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CHAPITRE IV LES AFRICAINS FRANCOPHONES ET LE MONDE

1. Les caractéristiques statistiques

En 1999, la France comptait environ 121 600 étudiants étrangers, dont un peu plus de 14 000 étudiants en provenance des pays de l’Union européenne, soit 11,5 % de cette population.

Bien que la France conserve le niveau le plus élevé en Europe d’étudiants étrangers dans les universités, la proportion totale de ces étudiants baisse de façon constante depuis la fin des années 1980. Plus récemment, de 1995 à 1998, le pourcentage des étudiants étrangers a diminué de 6,3 %. Il représente 8,5 % de la population étudiante totale contre 13,6 % en 1986.

1 Ces cadres et ingénieurs africains étaient 336 en 1997, 612 en 1998 et 1 079 en 1999.

2 Pour le public, la présence africaine est particulièrement visible dans les hôpitaux et les écoles.

3 Source : Commission des Finances de l’Assemblée nationale. Rapport d’information n° 1806 présenté par Alain Claeys, député. L’accueil des étudiants étrangers en France : enjeu commercial ou priorité éducative ?

Si les effectifs des étudiants étrangers sont en régression, on constate néanmoins, en termes relatifs, une progression significative des étudiants européens (+ 56,4 %) et une diminution de la part des étudiants issus de pays francophones ou liés à la francophonie. Ainsi, les étudiants originaires des pays asiatiques diminuent de 7,9 % et ceux originaires des pays d’Afrique de 4,8 %.

Numériquement, néanmoins, les étudiants originaires des pays d’Afrique francophone restent le groupe le plus important : ils représentent 55 % des étudiants étrangers, dont près de deux tiers d’origine maghrébine1.

Ces chiffres doivent être nuancés en distinguant les étudiants de nationalité étrangère issus des populations immigrées résidant en France (EEI) – dont le parcours s’apparente à celui des étudiants français - et les étudiants issus de parents résidant à l’étranger venus poursuivre en France leur cursus universitaire (EEE). En dix ans, l’effectif des EEE diminue de 12 %, alors que celui des EEI augmente de 75 %. Dans ce groupe, on note également la diminution des étudiants expatriés titulaires d’un baccalauréat français.

Un examen plus fin des nationalités fait apparaître un taux de croissance fort pour les étudiants venant de trois pays européens de l’Union européenne2 et de l’Algérie3. On constate, en revanche, un recul des étudiants marocains (-42 %) et tunisiens (-40 %), ainsi qu’une baisse des étudiants en provenance des pays du Moyen-Orient (Syrie, Liban et Iran).

Les raisons de cette évolution tiennent :

pour les étudiants d’origine européenne, à la mise en place d’une politique de coopération universitaire au niveau communautaire dans les années 1980 et à la chute du mur de Berlin entraînant l’augmentation du nombre d’étudiants venus de l’Est ;

pour les étudiants d’origine non européenne, à des facteurs multiples, comme les difficultés administratives rencontrées pour l’accès et le séjour avant 1998, aux changements propres à certains pays, notamment la régression des effectifs autochtones dans le lycées français (arabisation de l’enseignement supérieur), le développement de structures universitaires locales et les effets de la dévaluation du franc CFA.

1.2. Profils : répartition des étudiants par cycle d’études

La répartition des étudiants étrangers entre les trois cycles est homogène, à raison d’environ un tiers pour chaque cycle4. Au-delà, les chiffres montrent une distinction entre les étudiants originaires des pays développés et ceux des pays en voie de développement. Les premiers, notamment les étudiants européens, viennent le plus souvent poursuivre des études de langue et de civilisation française en deuxième cycle. Les seconds, originaires d’Afrique et d’Asie, sont massivement inscrits en troisième cycle. Tel est le cas de 60 % des étudiants étrangers venant du Maghreb, parmi lesquels le Algériens comptent pour 65 %.

1 Marocains : 16 000 ; Algériens : 13 400 ; Tunisiens : 5 070.

2 Italie : + 168 % ; Grande-Bretagne : + 104 % ; Allemagne : + 59 %.

3 Algérie : + 70 %.

4 34,6 % en premier cycle ; 32,3 % en deuxième cycle ; 33,1 % en troisième cycle.

Ainsi, les docteurs originaires des pays africains sont majoritaires dans la population issue du troisième cycle (56 %) et les Maghrébins représentent 41 % des étudiants étrangers titulaires d’un doctorat en France.

De même, le choix de la discipline est sensiblement différent selon la provenance des étudiants. On constate que les étudiants originaires d’Afrique, et en particulier du Maghreb, sont inscrits plus en sciences (30 %) qu’en lettres (20 %). Cette prédilection pour les disciplines scientifiques se révèle forte en médecine où la proportion des étudiants maghrébins expatriés est passée de 12 % à 30 % en dix ans.

