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1.1 Cosmologie

1.2.4 M´ethodes Observationnelles

D’une mani`ere g´enerale, la connaissance de l’information spectrophotom´etrique de toutes les sources pr´esentes dans une r´egion du ciel n´ecessite l’´echantillonnage

Fig. 1.15: Repr´esentation sch´ematique des techniques de photom´etrie et spectroscopie dans le plan espace-longueur d’onde (ou d´ecalage spectral en consid´erant la raie Lyman-α). La pr´esence des raies d’´emission atmosph´eriques de OH, pr´edominantes dans le domaine spectral 0.65-2.5µm, limite les observations spectroscopiques depuis le sol. En haut `a gauche : visualisation sch´ematique du cube d’informations espace-longueur d’onde. Chacune des techniques d’observation est pr´esent´ee dans une sous-partie (a) `a (e).

complet de l’espace des positions et des longueurs d’onde (∆α, ∆δ, ∆λ) des photons re¸cus. Cependant, les d´etecteurs permettant cette mesure ´etant `a l’heure actuelle bidimensionnels, on a g´en´eralement une perte d’information par int´egration suivant une des dimensions (spatiale ou spectrale), qui d´epend de la m´ethode instrumentale choisie (Fig. 1.15).

Pour pallier `a cet inconv´enient, la recherche d’objets distants ne va pas se limiter `a une technique particuli`ere, mais va les combiner. Ce fut le cas au cours de cette th`ese, pour laquelle nous avons adopt´e des approches techniques assez diff´erentes, en combinaison avec l’utilisation des lentilles gravitationnelles (voir Section 1.3). S´election en dehors du domaine visible ou proche-infrarouge

Historiquement, la recherche de galaxies les plus distantes fut synonyme de celle des quasars, des radiogalaxies, et des galaxies lumineuses dans les domaines infra- rouge ou submillim´etrique (Stern & Spinrad, 1999). Ces objets sont en effet in- trins`equement beaucoup plus brillants : les quasars sont des sources ponctuelles li´ees `a l’accr´etion de gaz sur un trou noir supermassif au noyau d’une galaxie sou- vent masqu´ee par une telle luminosit´e. Les radiogalaxies ou galaxies ultra-lumineuses

en infrarouge sont des syst`emes massifs beaucoup plus ´evolu´es que les galaxies clas- siques.

Cependant, la densit´e num´erique de tels objets reste assez faible et d’autres techniques permirent de franchir des d´ecalages spectraux z > 1 d’une mani`ere plus efficace. Au d´ebut de 2004, ∼ 30 galaxies sont d´ecouvertes et confirm´ees `a z > 5 et les recherches se multiplient (Spinrad, 2004). La confirmation du d´ecalage spectral des objets `a z>

∼2.3 est facilit´ee dans le cas d’une raie Lyman-α intense dans le domaine

visible.

S´election photom´etrique

En utilisant certains traits particuliers du spectre des galaxies, comme une brus- que discontinuit´e de flux au niveau du continuum, il est possible de d´efinir un crit`ere d’estimation du d´ecalage spectral bas´e uniquement sur de la photom´etrie. De telles mesures, effectu´ees `a l’aide de filtres en bande large (d’une valeur typique de 0.5 `a 1.0 µm), se comportent comme un spectre `a tr`es basse r´esolution. On parle g´en´eralement de Distribution Spectrale en ´Energie ou DSE (en anglais : SED). Un choix judicieux des caract´eristiques de ces filtres permet de discriminer un domaine de d´ecalage spectral sp´ecifique, comme c’est le cas pour les LBGs (voir Sect. 1.2.1) : en effet, la discontinuit´e dans le spectre provenant de la cassure de Lyman (en com- binaison avec la forˆet Lyman-α `a mesure que l’on s’approche des grands d´ecalages spectraux) se prˆete bien `a cette technique de s´election avec seulement trois filtres. Dans un diagramme couleur-couleur5 , qui combine l’´evolution relative du flux

entre ces trois filtres, la r´egion de s´election correspondant `a la discontinuit´e est bien d´elimit´ee (Figure 1.16). La confirmation du grand d´ecalage spectral des objets s´electionn´es par cette m´ethode, `a l’aide d’observations spectroscopiques, montre un taux d’efficacit´e sup´erieur `a 70 % (Steidel et al., 2003).

Cette approche de s´election photom´etrique multi-bandes n’est certes pas an- cienne, puisque elle fut utilis´ee historiquement par Baum (1957, 1962) afin d’´evaluer le d´ecalage spectral d’amas de galaxies distants. D’une mani`ere plus g´en´erale, il est possible d’am´eliorer l’estimateur du d´ecalage spectral en combinant des mesures de photom´etrie dans un nombre plus important de filtres, couvrant un domaine spec- tral plus large. On regroupe ce genre d’´etudes sous le terme g´en´erique de redshift photom´etrique. Il en existe deux approches principales :

– L’ajustement de la DSE observ´ee `a l’aide de spectres de r´ef´erence. Ces derniers peuvent ˆetre issus d’observations ou de mod`eles synth´etiques

– Un ajustement empirique d’une loi donnant une estimation du d´ecalage spec- tral ˜z(Ci) en fonction des couleurs Ci observ´ees entre les filtres successifs.

