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c) L’espérance de Heidegger

accueillir ce qui se donne, le es gibt, et à correspondre à une interpellation, celle de l’être. C’est en ce sens que l’homme doit s’exposer au « langage comme dictée, épiphanie et différence [ce qui] constitue la nouvelle formule de la donation de l’être, expliquant le privilège de la poésie, car ‘’le poète nous fait savoir que la poésie est le fini qui se range dans les limites de la convenance du destin89.’’ Cet accord de la finitude et du destin métamorphose alors l’angoisse en sérénité90. »

Mais alors, considérer que l’angoisse puisse se transformer finalement en sérénité, n’est-ce pas sous-entendre que Heidegger vise à résorber ce qu’il en est de cette mise en route, provoquée par l’ébranlement des certitudes de la pensée ? Si les remises en cause de la maîtrise du sujet par lui-même sont entérinées par Derrida, et s’il les ressaisit lui-même, n’est-ce pas surtout pour montrer ce qui avec Heidegger demeure encore prisonnier des carcans de la métaphysique de la présence d’une part et de l’anthropologie d’autre part ?

c) L’espérance de Heidegger

La pensée de Heidegger constitue pour Derrida un chemin à suivre. Chemin en forme d’ouverture, ce que Derrida appelle « l’ouverture des questions heideggériennes », sans lesquelles sa pensée n’aurait pu avoir lieu. Parmi ces questions se repèrent celles que nous venons d’examiner chez Heidegger : l’idée d’une présence se pensant nécessairement en différences, celle d’un Dasein qui se démet de la maîtrise du temps, de l’histoire et du langage, question aussi à propos de la façon dont Heidegger étudie la possibilité d’un imparlé demeurant dans le secret d’un non-dit, et partant la remise en cause du logocentrisme. Pourtant, nous l’avons montré d’emblée, les textes de Heidegger sont lus par Derrida comme tout autre texte, c’est-à-dire dans une perspective déconstructive. « J’ai marqué, très explicitement et, on pourra le vérifier, dans tous les essais que j’ai publiés, un écart par rapport à la problématique 88 Jean-Marie Vaysse, L’inconscient des modernes – Essai sur l’origine métaphysique de la psychanalyse, Éditions Gallimard, 1999, p. 377. 89 Martin Heidegger, Approche de Hölderlin, trad. H. Corbin, M. Deguy, F. Fédier, J. Launay, Paris, 1962, p. 162, cité par Jean-Marie Vaysse dans L’inconscient des modernes – Essai sur l’origine métaphysique de la psychanalyse, Éditions Gallimard, 1999, p. 378. 90 Jean-Marie Vaysse, Op. cit, p. 378.

heideggérienne91. » Cet écart a rapport aux concepts d’origine et de chute analysés, précise Derrida, à propos du temps, mais aussi quant à « la valeur du propre (propriété, proprier, appropriation, toute la famille de Eigentlichkeit, Eigen, Ereignis92) » qui est, ajoute Derrida, peut-être le fil le plus continu et le plus difficile de la pensée heideggérienne. Si la pensée de Heidegger est pour Derrida un coup d’envoi de la

Destruktion de la métaphysique, elle demeure assujettie à certains présupposés

métaphysiques. C’est ce qui lui fera dire : « J’ai parfois le sentiment que la problématique heideggérienne est la défense la plus ‘’profonde’’ et la plus ‘’puissante’’ de ce que j’essaie de mettre en question sous le titre de pensée de la présence93

