre, l’enseignement de la poésie, voire de l’orthographe, peut être parfaitement fonctionnel dans des situations pédagogiques qui en font l’objet premier, alors que celle du discours de la chimie- à supposer qu’il soit un- ne saurait évidemment l’être à tout coup. Il n’y a donc pas de langages et encore moins de langues, fonctionnels, mais des enseignements plus ou moins fonctionnels de tel ou tel aspect langagier dans telle ou telle situation » (Lehmann, 1980 : 121)

Cette vision du français fonctionnel élargit certainement le champ de ce dernier. Avant la vision de Lehmann, le français fonctionnel n’est qu’un synonyme de l’apprentissage d’un

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français spécialisé dans un domaine donné visant à atteindre un but précis. Mais Lehmann vient de donner une coloration à la fois pédagogique et fonctionnelle de l’enseignement du français.

De son côté, Porcher refuse toute opposition entre le français fonctionnel et le Français Fondamental. Pour lui, il s’agit plutôt d’une rénovation dans l’enseignement du français langue étrangère qui met des pratiques pédagogiques au service des objectifs visés. Il indique : « L’important n’est pas tant que l’enseignement de la langue porte sur de nouveaux domaines : ce qui compte, c’est bien plutôt la nouvelle perspective méthodologique dans laquelle il s’inscrit. Cette dernière englobe en effet la première et lui donne seule sa véritable portée » (Porcher, 1976 : 16)

En fait, l’appellation du français fonctionnel sera utilisée après la publication de l’article de Porcher pour désigner des conceptions méthodologiques diverses. Celles-ci ont besoin de changer de peau, soit par peur de disparaître, soit pour favoriser leur retour sur la scène didactique. Elles essayent alors de rejoindre la montée en force du français fonctionnel en vue de profiter du soutien accordé par les politiques et de l’intérêt porté par les didacticiens à ce type d’enseignement. À ce stade, il s’avère intéressant de souligner l’exemple du français instrumental qui semble être un exemple représentatif de ces méthodologies qui ont tendance à se rénover. Il se développe, comme on l’a vu plus haut, en Amérique latine où on considère l’enseignement du français comme moyen du développement scientifique et technique.

5-2 Des modèles du français fonctionnel

Au cours des années soixante-dix, les modèles du français fonctionnel se multiplient pour répondre aux demandes des publics spécifiques. En 1975, un modèle du français fonctionnel est au centre des réflexions des participants aux « Séminaires sur l’enseignement fonctionnel du français » organisé par le CREDIF. Ce modèle a été élaboré par Lehmann à l’intention des techniciens étrangers venus passer un stage en électronique en France. Il est inspiré des travaux du Conseil de l’Europe et du Niveau Seuil du français. Il est basé sur trois étapes. La première concerne l’identification des apprenants qui se fait à partir de différents critères dont, parmi d’autres, la spécialité des apprenants en prenant en compte bien sûr leur niveau en langue cible. La deuxième étape porte sur l’inventaire des situations de communication prévues pendant le stage. Il ne s’agit plus de situations fabriquées pour un usage pédagogique mais plutôt des situations réelles. Après la sélection de ces situations, elles servent

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principalement à élaborer le contenu. Quant à la troisième étape, Lehmann analyse les actes de paroles, les éléments de grammaire sémantique et les notions que les apprenants devront comprendre, s’approprier et produire au cours de ces situations.

Sous le titre d’idée globale de la démarche fonctionnelle, telle que nous l’avons analysée au cours des Séminaires de maîtrise des années 77-78 et 78-79, Moirand (1980) met l’accent sur un autre modèle du français fonctionnel. Ce dernier est composé de 4 étapes successives où les trois premières sont identiques au modèle précédent. Ce modèle ne s’inspire pas du Niveau Seuil français mais se base essentiellement sur l’analyse du discours. À partir d’un tableau descriptif présenté ci-dessous, on observe que ce modèle est plus détaillé que le précédent. Par exemple, à la première étape, Moirand ne se contente pas seulement d’identifier les apprenants mais également les enseignants et les institutions qui ont un rôle considérable dans le processus apprentissage/enseignement. Dans la quatrième étape, elle met en relief la démarche pédagogique qui devrait être suivie par l’enseignant et l’apprenant tout en accordant une importance particulière aux interactions entre les deux. Enfin le schéma souligne, comme nous l’avons indiqué plus haut, l’intérêt porté à l’analyse du discours.

