L’´evolution de la luminescence de l’europium sans co-dopant en fonction de la temp´erature de recuit des x´erogels a ´et´e ´etudi´ee en particulier par R. Campostrini et al [37]. Nous avons repris cette ´etude en comparant les r´esultats pour des x´erogels sans co-dopage et avec un co-dopage aluminium.
A. Biswas et al [38] ont quant `a eux ´etudi´e les propri´et´es de luminescence de xerogels co-dop´es europium et aluminium durant leurs densifications entre 1000◦C et 1150◦C. Cette ´etude n’a toutefois pas suivi les effets de la densification sur la luminescence d’un xerogel co-dop´e, depuis le gel humide jusqu’`a la temp´erature de recuit finale. La technique de dopage utilis´ee pour leurs ´echantillons ne le leur permettait pas. En effet, contrairement `a la m´ethode de dopage que nous utilisons (voir paragraphe 2.1.2) qui consiste `a incorporer dans le mat´eriau les dopants au premier stade de la fabrication, ils ont effectu´e leur dopage par trempage des xerogels, d´ej`a recuits `a 1000◦C, dans une solution de nitrate d’europium puis d’aluminium.
Figure 3.1: Spectres d’´emission apr`es excitation `a 355 nm de verres dop´es `a 10 000 ppm Eu/Si sans (A) et avec co-dopage aluminium (B) `a 60 000 ppm Al/Si en fonction de la temp´erature de recuit : (a) 80◦C ; (b) 100◦C ; (c) 150◦C ; (d) 200◦C ; (e) 250◦C ; (f) 300◦C ; (g) 350◦C ; (h) 400◦C ; (i) 500◦C ; (j) 700◦C ;(k) 800◦C ;(l) 900◦C.
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A partir des spectres des ´echantillons non co-dop´es, report´es en figure 3.1 A, on peut ´enoncer les constatations suivantes :
– pour un recuit `a 80◦C le spectre de l’´echantillon est ´equivalent `a celui qui aurait ´et´e obtenu en milieu aqueux [39]. Le x´erogel non densifi´e doit donc conserver en son sein une grande part d’eau. Les transitions 5D0 →7F0 et 5D0 →7F3 interdites par les r`egles de s´election n’apparaissent pas. Les transitions5D0→7F1,5D0→7F2,5D0→7F4ne font pas apparaˆıtre de structures d´emontrant une dissym´etrie du site occup´e par l’ion ;
– d`es 150◦C, les transitions5D0 →7F0et5D0 →7F3apparaissent mais leurs intensit´es restent inf´erieures aux autres. Les transitions 5D0→7F1,5D0 →7F2,5D0 →7F4 s’´elargissent et se structurent, traduisant l’action d’un environnement moins sym´etrique et plus inhomog`ene
autour de l’ion Eu3+;
– la transition entre un milieu contenant une grande quantit´e d’eau et un verre, commence donc pour un recuit `a 150◦C et est achev´e pour un recuit `a 200◦C. Apr`es 200◦C, et suivant l’augmentation des temp´eratures de recuit, les raies ont tendance `a s’´ecarter les unes des autres et `a s’´elargir.
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A partir des spectres des ´echantillons co-dop´es figure 3.1 B, on peut ´enoncer les constatations suivantes :
– pour un recuit `a 80◦C, comme dans le cas non co-dop´e, le spectre est ´equivalent au spectre de l’europium dans l’eau o`u les transitions 5D0 →7F0 et5D0 →7F3 sont absentes ;
– pour un recuit `a 150◦C, les transitions 5D0 →7F0 et 5D0 →7F3 apparaissent mais leurs intensit´es restent inf´erieures `a celles des transitions permises. L’intensit´e de la transition
5D0 →7F2 devient la plus importante ;
– un d´ebut de structure apparaˆıt dans le spectre de l’´echantillon recuit `a 200◦C ;
– c’est pour des recuits entre 300◦C et 350◦C que la transition5D0→7F0devient tr`es impor-tante et surpasse en amplitude la transition 5D0 →7F1. Ce ph´enom`ene particuli`erement surprenant et propre au co-dopage aluminium a d´ej`a ´et´e observ´e par M.J.Lochhead et K.L.Bray [32]. Les raies prennent une structure compl`etement diff´erente de celle observ´ee dans les ´echantillons ne contenant pas d’aluminium. En fonction des temp´eratures crois-santes, les positions des raies au del`a de 200◦C semblent s’´ecarter encore plus que dans le cas sans aluminium ;
Figure 3.2: ´Energie d’´emission des transitions 5D0 →7F0 et 5D0 →7F1 en fonction de la temp´erature de recuit pour les ´echantillons dop´es seulement avec 10 000 ppm de Eu/Si(symboles pleins) et avec un co-dopage `a 60 000 ppm Al/Si (symboles vides).
