• Aucun résultat trouvé

1.1 Cosmologie

1.2.1 Distribution Spectrale d’Energie

La “cassure de Lyman” Les objets `a z<

∼3.0 les plus propices `a l’observation sont les galaxies formant des

´etoiles. En effet, d’une part l’histoire du taux de formation stellaire montre un maxi- mum pour z<

∼1.5 (Fig. 1.8) et d’autre part le continuum spectral dans l’ultraviolet,

domin´e par les populations d’´etoiles jeunes (de type spectral O ou B) se retrouve dans le domaine visible (0.4 `a 0.8 µm) qui est le plus accessible depuis les t´elescopes au sol et pour lequel les d´eveloppements instrumentaux ont ´et´e les plus importants pendant les derni`eres d´ec´enies.

Le spectre int´egr´e de ces ´etoiles chaudes, combin´e `a la pr´esence d’hydrog`ene neutre en grandes quantit´es dans le milieu interstellaire, provoque une “cassure” dans le continuum `a la limite de la s´erie de Lyman (λ < 912 ˚A), en-de¸c`a de laquelle les photons ionisants sont compl`etement absorb´es par l’hydrog`ene atomique. L’uti- lisation de cette “cassure de Lyman” (Lyman-Break ) comme crit`ere de s´election photom´etrique (cf section 1.2.4) par Steidel et al. (1996) et ses collaborateurs a marqu´e un tournant important dans les ann´ees 1995-2000 pour la compr´ehension de l’Univers distant : les Galaxies Lyman-Break (ou LBGs) sont devenues le type d’objet le plus ´etudi´e et caract´eris´e `a 3 < z < 5.

Parmi les propri´et´es physiques mises en ´evidence sur les LBGs, on peut citer : – L’´etude d´etaill´ee du spectre ultraviolet au repos (domaine 900 − 4000 ˚A). Les

raies du milieu interstellaire permettent de contraindre les param`etres phy- siques (abondances, m´etallicit´e) des objets individuels (Shapley et al., 2003) – La mesure de raies d’´emission des r´egions HII dans le domaine visible au repos

(Pettini et al., 2001)

– Les effets de regroupement `a grande ´echelle des LBGs (Giavalisco & Dickinson, 2001)

– L’histoire du taux de formation stellaire cosmique `a z ∼ 3 − 4 d’apr`es la fonction de luminosit´e int´egr´ee dans l’ultraviolet (Steidel et al., 1999)

– Les populations stellaires et l’extinction en combinant les observations dans le visible et l’ultraviolet au repos (Shapley et al., 2001)

La forˆet Lyman-α

La pr´esence de syst`emes d’hydrog`ene neutre sur la ligne de vis´ee d’une source `a grand z va cr´eer une s´erie d’absorptions dans le domaine spectral 912-1216 ˚A au repos, qui s’ajoutent `a la cassure de Lyman. En effet, le ph´enom`ene de diffusion r´esonnante dans la raie Lyman-α (1216 ˚A au repos) va entraˆıner une chute impor- tante du flux au d´ecalage spectral de chaque absorbant : le continuum ultraviolet prend alors une forme tr`es discontinue dans cette plage de longueur d’onde, appel´ee forˆet Lyman-α (Lynds, 1971). Cet effet est plus important `a plus grand d´ecalage spectral, car on y trouve davantage d’absorbants sur la ligne de vis´ee par l’effet g´eom´etrique de distance. Le mˆeme comportement existe pour les autres raies de Lyman (Lyman-β 1026 ˚A, Lyman-γ 972 ˚A, ...) qui amplifient l’absorption en y jux- taposant d’autres “forˆets”. L’absorption moyenne du spectre prenant en compte les forˆets de Lyman a ´et´e mod´elis´ee par Madau (1995).

A plus grand d´ecalage spectral, cet effet d’absorption va dominer le spectre dans la r´egion 912-1216 ˚A , jusqu’`a former une discontinuit´e du continuum au niveau de la raie Lyman-α : on parle alors de “cassure Lyman-α”.

