• Aucun résultat trouvé

La fenêtre comme support intransitif : pour une révolution copernicienne du regard zolien

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 157-200)

1. Le regard renversé : l’expression d’une crise de la représentation au XIXe siècle a. Le détournement du regard dans l’art du XIXe siècle

[L]’extrême proximité des maisons aux fenêtres opposées sur une même cour y fait de chaque croisée le cadre où une cuisinière rêvasse en regardant à terre, où plus loin une jeune fille se laisse peigner les cheveux par une vieille figure, à peine distincte dans l’ombre, de sorcière ; ainsi chaque cour fait pour le voisin de la maison, en supprimant le bruit par son intervalle, en laissant voir les gestes silencieux par un rectangle placé sous verre par la clôture des fenêtres, une exposition de cent tableaux hollandais juxtaposés.

Marcel Proust, A la recherche du temps perdu, Le Côté de Guermantes.

Faire d’une fenêtre non plus un vecteur mais un support peut sembler un phénomène totalement anodin, mais celui-ci illustre en réalité une attitude paradoxale, consistant à renverser la tendance naturelle du regard et à remettre en cause des siècles de perspective albertienne. Il implique que le personnage ne regarde plus derrière la fenêtre en oubliant la médiation de cette dernière, mais qu’il regarde devant, sur la fenêtre, ce qui vient s’y inscrire.

Ce principe peut sembler farfelu, car en tout point contradictoire avec la fonction de l’objet-fenêtre, mais il semble néanmoins à l’œuvre chez de nombreux artistes du XIXe siècle, et ce de manière progressive. Il prend en vérité son origine dans une volonté des artistes de décentrer le regard, de déconcerter le spectateur. De nombreux impressionnistes se plairont ainsi à contrecarrer notre regard en interposant et bouchant leurs perspectives à l’aide de balcons (Caillebotte, Le Balcon, 1880 ; fig. 3), barrières, rambardes (Au théâtre de Degas, 1880 ; fig. 4) et autres rideaux d’arbres (Camille Pissarro, Bords de l’Oise près de Pontoise, temps gris, 1878, La Côte des Bœufs à Pontoise, 1877 ; Alfred Sisley, Sentier sur les roches, 1881 ; Claude Monet, Les Bords de la Seine (le printemps à travers les branches), 1878 ; fig. 5-8). Jean Clay évoque ainsi un phénomène qui n’est pas sans faire penser à l’interdiction du regard transitif que nous avons précédemment repérée chez Zola, d’abord chez Caillebotte : « Dans Le Balcon, on croirait que le regard, au moment de traverser la grille pour observer l’animation de la rue, s’est immobilisé sur la ferronnerie et son motif floral388 », ensuite dans les paysages de bords de Seine de Monet ou Pissarro : « Au premier plan, un

388 Jean Clay, Comprendre l’impressionnisme, Paris, Editions du Chêne, 1984, p. 64.

écran tamise et occulte partiellement la vue389. » Ce refus de la perspective, c’est-à-dire de la maîtrise du regard du spectateur sur le tableau, contribue à créer avec l’impressionnisme une rupture entre la peinture et la mimesis, menant progressivement l’art vers l’abstraction. Certes, les impressionnistes semblent bien tardifs pour témoigner d’un mouvement ayant pu influencer la description zolienne, mais bien avant ces principes picturaux des années 1880, il y a déjà Baudelaire, il y a déjà Manet, dont les liens avec Zola ne sont plus à démontrer.

Baudelaire et Manet sont les initiateurs d’une véritable remise en cause de la fenêtre albertienne de la représentation, que nous pourrions nommer une révolution copernicienne du regard. Révolution copernicienne au sens propre, c’est-à-dire renversant, retournant le point de vue habituel, le décentrant en pratique, afin d’en montrer les limites théoriques et épistémologiques. Le poème de Baudelaire qui nous a servi de point de départ dans ce chapitre illustre parfaitement la première étape de ce renversement du point de vue. Le poète des « Fenêtres » regarde vers l’extérieur, certes, mais son regard ne s’ouvre pas au monde, comme le souligne l’antithèse inaugurale du poème : « Celui qui regarde du dehors à travers une fenêtre ouverte, ne voit jamais autant de choses que celui qui regarde une fenêtre fermée. » Dirigé vers l’extérieur depuis la vitre du poète, le regard bascule, se renverse, se mue, attiré par les chambres éclairées des immeubles voisins, en un regard restreint dirigé vers l’intérieur, que le poète voit comme une métaphore de sa propre intériorité psychique : c’est lui-même, son esprit, que Baudelaire regarde, et son regard vers la fenêtre n’a fait que rebondir vers lui. Certes, dans le poème, il y a un bien un « à-voir » derrière la fenêtre fermée : la petite vieille qui ne sort jamais. Néanmoins, la vision du poète est fort différente d’un regard albertien : au lieu de recevoir le monde passivement et de le maîtriser ensuite par son intellect, l’œil du poète projette activement son fantasme (la « légende ») sur le point restreint de la fenêtre voisine, devenue un simple support. Dès lors, peu importe le monde situé au-delà : la petite vieille aperçue par la fenêtre n’est que le support de la légende du poète, qui seule compte. Le renversement de la transitivité du regard, de l’extérieur vers l’intérieur, se charge donc chez Baudelaire en 1863 d’une signification métatextuelle propre, déclarant la supériorité de l’imagination et de la subjectivité sur la représentation du réel.