L’int´erˆet principal d’utiliser cette m´ethode est qu’elle est moins coˆuteuse en temps d’observation que la spectroscopie, pour une mˆeme surface de champ. Cepen-

dant, la confirmation du d´ecalage spectral n´ecessite d’observer un spectre compl´emen- taire des objets pr´es´electionn´es par des crit`eres photom´etriques, sauf lorsque le taux de confirmation du crit`ere photom´etrique s’est av´er´e tr`es ´elev´e (ce qui est le cas pour les LBGs).

Fig. 1.16:A gauche : superposition d’un mod`eles spectral de galaxie et de la transmission de trois filtres en bande large (Un, G, R) dispos´es de part et d’autre de la discontinuit´e de Lyman, permettant de s´electionner des sources `a grand d´ecalage spectral. Le continuum de ces objets est rougedans la couleur U − G et bleu dans la couleur G − R. A droite : diagramme couleur-couleur correspondant `a cette s´election : les couleurs de diff´erents mod`eles de galaxies sont trac´ees en fonction de leur d´ecalage spectral. Lorsque z ≥ 3, les objets se situent dans la zone hachur´ee qui d´efinit un crit`ere de s´election photom´etrique. D’apr`es Giavalisco (2002).

Spectroscopie `a fente

La majorit´e des spectrographes utilisent une ou plusieurs fentes, plac´ees sur le chemin optique entre la source et l’observateur, qui permettent d’isoler une petite r´egion du ciel dans le champ de vue au voisinage de chaque source `a ´etudier. Ceci r´eduit fortement la contamination du spectre de l’objet par celle du ciel environ- nant : une fente plus ´etroite augmentera la capacit´e de s´eparer les raies d’´emission atmosph´eriques qui limitent la sensitivit´e spectrale, notamment dans la partie rouge du visible et le proche-infrarouge o`u une r´esolution instrumentale de l’ordre de 2000 est n´ecessaire. Toutefois, le nombre de pixel correspondant `a la largeur de la fente doit rester significatif, en vue d’´echantillonner correctement l’intervalle ∆λ de la r´esolution instrumentale.

La configuration spectroscopique la plus simple est celle d’une fente longue, qui s’´etend sur une des dimensions du champ de vue de l’instrument. Cependant, elle ne permet d’´etudier simultan´ement qu’un ou deux objets sp´ecifiquement s´electionn´es,

pour des raisons ´evidentes d’alignement. Les instruments les plus performants poss`e- dent un mode de spectroscopie multi-objets (ou MOS) : un ensemble de fentes courtes plac´ees chacune sur une source, en ´evitant le chevauchement des diff´erents spectres sur l’image finale du d´etecteur. Chacun des ces objets peut ˆetre pr´eala- blement s´electionn´e dans le champ selon d’autres crit`eres (par exemple de la pho- tom´etrie multi-bandes). Cette capacit´e de multiplexage augmente l’efficacit´e des ob- servations spectroscopiques par rapport `a la fente longue, en permettant d’´etudier un nombre typique de N ≃ 30 − 50 sources de mani`ere simultan´ee.

Pour ce qui concerne la recherche d’objets distants, ces techniques visent princi- palement `a mesurer la raie d’´emission Lyman-α. Pour les sources `a d´ecalage spectral mod´er´e (z<

∼5) les plus brillantes, on peut aussi envisager la d´etection de cette mˆeme

raie si elle est pr´esente en absorption, ou celle de la cassure dans le continuum spectral due `a la forˆet Lyman-α du cˆot´e bleu (λ < 1216 ˚A). D’autres raies d’ab- sorption m´etalliques, d’´el´ements comme le carbone ou le silicium, sont ´egalement observ´ees dans le spectre des LBGs `a ces d´ecalages spectraux. Enfin, si on se trouve en pr´esence d’un noyau actif au cœur de la galaxie, on peut voir apparaˆıtre d’autres raies d’´emission ´energ´etiques, comme NV ou CIV. A l’avenir, on imagine ´egalement

pouvoir d´etecter la raie de l’h´elium He ii λ1640 dans les objets primordiaux (de Population III, voir la section 1.2.1).

Filtres en bande ´etroite

Ce sont des filtres dont la bande passante se situe dans des fenˆetres atmosph´eri- ques tr`es ´etroites (de l’ordre de l’ordre de 100 ˚A), pour lesquelles la sensitivit´e spectrale est beaucoup plus importante grˆace aux faibles ´emissions des raies du ciel. Utilis´es en photom´etrie, ils permettent de s´electionner des objets ayant un flux anormalement ´elev´e, par comparaison avec un filtre en large bande dans le mˆeme domaine spectral, `a cause de la pr´esence d’une raie d’´emission intense.

