• Aucun résultat trouvé

Entre-deux

Dans le document « Le Grand Voyage » (Page 194-200)

permanent, ouverture, le navigateur y est séparé de la société et libéré des contraintes extérieures autres que celles de prendre soin du bateau. Il est bercé. Naviguer peut être régressif : le navigateur se laisse prendre en charge par une force plus grande que lui, qui punit parfois, mais isole et protège du monde extérieur, de la réalité. Il est dépendant du temps, du vent, des courants. Il peut y ouvrir son espace intérieur, laisser l’eau salée laver tous les soucis qui l’encombrent et le vider de tout ce qui n’est pas le présent. Cet espace où s’efface toute trace de passage, neuf devant chaque étrave invite à se refaire une virginité mentale.

       

Entre-deux

   

Passer les jetées du port vers l’océan, c’est pénétrer dans un univers différent, laisser derrière soi ses repères familiers, abandonner la stabilité de la terre ferme pour la mouvance aquatique. C’est franchir un seuil.

 

Seuil : du latin limen. Sens figuré, c’est « [un] début [un] commencement [l’] entrée

dans une période nouvelle », « [la] limite marquant un passage vers un autre état,

entrée dans une situation nouvelle »

.1

 

C’est pénétrer dans l’espace « d’entre-deux » que le scénario du voyage entrouvre : un lieu intermédiaire où se créer une nouvelle image du monde et de soi. Lorsque l’individu ordinaire se transforme en voyageur, sa rupture avec le quotidien lui permet de pénétrer dans un espace créatif où les structures habituelles sont abolies, un espace d’apprentissage, d’initiation.

En s’engageant dans le Grand Voyage, les navigateurs se posent plus d’un défi : le

 

premier étant sans aucun doute d’oser mettre leur rêve en péril, d’oser affronter la possibilité d’un échec : cela demande un certain courage. Ensuite, ils doivent faire preuve de détermination, de ténacité, d’organisation pour mener à bien leur projet ; vaincre leurs peurs, leurs doutes ; aller à l’encontre des schèmes culturels qui leur susurrent que c’est une folie de quitter son travail pour partir sur les flots, d’y entraîner ses enfants, etc. Puis une fois partis, c’est face aux événements du voyage qu’ils doivent faire face ; la promiscuité du bord, l’inconfort relatif, les avaries, la météo, les autres cultures. En fait, ils sont en permanence confrontés à leurs limites qu’ils doivent repousser un peu plus loin, s’ils le peuvent, ou apprendre à respecter. Mais surtout, ils confrontent leur vision idéalisée du monde et d’eux-mêmes à la réalité. Il s’agit de grandir, de mûrir. Le

   

 

195

     

Grand Voyage est un espace initiatique, un rite de passage. Il possède une dimension transformante dont sont conscients ceux qui l’entreprennent

 

Car que l’on ne se fasse pas d’illusion : le Grand Voyage initiatique ne laissera

jamais intact.

1

 

Départ, périple et retour ; séparation, liminalité et réintégration, les phases du rituel initiatique se retrouvent ici. Comme l’écrit Victor Turner, pour opérer la transition entre deux états d’accomplissement personnel, il faut entrer dans l’espace liminal. En franchir le seuil exige des navigateurs qu’ils s’isolent de leurs schémas culturels habituels. Détachés de leurs rôles sociaux, en désappartenance, ils peuvent poser un regard critique sur leur société et sur eux-mêmes (Turner 1974). Le voyage les revêt d’invisibilité sociale. Il constitue un espace interstitiel, secret qui leur permet se glisser dans une nouvelle histoire.

« Voyager c’est changer d’histoire de vie avant de changer de

lieu

» (Urbain 2003 p.274). C’est une échappée, une disparition (J.B.Garré)2. Les voyageurs s’y positionnent d’une façon ambigüe : ni ici, ni là (Turner 1974). Ce qui est d’autant plus vrai aujourd’hui, qu’absents physiquement et psychiquement de sa société, ils gardent simultanément le contact avec elle, grâce aux moyens de communication dont ils disposent. Dans cet entre-deux, un changement de perspective les autorise à expérimenter, à s’initier à d’autres manières d’être au monde.