Chez cet ennemi à la fois haineux et fasciné de la photographie, il semble en outre évident que le système de doubles fenêtres mettant en communication deux lieux clos et sombres (les chambres) mais baignés d’une lumière (la chandelle de la vieille, le génie du poète) s’inspire

389 Ibidem, p. 94.

de la chambre photographique et de la camera obscura, métaphore fréquente du cerveau en ce temps390, pour déclarer la supériorité de l’imagination du poète sur le réel.

Cette question du regard réversible est alors au centre même de la peinture de Manet.

Le scandale provoqué par Le Déjeuner sur l’herbe et Olympia provient en grande partie de l’utilisation que l’artiste fait du regard de ses héroïnes391. Certes, ces jeunes femmes sont nues, certes, leur environnement ne peut en aucun cas les légitimer par un quelconque glacis mythologique ou biblique, mais surtout, elles nous regardent, nous, spectateurs. Comme l’a bien démontré M. Fried, le personnage chez Manet n’est plus absorbé dans la scène de genre à laquelle il appartient392, et il ne présente pas non plus ce regard fixe mais perdu au loin du portrait académique. Or, ce phénomène relève selon l’historien de l’art d’un choix délibéré de l’artiste, dans la mesure où les motifs de ses compositions offriraient paradoxalement toutes les conditions pour représenter des scènes aux personnages absorbés. Les figures de Manet seraient dès lors « machiavéliquement » inscrites par le peintre dans des scènes propices à l’absorbement afin de souligner son propre refus de recourir à ce procédé :

[Il] semble même [que Manet] ait mis au point une stratégie visant à nier, à éviter même, les effets spécifiques de ce type de représentation ; il y usait en quelque sorte de motifs virtuellement susceptibles de produire les effets spécifiques des représentations de personnages absorbés lorsqu’ils étaient traités différemment – citons pour mention les personnages « en conversation » du Déjeuner sur l’herbe ; les anges endeuillés du Christ mort et les anges ; la bonne offrant un bouquet de fleurs à sa maîtresse dans l’Olympia ; Zola, assis, tenant un livre ouvert dans le Portrait d’Emile Zola […] – mais tels qu’ils sont agencés, il est clair qu’ils ne produisent pas ce type d’effet393.

Mais voilà, dans son Portrait (fig. 9), Zola ne lit pas son livre, les amis du Bain suspendent le fil de leur conversation et Olympia ignore magistralement le bouquet que lui tend sa bonne, pour se tourner vers le spectateur (fig. 1, 2). Dans Le Déjeuner ou Olympia, le personnage de Manet ne fait pas semblant : il est nu, et il sait que nous le regardons comme tel, ce qu’accentue le choix d’une composition quasi systématiquement frontale dans les

390 Nous ne faisons ici qu’évoquer cette métaphore ô combien problématique et cruciale pour notre étude, sur laquelle nous serons amenée à revenir dans notre troisième chapitre.

391 Ainsi lit-on sous la plume de Marius Chaumelin en 1869 : « Le premier aspect […] est peu agréable, nous devons le reconnaître ; les personnages […] ne sont rien moins que beaux, les faces ont quelque chose de morne, de maussade, comme celle de gens qui posent et, de fait, tous ces gens-là ont l’air de nous dire : regardez-moi ! Ils ne pensent pas à autre chose. » (Marius Chaumelin, « Salon de 1869 », dans L’Art contemporain [Paris, 1873, p. 236], cité par M. Fried dans Le modernisme de Manet, op. cit., p. 165).

