Exercice 18. La variation quadratique ou “crochet droit” d’une s´emimartingale peut ˆetre d´efinie par [X]t:=Xt2−X02−2
Z t 0
Xs−dXs.
• Calculer la variation quadratique pour un processus de L´evy-Itˆo g´en´eral, pour un processus de L´evy et pour le processus de Poisson.
• Montrer que si X est un processus de L´evy-Itˆo tel que [X]t≡t etX est une martingale alorsX est un mouvement brownien standard.
Exercice 19. Soit X un processus de L´evy-Itˆo de la forme (5.17) avec coefficientsµ, σet γ d´eterministes et born´es. En appliquant la formule de changement de variable (5.20) `a la fonctionf(x) =eiux, montrer que la fonction caract´eristique deXT peut ˆetre obtenue par une formule de L´evy-Khintchine g´en´eralis´ee.
Exercice 20. SoitX un processus de L´evy-Itˆo de la forme (5.17) tel que µt+σt2
2 + Z
R
(eγt(x)−1−γt(x)1|x|≤1)ν(dx) = 0
p.s. pour toutt. En appliquant la formule de changement de variable (5.20), montrer queeXt s’´ecrit sous la forme (5.18) avec les coefficients `a pr´eciser.
En supposant que σtet R
R(eγt(x)−1)2ν(dx) sont born´es p.s. par une constanteC, montrer, en utilisant la relation d’isom´etrie (5.19) et le lemme de Gronwall, que (eXt) est une martingale de carr´e int´egrable.
Indication: utiliser le lemme de Gronwall. Soitφune fonction positive localement born´ee surR+telle que φ(t)≤a+b
Z t 0
φ(s)ds pour touttet deux constantesaet b≥0. Alorsφ(t)≤aebt.
Chaque terme de la somme satisfait
0>ln(1 + ∆Xs)−∆Xs>−∆Xs2. La s´erie est donc d´ecroissante et born´ee inf´erieurement par−P
0≤s≤t∆Xs2, ce qui est fini pour tout processus de L´evy-Itˆo. Donc, (lnVt′) existe et est un processus d´ecroissant. Ceci implique que (Vt) existe et a des trajectoires de variation finie.
La deuxi`eme ´etape est d’appliquer la formule d’Itˆo `a la fonctionZt≡f(t, Xt, Vt)≡eXt−12R0tσs2dsVt, ce qui donne
dZt = −σs2
2 eXt−−12R0tσ2sdsVt−dt+eXt−−12R0tσs2dsVt−dXt+eXt−−12R0tσ2sdsdVt
+ σ2s
2 eXt−−12R0tσs2dsVt−dt+eXt−12R0tσ2sdsVt−eXt−−12R0tσ2sdsVt−
− eXt−−12R0tσ2sdsVt−∆Xt−eXt−−12R0tσs2ds∆Vt. PuisqueV est un processus de saut pur,
dVt≡∆Vt=Vt−(e∆Xt(1 + ∆Xt)−1).
En substituant cela dans l’´egalit´e pr´ecedente et en rassemblant les termes, on trouve (5.21).
Pour comprendre pourquoi la solution est unique, observons que si (Zt(1)) et (Zt(2)) verifient l’´equation (5.21), alors leur diff´erence ˜Zt =Zt(1)−Zt(2) v´erifie la mˆeme ´equation avec condition initiale ˜Z0 = 0. De la forme de cette ´equation il est clair que si la solution devient nulle `a un point donn´e, elle reste nulle.
Le processus Z est appell´e exponentielle stochastique ou exponentielle de Dol´eans-Dade de X not´e par Z=E(X).
Relation entre exponentielle ordinaire et exponentielle stochastique Il est clair que l’exponentielle ordinaire et l’exponentielle stochastique d’un processus sont deux processus stochastiques diff´erents. Par exem-ple, contrairement `a l’exponentielle ordinaire eXt qui est manifestement positive, l’exponentielle stochastique Z = E(X) n’est pas n´ecessairement positive. Il est facile de voir que l’exponentielle stochastique de X reste positive si tous les sauts deX sont plus grands que −1, ce qui revient `a dire (pour un processus de L´evy) que la mesure de L´evy satisfaitν((−∞,−1]) = 0.