Turner stresse l’importance et le caractère libre des relations au sein de l’espace liminal. Celles-ci prennent la forme d’une « communitas » : un ensemble homogène, indifférencié, fait d’individus libres, reliés par des liens affectifs, émotionnels et égalitaires. Communauté édenienne, utopique, la communitas est un mode primordial de relations humaines qui ne dépend ni de conventions, ni de sanctions : dans ce sens, elle est lieu de création (Turner 1974). Le désir d’établir de nouveaux liens sociaux du type de ceux qui créent la communitas est exprimé par la plupart des navigateurs. L’individu a besoin des autres pour savoir qui il est : l’identité choisie ayant besoin d’être validée par la reconnaissance d’autrui.

Il serait faux d’imaginer les communitas comme des lieux dépourvus de règles : elles sont imprégnées d’un genre de structures internes qui permettent un apprentissage à un nouveau mode de socialisation auquel les liminaires seront confrontés après leur réintégration. Turner insiste d’ailleurs sur la relation dialectique dans le temps entre social structuré et communitas : alternance entre normes et liberté. Ainsi, la vie en voilier a ses impératifs, ses conventions, sa culture propre qui règlent les relations entre navigateurs : rituels de bienvenue sur les pontons, invitations à l’apéritif, repas

 

1 Extrait d’une discussion sur un forum spécialisé pour les navigateurs de plaisance

2« Psychiatrie du voyage, voyages de psychiatres, voyages en psychiatrie »

 

communs, jargon, répertoire d’histoires de mer. Les relations ne se limitent pas à des contacts sociaux sympathiques : les marins forment une communauté de pratique comme la définit Étienne Wenger1. Ils partagent passion, connaissances et expériences pour apprendre à mieux faire en interagissant, qu’il s’agisse de résoudre des problèmes, de s’informer ou de partager des expériences. Voyager en voilier est une activité qui nécessite un apprentissage et les conversations entre navigateurs, tout comme les histoires racontées à la veillée participent non seulement à souder la communauté, mais remplissent aussi un rôle pédagogique.

Le passage initiatique nécessite, selon Turner, un but, une direction. Sans travail, sans acharnement, ni effort pour atteindre ce but, on risque de rester bloqué dans la liminalité : il n’y a plus de voyage, mais une nouvelle sédentarité agréable, certes, du moins dans un premier temps, mais vaine. Ainsi, ces circumnavigateurs qui tournent, re- tournent autour du globe, n’ayant plus nulle part leur place, ne sachant plus où poser sac à terre, ayant pourtant épuisé les joies de la navigation. Prisonniers pathétiques de « l’entre-deux » ils deviennent errants. La liberté n’est pas suffisante en soi, il faut lui donner un contenu pour qu’elle ait du sens (de Singly 2003). Par contre, les « navigateurs à durée indéterminée » qui ont réussi à donner un sens à leur existence nomade se situent hors de cette zone liminale, tout en étant fort proches. Ils ont choisi de ne pas réintégrer la société : ils préfèrent rester en marge, partageant avec elle certaines valeurs, mais s’en distinguant par d’autres. Turner les définit comme des individus très conscients d’eux-mêmes, des outsiders ou des marginaux qui parfois ils jouent le rôle de critiques radicaux du social pour la communitas.

Cette position critique, en recul par rapport aux structures sociales habituelles fait aussi de la liminalité le lieu des utopies. Les longues heures de veilles sont propices à la réflexivité, à l’imagination de soi possible (Kaufmann 2004) et durant d’interminables discussions de carré les voyageurs refont le monde avec leurs voisins de mouillage. Le voyage offre donc la possibilité d’effectuer un travail de remise en question, jugé trop difficile dans les conditions de vie ordinaire, mais qui ne prend réellement sens que parce qu’il est suivi d’une réintégration, du retour qui clôt le voyage initiatique. Les navigateurs se réinsèrent dans les structures sociales normalisées qu’ils avaient quittées, mais le regard qu’ils posent sur elles a changé. Ils se sont transformés. Il faut un jour rentrer de voyage pour le raconter et découvrir ce qu’il nous a apporté. Les blogs et les communautés en lignes y invitent, offrant la possibilité d’intégrer déjà avant le départ la tribu des voileux et de ne pas tout à fait la quitter après le voyage.