Figure 2 : Un modèle pour une démarche fonctionnelle (Moirand, 1980 : 7)

Un autre modèle du français fonctionnel à retenir, celui de Porquier, Lehmann et Khan (1981). Le modèle fonctionnel circulaire qu’ils proposent, a presque le même contenu des modèles précédents. Ce qui attire notre attention, c’est la forme circulaire de ce modèle qui essaye d’éviter la linéarité des étapes des autres modèles. En l’observant, on trouve que

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l’apprentissage est au centre du schéma qui est régi par quatre blocs principaux : la description des participants de la situation d’enseignement/apprentissage, l’inventaire et l’analyse des situations d’utilisation du français, la mise en forme pédagogique et enfin le dernier bloc regroupe ensemble l’analyse de discours authentique, les outils didactiques et l’élaboration des outils. Ce modèle prend en compte également les objectifs généraux qui concernent à la fois l’analyse des situations et les capacités communicatives visées ainsi que le matériel utilisé. La remarque principale qu’on peut porter sur ce modèle est ce jeu de flèches qui met l’accent sur les interactions entre les différentes activités. En fait, l’apport principal de ce modèle est fondé sur deux éléments principaux : le premier consiste à éviter le parcours traditionnel des étapes successives à franchir. Le deuxième souligne l’intérêt croissant porté à l’apprentissage en tant que catalyseur de toute activité pédagogique.

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Avant de conclure cette présentation des modèles du français fonctionnel, il est important de souligner le modèle tri-dimensionnel proposé par Vigner (1980) dans son livre Didactique fonctionnelle du français. L’appellation de ce modèle est due aux trois dimensions sur lesquelles repose ce modèle. La première dimension concerne les niveaux d’activités : métiers, professions et activités scientifiques. La deuxième dimension du modèle porte sur le « domaine de référence » où l’auteur entame une classification des disciplines scientifiques en accordant une importance particulière à la diversité de l’activité cognitive. Enfin, la troisième dimension souligne les « composantes langagières » où Vigner se contente d’en citer les quatre traditionnelles « parler, écouter, lire, écrire ». Le modèle de Vigner suit le même schéma adopté par les autres modèles déjà mentionnés à propos de l’identification des besoins et la prise en compte des situations visées. Mais un élément le différencie des autres modèles : la rupture entre d’une part les apprenants « leurs besoins et leurs objectifs » et d’autre part la réponse pédagogique proposée. Cette rupture trouve sa justification dans le fait que Vigner ne croit pas à la présence d’un fossé méthodologique entre les langues de spécialité et l’enseignement fonctionnel du français. Lehmann va plus loin dans sa justification de la rupture méthodologique chez Vigner en contextualisant la vision pédagogique de cet auteur au niveau spatial et temporel :

« Sans doute est-ce également parce que les réalisations pédagogiques sur lesquelles s’appuie sa construction avaient pour cadre des pays d’Afrique où le français est (ou était à l’époque) la langue d’enseignement des disciplines scientifiques et techniques, avec les contraintes que cela implique s’agissant du type de pédagogie qu’il est possible de mettre en œuvre dans un contexte scolaire déterminé » (Lehmann, 1993 : 106)

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Figure 4 : Modèle tri-dimensionnel de Vigner (1980 : 52)

Après cette présentation des modèles du français fonctionnel, nous constatons quelques points communs entre leurs approches méthodologiques. Vient en premier lieu, cette prise en compte des besoins du public visé qui occupent le centre d’intérêt de la première étape de chaque modèle. Ce dernier s’intéresse également à faire une description des enseignants (leur