Il est donc naturel de demander, lequel de deux processus convient mieux pour construire des mod`eles financiers. Le r´esultat suivant, dˆu `a Goll et Kallsen [35] montre que les deux approches sont ´equivalents: les deux op´erations corr´espondent `a la mˆeme classe de processus positifs.
Proposition 11 (Relation entre exponentielles ordinaires et stochastiques).
1. Soit (Xt)t≥0 un processus de L´evy de triplet caract´eristique (σ2, ν, γ) et Z = E(X) son exponentielle stochastique. Si Z > 0 p.s. alors il existe un autre processus de L´evy (Lt)t≥0 de triplet caract´eristique (σ2L, νL, γL)tel queZt=eLt o`u
Lt = lnZt=Xt−σ2t
2 + X
0≤s≤t
ln(1 + ∆Xs)−∆Xs . (5.23)
σL = σ,
νL(A) = ν({x: ln(1 +x)∈A}) = Z
1A(ln(1 +x))ν(dx), (5.24)
γL = γ−σ2 2 +
Z
ν(dx)
ln(1 +x)1[−1,1](ln(1 +x))−x1[−1,1](x) .
2. Soit(Lt)t≥0 un processus de L´evy de triplet caract´eristique (σL2, νL, γL) etSt= expLt son exponentielle.
Il existe un autre processus de L´evy(Xt)t≥0 tel queStest l’exponentielle stochastique deX: S=E(X)o`u Xt=Lt+σ2t
2 + X
0≤s≤t
e∆Ls−1−∆Ls . (5.25)
Le triplet (σ2, ν, γ)de X est donn´e par:
σ=σL,
ν(A) =νL({x:ex−1∈A}) = Z
1A(ex−1)νL(dx), (5.26)
γ=γL+σL2 2 +
Z
νL(dx)
(ex−1)1[−1,1](ex−1)−x1[−1,1](x) .
Preuve. 1. La condition Z > 0 p.s. est ´equivalente `a ∆Xs >−1 pour tout sp.s., ce qui permet de prendre le logarithme. Dans la preuve de proposition 10 nous avons vu que la somme P
0≤s≤t
ln(1 + ∆Xs)−∆Xs
converge vers un processus de variation finie. Il est alors clair queL est un processus de L´evy et queσL=σ.
De plus, ∆Ls= ln(1 + ∆Xs) pour touts. Ceci implique JL([0, t]×A) =
Z
[0,t]×R
1A(ln(1 +x))JX(ds dx) et doncνL(A) =R
1A(ln(1 +x))ν(dx). Il reste `a calculerγL. En substituant la d´ecomposition de L´evy-Itˆo pour (Lt) et (Xt) dans (5.23), on obtient
γLt−γt+σ2t
2 +
Z
s∈[0,t],|x|≤1
xJ˜L(ds dx) + Z
s∈[0,t],|x|>1
xJL(ds dx)
− Z
s∈[0,t],|x|≤1
xJ˜X(ds dx)− Z
s∈[0,t],|x|>1
xJX(ds dx)
− X
0≤s≤t
ln(1 + ∆Xs)−∆Xs = 0.
En observant que Z
s∈[0,t],|x|≤1
x(JL(ds dx)−JX(ds dx))
= X
0≤s≤t
∆Xs1[−1,1](∆Xs)−ln(1 + ∆Xs)1[−1,1](ln(1 + ∆Xs)) converge, on peut s´eparer l’expression ci-dessus en une partie ’sauts’ et une partie ’drift’, donc chacune doit ˆetre ´egale `a z´ero. Pour la partie drift on obtient:
γL−γ+σ2 2 −
Z 1
−1{xνL(dx)−xν(dx)}= 0, ce qui donne la formule pourγL apr`es un changement de variable.
2. Les sauts deStsont donn´es par ∆St=St−(exp(∆Lt)−1). SiXest un processus de L´evy tel queS=E(X) alors puisquedSt=St−dXt on a ∆St=St−∆Xt et donc ∆Xt= exp(∆Lt)−1 et ν est donn´e par (5.26). En particulier ∆Xt > −1 p.s. et il est facile `a v´erifier que lnE(X) est un processus de L´evy avec les mˆemes caract´eristiques queLseulement si les caract´eristiques deX sont donn´ees par (5.26). Inversement, si X est un processus de L´evy avec caract´eristiques donn´ees par (5.26), (5.22) permet de v´erifier queE(X) = expLt.