392 « Aussi doit-on prêter attention à l’un des traits distinguant [Manet] des peintres de son temps : au fait qu’il tendit ostensiblement, dès le départ et presque instinctivement, à refuser en bloc toute représentation de personnages absorbés (et a fortiori toute intensification des motifs de l’absorbement) comme à récuser qu’il s’agisse là d’un vrai moyen pour la peinture […]. » (Michael Fried, Le modernisme de Manet, op. cit., p. 143-144).

393 Ibidem, p. 145 [M. F. souligne].

tableaux réalisés par le peintre à partir des années 1860394. La composition frontale est selon Meyer Schapiro l’équivalent pictural de l’instauration d’un discours, d’une relation entre un

« je » et un « tu » qui englobe le spectateur395 : elle implique donc obligatoirement le public dans le jeu de regards suscité par le non-absorbement du personnage. D’où le scandale, car le spectateur se voit retourner son regard impudique par un tableau qui le « dévisage396 ». C’est le regard de ce dernier qui devient obscène et qui crée la nudité du personnage. Le phénomène s’expliquerait en outre selon Fried par une antithèse entre le caractère frontal du regard et son absence d’expression, souvent pointée par la critique, qui place le spectateur dans une situation inconfortable et paradoxale puisque le « vide et l’inexpressivité du regard projeté hors champ mettent le spectateur à distance et l’installent dans une position d’aliénation alors même qu’ils semblent le solliciter397 ». Cette lecture explique en partie les réactions violentes suscitées par les œuvres de Manet chez ses contemporains. Un commentaire d’Alfred Sensier à propos d’Olympia nous semble parfaitement illustrer ce renvoi agressif de son propre regard par le tableau, à propos d’Olympia : « Insurrection armée dans le camp des bourgeois : c’est un verre d’eau glacée que chaque visiteur reçoit au visage lorsqu’il voit s’épanouir la BELLE courtisane398. »

Si M. Fried voit dans l’agressivité de la réception d’Olympia la réponse à la violence contenue dans le tableau lui-même399, nous serions plutôt tenté d’y voir, en amont, la présence d’une relation inverse. Le motif du jet du verre d’eau souligne à la fois la violence et l’impassibilité du regard du personnage, mais il s’adapte en outre à l’idée d’un « retour à l’envoyeur » du coup porté : l’acte de jeter un verre d’eau est généralement compris comme un geste de défense et non d’attaque, comme une réponse envers une première agression, un

394 « Les goûts de Manet l’orientèrent en fait dès le départ vers ces compositions frontales dans lesquelles les personnages, quatre tout au plus, font face au spectateur. Dressant la liste des tableaux de ce genre qui furent réalisés entre les années 1850 et le séjour madrilène de septembre 1865, on devrait mentionner [suit une liste de vingt-cinq œuvres, parmi lesquelles Le Vieux Musicien, Lola de Valence, Mlle Victorine en costume d’espada, le Portrait de Victorine Meurent, Le Déjeuner sur l’herbe, Olympia, ou encore Le Christ mort et les anges] – en un mot, presque toutes les œuvres importantes qu’il produisit alors » (ibid.).

395 « Le profil est détaché du spectateur ; il appartient au corps en action (ou saisi dans un état transitif) et s’inscrit dans l’espace que d’autres profils partagent à la surface de l’image. A l’instar de la troisième personne grammaticale, il est, pour ainsi dire, le représentant de l’impersonnalité du « il » ou du « elle » comme du verbe que ces pronoms gouvernent ; au contraire, on attribuera des intentions au visage frontalement présenté, au regard qu’il jette virtuellement vers le spectateur ; il correspond par conséquent au « je » du discours, comme au

« tu » enveloppé par ce dernier à titre complémentaire. », (Meyer Schapiro, Words and Pictures, Approaches to Semiotics II, La Haye-Paris, 1973, p. 38-39, cité dans M. Fried, Le Modernisme de Manet, op. cit., p. 207 et 372, n. 200).

396 M. Fried utilise à multiples reprises cette expression dans Le modernisme de Manet, par exemple aux pages 153 et 169.

397 Ibidem, p. 207.

398 Jean Ravenel [Alfred Sensier], « Salon de 1865 », dans L’Epoque, juin 1865, cité par Michael Fried dans Le Modernisme de Manet, op. cit., p. 198.

