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Du faire commun à l’économie collaborative

Dans le document Réseaux sociaux numériques : (Page 77-80)

COMMENT RENFORCER L'ENGAGEMENT CITOYEN ?

A. Du faire commun à l’économie collaborative

Rapport

que l’on reçoit » (les liens faibles permettent de jeter des ponts locaux entre des individus qui autrement resteraient isolés).

Au terme de plusieurs enquêtes sur les cercles de contacts forts ou plus distendus tissés par les Américain.e.s interrogé.e.s, Mark Granovetter concluait que les liens faibles renforçaient la cohésion sociale et l’intégration au sein de la communauté américaine en raison des opportunités d’emplois, d’échanges qu’ils offraient à l’inverse des liens forts, causes de fragmentation sociale et de l’entre soi.

Antonio Casilli toutefois minore les effets de cette extension de la sociabilité produite par les réseaux sociaux qui paradoxalement « en raison de sa transitivité réduit en même temps le nombre de possibilités de connexion » et favorise la création de « chambres d’écho » dont nous traiterons plus longuement dans un autre chapitre.

Le baromètre annuel des usages des réseaux sociaux en France de l’institut Harris précédemment cité40, pointait cet usage conversationnel majeur des réseaux socio-numériques.

En agrégeant des individualités au sein de communautés numériques, les réseaux sociaux ont permis de démultiplier « la force des liens faibles  » énoncée par Mark Granovetter… Avec la massification du numérique, se sont tissées des relations de plus en plus interdépendantes entre le Web et les acteur.rice.s de l’espace public traditionnel (partis politiques, organisations, medias, entreprises). La puissance des réseaux sociaux repose sur cette capacité de l’information à circuler au sein des réseaux interpersonnels élargis.

III. LA FORCE DE COOPÉRATION DES « LIENS FAIBLES »

Espace d’expression, les réseaux sociaux ont généré des courants d’idées et des actions collectives, de nouvelles formes de production et de consommation collaboratives.

AVISDÉCLARATIONS/SCRUTINRAPPORTANNEXES propriété (propriété publique, ou privée). Cette communauté établit une gouvernance, pour

protéger la ressource, en organiser la gestion et la faire croître.

Les outils socio-numériques offrent une interaction entre apprentissage, création et communication à ces initiatives de mise en commun des connaissances d’économie collaborative à l’échelle du globe afin de construire une réorganisation durable de notre société et des modèles socio-économiques.

Ainsi les acteur.rice.s du Wiki42 au nom de « la non rivalité des ressources numérisées, actent les pratiques sociales de partage et se débarrassent des logiques de propriété, au profit de la construction de communs de la connaissance. De levier d’engagement, le numérique devient objet d’engagement  », souligne Valérie Peugeot43. Près de 78 000  personnes à travers le monde contribuent ainsi activement chaque mois à l’encyclopédie universelle et multilingue en libre accès Wikipédia. Des dizaines de milliers de développeur.euse.s mobilisent leur temps libre et leurs compétences pour inventer de nouveaux logiciels libres, 256 millions de photos ont été « postées » sur Flickr sous une licence Creative Commons autorisant ainsi les réutilisations (commerciales ou non) de leurs œuvres. 20 000 individus collectent et éditent leurs traces de mobilité pour nourrir le fonds cartographique libre d’Open Street Map, dont certain.e.s, à une échelle plus locale, ont contribué au succès de la carte Open Street Map de Bretagne, regorgeant de détails pratiques actualisés par les internautes et qui place celle-ci loin devant la carte de l’Institut géographique national44 en nombre de téléchargements.

Pascal Béria45 insiste dans son ouvrage sur cette capacité de certains programmes de recherche à faire réaliser par le plus grand nombre une tâche à portée universelle. Pour illustrer ces pratiques d’intelligence et de collaboration collectives, il rappelle le projet Zooniverse qui invitait les astronomes amateur.rice.s à participer notamment à la classification de millions de galaxies à partir des images collectées par le programme Hubble ou le jeu Foldit ayant pour objet la recherche scientifique ; une expérience dont l’émulation a permis aux joueur.euse.s de découvrir en trois semaines la structure d’une protéine responsable du sida chez les singes et dont la découverte a fait l’objet d’une publication en septembre 2011 dans la revue Nature Structural et Molecular Biology .