Dans « La différance », Derrida travaille précisément à déceler ce qui dans la démarche philosophique de Heidegger témoigne de cette défense profonde et puissante de la pensée de la présence. Si Heidegger provoque la mise en question de la notion métaphysique de la présence, il reste néanmoins, aux dires de Derrida, enferré dans l ‘idée même d’une persistance de la présence. C’est pourquoi, Derrida soucieux de définir la différance au plus juste, le fait en reprenant la question heideggérienne qui consiste à interroger l’essence du présent, la présence du présent. Néanmoins, refusant de définir ce qu’elle est puisqu’elle ne se donne jamais en tant que telle au présent, il cherche à en apprécier les contours. Dans la mesure où Heidegger interroge encore dans l’horizon de la question de l’être, il demeure dans la clôture de la métaphysique en maintenant la suprématie de la présence, quand bien même il s’agit d’une présence pensée dans le mouvement extatique et dynamique de l’événement, c’est-à-dire de la venue en présence. Autrement dit, quand bien même Heidegger pense la différence de l’être à l’étant, et s’il affirme également que cette différence est l’oublié de la métaphysique, il ne fait pourtant que reconduire cet oubli en affirmant un autre type de présence. En effet, lorsque le différencié – le présent et la présence -, se désabrite, alors là se dit une autre présence, une présence elle-même indifférenciée. Autrement dit, la trace se dévoile en un indifférencié : le présent et la présence. Et même si cet indifférencié se découvre sans se dévoiler en tant que différencié, il n’en demeure pas moins que l’effacement est en même temps, avènement d’un étant-présent. La trace demeure donc, se maintient, signée par cet étant-présent. Et quand bien-même cet étant- 91 Jacques Derrida, Positions – Entretien avec Jean-Louis Houdebine et Guy Scarpetta, intitulé « Positions », Les Éditions de Minuit, 1972, p. 73. 92 Ibid., p. 74. 93 Ibid., p. 75.

présent n’est plus pensé, comme dans la tradition métaphysique, il n’empêche que se

maintient un lieu de rassemblement, une appropriation. Selon Derrida :

La “trace matinale” de la différence s’est perdue dans une invisibilité sans retour et pourtant sa perte même est abritée, gardée, regardée, retardée. Dans un texte. Sous la forme de la présence. De la propriété. Qui n’est elle-même qu’un effet d’écriture94.

Avec Heidegger, le texte garde la marque de ce qu’il a perdu. Est alors maintenue une autre sorte de présent : « le présent devient le signe du signe, la trace de la trace95. » C’est pourquoi, en dernière instance, le texte de la métaphysique est ainsi compris. Encore lisible ; et à lire96. La question de Derrida est alors la suivante, celle que la philosophie a à recueillir après Heidegger : comment penser le dehors d’un texte, par exemple, l’autre du texte de la métaphysique occidentale ? Par cette question, Derrida a la volonté de se confronter à ce que cet impensé contient d’aporie : certes il y a un vacillement opéré dans la pensée grâce à cette proposition heideggérienne de penser l’encore impensé, de décentrer le centre à partir duquel la pensée pense, c’est-à-dire le sujet, mais il maintient un maintenant de la pensée, un autre centre, toujours tributaire du concept vulgaire du temps. Ou autrement dit, la différence reste un nom métaphysique et tous les noms qu’elle reçoit dans notre langue sont encore, en tant que noms, métaphysiques. C’est pourquoi, Derrida, à la suite de Heidegger, propose, lui, un autre texte ou texte général : une réinscription déplacée de la chaîne (être, présence, -propriation, etc.). Comme il le précise en note de bas de page, à la fin du texte « La différance » :

Il va de soi qu’une telle réinscription ne sera jamais contenue dans un discours philosophique ou théorique, ni en général dans un discours ou un écrit ; seulement sur la scène de ce que j’ai appelé ailleurs le texte général (197297). De quoi se nourrit l’espérance de Heidegger ? De la nostalgie de trouver une inscription rassemblante, unifiante et unique. L’espérance de Heidegger se repère dans la quête du mot propre et du nom unique, le « premier mot de l’être », là où le dire vise la parole la plus authentique, celle de l’origine. Or, cette quête suppose la mise en rapport avec ce 94 Jacques Derrida, Marges de la philosophie – « La différance », Les Éditions de Minuit, 1972, p. 26. 95 Ibid., p. 25.