Pour les sources observ´ees au-del`a du d´ecalage spectral marquant la fin de la p´eriode de r´eionisation(zre), l’hydrog`ene neutre du milieu intergalactique va avoir

un effet similaire aux forˆets de Lyman, en formant une d´epression absorbante dans le spectre, appel´ee d´epression de Gunn-Peterson (Gunn & Peterson, 1965), du cˆot´e bleu de chaque raie de Lyman de la source (Fig. 1.9). La mesure pr´ecise de la largeur de ces d´epressions est un moyen d’´evaluer zre (Haiman & Loeb, 1999).

Mod´elisation du spectre ultraviolet des premi`eres sources

Comme la majorit´e des ´el´ements lourds (m´etaux ) sont synth´etis´es au sein des ´etoiles, les mod`eles actuels (Bromm et al., 2002) consid`erent que les nuages qui ont donn´e lieu `a la premi`ere g´en´eration stellaire ´etaient compos´es de mati`ere pri- mordiale, contenant exclusivement de l’hydrog`ene et de l’h´elium. Les ´etoiles ainsi form´ees, dites de Population III, ont par la suite enrichi rapidement le milieu intergalactique en m´etaux d`es l’apparition des premi`eres supernovae. Ceci permet d’expliquer la pr´esence d’une faible m´etallicit´e (Z ≃ 0.003 Z⊙) dans les absorbants

Lyman-α jusqu’`a z ∼ 5 (Songaila, 2001).

Les conditions physico-chimiques de la fragmentation du gaz pr´estellaire sont g´er´ees par la masse de Jeans et les m´ecanismes de refroidissement par l’hydrog`ene

Dépression

Fig. 1.9:Evolution mod´elis´ee du spectre ultraviolet des sources `a grand z dans le domaine 912-1216 ˚

A (d’apr`es ). En haut, on voit l’effet d’absorption de la forˆet de Lyman et sa croissance `a mesure qu’on s’approche de la r´eionisation. En bas : apparition de la d´epression de Gunn-Peterson du cˆot´e bleu de la raie Lyman-α, pour des sources situ´ees au-del`a du d´ecalage spectral de la r´eionisation zre. D’apr`es Haiman & Loeb (1999).

mol´eculaire. Dans le cas des nuages de m´etallicit´e nulle, les mod`eles indiquent que la Fonction Initiale de Masse des ´etoiles form´ees sera tr`es diff´erente d’une fonction de Salpeter classique, avec un biais vers la formation d’´etoiles tr`es massives : 1 M⊙

`a 100 M⊙ (Nakamura & Umemura, 2002), voire extrˆemement massives (de plusieurs

de l’absence de m´etaux dans les ´etoiles de Population III est que leur temp´erature effective et leur efficacit´e d’ionisation sont beaucoup plus fortes (Tumlinson & Shull, 2000; Bromm et al., 2001) que les ´etoiles riches en m´etaux (Population I, voir Fig. 1.10).

Longueur d’onde Massive

Fig. 1.10:A gauche : ´evolution de la s´equence principale d’age z´ero (ZAMS), pour des ´etoiles de Population III (m´etallicit´e Z = 0). On observe un biais syst´ematique vers les hautes temp´eratures effectives Tef f. A droite : ´evolution du spectre ultraviolet observ´e pour un amas de telles ´etoiles `a z = 10, suite `a la transition entre une IMF classique de Salpeter et une IMF privil´egiant les ´etoiles massives. D’apr`es Bromm et al. (2001).

La mod´elisation des propri´et´es observ´ees d’un objet compos´e d’´etoiles de Popu- lation III doit prendre en compte la contribution du continuum spectral n´ebulaire. Celle-ci devient en effet non n´egligeable lorsqu’on ´etudie des objets avec des flux d’ionisation aussi ´elev´es, dont une fraction ne s’´echappe pas directement de la ga- laxie et est absorb´ee puis r´e´emise par le gaz environnant (transitions de type libre-li´e et libre-libre). Les mod`eles de Schaerer (2002) pr´edisent cet effet sur le continuum ultraviolet, ainsi que les flux attendus dans les raies d’´emission de l’hydrog`ene et de l’h´elium (Fig. 1.11). Outre les transitions usuelles de Lyman et de Balmer, la pr´esence des raies He ii λ1640 dans l’ultraviolet et He ii λ4686 dans le visible ca- ract´erise ces spectres `a Z = 0. Cependant, ces transitions de l’h´elium d´ependent fortement des hypoth`eses faites sur l’IMF des objets et diminuent rapidement, en ∼ 4 millions d’ann´ees d’´evolution passive, si on suppose un sursaut instantan´e de formation stellaire.