Ces pratiques de partage au sein de communautés socio-numériques s’étendent à la consommation collaborative.

D’après une étude de l’OBSOCO (Observatoire Société et Consommation) débutée en 2012, 83 % des Français.es privilégient l’importance de pouvoir utiliser un produit à celle de le posséder46. Ces activités dites de « l’économie collaborative » qui mettent en relation des usager.ère.s contre rétribution se développent de plus en plus. L’étude du même observatoire sur l’année 201547 révèle que « certaines pratiques de consommation émergentes

42 Un wiki est une application Web qui permet la création, la modification et l’illustration collaboratives de pages à l’intérieur d’un site Web. Le mot « wiki » signifie, en hawaïen, rapide, vite, ou informel. Il a été choisi par Ward Cunningham lorsqu’il créa en 1995 le premier wiki, qu’il appela WikiWiki (source Wikipédia).

43 Entretien avec les rapporteur.e.s du 27 avril 2016.

44 Michel Briand, acteur des réseaux coopératifs. Audition du 8 mars 2016.

45 Pascal Béria, La révolution des contenus, Paris, Télémaque, 2013.

46 L’Observatoire des consommations émergentes, Évolution des tendances de consommation, 2012.

47 L’Observatoire des consommations émergentes, Le nouveau tournant des pratiques de consommation émergentes à l’heure de la maturité, 2012.

Rapport

sont en voie de banalisation : sept pratiques concernent un Français sur deux ». Ces pratiques selon les analyses de l’étude sont portées à la fois par la nouvelle donne technologique et par les tensions persistantes sur le pouvoir d’achat des ménages. Mais elles révèlent également les réserves ressenties par une part significative du modèle de consommation dominant.  Chaque pratique de consommation émergente a fait l’objet d’un classement selon le calcul de la part des personnes l’ayant pratiqué au cours des 12 derniers mois, un taux de pénétration représenté ci-après :

Schéma n° 6  Classement des pratiques de consommation émergentes

Source : L’ObSoCo / Le Groupe La Poste, DPDgroup, MAIF, PICOM, 2015.

Dans l’ensemble, pas moins de 99 % des personnes interrogées par l’OBSOCO ont eu recours à l’une des 21 pratiques au cours des 12 derniers mois. Les plateformes numériques d’intermédiation sont un facteur-clé dans la croissance de ces pratiques en facilitant et en sécurisant la transaction ainsi qu’en réduisant les coûts de celle-ci. Une étude de PwC48 publiée en 2015 estime que le chiffre d’affaires de l’économie collaborative à l’échelle mondiale pourrait passer de 15 milliards de dollars en 2014 à 335 milliards à l’horizon 2025.

La finance collaborative et le recrutement en ligne devraient, selon cette étude, « être les

48 PwC, Le marché mondial de l’économie collaborative devrait atteindre près de 335  milliards de dollars d’ici à 2025, contre 15  milliards en 2014, le 12  mai  2015 (http://www.pwc.fr/fr/espace-presse/communiques-de- presse/2015/mai/le-marche-mondial-de-economie-collaborative-devrait-atteindre-pres-de-335-milliards-de-dollars-ici-a-2025-contre-15-milliards-en-2014.html).

AVISDÉCLARATIONS/SCRUTINRAPPORTANNEXES secteurs les plus dynamiques dans les prochaines années avec respectivement 63 % et 37 % de

croissance annuelle, le logement et l’auto-partage suivent ensuite avec une hausse annuelle de 31 % et 23 % ».

Mais ces avancées numériques suscitent débats et controverses, entre innovations encouragées par les technophiles et inquiétudes sur les dangers économiques futurs, les répercussions sociales d’une uberisation* de l’économie, le non-respect des règles de sécurité et de protection des consommateur.rice.s et leurs incidences environnementales parfois contre-productives49. Sur ces enjeux, les auteur.e.s du présent rapport invitent le lecteur à lire l’avis du CESE La coproduction à l’heure du numérique. Risques et opportunités pour la.le consommateur.rice et l’emploi50.

Les réseaux sociaux utilisent l’intelligence collective dans un esprit de collaboration en ligne. Ils ont également transformé la circulation de l’information, traditionnellement verticale voire pyramidale en une transmission horizontale. Chaque internaute peut produire du contenu et devient un émetteur-récepteur de l’information.

B. L’internaute émetteur-récepteur ou la diffusion

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