96 À cette question du lisible qui renvoie chez Derrida à celle de l’illisible, nous consacrerons ultérieurement un chapitre. Nous y reprendrons les interrogations concomitantes de Lacan et de Derrida à propos d’une possible ou impossible lecture de Joyce. Nous nous inspirerons pour cette question, du séminaire de Francis Capron, intitulé Psychanalyse et Déconstruction, donné à Espace analytique à Paris, de novembre 2015 à juin 2016 (inédit).

que La parole d’Anaximandre paraît retenir de la métaphysique. Voici comment Heidegger parle du « premier mot de l’être » (das frühe Wort des Seins : to khreôn) :

Le rapport au présent, déployant son ordre dans l’essence même de la présence, est unique (ist eine einzige). Il reste par excellence incomparable à tout autre rapport. Il appartient à l’unicité de l’être lui-même (Sie gehört zur Einzigkeit des Seins selbst). La langue devrait donc, pour nommer ce qui se déploie dans l’être (das Wesende des Seins), trouver un seul mot, le mot unique (ein einziges, das einzige Wort). C’est là que nous mesurons combien risqué est tout mot de la pensée [Tout mot pensant : denkende Wort] qui s’adresse à l’être (das dem Sein Zugesprochen wird). Pourtant, ce qui est risqué ici n’est pas quelque chose d’impossible ; car l’être parle partout et toujours au travers de toute langue98.

Dans Identité et différence, Heidegger affirme avoir recours provisoirement mais inévitablement, par le nom de la différence, au langage de la tradition pour rendre compte de ce qui n’a pas encore été interrogé et pour tenter de trouver ce premier mot de l’être. Derrida lui répond ceci :

Plus “vieille” que l’être lui-même, une telle différence n’a aucun nom dans notre langue. Mais “nous savons déjà” que si elle est innommable, ce n’est pas par provision, parce que notre langue n’a pas encore trouvé ou reçu ce nom, ou parce qu’il faudrait le chercher dans une autre langue, hors du système fini de la nôtre. C’est parce qu’il n’y a pas de nom pour cela, pas même celui d’essence ou d’être, pas même celui de “différance” qui n’est pas un nom, qui n’est pas une unité nominale pure et se disloque sans cesse dans une chaîne de substitutions différantes. “Il n’y a pas de nom pour cela“ : lire cette proposition dans sa platitude99.

Derrida relance ici la question de Heidegger et propose une réponse qui consiste à ne pas apporter de réponse, puisqu’aucun objet nommable n’est proposé pour faire unité. Au contraire, il s’agit pour lui de rappeler que le processus de signification n’a ni origine ni fin et ne prend place que parce que « la chose même se dérobe toujours ». Si selon Derrida, il reste à parler, à faire résonner la voix dans les couloirs du « labyrinthe de la galerie de Dresde100 », pour suppléer l’éclat de la présence, cela ne peut être que par le fourvoiement de la phonè, qui en s’élevant vers le soleil de la présence, est en

98 Martin Heidegger, Chemins qui ne mènent nulle part – « La parole d’Anaximandre », Éditions Vittorio Klostermann, Frankfurt/Main, 1949, Gallimard, 1962, pour la traduction française, p. 441-442 cité par Jacques Derrida, Marges de la philosophie – « La différance », Les Éditions de Minuit, 1972, Note de bas de page, p. 29.

99 Jacques Derrida, Marges de la philosophie – « La différance », Les Éditions de Minuit, 1972, Note de bas de page, p. 28.

100 Derrida fait allusion ici à « l’expérience que Husserl croit pouvoir isoler comme une expérience particulière, accidentelle, dépendante et seconde : celle de la dérive indéfinie des signes comme errance et changement de scènes (Verwandlung), enchaînant les représentations (Vregegenwärtigungen) les unes aux autres, sans commencement ni fin. » Cette expérience est décrite par Husserl dans Idées I. Elle est reprise par Derrida pour affirmer que cette expérience du labyrinthe n’est pas un cas particulier de l’expérience. « Hors de la galerie, aucune perception ne nous est donnée, ni assurément promise : la chose même se dérobe toujours », il n’y a pas un « plein jour de la présence. » cf. La voix et le phénomène, Éditions Puf, Quadrige, Paris, 1967, p. 116-117.

