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Les enjeux de la gestion de l'eau pour l'agriculture en Bretagne

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 59-63)

S ENSIBILITE D ’ UN TERRITOIRE ET VULNERABILITE D ’ UNE ACTIVITE ECONOMIQUE

2.5 Les enjeux de la gestion de l'eau pour l'agriculture en Bretagne

Les effets du climat sur l'agriculture, la forêt et l'élevage sont ainsi révélateurs des enjeux de la gestion de l'eau à l'échelle régionale, dans le contexte du changement climatique. Les enjeux majeurs correspondent à la période estivale où les besoins en eau potable s'ajoutent aux besoins hydrauliques (respect des débits d'étiages) et aux besoins hydriques (croissance du maïs par apport d'eau d'irrigation). Cette concurrence engendre une demande en eau supérieure aux ressources disponibles et entraîne une surexploitation des ressources non renouvelables (Blum, 2005). Debaeke et Amigues (2007) proposent plusieurs stratégies d'adaptation à la pénurie d'eau pour l'irrigation. Une première se base sur l'ajustement entre l'offre et la demande en créant des ressources supplémentaires; une seconde approche serait d'ajuster la demande à l'offre par des solutions plus économiques sur les plans agronomiques, socio-économiques ou génétiques entre autres. Une troisième stratégie serait la mise en place d'une gestion concertée entre les acteurs locaux sur la question du partage de la ressource en eau. En dernier recours, ils proposent l'indemnisation des pertes de production par l'utilisation d'un fond de calamité agricole.

L'irrigation est donc une étape importante en Bretagne, qui doit être adaptée aux stades phénologiques. On utilise ainsi préférentiellement l'eau d'irrigation lors des étapes critiques de montaison, floraison et remplissage des grains (Debaeke, 2007). La figure 2.11A montre ainsi que l'irrigation ne compte que pour 8 % de la consommation d'eau en Bretagne, soit 3 % de plus que l'utilisation industrielle mais nettement moins que les usages domestiques (87 %). Les surfaces irriguées ont augmenté entre 1988 et 2000 dans le Finistère et le Morbihan (figure 2.11B).

Figure 2.11 A : Répartition des consommations d'eau en Bretagne par secteurs d'activité en 2006 (source : agence de l'eau Loire-Bretagne) ; B : Evolution des surfaces irriguées en Bretagne entre 1988 et 2000

A B

Pour autant en 2009, avec un volume de 10 878 millions de m3, la Bretagne a le 6ème taux le plus bas du pays en termes de quantité d'eau utilisée pour irrigation (Commissariat Général du Développement Durable, 2012).

Lors des années de sécheresses, l'eau d'irrigation ne doit pas être utilisée pour assurer un rendement identique aux années moyennes, mais plutôt pour permettre un rendement minimal.

Cependant l'irrigation ne peut pas être pensée comme solution durable, car elle utilise une ressource limitée à partager avec de multiples usagers (alimentation humaine, santé, etc.) et d'autres pistes doivent être creusées. Il peut être alors intéressant d'utiliser des variétés précoces ou moins demandeuses en eau d'une même céréale, ou d'implanter de nouvelles céréales aux propriétés nutritives similaires. Ces différentes pistes d'économie en eau d'irrigation ont été testées dans leur efficacité (tableau 2.3). Cette information permet de hiérarchiser les méthodes, puisque l'on privilégiera les techniques les plus efficaces et qui sont également parmi les moins couteuses. D'après Debaeke (2007) on voit ainsi que les techniques les plus efficaces concernent la diversification des cultures, où l'on cherche à utiliser des cultures d'été moins demandeuses en eau par exemple.

Tableau 2.3 Appréciation des mesures agronomiques vis-à-vis de l'économie en eau d'irrigation (Debaeke, 2007)

Le changement du climat tel qu'annoncé par les membres du GIEC fait état, à l'échelle du globe, d'une augmentation des températures et d'une répartition différente des précipitations. Ainsi, des cultures très demandeuses en eau, comme le maïs, pourraient être amenées à être moins utilisées dans les régions affectées par ce type de changement climatique, notamment par des petits exploitants agricoles qui pourraient manquer de ressources (Brunini et Stigter, 2010). Le réchauffement global peut également avoir pour effet un déplacement vers le Nord des zones productrices de cette céréale.

Les questions que l'on se posait dans les années 1970 quand on cherchait à mettre en place une culture dans une nouvelle région, sur l'ensoleillement, la période de gel, les précipitations et le nombre de degrés-jours (Waggoner, 1966), sont de nouveau d'actualité avec le changement climatique.

On peut en effet se demander si une culture qui pousse actuellement sans trop de problèmes dans une région, sera toujours autant adaptée, en termes de pluviométrie par exemple, dans quelques décennies. Les agriculteurs ont, la plupart du temps, mis en place des cultures ou élevages en tenant compte des conditions climatiques. Or, dans le contexte du changement climatique, les agriculteurs s'interrogent sur l'évolution locale du climat. L'apport des modèles est alors décisif pour prendre en compte les changements à venir dans les stratégies agricoles.

Synthèse : L'apport des sécheresses passées et de leurs enseignements quant à la vulnérabilité de l'agriculture

Le savoir accumulé depuis les débuts de l'agriculture a permis de saisir les liens forts qui l'unit au climat, mettant en évidence une certaine vulnérabilité. L'agroclimatologie se base sur un climat moyen, passé présent ou futur, comme support à la planification des pratiques agricoles. Cette science permet de connaitre la vulnérabilité des cultures aux variabilités du climat, notamment l'effet des sécheresses sur certains stades phénotypiques. Pour le maïs, par exemple, la phase d'anthèse est très dépendante de la ressource en eau. De fait, pour que le rendement soit correct il faut assurer une alimentation en eau convenable lors de cette phase de croissance du végétal.

L'agroclimatologie renseigne également sur la sensibilité des arbres aux racines superficielles aux évènements secs de plus ou moins grande durée. Cette caractéristique pouvant expliquer la disparition progressive du pin d'ici l'horizon 2060 dans le quart nord-ouest français. Cette discipline s'intéresse également aux effets de la chaleur et l'humidité sur la vie animale, pouvant affecter le confort et le milieu de vie du bétail.

Les sécheresses passées ont confirmé cette vulnérabilité de l'agriculture et de l'environnement de manière générale. Leur étude à travers des récits historiques et grâce à la dendrochronologie a permis d'apprécier les impacts des sécheresses sur l'occupation du sol depuis le 16ème siècle. Au 20ème siècle, la Bretagne et plus généralement la France ont été affectées par des évènements secs variables dans leur intensité, durée et apparition dans l'année. Bien que la majorité des sécheresses se soient produites sur la période estivale, certaines ont démarré au printemps et ont eu des impacts très importants. C'est le cas par exemple de la sécheresse de 1976, qualifiée encore actuellement de sécheresse historique, qui marqua les esprits de par ses conséquences dramatiques sur l'agriculture. Le système agricole breton, intensif par choix socio-politico-économique, fut dès lors remis en question dans sa durabilité si des évènements de cette ampleur venaient à être plus fréquents.

L'importance de l'agriculture dans l'économie bretonne rend compte de la gravité que l'aléa sécheresse peut avoir en Bretagne. Le changement climatique amène une contrainte supplémentaire sur laquelle les scientifiques peuvent aider les agriculteurs en indiquant des scénarios probables de changements à moyen et long termes permettant de réfléchir à des pistes d'adaptation de l'agriculture.

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 59-63)

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