En vu de ce r´esultat, et du fait que les formules qui font intervenir l’exponentielle ordinaire sont plus lisibles, cette derni`ere est plus souvent utilis´ee pour construire les mod`eles de prix. Cependant, dans certaines situations comme le montre l’exemple suivant, l’exponentielle stochastique est mieux adapt´ee.
Strat´egie CPPI avec sauts La strat´egie CPPI est une strat´egie d’assurance de portefeuille permettant (en th´eorie) de maintenir la valeur du portefeuille au-dessus d’un seuil donn´e tout en profitant d’une evolution favorable de la bourse.
Pour fixer les id´ees, nous supposerons que l’investisseur souhaite garantir le capitalN `a l’´ech´eanceT (Npeut ˆetre plus grand ou plus petit que l’investissement initial). Pour cela il doit maintenir la valeur du portefeuille Vtau-dessus duplancher Bt`a chaque date, o`u Btest ´egal au prix du z´ero-coupon de nominalN et d’´ech´eance T. La difference Ct =Vt−Bt est appell´ee lecoussin. La strat´egie CPPI consiste alors `a utiliser l’algorithme suivant:
• A chaque date t, si Vt> Bt, investirmCt en l’actif risqu´e, o`u m >1 est lemultiplicateur de la strat´egie, et le reste en z´ero-coupons d’´ech´eanceT.
• Si Vt≤Bt, investir tout en z´ero-coupons d’´ech´eanceT.
Si le prix de l’actif risqu´eS est un processus aux trajectoires continues, le portefeuille reste toujours au-dessus du plancher, et l’´evolution du coussin est donn´ee par
dCt
Ct
=mdSt
St
+ (1−m)rdt, o`urest le taux d’int´erˆet. Dans le mod`ele de Black-Scholes,
dSt
St
=µdt+σdWt,
cette ´equation se r´esout explicitement et on obtient la valeur finale du portefeuille VT =N+ (V0−N e−rT) exp
rT+m(µ−r)T +mσWT −m2σ2T 2
. L’esp´erance du gain est donc
E[VT] =N+ (V0−N e−rT) exp (rT +m(µ−r)T).
Siµ > r, on arrive `a un paradoxe apparent: il n’y a pas de risque, et l’esp´erance du gain peut ˆetre rendu aussi grande que l’on souhaite en choisissant un multiplicateur suffisamment ´elev´e. Ce paradoxe se r´esout facilement en introduisant les sauts dans les trajectoires du prix car dans ce cas, en augmentant le multiplicateur on augmente aussi la probabilit´e de perte.
Soit dSt
St−
=rdt+dZt,
o`uZtest un processus de L´evy, et soitτ= inf{t:Vt≤Bt}la premi`ere date o`u le portefeuille passe au-dessous du coussin (on peut avoirτ =∞). Alors avant la date τ, le coussin satisfait
dCt
Ct−
=mdZt+rdt, et le coussin actualis´eCt∗:= eCrtt est donc donn´e par
Ct∗=E(mZ)t, t < τ.
Apr`es la dateτ, tout le portefeuille est investi en z´ero coupons et le coussin actualis´e reste constant. On a donc Ct∗=E(mZ)t∧τ.
La perte a lieu si, `a un instantt≤T,Ct∗≤0, ce qui peut arriver si et seulement siZ a un saut dans [0, T] dont la taille est inf´erieure `a −1/m. On obtient donc (voir exercice 11)
P[∃t∈[0, T] :Vt≤Bt] = 1−exp −T
Z −1/m
−∞
ν(dx)
! .
Exercice 21. Montrer que siX etY sont deux processus de L´evy etY est de saut pur alors E(X)E(Y) =E(X+Y +X
∆X∆Y)
Exercice 22 (Propri´et´e de martingale de l’exponentielle stochastique). Soit X un processus de L´evy et une martingale. Montrer queE(X) est ´egalement une martingale.
Indication: D´ecomposerX en une somme d’un processus de Poisson compos´e et d’un processus de L´evyX′ tel que|∆X′|<1. Utiliser proposition 11 et l’exercice pr´ecedent.