1.3. Le cas des étudiants maghrébins en France

Les données disponibles sur les étudiants originaires des pays du Maghreb font apparaître un certain nombre de points qui doivent être retenus dans le cadre de cette étude.

Cette population a une moyenne d’âge de 27,6 ans et sa durée moyenne de séjour est de 3,4 années. Près d’un quart des étudiants sont d’origine modeste. La proportion des étudiantes est encore faible : la plupart d’entre elles sont issues de milieux sociaux plus disposés à transgresser l’interdit relatif à l’émancipation des femmes dans les pays musulmans (familles où la mère a fait des études).

La migration de ces étudiants ne revêt pas qu’une finalité universitaire. Elle est souvent associée à une raison sociétale qui peut conduire à trois types de migrations :

une migration à dominante économique ou professionnelle qui a pour but un élargissement des perspectives du fait du diplôme obtenu et qui n’exclut pas l’exercice de la profession dans le pays des études ; il s’agit de ce que les anglo-saxons appellent les « skilled migrations », des migrations de compétences ou de qualifiés ;

une migration à dominante culturelle, le pays d’études étant considéré comme plus « moderne » que le pays d’origine, en particulier pour les femmes ;

une migration à dominante politique ou idéologique inscrite dans la volonté de mettre à distance une société jugée régressive ou incertaine en raisons des crises politiques.

Ces étudiants ont souvent des liens familiaux en France. Ainsi, le choix de la ville où sont effectuées les études est pour 45,6 % des étudiants lié à la présence de membres de la famille au même endroit. Un quart des étudiants sont d’ailleurs logés par des membres de leur famille.

La majorité des étudiants visent un doctorat ou un DIS (diplôme interuniversitaire de spécialisation) et se destinent, pour la moitié, à l’enseignement et à la recherche. C’est notamment le cas des Algériens qui poursuivent des études en France après un deuxième cycle dans leur pays. Ces étudiants recherchent des spécialisations qui les rendront plus compétitifs sur le marché du travail tant algérien qu’étranger.

1.4. Le cas des étudiants des pays d’Afrique Noire francophone

Pour 1999-2000, le nombre des étudiants originaires de l’Afrique francophone était d’environ 25 300, soit une progression de plus de 8 % par rapport à l’année universitaire 1998-1999. En regard, les étudiants de l’Afrique non francophone étaient moins d’un millier. Au total, les étudiants de l’Afrique francophone représentaient pour ce dernier recensement 41 % du total des étudiants venant d’Afrique et 19,5 % du total de la population étudiante étrangère1.

Par ordre décroissant, les spécialités dans lesquelles les étudiants d’Afrique noire francophone se trouvent les plus nombreux sont :

- les sciences économiques et la gestion ; - le droit et les sciences politiques ; - les sciences humaines et sociales ; - l’administration économique et sociale ; - les sciences et structures de la matière ; - la médecine ;

- les sciences et technologie ; - les langues ;

- les lettres et la linguistique ;

- les sciences de la nature et de la vie ; - la pharmacie.

Cette répartition montre que la préoccupation pour l’économie et la gestion vient au premier rang, tandis que l’administration économique et sociale se situe également en très bonne place. Proportionnellement, c’est même la discipline où les étudiants d’Afrique noire sont les plus nombreux (55,8 %), puisque leur pourcentage dépasse celui des étudiants issus d’Afrique du Nord, qui forment le groupe majoritaire dans la plupart des autres disciplines. A l’heure actuelle, ce ne sont donc plus les disciplines générales, comme les lettres et les sciences humaines, qui motivent le plus grand nombre des étudiants d’Afrique Noire francophone à poursuivre leur parcours en France, mais bien des formations qui peuvent concourir directement au développement. Si le droit et les sciences politiques occupent la seconde place - et l’étude de ces domaines correspond également à un besoin fort dans les pays d’origine -, on remarque que les disciplines purement scientifiques se situent avant la médecine.

L’état d’esprit qui prévaut semble donc être de disposer de diplômes qui permettent un emploi immédiat pour l’économie des pays d’origine. Cette évolution se situe bien dans la perspective d’un partenariat entre la France et les pays intéressés pour aider cette population à bénéficier de formations en alternance dans les entreprises françaises et des pays d’origine, de stages, et même de recrutements qui permettraient aux candidats à l’emploi en France d’asseoir leur première expérience professionnelle avant de créer chez eux des

1 Pour ce qui concerne la période 1997-2000, les visas délivrés aux étudiants maliens ont augmenté de 490 %, de 229 % pour les étudiants sénégalais, de 274 % pour les étudiants marocains ; ils ont diminué de 16 % pour les étudiants comoriens.

entreprises ou d’être employés dans les filiales d’entreprises françaises privées ou publiques installées sur place.

2. L’insertion professionnelle en France des étrangers titulaires de