Le Grand Voyage initie à l’autonomie, mais aussi à un type de relations humaines qui sait à la fois respecter cette indépendance et apporter soutien, solidarité, chaleur humaine. Un néotribalisme (Maffesoli 1997), mais provisoire et qui laisse une large place

 

197

     

à la liberté individuelle et n’a de réelle valeur que par son alternance avec une vie sociale intégrée.        

Jeu

   

Dans les discours médiatiques d’aujourd’hui, l’image de l’individu hypermoderne, sans cesse à l’affût de toute expérience significative, gardant sa vie ouverte à la nouveauté, obsédé par la peur de l’ennui, agité d’un besoin quasi compulsif de se garder en mouvement (Abrahams 1986) est une apologie du renouvellement et du changement. Cette soif d’intensité va pourtant de pair avec une tendance tout aussi présente à rechercher le bien-être, la lenteur, l’intimité, le cocooning. Les individus ne veulent pas exclure :

 

Réalistes et demandant l’impossible, ils apprécient des moments à plus forte intensité

de liberté et des moments à plus forte intensité de sécurité.

(de Singly 2003 p.116)

 

Le Grand Voyage leur offre la possibilité de satisfaire tour à tour ces aspirations. L’aventure s’invite toute seule, même si on ne la recherche pas activement. L’oisiveté fait elle aussi partie du voyage, qu’on le veuille ou non. Cette alternance entre intensité et flânerie offre aux navigateurs à la fois des possibilités de s’essayer à de nouveaux rôles et des plages de réflexions pour intégrer ce qu’ils ont vécu dans l’action. Elle équilibre le voyage et soutient sa dimension initiatique. De plus, elle laisse la place à une approche très ludique du monde. Initiation et jeu, les deux sont liés. (Huizinga 1955).

     

Aventure

 

Les navigateurs sont tour à tour aventuriers, rebelles, découvreurs, l’explorateurs, grands marins, pêcheurs de gros : adultes, ils jouent le premier rôle d’un scénario souvent qu’ils ont souvent commencé à échaffauder dans leur enfance ou leur adolescence. Le Grand Voyage conserve la fraîcheur juvénile d’un jeu. Des modèles forts ont servi de support à l’envie de voyage pour beaucoup de nombreux navigateurs, je l’ai dit. Mais la réalité du voyage est plus douce. Il ne s’agit plutôt de jouer à imiter ces figures emblématiques, pas de renouveler leur exploit. L’exploit ne se mesure qu’à l’aune de celui qui l’accomplit : l’aventure, la vraie, dépend de la mise en jeu personnelle de celui qui la vit.

 

Les plaisanciers jouent aux aventuriers, aux rebelles! Ils s’en vont pour vivre «

une

aventure humaine extraordinaire

», «

une odyssée exceptionnelle

»1 , avec un enthousiasme teinté de joie enfantine et ludique. Étant donné le confort de la plupart des voiliers, les conditions dans lesquelles se déroule leur périple ne correspondent plus à l’image qu’ils s’en font, mais ils sont heureux ainsi. Ils s’essaient à de nouvelles identités et observent la vie au travers ces différents filtres. Et leur registre identitaire augmentant, c’est leur perception d’eux-mêmes qui s’étoffe (Kaufmann 2004). Ceux pour qui le voyage est un vieux rêve peuvent enfin s’identifier à l’image d’eux-mêmes qu’ils portaient enfouie sous les apparences. Au retour, ils seront eux aussi des Atlanticos.