Les mˆemes mod`eles permettent de suivre l’´evolution des spectres en m´etallicit´e, depuis la valeur nulle jusqu’`a la valeur solaire Z = 0.02, montrant ainsi la transition entre les objets de Population III et les galaxies habituelles (Schaerer, 2003). De mani`ere g´en´erale, la pente du spectre dans l’ultraviolet, li´ee au flux ionisant des ´etoiles, tend `a diminuer avec la m´etallicit´e pour une IMF donn´ee.

Fig. 1.11:Distribution Spectrale d’Energie d’une galaxie primordiale form´ee d’´etoiles de m´etallicit´e Z = 0. A gauche : population de la s´equence principale d’ˆage z´ero (ZAMS), montrant l’´ecart entre le spectre purement stellaire (tirets) et la prise en compte de l’´emission n´ebulaire (trait plein). Les principales raies d’´emission de l’hydrog`ene et de l’h´elium sont indiqu´ees. A droite : ´evolution temporelle de ce mˆeme spectre pour des ˆages de 0 `a 4 millions d’ann´ees. Les raies de l’h´elium s’estompent rapidement. D’apr`es Schaerer (2002).

Autres signatures

En compl´ement de l’observation directe du spectre ultraviolet pour des objets individuels, d’autres m´ethodes permettent de contraindre leurs propri´et´es globales et d’´etudier l’´epoque de la r´eionisation.

En particulier, l’exc`es de fond diffus infrarouge, mis en ´evidence par les observations de COBE et de IRTS dans le domaine 1.2 `a 4 µm (Wright, 2001; Matsu- moto et al., 2004), aurait pour origine le rayonnement d’´etoiles de Population III ou l’accr´etion de gaz sur des trous noirs `a tr`es grand d´ecalage spectral (Santos et al., 2002; Madau & Silk, 2005). Cependant, il est encore difficile d’´evaluer la contribu- tion des autres sources situ´ees en avant-plan, notamment les poussi`eres du syst`eme solaire. Les contraintes actuelles donn´ees sur l’efficacit´e de conversion des baryons en ´etoiles, f∗, sont de l’ordre de 10 `a 50 % (Salvaterra & Ferrara, 2003).

Certains mod`eles pr´edisent ´egalement l’existence d’un fond diffus X, ayant pour origine les AGNs `a tr`es grand d´ecalage spectral, et les produits de la formation stel- laire intense : des binaires X massives (Helfand & Moran, 2001), le bremsstrahlung et l’effet Compton inverse dans les restes de supernovae. Ceux-ci pourraient dominer le rayonnement de fond X et produire un effet inverse par rapport au rayonnement ultraviolet qui photodissocie l’hydrog`ene mol´eculaire : les ´electrons libres form´es par l’ionisation suppl´ementaire sont un catalyseur important pour les r´eactions de cr´eation de H2 (Glover & Brand, 2003).

Si la formation stellaire est biais´ee vers les ´etoiles massives `a grand d´ecalage spec- tral, le taux de supernovae g´en´er´ees devient lui aussi tr`es important, les dur´ees de vie de ces objets ´etant tr`es courtes. Les supernovae jouent un rˆole dominant pour l’enrichissement en m´etaux du milieu interstellaire et l’´evolution de la for- mation d’´etoiles (Wada & Venkatesan, 2003). De plus, l’´energie m´ecanique qu’elles apportent permet d’expulser une partie des mat´eriaux stellaires form´es dans le mi- lieu intergalactique. L’observation d’un grand nombre de ces supernovae est pr´edit pour l’av`enement du futur James Webb Space Telescope (JWST) vers 2010 (Ferrara & Marri, 1998).

Enfin, les sursauts gamma (Gamma Ray Bursts, ou GRBs), observ´es principa- lement dans les r´egions de formation d’´etoiles (Djorgovski et al., 2001b), seraient li´es `a la mort d’´etoiles tr`es massives (MacFadyen & Woosley, 1999). Compte tenu de l’IMF pr´edite par les mod`eles de galaxies, le taux de sursauts correspondant et leur tr`es forte intensit´e ouvrent une toute nouvelle voie d’´etude de la formation stellaire `a tr`es grand d´ecalage spectral (Gorosabel et al., 2001).