définitive la voie d’Icare, c’est-à-dire une voie sans issue, où l’on se brule les ailes à trop vouloir retrouver l’éclat ou l’éclaircie. Ainsi en est-il du concept de temps, pensé à partir de l’être comme présence. Car c’est précisément lorsqu’il s’agit de penser le temps au-delà de la détermination de l’être comme présence que l’on est confronté à l’impossibilité de le nommer. Dans ce cas, « Il ne peut s’agir de quelque chose qu’on pourrait encore appeler temps101 », affirme Derrida dans « Ousia et Grammè ». Il y a là un cercle inhérent à toute pensée, enfermée nécessairement dans un système du concept.

Plus simplement : tout texte de la métaphysique porte en lui, par exemple, et le concept dit “vulgaire” du temps et les ressources qu’on empruntera au système de la métaphysique pour critiquer ce concept. Et ces ressources sont requises dès l’instant où le signe “temps” – l’unité du mot et du concept, du signifiant et du signifié “temps” en général, qu’il soit ou non limité par la “vulgarité” métaphysique – se met à fonctionner dans un discours102.

La non-réponse est ainsi soulignée par Derrida : c’est parce que l’on ne peut penser qu’au sein du cercle de la nécessité formelle du discours, « qu’il faut réfléchir aux conditions d’un discours excédant la métaphysique, à supposer qu’un tel discours soit possible ou s’annonce dans le filigrane de quelque marge103. » Pour le dire autrement, il n’y a pas de signifié transcendantal, pas d’unité du nom, ni pour le temps, ni pour l’être. Et cela parce qu’il n’y a pas de « concept vulgaire du temps ».

Le concept de temps appartient de part en part à la métaphysique et il nomme la domination de la présence. Il faut donc en conclure que tout le système des concepts métaphysiques, à travers toute leur histoire développe ladite “vulgarité” de ce concept (ce dont Heidegger ne contesterait pas), mais aussi qu’on ne peut lui opposer un autre concept, on s’apercevrait vite qu’on le construit avec d’autres prédicats métaphysiques ou onto-théologiques104.

Ainsi, même la démarche heideggérienne s’ordonne autour d’un axe qui est lui-même métaphysique, celui de la séparation entre l’authentique et l’inauthentique ou encore de l’opposition entre la temporalité originaire et la temporalité déchue, dérivée. D’autant plus que cette temporalité originaire et cette tentative pour penser le temps en dehors des sédimentations ontiques, constituent cet horizon de l’être que cherchait Heidegger

101 Jacques Derrida, Marges de la philosophie – « Ousia et Grammè », Les Éditions de Minuit, 1972, note de bas de page, p. 69.

102 Ibid., note de bas de page, p. 70.

103 Ibid., note de bas de page, p.70.

en quête d’une pensée qui soit authentique, à partir de laquelle pourrait se faire une éclaircie de l’être.

Et c’est de cette temporalité originaire que, fermant [nous soulignons] Sein und Zeit, Heidegger se demande si elle constitue l’horizon de l’être, si elle conduit au sens de l’être. Or l’opposition de l’originaire et du dérivé n’est-elle pas encore métaphysique ? La requête de l’archie, quelles que soient les précautions dont on entoure ce concept, n’est-elle pas l’opération “essentielle” de la métaphysique ? 105.

La même année (1968) - dans l’entretien avec Julia Kristeva, intitulé Sémiologie et

Grammatologie, consigné dans Positions -, Derrida pointe l’écart entre sa pensée et celle

de Heidegger, précisément dans ce rapport aux concepts d’origine et de chute. Ce que Derrida rejette, c’est l’idée qu’il y aurait une origine de la parole permettant de dire le temps historial, tandis que dans le temps de l’histoire, il ne serait question que d’un temps où l’on perd la question authentique de l’être.