 

 

Le Grand Voyage peut être comparé au jeu comme le considère Johan Huizinga (Huizinga 1955) : il est gai, plaisant, intense. Plein de fantaisie, il aide à franchir la distance qui sépare l’imaginaire et le concret, le rêve et le corps. On se lance dans l’aventure parce que l’on en a envie. Le jeu, comme le voyage, se déroule dans une sphère temporelle et d’action située hors de la vie ordinaire. Il a son espace, son temps et ses limites. Lorsque l’on pénètre dans son univers, on en accepte les contraintes puisqu’elles sont librement choisies. En fait, le jeu est une activité sérieuse même s’il n’est pas considéré comme tel : contrairement aux apparences, il est ordre. En effet, écrit Huizinga, le jeu apporte par ses règles et ses limites un semblant de perfection dans un monde imparfait et crée, pour un temps, l’harmonie dans le chaos de la vie. Ainsi le Grand Voyage emmène les voyageurs dans un monde imaginé, les sort temporairement de la réalité crue de la vie quotidienne. Les navigateurs ne font pas, ou si peu, allusion dans leurs témoignages à l’actualité politico-socio-économique : l’espace du voyage est lissé des imperfections du concret. Il reproduit le caractère esthétique, le rythme et l’harmonie du jeu. Sa lenteur laisse de la place à beauté de la mer, des paysages visités : les voyageurs voient surtout les beaux côtés des territoires qu’ils abordent et ceux qui les habitent, romantisant volontiers leurs aspects les plus rudes. Comme le joueur, ils cherchent à atteindre un but : réussir leur boucle de l’Atlantique et rentrer à bon port, la tête pleine de souvenirs. Leur motivation les absorbent : intensité, contraste, tension, changement, problèmes à résoudre et solutions à trouver font partie du quotidien de la croisière. Comme on joue rarement seul, c’est au sein de la communauté des voyageurs qu’ils évoluent, proche de la communauté des joueurs qu’Huizinga la rapproche de la communitas de Turner. Elle a ses propres normes et structures qui la différencie de la vie ordinaire. Le statut n’y dépend pas de la supériorité économique, il s’acquiert grâce à la compétence. Dans le monde des voileux, le marin doué et capable sera toujours respecté de tous. Dans ce sens, il s’agit d’un microcosme plus égalitaire que la société dont ils sont partis, mais où il s’agit de respecter des valeurs éthiques pour

 

199

     

être accepté. En effet, joueurs et voyageurs doivent faire preuve de courage, d’intelligence, de résistance, de ressources et de force psychique et physique. Mais ils doivent avant tout respecter les règles du jeu sous peine de se voir exclus : sur les pontons, le grincheux incompétent ne faisant pas preuve de solidarité, ne sera pas convié aux apéros, aux repas communs et sa mauvaise réputation risque de se répandre de port en port.

Le jeu comme le voyage sont des espaces structurés pour l’apprentissage joyeux et où la créativité peut s’exprimer tout en étant canalisée. Sans règles ni but, ils se dissolvent.

Ainsi, on part en voyage pour le plaisir, la joie d’être, de découvrir : on joue au héros, à l’aventurier, au Robinson, au premier ou dernier homme, au rebelle. On se déguise en romano des mers – cheveux et vêtements décolorés sous les soleil et l’eau de mer, peu tannée, voilier au pavillon en lambeau, et mille autres petits signes de reconnaissance. On parle une langue secrète partagée des seuls initiés. On joue à faire son pain, laver sa lessive à la main. On joue au marin paillard et ivrogne, en buvant un verre avec ses voisins de mouillage tout en racontant des histoires à faire frémir Neptune. On joue avec ses enfants, beaucoup.

Cette fraicheur ludique du regard que les voyageurs posent sur l’ailleurs, sur les autres, élargit leur univers intérieur.

     

Oisiveté

 

Dans tout jeu, il y a des périodes de réflexion, de relâche, pour que les joueurs se rassemblent en eux-mêmes pour mieux se relancer dans l’action. La construction intérieure à laquelle le jeu du voyage donne lieu a aussi besoin de son espace : jeu de bricolage solitaire auquel on se livre lorsqu’aucune activité n’accapare l’esprit.

