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de l’asthme professionnel

III. Epidémiologie de l’asthme professionnel

III.5. Histoire naturelle de l’asthme profesionnel et facteurs de risque

III.5.1 Facteurs individuels Prédisposition génétique

La mise en évidence d’interactions de type gène-environnement dans l’asthme a souligné l’importance de mesurer l’exposition professionnelle dans les études génétiques sur l’asthme, qu’il soit de nature professionnelle ou non [34]. Il est parfois difficile de définir les expositions environnementales. En revanche, chez les sujets présentant un AP, l’avantage est que l’exposition, la sensibilisation et le phénotype peuvent être identifiés, ou tout du moins suspectés.

Plusieurs modèles d’interaction ont été proposés [35]. Quatre modèles pourraient contribuer au risque de développer l’AP : interactions de type environnement,

gène-gène, gène-gène-environnement, gène-environnement-environnement.

L’aspect génétique de l’asthme a fait l’objet de nombreux travaux ces dernières années avec de nombreuses avancées dans ce domaine. L’AP a ainsi été reconnu comme une pathologie multifactorielle. Les recherches en génétique ont montré que l’asthme ne résultait pas de la mutation d’un gène unique [36]. Ces découvertes ont ouvert de nouvelles perspectives de recherche comme l’identification des gènes impliqués dans l’AP, la détermination des mécanismes responsables de l’hétérogénéité du phénotype de cette maladie, et de comprendre comment les déterminants environnementaux interagissent avec les déterminants génétiques pour modifier la susceptibilité à cette maladie.

Des études sur la génétique de l’asthme ont mis en évidence de nombreuses associations (annexe 5) qui n’ont cependant pas été retrouvées dans d’autres populations. Ober et Thompson [35] donnent une explication à cette absence de reproductibilité : plutôt que de traduire l’absence d’association par le fait que le gène ne contribue pas à au risque, il serait plus judicieux de considérer pourquoi le gène contribue au risque dans certaines populations

mais pas d’en d’autres. Par exemple, l’allèle HLA-DQB1*0501 confère une susceptibilité dans le développement d’IgE spécifiques envers les acides anhydrides organiques [37], mais le même allèle est protecteur pour des agents de BPM comme les diisocyanates ou l’acide plicatique [38, 39], suggérant que différentes affinités existent pour les molécules de classe II spécifiques correspondantes.

Une autre raison avancée pour expliquer cette absence de reproductibilité est la non prise en compte de l’épigénétique [35, 40]. Ce domaine étudie comment l'environnement et l'histoire individuelle influent sur l'expression des gènes sans altération des séquences nucléotidiques [41]. Les mécanismes de l’épigénétisme incluent la méthylation de l’ADN, la désacétylation des histones et d’autres facteurs de remodelage de la chromatine. Ils permettent ainsi l’expression sélective d’un allèle spécifique d’un chromosome alors que le second allèle présent sur le même chromosome reste silencieux [39].

Atopie

L’atopie est définie comme une propension personnelle (ou familiale) à produire des IgE spécifiques en réponse à de faibles doses d’allergènes et à développer des manifestations cliniques de l’asthme [42]. La définition de l’atopie par l’OMS est caractérisée par la positivité des tests cutanés (ou la présence d’IgE spécifiques) ou par la réponse clinique en relation avec une exposition à des allergènes environnementaux [3].

L’atopie est considérée comme un facteur de risque de la sensibilisation IgE médiée à un grand nombre de substances professionnelles de HPM. Les sujets atopiques ont alors un risque accru de développer un AP lorsqu’ils sont exposés professionnellement à des agents de HPM comme la farine ou les substances animales [43]. Cependant, la valeur prédictive positive de l’atopie est assez faible et ne justifie pas l’éviction systématique des sujets atopiques des professions exposées [44]. En revanche, une information des risques encourus devrait être mise en place ainsi qu’une surveillance attentive de cette population à risque.

Concernant les agents de BPM n’induisant pas, ou tout du moins pas de manière constante, de réponse IgE médiée (isocyanates, anhydride phtalique,..), les individus atopiques ne présenteraient pas d’excès de risque de développer un AP par rapport aux sujets non atopiques [43].

Rhinite professionnelle

Une définition complète de la rhinite professionnelle (RP) a été donnée par l’Académie Européenne d’Allergie et d’Immunologie Clinique [56] : la RP est une pathologie inflammatoire du nez caractérisée par des symptômes intermittents ou persistants (congestion nasale, éternuements, rhinorrhée, prurit nasal) et/ou une limitation variable du

flux d’air nasal et/ou une hypersécrétion provenant de causes ou de conditions attribuables à un environnement de travail particulier et non à des stimuli rencontrés en dehors du lieu de travail.

Pour la RP, comme pour l’AP, une distinction doit être faite entre :

- la RP due à des causes ou conditions attribuables à un environnement de travail particulier ;

- l’exacerbation, par les conditions de travail, d’une rhinite préexistante.

Les études sur les populations exposées à des agents sensibilisants indiquent que la RP serait 2 à 4 fois plus fréquente que l’AP, bien que la contribution de l’exposition professionnelle dans l’histoire naturelle de la RP reste méconnue.

Le concept de« one airway, one disease » initié par Grossman [45] souligne les relations et interactions entre le nez et les bronches. La majorité des sujets diagnostiqués comme AP présentent une RP associée (92% dans l’étude de Malo [46]). La RP est associée avec une augmentation du risque d’AP, alors que la proportion de sujets avec une RP qui présenteront un AP reste incertaine. La prévalence des symptômes de la rhinite ne diffère pas en fonction du poids moléculaire de l’agent, alors que l’intensité des symptômes serait plus importante lors de l’exposition à des agents de HPM [46].

Dans une revue de la littérature, Moscato et coll. ont observé que les symptômes de la rhinite professionnelle précédent ceux de l’asthme dans 20 à 78% des sujets affectés [47]. Les délais entre exposition professionnelle, sensibilisation et diagnostic de RP ou entre RP et AP demeurent mal connus en raison des incertitudes des données épidémiologiques, du diagnostic souvent tardif de la RP, de la variabilité de l’exposition professionnelle (métiers, conditions de travail et agents étiologiques…) et des facteurs de risque inter- et intra-individuels difficiles à cerner. De même, l’évolution de la RP après éviction demeure mal connue.

Hyperréactivité bronchique non spécifique

L’hyperréactivité bronchique (HRB) est le signe physiologique de l’asthme, qu’il soit de nature professionnelle ou non. Sa mesure a plusieurs objectifs : contribuer au diagnostic positif de l’asthme, mettre en évidence une modification de l’HRB non spécifique (HRBns) après exposition professionnelle et/ou évaluer le handicap respiratoire de l’AP.

L’HRBns ne représente pas un état stable : elle fluctue dans le temps en fonction de la nature et de la teneur des agents environnementaux. Bien que la mesure de l’HRBns fournisse un aperçu de l’obstruction des voies aériennes, la relation entre HRBns et la présence de symptômes respiratoires reste faible. Approximativement 50% des sujets chez

lesquels une HRBns a été mise en évidence, ne présentent pas de symptômes [48]. L’HRBns est une des caractéristiques de l’AP mais sa présence seule ne permet pas le diagnostic d’AP du fait qu’elle peut être retrouvée dans une diversité de désordres respiratoires (infection virale du tractus respiratoire, tabagisme actif ou passé, bronchite chronique, atopie isolée…). Pour rappel, la valeur prédictive positive du test à la métacholine dans l’identification de l’asthme est seulement de 10%, alors que sa valeur prédictive négative est de 99% [48].

III.5.2 Facteurs environnementaux