Finalement, penser la trace de la différence et l’effacement qui en résulte dans le texte métaphysique est l’impensable même. À la mise en évidence de l’impensé heideggérien, Derrida substitue l’impensable. Or, cet impensable est intraduisible, puisqu’il suppose une illisibilité, un autre texte, hors de la compréhension du texte métaphysique, jamais contenu dans un discours philosophique ou théorique. C’est pourquoi il reste à se démettre des prétentions de la philosophie à pouvoir tout dire, même si c’est en un autre dire. Cette idée est formulée ainsi à la fin de « Ousia et Grammè » :

Une telle trace ne peut être pensée more metaphysico. Aucun philosophème n’est paré pour la maîtriser. Et elle (est) cela même qui doit se dérober à la maîtrise. Seule la présence se maîtrise106.

De cette impossible maîtrise, de cette impossible unification dans un lieu authentique, qui certes dépasserait une métaphysique de la substance, mais qui continuerait à penser la « destruction » de la métaphysique de la substance dans la clôture de la pensée occidentale, Derrida déduit la nécessité d’un « en-dehors de la tradition occidentale. » Comment cet en-dehors se pense-t-il alors chez Derrida ? Là où Heidegger donne pour mission au Dasein de s’extirper de l’indifférence du quotidien caractérisé par le manque du besoin de questionner l'être (et d'abord de questionner son être propre, ou l'être de l'étant que nous

sommes), et cela dans la visée téléologique de faire advenir une pensée

105 Jacques Derrida, Marges de la philosophie – « Ousia et Grammè », Les Éditions de Minuit, 1972, note de bas de page, p.73.

et un dire authentiques, Derrida veut penser la différance jusque dans l’impensable. Mais cet impensable n’a pas à être recueilli par un dire compris comme épiphanie. Derrida affirme la nécessité d’une dissémination qui ne se laisse jamais reconduire à un présent d’origine simple. Au point fixe se substituent des positions dont la valeur serait de ne jamais avoir à se clôturer.

d) Penser au-delà de la « grammaire métaphysique »

Heidegger et Derrida ne défendent pas les mêmes enjeux de la pensée. S’il convient pour eux de penser un renouvellement de la pensée occidentale de l’être puisque le dépassement de la métaphysique est impossible, il n’empêche que Heidegger et Derrida se séparent à propos de la question de l’origine. Heidegger cherche à revenir à l’origine, tandis que Derrida soutient qu’il n’y a pas d’origine, que tout est toujours renvoi, renvoyant à d’autres renvois. Sans doute est-ce la raison pour laquelle Derrida parle d’une déconstruction de la métaphysique de la présence qui ne peut venir que d’un « certain dehors » de la tradition occidentale. Il parle d’un « ébranlement » qui devrait venir faire écho à ce qui était sédimenté dans la langue occidentale, à savoir une « co- appartenance » et une « co-propriété » du nom de l’homme et du nom de l’être, ces co-appartenances étant selon lui présentes encore dans la pensée de Heidegger. Si Heidegger comme Derrida, déprécient l’idée d’un sujet présent à lui-même, maître par sa volonté de ce qui ressort de sa subjectivité et dans le fantasme de maîtriser le monde, ce qui est davantage en question avec Heidegger, c’est le privilège donné à la présence

permanente. Françoise Dastur l’affirme ainsi :

La question n’est nullement pour Heidegger de mettre en question le privilège donné à la présence dans la tradition occidentale, que Derrida caractérise comme une “métaphysique de la présence”. Ce qui est en question, c’est le privilège donnée à la présence permanente, qui caractériserait plutôt ce que l’on pourrait nommer une “métaphysique de la substance”, c’est-à-dire une métaphysique qui comprend l’être comme une présence déjà accomplie par opposition à laquelle Heidegger veut penser l’événement de la venue en présence afin de mettre en évidence le caractère temporel de l’être107. Selon elle, il y aurait à ce propos un malentendu entre Heidegger et Derrida. Si Derrida tente de discuter, comme le fait Heidegger, la question de la présence - conçue comme le

107 Françoise Dastur, Déconstruction et phénoménologie – Derrida en débat avec Husserl et Heidegger –