Justement, l’entre-deux de la croisière laisse le droit à l’hédonisme, au plaisir d’être, de ne rien faire. Renversement des valeurs, l’oisiveté devient même une activité à part entière. En traversée ou quand le voilier tire doucement sur son ancre au mouillage, on passe beaucoup de temps à faire « rien ». Attente, rêverie, routines remplissent ces moments où «

rien de particulier ne se passe »

(Ehn & Löfgren 2007). Comme Ehn & Löfgren –sur le travail desquels je me repose dans cette section– le notent, dans la société occidentale, ces instants vides sont considérés comme des pertes de temps, de sens, de pouvoir, de contrôle. Mal considérés, l’inactivité et le manque d’action sont pourtant plus remplis qu’il n’y paraît. En effet, ils libèrent un espace pour la pensée : elle s’échappe (Ehn & Löfgren 2007).

En voyage certains moments prennent une valeur inattendue : quarts passés à

 

 

regard se reposer dans l’obscurité de la nuit ou à scruter la voûte céleste, paresse qui envahit agréablement au mouillage, ou encore petites routines. L’abondance de temps à bord a un grand avantage. Elle permet de s’abstraire d’un mode de fonctionnement multitâche vécu comme pénible ou stressant et autorise à ne plus faire qu’une seule chose à la fois, à mieux vivre le moment présent, à devenir plus conscient de ses actes. On s’autorise à faire ce que l’on ne supporte pas à terre : perdre son temps devient prendre le temps. On abandonne le jugement citadin qui condamne l’oisiveté pour la changer en vertu et on délaisse le stress pour s’initier à une nouvelle façon d’être au monde. Même l’attente imposée devant le guichet de douaniers grincheux est – presque – toujours prise avec philosophie, la patience est de mise, admirée aussi chez les locaux dont on envie la capacité à ne pas dépendre d’une horloge. Cependant, lorsqu’on a besoin d’eux pour des travaux, des réparations ou des livraisons de vivres leur indolence devient parfois plus difficile à supporter : le contrôle se perd et la liberté avec lui !

 

 

Pilote automatique de la vie ordinaire, les habitudes et les routines qu’on effectue sans y penser, procurent un sentiment de maîtrise, de fluidité, mais deviennent aussi camisoles de force d’un quotidien fastidieux. Changer de milieu de vie oblige à les modifier, à en acquérir d’autres. Le Grand Voyage provoque cette rupture et invite à un mode de vie plus primitif, moins confortable où les gestes triviaux, délocalisés, revêtent un intérêt neuf. Ainsi, faire sa lessive à la main dans le cockpit, sur le ponton d’une marina ou au lavoir d’un village devient une activité digne d’être racontée, comme le fait de prendre une douche après des jours passé la peau salée sous un soleil de plomb. Sécurisantes aussi, les routines réduisent l’inquiétude. Principalement, celles qui concernent la navigation. Faire le point, écouter le bulletin météo se transforment en repères spatio-temporels. La maîtrise des manœuvres du bateau, répétées jusqu’à être incorporées, jusqu’à ce que le corps agisse de lui-même , calme l’incertitude des débutants. En participant grandement à la métamorphose du bord en foyer, les habitudes et petits rituels du quotidien réconfortent aussi: chaque objet a sa place, chaque membre d’équipage sa bannette, son petit coin personnel. Les rythmes de repas, les places autour de la table, les petites plaisanteries rituelles, le nom du pilote automatique, les anniversaires que l’on célèbre, les fêtes que l’on marque forment un folklore rassurant qui renforce la sensation de home. Ce faisant, les routines du bord créent une structure calme et libèrent du temps où la pensée s’évade.

 

 

Si le rêve guide le voyage, les rêveries l’occupent en grande partie. Les moments abondent où laisser son esprit vagabonder face à la mer ou à un paysage paradisiaque. Où est-on alors ? À la fois dans la réalité et dans ses songes. Pour Ehn & Löfgren, lors d’instants de flânerie intellectuelle, le rêveur teste diverses identités, s’imagine assouvir

Dans le document « Le Grand Voyage » (Page 194-200)