On d´efinit la largeur ´equivalente W d’une raie comme : W = Z ∆λ fλ fc − 1  dλ (1.48) o`u fλ est le flux monochromatique de l’objet, fc la valeur moyenne du continuum

“sous” la raie (estim´ee `a partir des r´egions adjacentes), et ∆λ la plage de longueur d’onde contenant la raie d’´emission. La largeur ´equivalente mesure donc l’intensit´e d’une raie en rapport `a celle du continuum.

Les objets s´electionn´es en comparant la photom´etrie dans un filtre en bande ´etroite (domin´ee par le flux dans la raie) avec celle d’un filtre en large bande (do- min´ee par la valeur fc) seront donc ceux ayant des largeurs ´equivalentes W les plus

importantes. L’identification d’une raie d´etect´ee dans un filtre en bande ´etroite, et donc le d´ecalage spectral correspondant, n´ecessite de connaˆıtre d’autres mesures de

la DSE, `a cause des diff´erentes origines possibles (Hα, Hβ, [OIII], Lyman-α, ...).

Cette technique a permis de d´ecouvrir beaucoup d’´emetteurs Lyman-α `a grand d´ecalage spectral, essentiellement dans les fenˆetres atmosph´eriques correspondant `a z ≃ 4.5, z ≃ 5.7 et z ≃ 6.5. A cause de l’´etroitesse de la zone spectrale explor´ee, elle est g´en´eralement appliqu´ee `a des sondages couvrant une large r´egion du ciel, comme le relev´e Large-Area Lyman Alpha Survey (LALA) par Rhoads & Malhotra (2001); Rhoads et al. (2003), ou dans les recherches avec le t´elescope Subaru (Kodaira et al., 2003; Ajiki et al., 2003).

Des solutions hybrides ont ´et´e propos´ees par d’autres groupes, comme des com- binaisons de filtres en bandes ´etroites dans le cas du Wide Field Imager Lyman- Alpha Search (WFILAS) (Westra et al., 2005), ou l’utilisation de filtres de largeurs interm´ediaires (Ajiki et al., 2004).

Spectroscopie IFU

Les instruments de spectroscopie int´egrale de champ (ou IFUs) fournissent un spectre en chaque position d’un champ de vue (Figure 1.15, e). Ils explorent ainsi un cube complet dans l’espace (α, δ , λ) : on parle ´egalement de spectroscopie 3D. Ce type d’instruments est tr`es utile pour ´etude spectroscopique des objets en re- lation avec leur morphologie (visible sur les images). Ils sont relativement r´ecents (le premier spectrographe int´egral de champ a ´et´e lanc´e par Vanderriest (1980)) et beaucoup de projets sont en d´eveloppement dans ce domaine.

La technique g´en´erale consiste `a transformer le plan focal bidimensionnel, en reprojetant le signal mesur´e le long d’une pseudo-fente en entr´ee d’un spectrographe classique, qui va produire un spectre sur le d´etecteur. Les deux approches les plus courantes utilisent :

– un r´eseau de fibres optiques, chacune d’entre elles plac´ee `a une position (α, δ) du plan focal.

– un d´ecoupeur de champ (image slicer ) : un ensemble de miroirs s´electionnant une r´egion rectiligne du plan focal (mini-fente) pour la r´eimager le long de la pseudo-fente du spectrographe.

Autres techniques diverses

Plusieurs approches sp´ecifiques ont ´et´e mis en place par les groupes recherchant des objets distants, parmi lesquelles on peut citer :

– La suppression des raies de OH : afin de limiter la contamination des spectres par les raies d’´emission du ciel dont les longueurs d’onde sont biens connues, cette technique consiste `a filtrer les zones correspondantes dans un spectre `a tr`es haute r´esolution, puis `a le reconcentrer `a plus basse r´esolution sur le d´etecteur. Elle est utilis´ee dans l’instrument COHSI (Piche et al., 1997).

– Les fenˆetres multi-fentes : c’est une m´ethode hybride, qui combine la spectro- scopie multi-fentes et l’utilisation d’un filtre en bande ´etroite. Elle permet de couvrir toute la surface du d´etecteur par des spectres non contamin´es par les raies d’´emission du ciel (Martin & Sawicki, 2004).

– Les grismes sur le t´elescope spatial : celui-ci n’´etant pas influenc´e par l’´emission atmosph´erique, on peut y effectuer de la spectroscopie sans fente avec un grisme `a basse r´esolution. Ce dispositif est mis en place sur la cam´era ACS, et a permis notamment de confirmer la d´etection d’une surdensit´e de galaxies `a z ≃ 6 dans le champ UDF (Malhotra et al., 2005).

– La recherche cibl´ee de sources autour d’un objet distant, notamment `a proxi- mit´e des quasars. En effet, les quasars sont g´en´eralement li´es `a des galaxies tr`es massives, autour desquelles on s’attend `a trouver une concentration plus importantes d’objets par effet de gravit´e. Cette m´ethode a ´et´e appliqu´ee lors des premi`eres tentatives recherchant des ´emetteurs Lyman-α par Djorgovski et al. (1985), et aussi dans les premiers champs de recherche des LBGs (Steidel & Hamilton, 1992; Steidel et al., 1995)