399 Ibidem.

premier choc : ici, le viol initial perpétré par le regard du spectateur. La violence des réactions du public face au tableau ne serait dès lors qu’une réaction consécutive à cet échange de regards initial. Cette hypothèse semble confortée par la lecture très personnelle mais aussi fort stimulante que le critique américain propose de L’Exécution de Maximilien, réalisé par Manet entre 1867 et 1869 (fig. 10). M. Fried voit dans l’étrange composition faisant tirer le peloton d’exécution à bout portant sur les victimes une allégorie de la relation instaurée par l’artiste avec ses spectateurs : métaphore labile qui ferait tour à tour du peloton une image de

« l’agression spectaculaire suscitée par les peintures de Manet » sur le public, ou des

« violences » du public et du jury à l’égard du peintre400. Quelle que soit la pertinence de ces deux attributions, celles-ci montrent néanmoins la nature hautement dangereuse du regard dans l’œuvre de Manet, que celle-ci fusille le spectateur ou qu’elle soit une simple paroi renvoyant au public son regard intrusif. Le regard du spectateur, chez Manet comme chez Baudelaire, est donc comme renvoyé symétriquement dans le sens inverse, afin que l’on s’interroge sur lui, afin qu’on mette en crise la notion même du regarder.

b. Le regard de l’extérieur dans Les Rougon-Macquart, ou le passage de l’œuvre dans le régime merveilleux de l’écran optique

Ces regards coperniciens, qui renversent la direction usuelle de la vue, qui mettent en branle son système bien rodé, les Rougon-Macquart n’en sont pas exempts. Nous reprenons finalement là un des plus anciens constats de la critique zolienne sur les regards mis en scène par le romancier, bien avant l’émergence de l’esthétique de la transparence. La critique thématique de la fin des années 1950 et des années 1960 a en effet constaté à plusieurs reprises la récurrence dans l’œuvre du motif du personnage regardant une fenêtre depuis l’extérieur, d’abord John C. Lapp avec sa notion de « watcher betrayed », puis Roger Ripoll dans son étude de la dimension fatale du regard chez Zola401. Ces deux précoces études ciblées sur le regard porté à l’extérieur d’une fenêtre semblent d’ailleurs confirmer, par défaut, notre idée de la quantité peu remarquable des fenêtres fonctionnant « à l’endroit » dans le cycle zolien. Cependant, quelques années plus tard, la théorie du porte-regard reprendra implicitement ces premières analyses en en faisant un appui de l’importance du

400 Sur cette analyse de L’Exécution de Maximilien, consulter M. Fried, p. 216-232 et plus particulièrement p. 225-229.

401 John C. Lapp « The Watcher Betrayed and the Fatal Woman », PMLA, n°74, 1959, p. 276-284 ; John C. Lapp, Les racines du naturalisme. Zola avant les Rougon-Macquart, Paris, Bordas, 1972 [1964], p. 21-22, 60-64 ; Roger Ripoll, « Fascination et fatalité : le regard dans l’œuvre de Zola », op. cit.

« technème fenêtre » dans la lisibilité du texte naturaliste, en utilisant le regard depuis l’extérieur ou l’intérieur comme deux pôles équivalents destinés à distribuer des descriptions d’intérieurs ou de paysages402. Dans Le Personnel du roman, Philippe Hamon représente ainsi ce qu’il nomme « l’espace cybernétique » du récit naturaliste selon un schéma fondé sur trois pôles : autour d’un pôle A pivot, représenté par la fenêtre ou la porte, sont articulés le pôle B de l’intérieur clos et le pôle C du lieu ouvert (paysage, rue…)403. La notion d’intérieur ou d’extérieur de la fenêtre est donc ignorée au profit de deux vecteurs directionnels reparti depuis un pôle A univoque. Les descriptions depuis l’intérieur ou l’extérieur de la fenêtre ne seraient donc qu’une affaire d’articulation mécanique entre la place du spectateur et celle du spectacle, suscitant des inventaires équivalents des pôles B et C, comme le souligne admirablement le parallélisme syntaxique utilisé par l’auteur : « Si le personnage est situé en B, il peut se diriger vers la fenêtre et s’y accouder ; s’il est situé en C, il peut regarder ce qui se passe en B404. » Selon nous, cet amalgame entre observation de l’extérieur par une fenêtre et observation d’une fenêtre depuis l’extérieur est cependant difficilement tenable405.