e-ratures. Les changements ont lieu autour de 150◦C-200◦C pour les ´echantillons sans aluminium et autour de 300◦C-350◦C pour les ´echantillons co-dop´es aluminium.
En relevant la position du maximum de quatre gaussiennes ajust´ees sur les spectres exp´ eri-mentaux, nous avons d´etermin´e la position de la transition5D0 →7F0 ainsi que des composantes de la transition 5D0 →7F1. Ces positions sont report´ees en figure 3.2. Avec la temp´erature de recuit un ´ecartement des diff´erentes raies se produit. Cet ´ecartement est moins important sans l’aluminium qu’en sa pr´esence. Pour les ´echantillons avec aluminium, outre un d´eplacement im-portant des raies de la transition5D0→7F1 entraˆınant son ´elargissement, la transition5D0 →7F0 se d´eplace vers le bleu.
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A partir des positions des diff´erentes raies de luminescence, on calcule les param`etres B20
et B22. De ces deux param`etres on d´eduit le param`etre S2 dont l’´evolution est pr´esent´ee en Figure 3.3.
Figure 3.3: ´Evaluation du param`etre S2en fonction de la temp´erature de recuit pour les ´echantillons do-p´es seulement avec 10 000 ppm de Eu/Si(symboles pleins) et avec un co-dopage `a 60 000 ppm Al/Si (symboles vides).
Le param`etre S2 des diff´erents ´echantillons croˆıt en fonction de leur temp´erature de recuit. Dans le cas sans aluminium, apr`es un l´eger saut entre 150◦C et 200◦C, il croˆıt de mani`ere quasi lin´eaire. Par contre, dans le cas des ´echantillons contenant de l’aluminium, on observe un effet de palier.
Pour des recuits inf´erieurs `a 300◦C, les param`etres S2 des ´echantillons avec aluminium sont inf´erieurs `a ceux de leurs homologues n’en contenant pas. En environnement aqueux les sites sont plus sym´etriques [39]. On peut donc supposer que les ´echantillons avec de l’aluminium conservent plus l’eau [32].
Pour les fortes temp´eratures, le param`etre S2 est plus important pour les ´echantillons conte-nant de l’aluminium. Cela indique, comme nous avons pu le remarquer sur les spectres, une
influence forte du champ cristallin. Les sites, dans le cas du co-dopage aluminium, sont alors moins sym´etriques que sans co-dopant. Ceci explique l’apparition de structures tr`es marqu´ees dans le spectre, dues `a un ´elargissement inhomog`ene des raies.
La transition entre ces deux structures est tr`es brutale dans le cas des ´echantillons contenant de l’aluminium et a lieu `a 300◦C, alors qu’une transition a lieu entre 100◦C et 150◦C et de mani`ere moins nette pour les ´echantillons sans aluminium.
En conclusion :
– cette ´etude conforte l’hypoth`ese de la r´etention d’eau par la pr´esence d’alu-minium ;
– la structure locale autour de l’ion europium est modifi´ee en pr´esence d’alumi-nium et produit un environnement tr`es peu sym´etrique qui renforce l’intensit´e du champ cristallin (amplitude 5D0 →7F0 avec Al3+>amplitude 5D0 →7F0 sans Al3+).