Lorsque Jean Borie s’intéresse au début des années 1970 aux fenêtres zoliennes dans le cadre de son étude psychanalytique du mythe zolien de la maison comme espace à la fois protecteur et aliénant, il conçoit certes la fenêtre comme une ouverture, mais ne peut bien évidemment négliger son rôle de frontière406. L’auteur souligne donc d’emblée la radicale différence entre les deux points de vue adoptés de part et d’autre de la vitre d’une fenêtre, qui ne sont pas seulement affaire de pivotement du regard, et qu’il distinguera en deux parties distinctes dans son analyse : « Encore devons-nous remarquer que la fenêtre peut cristalliser et fixer l’attention de deux points de vue opposés : pour le célibataire enfermé, elle s’ouvre sur le spectacle du monde ; pour l’exilé des rues, elle se ferme sur le mystère des chambres407. » Cette première distinction ne saurait nous étonner, en ce que l’acte de regarder ne consiste pas simplement en une opération mécanique ou technique. Tout regard depuis

402 Dans « Zola, romancier de la transparence », les exemples utilisés par Philippe Hamon mélangent sans distinction regard depuis l’intérieur et regard depuis l’extérieur (op. cit., p. 388) ; même confusion dans Le Personnel du roman, où ces scènes d’extérieur ne font pour l’auteur qu’inverser le mouvement de « la posture-type qui sert […] à introduire tant descriptions de paysages ». Le critique renvoie à l’article de R. Ripoll tout en maintenant l’idée d’un rôle foncièrement herméneutique de ces scènes, même s’il leur reconnaît une part de mystère qui ne ferait d’ailleurs que renforcer la volonté de décryptage assumée par le personnage (Ph. Hamon, Le Personnel du roman, op. cit., p. 294-295).

403 Philippe Hamon, Le Personnel du roman, op. cit., p. 71-72.

404 Ibidem, p. 72.

405 Notons cependant qu’en 1989, la remarque suivante surprise au détour de son étude des liens entre architecture et littérature, Expositions, semble manifester par défaut un glissement du critique vers une position plus nuancée sur ce point : « [Une] façade ne peut jamais, même dans les « Crystal Palaces » les plus transparents, laisser entièrement voir l’intérieur […]. » (Philippe Hamon, Expositions, op. cit., p. 29).

406 Sur ce point, consulter Jean Borie, Zola et les mythes, ou de la nausée au salut, op. cit., p. 281-298.

407 Ibidem, p. 281-282.

l’extérieur se différencie en en effet des autres points de vue car il est spécifiquement et systématiquement connoté de voyeurisme et d’interdit : il est un regard qui ne doit pas être, un regard qui ne fonctionne pas correctement, un « mal-regard ». Roger Ripoll, qui est l’un des premiers à reprendre en 1966 le constat initial de J. C. Lapp sur la fréquence des scènes d’observation extérieures des fenêtres, insiste d’ailleurs sur le lien de celles-ci avec l’interdit408. Pour le critique, plus que le regard de l’extérieur, c’est d’ailleurs tout regard en soi qui est caractérisé par la fatalité chez Zola : souvent malveillant, généralement interdit et rarement récompensé par le spectacle qui s’offre à lui, « par lui-même, le regard est transgression409 ». Cette caractérisation conditionnerait selon lui une accointance particulière pour les scènes de « spectacle défendu […] reparaissant dans l’œuvre avec une fréquence remarquable410 ». Dès lors, les multiples exemples de voyeurs épiant une fenêtre de l’extérieur ne seraient qu’une actualisation narrative de l’interdit associé à l’idée même de regarder chez le romancier.

l’extérieur se différencie en en effet des autres points de vue car il est spécifiquement et systématiquement connoté de voyeurisme et d’interdit : il est un regard qui ne doit pas être, un regard qui ne fonctionne pas correctement, un « mal-regard ». Roger Ripoll, qui est l’un des premiers à reprendre en 1966 le constat initial de J. C. Lapp sur la fréquence des scènes d’observation extérieures des fenêtres, insiste d’ailleurs sur le lien de celles-ci avec l’interdit408. Pour le critique, plus que le regard de l’extérieur, c’est d’ailleurs tout regard en soi qui est caractérisé par la fatalité chez Zola : souvent malveillant, généralement interdit et rarement récompensé par le spectacle qui s’offre à lui, « par lui-même, le regard est transgression409 ». Cette caractérisation conditionnerait selon lui une accointance particulière pour les scènes de « spectacle défendu […] reparaissant dans l’œuvre avec une fréquence remarquable410 ». Dès lors, les multiples exemples de voyeurs épiant une fenêtre de l’extérieur ne seraient qu’une actualisation narrative de l’interdit associé à l’idée même de regarder chez le romancier.

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 157-200)

Documents relatifs